- La… la magie…
Ça y est.
- La magie de… de l'…
C'était dit.
- … de l'… de l'île…
Connor s'était servi de la magie de l'île.
- La… la magie de… de l'île… Répéta-t-il livide.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
- Hum hum… grimaça le petit.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
- Tu… tu t'es servi de la magie de l'île ?!
Connor s'était servi de la magie de l'île.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
Connor s'était servi de la magie de l'île.
- Oui, mais…
- Tu t'es servi de la magie de l'île pour… pour y… pour lui rendre visite…
Lui rendre visite.
Lui rendre visite.
Lui rendre visite.
- Et ça depuis… depuis le début ?! Hurla-t-il.
Depuis le début.
Depuis le début.
Depuis le début.
- Je suis désolé ! Je…
- Dé… Désolé ? Explosa-t-il. Désolé ?!
Au bord de la crise cardiaque, Voldemort fit voler sa chaise à la seule force de sa rage, une nouvelle folie embrasant furieusement son regard. Et pour cause… il ne lui racontait pas moins que son pire cauchemar. Que dire ! La quintessence même de ce qu'il redoutait silencieusement dans le noir ! De ce qu'il cherchait à éviter depuis leur retour à Poudlard ! Et de tout ce dont l'avertissait ses grimoires ! Soit la seule et unique chose capable de réduire à néant ses derniers espoirs de victoire...
- Te… te rends-tu… te rends-tu compte de ce que tu as fait ?! Siffla-t-il entre ses lèvres.
Surpris par la teneur de sa réaction, le petit garçon balbutia dans un frisson. Seigneur… ses pupilles n'étaient plus que deux billes de sang. Ou était-ce le scintillement de sa magie incandescente ? L'expression de sa colère grondante ? Ou encore le frémissement d'un reflet sans importance ? Abasourdi, Connor voulut le croire ; plus encore, il voulut se persuader qu'une telle réaction ne signifiait rien de grave ! Mais après une telle soirée, était-ce vraiment raisonnable ?
- Je… enfin, je sais que… que j'aurais pas dû mais…
- Tu as utilisé la magie de l'île dans sa chambre ! S'époumona-t-il.
Terrorisé, Connor n'osa plus respirer, son petit corps se ratatinant brusquement sur lui-même à mesure que Voldemort le dévisageait… et à mesure que tout dégénérait.
- Tu as utilisé la magie de l'île alors… alors que je te l'avais interdit ! S'écria-t-il.
Interdit.
- Je sais mais… mais j'me suis dit…
- Interdit !
Oui, il le lui avait interdit… pourquoi ?
- Interdit ! Répéta-t-il.
Car la chambre d'Hermione avait spécialement été conçue pour la protéger de la moindre interférence magique.
Car la moindre faille pouvait avoir des conséquences toutes aussi mortelles que catastrophiques.
Car la seule présence de mage parasite pouvait lui coûter la vie…
- Interdit ! S'étrangla-t-il en furie.
Un détail à l'importance gravissime, mais qui à la lueur de cet aveux, suffit à le rendre hystérique… En particulier quand il comprit que Connor avait malgré lui imprégné sa chambre de la Magie la plus instable et chaotique du Monde Magique.
- Je… je…
- Seigneur… c'est un cauchemar.
Oui…
- Un cauchemar !
Le pire de tous.
- Un… un cauchemar !
Et encore le même était faible ! Car désormais, plus rien ne servait d'attendre un miracle du ciel… Connor venait d'anéantir l'intégralité de ses recherches ; l'intégralité de son labeur acerbe, l'intégralité de ses prières, l'intégralité de ses derniers rêves, l'intégralité de tout ce qu'il avait accompli en deux semaines d'insomnies, de pleures et d'efforts mortifères ! Et pire encore… il venait d'anéantir ses derniers espoirs de protéger l'âme Hermione d'interférences magiques potentiellement mortelles.
- Je sais que c'est pas bien ! Paniqua le petit. Et… et je suis vraiment désolé, j'te jure ! Mais…
- « Mais » ? Hurla-t-il ahurit. Quel « Mais » ?! Il n'y a pas de « Mais » Connor ! Il n'y aura plus jamais de « Mais » !
Non… il n'y avait plus de « mais » ; plus d'explication, de justifications, de regards larmoyants, d'excuses ou de sermons ! Ne restait que le crime… et les conséquences.
- Tu… tu as tout détruit.
Tout détruit.
- Tout ce que j'ai fait pour la sauver, la protéger, la préserver…
Pour la sauver.
- Tu… tu as tout gâché !
Tout gâché.
Aveuglé par la douleur que de tels mots lui insufflèrent, par l'horreur qu'ils signifièrent et par tout ce que leurs seules existences impliquèrent, Voldemort ne sentit pas ses mains trembler ; pas plus qu'il ne sentit son souffle s'accélérer, ses veines gonfler, son pouls s'emballer, son aura s'embraser… et sa magie le submerger. Et pour cause ! Déconnecté de toute réalité, de tout bon sens et de ses dernières onces de lucidité, c'est l'intégralité même de son esprit qui sembla s'écrouler ; que de dire… l'intégralité de sa conscience ! De son être ! Et de son identité ! Et se faisant, il ne vit rien du fléau qu'il se mit à déchainer.
- Tout !
Oui… rien.
- Absolument tout !
Rien des flammes qui incendièrent ses mains.
Rien de l'électricité qui dressa sa chevelure.
Rien des étincelles qui explosèrent entre ses poings.
Rien des sortilèges qui ricochèrent contre ses murs.
Rien de sa magie aux desseins carmin.
Rien de ses malédictions aux promesses obscures.
Rien de ses cris d'agonie sans fin.
Et rien de son cœur aux milles fractures…
- Tout !
Malheureusement, il fut le seul aveugle en ces lieux. Car jamais encore Connor n'avait assisté à un spectacle plus… plus…
- Tu entends ?! S'étrangla-t-il.
… plus miséreux.
- Tout !
Oui… tel était le seul mot qui parvenait à décrire un tel chaos ; non pas dangereux, effrayant, douloureux, foudroyant, désastreux, terrifiant, monstrueux ou encore épouvantablement horrifiant ! Mais miséreux… inquiétant… malheureux… et insupportablement bouleversant. Incapable de se tempérer, de se contrôler ou de ne serait-ce que de prendre conscience de la vésanie de ses sortilèges effrénés, Voldemort ne ressemblait plus qu'à un aliéné… qu'à une bête enragée… qu'à un malade bon à interner ! En sueur, en rage, en deuil et en larme, il hurlait à s'en arracher l'âme, les lèvres en sang et le teint blafard tandis que la douleur incendiait son poitrail. Vaincu par la perte de ses espoirs, il ne vit même pas ses dernières vitres exploser, certains murs se fissurer, le carrelage trembler, son bureau être désintégré et ses ultimes grimoires brûler. Non… il ne vit que son monde s'écrouler. De quoi prostrer Connor dans une torpeur toute aussi pétrifiée que tremblante, et le laisser gésir au fond de son fauteuil, la tête repliée entre ses jambes…
- Ce que… ce tu as fait… Ce que tu as fait…
Seigneur… il n'arrivait plus à parler.
- Ce que tu as fait… est…
Il n'arrivait plus à respirer.
- … est…
Il n'arrivait plus à se calmer.
- Inqualifiable. Siffla-t-il en apnée.
Inqualifiable.
Inqualifiable.
Inqualifiable.
- Tu entends ?!
Inqualifiable.
Inqualifiable.
Inqualifiable.
- Inqualifiable !
Inqualifiable.
Inqualifiable.
Inqualifiable
- Et le pire est… est que tu ne le vois même pas ! S'étouffa-t-il.
Blessé, sonné et mortifié, Connor se tu dans un silence bouleversé, le souffle court et la gorge serrée devant la déception qu'il lut dans ses pupilles étriquées… des pupilles qui le dévisagèrent avec autant d'aberration que de sévérité, et dont le courroux, la rancœur et l'assommante condamnation suffirent à le tétaniser.
- Je… je pensais pas faire de mal. Hoqueta-t-il d'une voix enrouée.
Pas faire de mal…
Pas faire de mal…
Pas faire de mal…
- Vraiment, je… je voulais pas…
Oui… Le mage le savait. Et pourtant, un mal avait été fait ; un mal que rien ni personne ne pouvait plus réparer et dont la seule idée ne parvînt qu'à le faire disjoncter.
- Tu ne voulais pas ? Répéta-t-il enragé. Tu ne voulais pas ?!
- Non, je…
- J'ai condamné sa chambre pour une bonne raison Connor ! Siffla-t-il durement. Une bonne raison !
- Mais… mais comment je pouvais savoir ?!
Abasourdi par l'ineptie d'une telle réplique, Voldemort ne sut pas s'il devait pleurer ou exploser de rire… quoi qu'en de telles circonstances, les deux auraient été légitimes.
- Savoir ?! Railla-t-il ahurit.
- Oui, je…
- Pitié… siffla-t-il avec mépris. Ne sois pas ridicule !
- Mais je savais pas que…
- Tu n'avais pas à savoir ! Tonna-t-il.
Troublé, Connor senti son esprit s'échauffer. Pas à savoir ?! Grand Dieux, mais… mais pourquoi lui reprocher son ignorance dans ce cas ? Pourquoi le condamner ? L'accabler ? Le sermonner ? Et s'étouffer devant son air hébété ?! Cela n'avait aucun sens ! Mais face à ses hurlements, de telles questions étaient-elles vraiment importantes ? La réponse était évidente… Voldemort n'attendait de lui aucun raisonnement.
- Tu n'avais qu'à m'obéir !
A obéir…
- Obéir et te taire !
Se taire.
- Obéir et ne rien faire !
Ne rien faire.
- Obéir et nous éviter un pareil calvaire !
Un tel calvaire…
- Mais de toute évidence, j'avais tort d'espérer… Argua-t-il enragé. De toute évidence, même cette infime tâche était trop te demander !
Assommé, Connor ne sut plus quoi répliquer. Tort d'espérer ? Trop lui demander ?! Mais… mais enfin, il n'avait jamais cherché à lui nuire ! A le contrarier ! A le blesser ! A ralentir ses avancées ! Ou ne serait-ce qu'à trahir la confiance qu'il lui portait ! Et pourtant, seule la rancœur l'habitait...
- Non ! Non, je… c'était… c'était pas trop me demander ! Tenta-t-il de riposter.
- Ah oui ?!
- Oui ! Si j'avais su, j'aurais jamais…
- Si tu avais su ?!
Ne cachant même plus la folie lui dévorant l'esprit, Voldemort s'écria dans l'écho d'un drôle de rire, mélange de sanglots et d'hystérie ; le genre que Connor sentit lui hérisser l'échine, mais qui ne put que lui faire redouter le pire…
- Si tu avais su… gloussa-t-il.
- Oui ! Je…
- Tu veux savoir ? Déclara-t-il alors. Tu veux vraiment savoir pourquoi sa chambre était interdite ? Tu veux vraiment savoir pourquoi j'ai proscrit toute visite ? Pourquoi je m'enferme tel un ermite ? Pourquoi j'amasse ces milliers de livres ? Pourquoi je laisse Drago gouverner mon pays ? Et pourquoi je me fiche du monde et des critiques ?
Effrayé par la frénésie qu'il vit agiter ses prunelles, le petit garçon se ratatina sur lui-même, incertain quant à la suite de cette étrange entrée en matière… mais également quant à ses possibles futures découvertes.
- Je… je…
- Hermione va mourir. Claqua-t-il.
Mourir.
Mourir.
Mourir.
- Qu… quoi ? Souffla-t-il.
- Oui ! Son âme va mourir !
Mourir.
Mourir.
Mourir.
- Mais… mais tu as dit…
- J'ai menti ! Tonna-t-il.
Mourir.
Mourir.
Mourir.
- Je… je ne peux l'empêcher.
Mourir.
Mourir.
Mourir.
- Personne ne peut l'empêcher !
Mourir.
Mourir.
Mourir.
- C'est pour ça que je m'acharne jour et nuit… Cracha-t-il. C'est pour ça que je délaisse mon pays ! C'est pour ça que j'ai interdit la moindre visite ! C'est pour ça que je me laisse volontiers passer pour un homme cruel et insensible !
Bouleversé, Connor ne put plus parler…
- Pour sauver Hermione de sa malédiction… Pour la ramener parmi nous ! Pour la libérer de sa prison ! Et la voir enfin s'éveiller un jour ! Mais pendant que je m'évertuais à chercher une solution… pendant que j'exhumais les derniers secrets du monde et que je m'acharnais à prendre toutes les précautions pour lui faire gagner un peu de temps, toi tu… tu n'as fait qu'ignorer mes interdictions.
… respirer…
- Tu as trahi ma confiance, utilisé la Magie la plus instable au monde, contaminé sa chambre à ses dépens et… et réduis tous mes efforts à néants !
… bouger…
- Je ne t'avais donné qu'une seule consigne Connor… qu'une seule ! Mais non ! Comme si la situation n'était pas assez critique, il a fallu que tu n'en fasses qu'à ta tête ! Que tu désobéisses, que tu mentes, que tu t'infiltres et que tu… que tu anéantisses ses dernières chances de survie !
… penser.
- Et pourquoi ?! S'écria-t-il. Hein ?!
A vrai dire, le petit garçon ne parvînt même plus à l'écouter.
- Pour épousseter sa table de nuit ?!
D'ailleurs, comment aurait-il pu ? Chacun de ses mots aggravait son apnée, chacun de ses cris le tétanisait, chacun de ses hurlements le mortifiait… tandis que chacune de ces vérités l'assassinait.
- Mais je…
Hermione allait mourir.
Hermione allait mourir.
Hermione allait mourir.
- Enfin, je…
Hermione allait mourir.
Hermione allait mourir.
Hermione allait mourir.
Je savais pas… Bégaya-t-il.
Hermione allait mourir.
Hermione allait mourir.
Hermione allait mourir.
- J'en savais rien !
Non… rien. Certes, il connaissait la gravité de son état, de même que les potentiels dangers de son « coma » ! Mais la mort n'était restée qu'une hypothèse vague ; qu'une croyance macabre, qu'un mot murmuré tout bas, qu'un reste de cauchemar, qu'une… qu'une idée inconcevable ! Mais certainement pas une issue probable.
- Je savais pas que…
- Tu ne savais pas que cette chambre était interdite ?! Rétorqua-t-il.
- Si mais…
- Alors tu savais ! Hurla-t-il.
- Non ! Riposta-t-il.
- Tu savais et tu n'as rien écouté !
- Mais…
- Tu savais et tu as choisi de l'ignorer !
Mais il n'avait jamais rien su ! Rien d'Hermione et de la fébrilité de sa survie, rien de sa sensibilité à la magie, rien des dangers de ses visites ou encore de son rôle dans son agonie ! Une évidence qui ne tarda pas à gonfler sa gorge de sanglots meurtris… à délaver ses joues d'un teint livide… à embuer ses cils de larmes acides… et à retourner ses tripes de la plus atroce des culpabilités qu'il ait jamais éprouvé de toute sa vie.
- Mais… mais je… je voulais pas…
- Ça ne change rien. Cracha-t-il amer.
- Mais… mais…
- Pourquoi tu y es allé de toute façon ?! Demanda brusquement le Mage.
- Qu… quoi ?!
- Dans sa chambre ! Pourquoi tu y es allé ?!
Oh bon sang…
- Je…
- Par ennuie ?!
- Qu… quoi ?!
- Par amusement ?
- Non ! S'écria-t-il.
- Par désintérêt pur et simple des ordres que je t'avais donnés ? Insista-t-il.
- C'est pas ça !
- Alors quoi ?! Hurla-t-il excédé.
Incapable de répondre sans sentir ses sanglots l'étrangler, ses larmes redoubler et son cœur s'éventrer, Connor haleta sous la douleur d'un jugement aussi courroucé, désespéré à l'idée que Tom ne voit en lui qu'un enfant écervelé… qu'un gamin sans le moindre sens des responsabilités… qu'un encombrement sans intérêt.
- C'est… c'est compliqué, je…
- Compliqué ?! Répéta le Mage atterré. Je t'en ai défendu l'accès et tu as délibérément désobéi à mes ordres ! Alors ça n'a rien de compliqué !
- Je sais mais…
- Mais quoi ?! S'écria-t-il.
Intimidé par l'exigence de ses pupilles embrasées, Connor ne sut pas quoi répliquer. Et pour cause ! Il y avait tant de réponses qu'il aurait aimé lui donner… tant de choses qu'il aurait aimé lui expliquer… tant de sujets qu'il aurait aimé aborder… tant de maux qu'il aurait aimé lui partager ! Mais par quoi commencer ? Devait-il lui parler de ses insomnies ? De ses doutes ? De ses cauchemars ? De ses peurs ? Et tout ce qui lui faisait redouter l'arrivée de la nuit ? Devait-il aborder le sujet de ses hommes ? De leur fuite ? De sa solitude ? De sa peine ? Et de tout ce qu'il détestait dans ce maudit pays ? Ou devait-il uniquement parler d'Hermione ? De sa crainte de la voir tomber dans l'oubli ? De sa douleur ? Et de son effroi de la savoir seule et recluse au fond de cet immense lit ? Il n'aurait su dire, incertain quant à ses réactions après de tels cris… mais quand bien même, se donnerait-il la peine de l'écouter ? De le laisser parler ? Et de lui donner une chance de s'expliquer sans l'accabler de reproches excédés ?! Là encore, il l'ignorait... mais que Marise lui en soit témoin, il espérait. Car rien ne servait de le nier ! Depuis que ses hommes l'avaient abandonné, lui et Hermione étaient tout ce qui lui restait…
- Vas-y ! Parle ! Insista-t-il.
- Eh bien, je… enfin…
- Allez !
Oh Marise… qu'il ait pitié.
- Je… j'arrivais pas à dormir. Avoua-t-il.
- Quoi ?!
- J'arrivais pas à dormir ! Alors même si je savais que… que j'en avais pas le droit et que c'était pas bien, je me suis dit que je pourrais peut-être…
- Att… attends… L'interrompit-il d'une voix blanche.
Sonné, Voldemort vacilla dans un hoquet. Seigneur… il rêvait.
- Tu n'arrivais pas à dormir ?! Répéta-t-il livide.
- Oui, mais…
- Et c'est pour ça que tu as désobéi ?! S'étrangla-t-il. Parce que… parce que tu avais du mal à dormir ?!
S'épaississant violemment autour de lui, son aura vrombi à l'écho de ses cris, symboles criant de la nouvelle colère qui embrasait ses pupilles ; une colère face à laquelle Connor ne put plus rester impassible.
- Quoi ?! Non, c'est pas que ça ! Se scandalisa le petit.
- Connor…
- Mais enfin, laisse-moi finir ! S'exclama-t-il plus fortement.
- Pourquoi ? Pour que tu m'expliques comment ta petite insomnie t'as poussé à ramper dans mes canalisations au beau milieu de la nuit ?!
Excédé par le ridicule de sa tournure de phrase, Connor se frappa le front dans une œillade lasse. Grand Dieux ! Et c'était ça que l'on appelait « Le Plus Grand Sorcier de l'Histoire » … un homme à l'esprit si étroit qu'il était incapable de le laisser finir sa phrase.
- Par Marise, tu… tu comprends pas !
- Eh bien explique moi ! Au point où j'en suis, je ne pense pas pouvoir tomber plus bas !
- Mais t'essaies même pas de me comprendre ! S'écria-t-il violemment.
- Je t'interdis de me parler sur ce ton ! S'insurgea-t-il.
- Pourquoi ?! Tu me hurles bien dessus toi !
- J'ai toutes les raisons de hurler et tu le sais très bien !
- Eh bah moi aussi !
- Oh tu crois ?!
- Oui !
Interpellé par la douleur d'un cri aussi spontané, Voldemort se surprit à ne pas savoir quoi répliquer. Et pour cause… Connor s'était redressé. Connor s'était mis à hurler. Connor… Connor semblait vouloir l'affronter ? Non ! Non, cela ne se pouvait ! Et pourtant, une nouvelle rage semblait brusquement l'habiter ; une rage encore neuve, légère et à peine révoltée… mais une rage dont les seuls prémices ne parvinrent qu'à le désarmer.
- Tu veux savoir pourquoi je suis allé la voir ? Hurla-t-il. Tu veux savoir pourquoi j'ai rampé dans tes maudits conduits au beau milieu de la nuit ? Pourquoi j'ai détourné tes barrières magiques ? Et pourquoi j'ai transgressé tes lois et tes stupides interdits ?!
Oui ; il n'y avait plus de doutes possibles… là, debout sur son fauteuil, le dos droits et la haine au cœur, Connor enrageait. Connor fulminait. Connor s'écriait ! Or, il ne s'agissait pas là d'un affront calculé, d'une insulte savamment orchestré ou d'une explosion de cris démesurés ! Non… mais seulement d'un enfant blessé, dont le regard avait soudainement changé ; un regard désormais dénué de la moindre peur, culpabilité ou terreur, mais qui face au Mage Noir, se révéla aussi sombre, profond et amer que les affres de sa nouvelle rancœur…
- C'est parce qu'Hermione me manque ! Hurla-t-il en transe.
Grand Dieu…
- Elle… elle me manque trop !
Il pleurait.
- Et… et toi aussi tu me manque !
Connor pleurait.
- Tous les jours, je supplie Luna pour qu'on me laisse venir te voir ! Tous les jours, je… j'essaie de détourner l'attention de Narcissa ! Tous les jours, je piste Drago pour cartographier les couloirs ! Tous les jours, j'essaie de filer en douce jusqu'à ton bureau et de corrompre tes gardes ! Tous les jours, j'essaie de trouver une excuse valable ! Tous les jours, je… je demande de nouvelles de toi !
Connor hurlait.
- Mais tous les jours, Drago me dit que t'es trop occupé ! Tous les jours, tes gardes me disent de repasser ! Tous les jours, Narcissa me demande d'attendre et de… de me raisonner, tandis que… tandis que Luna essaie de me distraire et de me changer les idées !
Connor s'insurgeait.
- Mais… mais j'suis pas aveugle ! Continua-t-il. Je vois leurs regards ! J'entends leurs murmures ! Je… je sens leurs mensonges ! Ils ne me l'avoueront jamais, mais c'est évident ! Ils… ils…
Connor s'imposait.
- Ils savent que tu me fuies.
Oui… incapable d'en supporter davantage, de se soumettre ou de rentrer dans les carcans de « l'enfant sage », Connor se redressa davantage, le joues rouges et le cœur brave. Indifférent à la stature du Mage, il gonfla le poitrail et le toisa alors tel son égal, le menton haut et le dos droit ; un geste bien entendu immensément grave… mais un geste qui traduisit alors toute la détermination de son âme.
Une détermination sans cage.
Une détermination sans égale.
Une détermination… de pirate.
Oui… il en avait assez de s'agenouiller. Il en avait assez d'implorer. Il en avait assez de se résigner ! Et plus important encore, il en avait assez qu'on lui manque de respect…
Ainsi, il n'allait pas reculer.
Ainsi, il n'allait pas se défiler.
Ainsi, il n'allait pas se cacher !
Oui… il était déterminé à faire entendre sa voix ; déterminé à faire valoir ses droits, déterminé à reprendre sa juste place ! Car il n'était pas cet « enfant sage » ; il n'était pas ce cinéma, ce canular, ce simulacre, cette farce ! Et il n'était pas non plus un soldat, un pion, un fantassin, un sous-fifre ou l'une des ces petites créatures difformes qui leur servaient d'esclaves ! Non… il était un Capitaine Pirate. Il était un témoin de l'Histoire. Il était un enfant sans âge. Il était le gardien d'une Magie Ancestrale ! Et il n'allait pas se laisser insulter par l'égo d'un pseudo Roi.
- J'en ai assez de subir ta distance. Cingla-t-il. J'en ai assez de subir ton ignorance ! J'en ai assez de subir ton absence !
Un Roi qui ne tarda pas à se liquéfier devant la douleur de ses larmes.
Un Roi qui ne tarda pas à vaciller devant la puissance de sa hargne.
Un Roi qui ne tarda pas trembler devant la force de son désespoir.
- Je… j'en ai assez de toujours attendre !
Oui… assommé, troublé et bouleversé, Voldemort se tu dans une nouvelle apnée, incapable d'aligner deux mots après des paroles aussi blessées. Ou était-ce à cause de la profondeur abyssale de ses pupilles embuées ? De la fièvre de ses joues mouillées ? De la puissance de son aura décuplé ? Ou encore de l'ardeur de son souffle entrecoupé ? Il n'aurait su le deviner ; mais ce qu'il sût, était qu'il était envouté… démuni… hypnotisé… abasourdi… et tant de chose encore qu'aucun mot n'aurait su décrire. Pourquoi ? Seigneur… là encore, il n'aurait su dire. Pourtant, ce n'était pas la première fois que Connor se risquait à donner son avis ; à être en désaccord, à hausser le ton contre lui, à défier son autorité et à l'accabler de cris ! Mais c'était bien la première fois qu'il le sentait aussi… aussi…
- Mais quoi que je fasse…
… aussi trahi.
- Quoi que je fasse, quoi que je promette, dise ou espère, tu… tu continues de m'ignorer !
De l'ignorer.
- Tu continues de m'éviter !
De l'éviter.
- Tu continues de m'abandonner !
L'abandonner.
- Et… c'est pas juste ! S'écria-t-il en larmes.
Pas juste.
- Je mérite pas ça !
Pas ça…
- Je… je mérite rien de tout ça !
Abasourdi, le Mage Noir sentit son cœur tomber au fond de ses tripes, un nouvel étau de feu lui dévorant la poitrine à mesure que résonnait l'amertume de ses cris ; un étau que rien n'aurait su décrire, mais dont l'irrévocable puissance suffit à le faire défaillir. Seigneur… ainsi, il pensait vraiment qu'il cherchait à l'ignorer ? Qu'il cherchait à l'éviter ? A le négliger ? A le laisser de côté ? Et… et à l'abandonner ?! Alors même que son seul souhait était de lui ramener une Hermione en bonne santé ? De restaurer leur semblant de paix ? Et d'enfin lui offrir la vie qu'il méritait ?! A la vue de sa douleur, de ses larmes et de sa rancœur, la réponse était toute trouvée… mais que Salazar lui en soit témoin, jamais il n'avait connu plus atroce vérité.
- Mais enfin, je… je n'ai jamais…
- Non ! Tonna l'enfant avec violence. C'est à mon tour de parler ! C'est… c'est à mon tour de crier !
- Connor, s'il te plaît…
- J'ai quitté mon île pour toi ! S'écria-t-il à pleine voix.
Un silence.
- J'ai quitté ma maison pour toi !
Un deuxième.
- J'ai abandonné mon serment pour toi !
Un troisième.
- J'ai… j'ai réveillé mes hommes pour toi !
Un quatrième.
- Je les ai convaincu de se battre pour toi !
Un cinquième.
- Et… et j'en ai même perdu pour toi ! Hurla-t-il en rage.
Un sixième…
- Mais… mais quoi que je fasse, c'est… c'est jamais assez.
… avant que la douleur de ses mots ne percute Tom de plein fouet.
- Jamais !
Essoufflé, en sueur et indifférent aux sanglots qui l'étranglait, Connor le contempla avec autant de douleur que de gravité, le regard grave et la gorge serrée à mesure que la vérité éclatait… à mesure que pour la première fois depuis des semaines, son cœur hurlait.
- Quoi que je fasse, je serais toujours que ce petit sauvageon qu'on tolère mais qu'on cherche à éviter ! Quoi que je fasse, je serais toujours que ce gamin un peu trop bavard dont personne veut s'encombrer ! Quoi… quoi que je fasse, je… je serais toujours qu'une gêne dont on veut se débarrasser !
Seigneur…
- Non, Connor…
- Si ! Je… je serais toujours que ce p'tit orphelin qu'on laisse de côté, qu'on ignore, qu'on tourmente, qu'on accuse ou… ou qu'on abandonne sans regret !
Non… non, il ne pouvait pas croire ça ! Il n'en avait pas le droit !
- Mais… mais j'ai des sentiments moi aussi !
Malheureusement, rien n'aurait su réfréner ses larmes.
- Je… je suis là ! S'époumona-t-il. J'existe ! Je respire ! Je vis !
Des larmes que Voldemort senti submerger son âme…
- Mais personne m'écoute jamais ! Personne me voit jamais ! Personne… personne…
Incapable de poursuivre sa phrase sans s'étrangler, Connor essuya rageusement ses larmes d'un revers de poignet, éraflant alors méchamment sa joue déjà esquintée. Un petit geste inconscient non moins emplit d'une étonnante brutalité, qui ne tarda pas à s'accompagner de râles étouffés, de tremblements saccadés, de tapes excédés… et de cris horrifié.
- Personne ne m'aime jamais ! Explosa-t-il.
Pétrifié, Voldemort sentit son cœur s'arrêter. A cause de son regard brisé ? De sa grimace effondrée ? De ses joues enfiévrées ? Et de ses sanglots effrénés ? Non… mais à cause de sa sincérité. De sa transparence. De son honnêteté. Et de l'indéfectible douleur que lui insuffla une croyance aussi erronée.
- Personne… personne à part elle. Se reprit-il essoufflé.
- Connor, je…
- Mais bien sûr… la seule personne qui m'ai jamais aimé m'est « interdite d'accès » !
La seule…
- Alors oui… moi aussi j'ai des raisons de hurler. Moi aussi, j'ai des raisons de pleurer ! Moi aussi, j'ai… j'ai des raisons de… de te détester ! S'exclama-t-il sans le regarder.
Le détester.
- Mais à quoi bon toutes te les expliquer ?
Sonné, le Mage le contempla sans respirer, le regard meurtri et le cœur brisé.
- Tu veux jamais écouter… Cingla Connor avec sévérité.
Un cœur qu'il senti être éventré…
Un cœur qu'il senti se mettre à saigner…
Un cœur qu'il crut sur le point de s'arrêter…
- Maître !
Mais un cœur que les Dieux ranimèrent d'un cri désespéré.
- Maître ! Maître !
Brisant l'étrange silence qui venait tout juste de s'installer, ce cri se mit brusquement à résonner ; un cri étrange et empressé qui ne tarda pas à se multiplier… s'intensifier… se répéter… et se rapprocher.
- Maître ! Maître !
Incapable d'y réagir, de le comprendre ou de ne serait-ce que l'entendre sans se sentir pris de vertiges, Voldemort vacilla sans rien dire, le regard toujours ancré sur Connor et la dureté de ses pupilles ; des pupilles qui ne dévièrent pas, ne cédèrent pas et ne s'abaissèrent pas… mais des pupilles dans lesquelles se noyèrent son âme.
- Co… Connor, je…
- Non. Cingla-t-il amer.
Seigneur…
- Y a plus rien à dire.
Plus rien ?! Mais… non ! Non, non, non, non ! Il y avait encore des tas de choses à dire ! Il y avait encore des tas de choses à éclaircir ! Pour preuve, ils… ils ne pouvaient pas en finir ainsi ! Encore moins après tout ce qui avait été dit ! Mais c'était sans compter ces intarissables cris…
- Maître !
Et la violence avec laquelle sa porte s'ouvrit.
- Maître ! Maître !
Sursautant violemment à l'entrée d'un vieil homme dans ses appartements, Voldemort se saisit de sa baguette en un instant. L'œil noir et la rage au sang, il le teint en joug dans l'écho d'un nouveau grondement, prêt à faire taire cet odieux personnage et ses cris incessants ; du moins, jusqu'à ce qu'il ne remarque sa blouse blanche… et qu'il ne reconnaisse le visage boursoufflé du médicomage qui avait mis Hermione en observation.
- Maître !
Un médicomage suivit d'un deuxième…
- Maître ! Vite !
D'un troisième…
- Maître !
D'un quatrième…
- Vite ! Vite !
Et de toute une dizaine.
- Maître ! Maître !
En nage après une course effrénée, c'est l'intégralité même du corps médical qu'il avait réquisitionné que Voldemort vit brusquement débarquer sans avoir été invité. Paniqué, débraillé et décoiffé, chacun des praticiens se pressa dans l'encadrement de sa porte dans un dédale de cris, d'apnées et de halètements épuisés, leurs lunettes allant jusqu'à leurs tomber du nez après un sprint aussi empressé…
- Maître !
Un sprint face auquel Connor et Voldemort ne purent que paniquer.
- Mais enfin, que… que se passe-t-il ?! Tonna-t-il inquiet.
A sa question, plusieurs voix commencèrent à s'élever, toutes aussi confuses, haletantes et désorientées ; pourtant et bien qu'aucune d'elle ne parvint à véritablement l'éclairer, le mage ne put manquer l'étrange urgence de leur fébrilité… et la panique toute aussi heureuse que troublée qui se mit à les animer.
- Maître ! Maître ! Vite !
- Votre… votre Initiée… elle…
- Elle est… elle a…
- On ne… on ne sait pas comment !
- Ça… ça parait impossible !
- C'est vrai !
- Mais… mais ça s'est produit !
- Oui !
- Absolument !
- C'est… incroyable !
Incroyable ?! Mais enfin de quoi parlaient-ils ? Et pourquoi diable étaient-ils tous ici ?!
- Bon Dieu, que l'un d'entre vous s'explique ! S'impatienta-t-il.
- Votre… votre Initiée…
- Qu'a-t-elle ?! Paniqua-t-il.
Un silence.
Un deuxième.
Et son cœur se mit à battre de plus belle.
- Nous… nous ne savons pas mais… mais…
- Mais quoi ?!
Un silence.
Un deuxième.
Et Connor et Voldemort haletèrent.
- Elle… elle s'est réveillée.
Helloooo !
Voilà la suite et comme vous avez pu le voir, ce chapitre est un ascenseur émotionnel ! Voldemort est véritablement enragé, sonné et mortifié (comme d'habitude vous me direz XD) mais pour la première fois, Connor est déterminé à l'affronter... et à lui dire la vérité sur ce que le ronge depuis son arrivée. Une vérité que le Mage ne s'était certainement à attendu à entendre et qui va profondément bouleverser l'équilibre fragile de leur relation. Quant au mystère final... est-ce vrai ? Hermione s'est réellement réveillée ?
Quelles sont vos idées et théories ? J'ai hâte de les entendre !
Mais pour toute réponse, ce sera mardi prochain ;)
A très vite !
