Disclaimer : Tout l'univers de Bleach que j'utilise appartient à Kubo Tite.
Note de l'auteur : je suis fan de Bleach depuis les premier épisodes et j'ai lu beaucoup de fanfictions. Jusqu'à présent, je n'avais jamais osé publier ce que j'avais écrit, mais l'envie de savoir si j'étais capable de produire une histoire et un texte de qualité c'est fait plus pressente, alors voilà. C'est la toute première. Soyez indulgent(e)s et n'hésitez pas à me dire ce qui vous plait et ce qui vous déplait. Ce n'est que de cette manière que je pourrai progresser.
Merci et bonne lecture.
Cette histoire se situe entre le dernier épisode de "La bataille de Karakura" n°310 et le premier épisode de l'arc des "Fullbringer" n°343. Je ne tiens pas compte des épisodes HS situés entre les deux arcs.
Un bref instant
Chapitre unique
Depuis la fin de la bataille de Karakura, nombre de shinigamis s'étaient isolés pour s'entraîner et devenir plus fort en vue des prochains combats qu'ils auraient à mener. Mais ils assuraient surtout la sécurité du Seireitei fréquemment envahi par des Hollow depuis l'affrontement avec Aizen et ses complices. Le reiatsu dégagé à ce moment-là par la substitution de la ville par une copie entre les deux mondes s'amenuisait, mais il y en avait encore assez pour attirer ces monstres et il fallait les arrêter.
Rarement pouvait-on assister à un combat de Hisagi Shuuhei, lieutenant et capitaine intérimaire de la neuvième division, en état de shikai. À la faveur d'un clair de lune qu'assombrissaient quelques nuages, Yumichika apprécia la qualité du spectacle qui s'offrait à lui. Le zanpakuto libéré d'Hisagi Shuuhei, Kazeshini, était une arme peu commune. Constituée de deux doubles faux reliées par une longue chaîne, sa principale particularité venait des deux lames opposées et inversées qui encadraient la hampe de chaque faucille, terminée elle-même par une pointe acérée. Une zanpakuto difficile à manœuvrer, efficace aussi bien en corps à corps qu'à distance, dangereux même pour son porteur si celui-ci n'était pas à la hauteur, mais qui se révélait meurtrière dans le cas où, au contraire, elle était maniée avec puissance et précision. Ce que le lieutenant Hisagi n'avait aucun mal à faire, prouvant aux yeux de Yumichika que sa réputation de génie dans les arts du combat n'était pas usurpée.
Inconscient de l'attention dont il faisait maintenant l'objet, Hisagi prolongeait l'affrontement, jouissant de la force et de la résistance de son adversaire. Il s'amusait, et sa façon de combattre aurait étonné toute personne le connaissant. Car si Hisagi ne libérait que rarement Kazeshini, c'était à cause de la nature cruelle et vicieuse de celui-ci. C'était une arme dont les mouvements rapides et imprévisibles rendaient difficile toute esquive. Vouée à sectionner et à transpercer, attaquant quel que soit l'angle, c'était une arme de traîtrise, en contradiction totale avec la droiture et la gentillesse habituelle de Shuuhei. Il en appréciait pourtant à présent la juste valeur et en utilisait tout son potentiel, manipulant faucilles et chaîne comme une extension de son propre corps. Sous les offensives répétées d'Hisagi, le Hollow rugissait de souffrance et de frustration. Trop vif, trop rapide, trop puissant, l'ennemi était assailli de toutes parts par le Shinigami, et son sang jaillissait abondamment des blessures infligées par les lames tranchantes et impitoyables. Un habile contrecoup exercé sur la chaîne permit aux doubles faux projetées dans les airs de venir se planter avec force dans le flanc gauche du monstre, qui se courba sous la douleur, l'immobilisant temporairement.
Hisagi reprit son souffle. Le combat s'éternisait, ce n'était pas dans ses habitudes, cela ne lui ressemblait pas. La puissance des ennemis rencontrés le contraignait à sortir Kazeshini bien trop souvent à son goût. Le kido, conjugué au kendo, ne parvenait plus à vaincre ces nouveaux adversaires, et il ne pouvait plus s'autoriser à ignorer son Shikai, sous peine de mettre en péril ses subordonnés et les habitants du Rukongai. Et au cours des affrontements de ces derniers jours, il avait senti monter en lui une violence qu'il avait de plus en plus de mal à contenir. Et cette nuit, l'ivresse du combat le rendait fou. Il n'avait plus peur de laisser couler en lui ces sensations, l'odeur du sang qui se répandait, les hurlements lugubres et pleins de rage du Hollow, cette bataille entre la vie et la mort sur le fil de la raison.
Le cœur de Yumichika s'était mis à battre de plus en plus vite à la vue de l'étrange ballet exécuté par Hisagi. La grâce et la souplesse des mouvements de ce dernier contrastaient avec l'implacabilité des coups portés. Et c'était extrêmement beau. Yumichika en frémissait, alors que la violence et l'absence de pitié de ce duel faisaient écho aux sentiments qui habitaient son âme. Un hurlement d'agonie retentit et le combat sembla en suspens. Yumichika retint son souffle. Hisagi, le regard tourné vers sa proie leva le bras et reçut l'autre faucille qui revenait vers lui en vrillant, dans un bruit de cliquetis et de sifflements qui avaient jusqu'ici accompagné la danse mortelle. Et dans un même mouvement, il se rua au contact. Il posa le tranchant de la lame sous le cou désormais accessible du Hollow, pour ensuite, d'un geste ample et puissant, le décapiter. Dans un jaillissement d'énergie spirituelle, Hisagi se redressa et tout son corps se tendit vers le ciel, semblant célébrer sa victoire. Un rayon de lune éclaira son visage éclaboussé de sang, mais dont on pouvait encore voir le tatouage sur sa joue gauche.
Le sang bourdonnait aux oreilles de Yumichika, tandis qu'une chaleur se répandait dans tout son être. Une sensation, qu'il n'avait pas éprouvée depuis longtemps, naquit, en lui. Troublé et surpris, il se retira et disparut dans l'obscurité nocturne. Le silence avait fait place aux derniers échos de l'affrontement. Un silence pesant. Le regard assombri, Hisagi rappela Kazeshini et rangea l'épée dans son fourreau. Observant l'avancée de la nuit, et le bouleversement des lieux, il soupira lourdement. L'extrême tension qui l'habitait jusqu'alors le quitta progressivement. Dégoûté de lui-même et effrayé, il s'éloigna rapidement.
C'était un bref instant qui avait changé la vie d'Hisagi. Il ignorait pourquoi les choses avaient évolué comme ça. Toujours était-il que même si ça lui plaisait, c'était difficile à supporter. Son corps se souvenait de sa chaleur, de son poids, de son odeur. L'adrénaline courait encore dans leurs veines. Était-ce pour cette raison qu'il éprouvait tous ces violents sentiments ? À cause de ce bref instant ? Il revoyait ce moment à chaque fois qu'il fermait les yeux. La bataille de Karakura contre Aizen et l'Espada.
Leur mission était de protéger les quatre piliers qui maintenaient le sortilège. La vraie ville avait été transportée à la Soul Society avec tous ses habitants endormis et une reproduction vide avait été mise à sa place. Ainsi, même si elle était démolie par la violence des combats, les gens étaient en sécurité. Mais il ne fallait pas que les colonnes soient détruites ou tout s'inverserait. Yumichika venait de battre son adversaire et il sentit Madarame s'effondrer face au sien. Il avait voulu se précipiter pour l'aider, mais Hisagi l'arrêta.
Le cinquième siège n'aurait jamais pu vaincre ce Pow alors qu'Ikkaku n'y était pas parvenu malgré sa force. Il menaça le lieutenant et il l'aurait attaqué si Kira ne l'avait pas endormi avec un point pénétrant. Il était dans les bras d'Hisagi, sans connaissance, mais celui-ci ressentait sa colère et sa peur suinter de son reiatsu. Il le tenait contre lui et il percevait les effluves de son eau de toilette mêlés à ceux de sa transpiration. Cela le fit sourire, car il songea qu'il n'y avait que Yumichika pour se parfumer avant un combat. Tout en regardant le piler s'effondrer et la vraie ville réapparaître lentement, il réfléchissait à la technique employée pour se débarrasser de ce Culhorne. Il avait dû se retrouver dans un lieu assez éloigné pour utiliser la véritable forme de son Zanpakuto. Il l'avait déjà fait contre lui et il s'en souvenait encore. Soucieux de leur sécurité, Kira le rappela à l'ordre et ils mirent le cinquième siège à l'abri avant de repartir au combat.
Aujourd'hui, ils léchaient toujours leurs plaies. Les blessures physiques étaient guéries, mais dans leurs têtes, ils étaient tous très secoués. Hisagi avait tué son ancien capitaine. Il l'admirait et le respectait. Et il lui avait ouvert la gorge avec Kazeshini. Ichimaru fut assassiné par Aizen et Matsumoto était encore bouleversée, elle qui était si proche de lui. Et celui dont l'aide leur avait permis de vaincre, Kurosaki Ichigo, allait perdre ses pouvoirs de Shinigami. C'était injuste. Pour l'instant, ils profitaient d'une période de tranquillité, de calme parce que tant qu'il y aura des Hollow qui menaceront la Soul Society ou le Monde Réel, il n'y aura pas de véritable paix. Et pour maintenir l'équilibre, il devra éternellement y avoir des Hollow.
Hisagi avait recommencé à s'entraîner avec sa division, mais également avec Kira et Madarame. Renji se joignait parfois à eux, mais Yumichika restait seul. Il ne voulait toujours pas dévoiler la vraie nature de son Zanpakuto. Personne n'y trouverait rien à redire pourtant. Il était un combattant exceptionnel et il l'avait prouvé à de nombreuses reprises. Mais c'était son choix et il entendait bien qu'il soit respecté. À chaque fois qu'il repensait à ce qu'il avait failli faire, il avait des remords, des regrets. Il se doutait bien qu'Hisagi ne lui en tiendrait pas rigueur, il avait compris sa réaction en voyant Madarame en danger. C'était son meilleur ami, son frère et il ne pouvait pas rester sans rien faire. Les mots qu'Hisagi avait prononcés étaient justes, mais Yumichika était aveuglé par la peur et sourd aux paroles du lieutenant.
Il avait senti ses bras autour de lui quand il avait perdu connaissance. Kira avait toujours quelque chose d'utile caché dans son kimono. Il avait éprouvé son corps contre le sien, son odeur. Lorsqu'il s'était éveillé, il percevait encore ces sensations sur sa peau, à travers son vêtement. La pression des bras d'Hisagi autour de lui et sur son uniforme, les effluves de sa présence l'apaisèrent. Il ressentit également le reiatsu de Madarame et sourit. Il allait bien. Mais pas lui. D'abord parce qu'il ne comprenait pas pourquoi son cœur battait si vite. Ensuite, il s'en voulait d'avoir menacé Hisagi. Il aurait fallu qu'il lui présente ses excuses, mais il se sentait si misérable qu'il n'avait pas encore trouvé la détermination de le faire. Il n'avait aucune hésitation à abattre un Hollow, mais faire des excuses était terriblement difficile. Mais il devait le faire. Il devait le faire. Il se répétait cette toute petite phrase sans arrêt, comme une litanie pour se motiver. Il n'avait pas le courage de le prendre à part pour ça, mais peut-être que s'il le faisait devant tous ces amis, ses paroles auraient plus de poids. Et pour ça, il allait devoir mettre sa fierté de côté. En était-il capable ? Il savait qu'il était orgueilleux, mais il s'agissait d'une question d'honneur. Il devait le faire. Il devait le faire. Il devait le faire.
Ce soir-là, à la taverne quand tout le monde sera là, il le fera. C'était ce qu'il avait décidé. Il n'arrivait plus à vivre avec cette culpabilité qui l'écrasait chaque jour un peu plus. Et plus le temps passait, plus c'était difficile. Il y avait également autre chose qu'il souhaitait confirmer. Cela remontait à loin, au jour où il avait vaincu Hisagi avec les véritables capacités de son Zanpakuto. La réaction du vice-capitaine sera parlante pour Yumichika. Ça l'obsédait bien plus qu'il ne le voulait et ce qu'il avait ressenti lorsqu'il s'était évanoui, était lié aux questions qu'il se posait depuis un bon moment. Ce soir, il allait enfin savoir.
Quand Yumichika arriva à la taverne où les lieutenants avaient l'habitude de se retrouver, il repéra immédiatement leur petit groupe. Son cœur battait vite et fort, il avait les mains moites et il dut faire un gros effort pour bouger ses jambes vers ses amis. Il respira profondément et s'avança vers la tablée. Jamais quelques mètres ne lui parurent si longs à parcourir.
— Ah ! Yumichika ! s'exclama Madarame. Qu'est-ce qui t'a pris tant de temps ?
— Rien de particulier, répondit celui-ci. Je rassemblais mon courage…
— Ton courage ? fit Matsumoto à son tour. T'as besoin de courage pour boire du saké ? rit-elle en lui tendant une coupelle pleine.
— Lieutenant Hisagi, commença le cinquième siège de la Onzième Division en se tournant vers le shinigami, je vous présente mes excuses les plus sincères pour avoir voulu vous attaquer pendant la bataille de Karakura quand vous m'avez empêché d'aller aider Ikkaku. Mon attitude était complètement irréfléchie et je sais que vous avez fait ça pour me protéger parce qu'il est vrai que je n'aurais rien pu faire.
À la fin de sa tirade, Ayasegawa s'inclina bien bas. De ce fait il ne voyait pas les regards que tous dardaient sur lui ce qui lui évitait d'être trop mal à l'aise. La surprise se lisait sur tous les visages en particulier sur celui d'Hisagi. Il ne s'attendait pas du tout à ça et fut embarrassé. Cependant, il n'en montra rien même s'il avait la gorge serrée, la bouche sèche et si son cœur battait des records de vitesse. Il se calma rapidement avant que sa gêne ne soit trop perceptible. Il ne comprenait pas sa réaction. Pourquoi se sentait-il si troublé par de simples excuses ? Il était un lieutenant qui se devait de savoir affronter toutes les situations, surtout la plus inattendue. Mais il fallait avouer que pour celle-ci, il n'était pas prêt.
— Yumichika…, souffla Hisagi, surprit. Je les accepte même si elles sont inutiles. J'y pensais plus et j'avais parfaitement compris ta réaction.
— Mais moi je ne l'ai pas oublié, poursuivit Ayasegawa, et depuis j'ai développé un sentiment de culpabilité que je devais apaiser, expliqua le Shinigami en se redressant, un peu moins gêné.
Hisagi se leva et s'approcha de son collègue. Il posa une main sur son épaule et l'invita à le suivre à l'extérieur. Ce simple contact fit frissonner le cinquième siège et il eut un temps d'hésitation.
— Quelque chose ne va pas ? demanda Yumichika, une fois qu'ils furent dehors. Je vous ai mis mal à l'aise ?
— Non, rassure-toi. Je te l'ai dit, tes excuses étaient inutiles, mais elles me touchent beaucoup. Merci. Et arrête de me vouvoyer. On tourne la page, d'accord ?
— D'accord, soupira Ayasegawa. Je suis désolé du temps qu'il m'a fallu pour me décider.
— Ça suffit. On se connaît depuis de nombreuses années. Même si tu ne l'avais pas fait, je ne t'en aurais pas tenu rigueur. Nous ne sommes plus tout à fait nous-même dans le feu de l'action.
— C'est vrai, mais entre mon honneur et ma fierté, j'ai choisi mon honneur.
— Ton choix est digne de respect.
Pour Hisagi, cette conversation était un supplice. Il ne pensait plus à cet incident, mais ce qu'il avait éprouvé, il ne l'avait pas oublié. La raison pour laquelle Yumichika s'était retrouvé dans ses bras – merci, Kira – n'avait pas d'importance à ses yeux. Par contre, ce dont il se souvenait dans les moindres détails, c'était ce qu'il avait ressenti. Ce fut à la fois éphémère et infiniment long. Un trouble brutal par sa survenue inattendue, et délectable par le surprenant émoi qui l'avait saisi. Et à ce moment, il l'éprouva de nouveau à la simple évocation de ce souvenir. Là, en présence d'Ayasegawa, il ne voulait qu'une chose : que ce bref instant devienne… moins bref. Il fut ébranlé dans son assurance. Venait-il vraiment de penser ça ?
De son côté le cinquième siège avait obtenu sa réponse et il se sentit plus léger. Il y avait quelque chose dans le regard que le lieutenant qui fit battre son cœur un peu plus vite. Un sourire étira ses lèvres. Il fallait qu'il force sa chance.
— Ne tu croies que je profite du fait que tu aies accepté mes excuses, mais puis-je te demander une faveur ?
— Bien sûr.
— J'admire beaucoup ta technique au sabre. Est-ce que tu voudrais bien t'entraîner avec moi pour me permettre de progresser ?
— Ne peux-tu le faire avec Madarame ? questionna le lieutenant en haussant un sourcil d'incompréhension, vous êtes dans la même Division.
— Je me suis très souvent exercé avec lui, mais Ikkaku n'est pas aussi pédagogue que toi. Tu me montreras mes défauts et comment les rectifier. Lui se contente toujours de me dire que j'en ai et que je dois les combattre tout seul.
— Je vois, sourit encore Hisagi avec un petit rire. C'est tout lui… Très bien. Je t'aiderai avec plaisir. Tous les soirs après le dîner ?
— C'est parfait. Merci beaucoup.
— Aller ! Rentrons boire avec les autres…
Sans même s'en rendre compte, dans un geste naturel et sans arrière-pensée pour l'inviter à retourner dans la taverne, Hisagi posa sa main sur l'épaule d'Ayasegawa qui retint un sursaut. Apparemment, il était bien plus sensible qu'il ne l'avait cru jusque-là. Il fallait qu'il se contrôle sinon, il risquait de laisser passer sa chance. Il était très attiré par le lieutenant de la Neuvième Division et s'il avait encore un doute, ses réactions étaient probantes.
— Qu'est-ce que vous faisiez ? brailla Matsumoto déjà bien avinée.
— Une simple discussion, marmonna Shuuhei.
— T'as eu ta réponse ? murmura Ikkaku à Yumichika qui s'assit à côté de lui, face à Kira.
— Oui, fit juste celui-ci.
Madarame avait depuis longtemps remarqué et compris ce qu'éprouvait son ami. Il lui en avait parlé lorsqu'il avait vu que ça perturbait un peu trop le cinquième siège. Il lui avait conseillé de tâter le terrain en restant discret et surtout de ne pas se faire d'illusions. Il n'y avait peut-être pas de réciprocité et ce serait dur à encaisser.
— Et ?
Au sourire qui fendit le visage de son voisin de table, Ikkaku laissa échapper un petit rire de satisfaction. A priori, les choses semblaient avoir pris une bonne tournure. À demi-mot, alors que Kira était en train d'essayer de se débarrasser gentiment d'une Matsumoto qui se transformait en poulpe à mesure que grimpait son taux d'alcool, il expliqua à son ami, qu'il allait s'entraîner tous les soirs avec Hisagi.
— Bien joué, sourit Madarame en buvant une gorgée de saké.
— Ce n'est pas un jeu, grinça Yumichika en envoyant son coude dans les côtes de son voisin.
— Aïe ! D'accord, d'accord… s'esclaffa Ikkaku, ne gâche pas tout, hein ?
— Aucun risque… Mais j'ai pas envie d'un coup d'un soir…
— C'est pas son genre… Et tu perdras son estime et son amitié si tu fais ça…
— J'en ai conscience… J'ai beaucoup trop de respect pour lui…
— En quoi est-ce différent des autres ?
— Ce que j'éprouve… C'est la première fois…
— C'est-à-dire ?
— Il m'intimide…
Ikkaku faillit s'étrangler avec une gorgée de sa boisson. Yumichika impressionné ? Voilà qui était inattendu. Le cinquième siège de la Onzième Division, toujours prompt à se battre, qui avait une éloquence vive, qui se moquait de ses ennemis en leur disant qu'ils étaient laids et que c'était là la raison de leur défaite contre lui, qui se ruait au secours de ceux qu'il considérait comme ses amis, et dont le sens de l'esthétisme s'exprimait sur sa personne, ce cinquième siège-là était intimidé ? D'un autre côté, il était parfois plus ardu de faire face à ses propres sentiments qu'à un adversaire.
— Celle-là, je ne m'y attendais pas…
— Qu'est-ce que vous complotez… hic… dans vot' coin… hic… beugla Matsumoto en titubant tellement qu'elle s'affala sur Hisagi.
Celui-ci retint la jeune femme pour ne pas qu'elle se blesse en trébuchant. Ce geste lui valut un regard irrité de Yumichika qui ressentit l'insupportable piqûre de la jalousie. Elle touchait ce qu'il désirait. Elle était vautrée sur le lieutenant, tout près de lui, contre lui, sur lui alors que le cinquième siège n'avait même pas pu poser un doigt, ne serait-ce que sur le tissu de son uniforme. Et Hisagi s'en aperçut.
— Matsumoto, tu me fais mal, dit-il gentiment, lève-toi s'il te plaît…
— Oh Shuuhei… désolée… hic… encore heureux que t'as pas dit… hic… que j'étais lourde…
— Non, je ne dirais jamais ça, sourit Hisagi, mais tu m'as enfoncé ton coude dans la cuisse est c'est douloureux…
— Hic…
La jeune femme se dégagea et reporta son attention sur Renji et Rukia. La soirée se poursuivit sans autre incident et tous sortir de la taverne en titubant plus ou moins. Ils se saluèrent et se séparèrent pour retourner chez eux sans s'être rappelé pour Hisagi et Yumichika qu'ils commenceraient à s'entraîner ensemble à partir du lendemain après le dîner…
Hisagi rentra chez lui. Il se déshabilla paresseusement et se glissa sous la douche. Le jet d'eau chaude gicla sur sa peau sous laquelle les muscles déliés jouaient à la faveur d'un mouvement et la vapeur l'enveloppa. Il ferma les yeux et se laissa envahir par une certaine langueur, aidé en cela par une légère ébriété. Il aimait boire, mais pas au point de se mettre dans un état d'ivresse avancé comme Matsumoto. Il était encore assez lucide pour réfléchir. D'un naturel suspicieux, il se demandait si la requête de Yumichika ne cachait pas autre chose que l'amélioration de sa technique au sabre. Ce qui, soit dit en passant, ne lui déplairait pas. Il aimait enseigner, partager ses connaissances, et que le cinquième siège de la Onzième soit son élève le réjouissait grandement. Peut-être même exagérément pour un simple entraînement dans le but de progresser. Il appréciait énormément le shinigami et songer qu'il allait passer davantage de temps avec lui le fit agréablement frissonner.
Bien que Yumichika soit très orgueilleux à la limite du narcissisme, et obsédé par son apparence, Hisagi considérait ça comme superficiel et secondaire. Il savait que derrière ce masque se cachait un homme courageux et fidèle envers ses amis. Il était le quatrième meilleur combattant de sa Division même s'il avait choisi la place de cinquième siège. Il trouvait que le chiffre quatre n'était pas beau. Son capitaine, son lieutenant et Madarame avaient foi en lui, ce qui était significatif quand on savait que Zaraki Kenpachi était son supérieur. Malgré une attitude qui pouvait paraître désinvolte, il était solide et on pouvait compter sur lui en toutes circonstances. Il ne donnait pas non plus sa confiance aisément et lorsqu'il le faisait il ne se trompait pas. Et il semblait l'avoir accordée à Hisagi sans quoi, il ne lui aurait pas requis son aide pour s'entraîner. Et ça le rendait heureux au lieutenant sans capitaine…
Les jours s'écoulaient dans une tranquillité relative. Les créatures venaient du Hueco Mundo plus ou moins fréquemment que ce soit à la Soul Society que dans le Monde Réel. La Onzième Division était toujours la première à arriver sur les lieux où des Hollow apparaissaient et les combattait. Les shinigamis s'entraînaient plus durement que jamais pour rester en vie lors de ces affrontements. Les Hollow ne se souciaient pas du tout de cet équilibre qu'il fallait à tout prix conserver. Peu leur importait cette parité alors qu'elle était à la base même de l'existence des deux mondes spirituels. D'un autre côté, pour la grande majorité, ils ne brillaient pas par leur intelligence.
Les shinigamis savaient que c'était une guerre qu'ils ne gagneraient jamais à cause de cette égalité en nombre d'âmes qu'il fallait préserver impérativement. Pourtant, malgré des journées bien remplies et parfois épuisantes, Hisagi et Yumichika se retrouvaient après le dîner pour s'entraîner encore l'un avec l'autre. Shuuhei avait suggéré un lieu assez éloigné afin qu'Ayasegawa puisse libérer son Zanpakuto sous sa véritable forme sans que personne ne risque de le voir. Ce dernier avait apprécié la prévenance du lieutenant tout comme le fait qu'il n'en ait jamais parlé à personne depuis qu'il connaissait son secret. Ils auraient pu aller dans le vaste espace sous la montagne du Sokyoku, mais l'endroit était connu désormais. Mieux valait un site perdu au fin fond du Rukongai.
Yumichika ne s'était pas trompé en requérant l'aide d'Hisagi. Il était un excellent professeur et rectifiait le moindre défaut qu'il repérait. Le cinquième siège progressa rapidement. Il ne lui fallait pas longtemps pour corriger un mouvement défaillant. De même que le lieutenant trouva une parade pour échapper aux tentacules irisés de Ruriiro Kujaku. Elle pourrait lui servir face à une attaque du même genre. Ils passaient beaucoup de temps ensemble et ça les rapprocha. Et si Madarame était et resterait toujours le meilleur ami de Yumichika, celui-ci considérait désormais Hisagi comme un très bon ami. Mais le souvenir de ce bref instant ne le quittait pas et il continuait d'espérer pouvoir s'attacher le séduisant lieutenant. Le voir tous les jours était devenu une véritable torture. Ses réactions devenaient de plus en plus difficiles à camoufler. À chaque fois qu'il le touchait au détour d'un mouvement, un frisson brûlant aussi délicieux que brutal dévalait son échine telle une coulée de lave.
Plus il le connaissait, plus il était attiré. Bien plus que physiquement. Il découvrit qu'Hisagi était très cultivé et qu'il avait une passion pour les écrivains du Monde Réel. Son travail de rédacteur en chef de la Gazette du Seireitei lui permettait d'accéder à la grande bibliothèque et au fil des années, il avait appris beaucoup de choses dans de nombreux domaines, ce qui faisait de lui une personne avec qui il était très agréable de discuter. Et Yumichika ne boudait pas son plaisir. Parler avec quelqu'un qui avait de la conversation était particulièrement plaisant. Et ça ne le rendait que plus fascinant à ses yeux. Sans s'en apercevoir, il s'attachait à lui chaque jour un peu plus. Et l'attirance physique s'était transformée en un sentiment plus profond.
De son côté, Hisagi était également satisfait de ces entraînements. Il voyait bien que lui-même avait également progressé surtout en rapidité, son shunpo avait également gagné en vélocité, et il découvrait chaque jour un peu plus Ayasegawa. Ce n'était pas quelqu'un de compliqué. Il était courageux, résistant et loyal. Il avait connu Madarame dans le Rukongai et ils s'étaient liés d'amitié. Après que son ami ait défié Zaraki avant même qu'ils n'entrent tous au Seireitei, il avait vu que cet homme était quelqu'un de fort et ça lui plaisait. Il n'était pas particulièrement un suiveur, mais être avec des personnes fortes lui permettait de progresser parce qu'il voulait survivre, tout simplement. Et le Gotei Treize avait gagné un redoutable combattant.
Hisagi tombait lentement sous son charme à chacune de leurs retrouvailles et ne faisait rien pour résister. Yumichika était très bel homme et séduisant. D'un autre côté, il aimait sentir ce désir qu'il avait développé grandir toujours plus. Il s'était laissé envoûter par la fraîcheur de son compagnon, par son apparente superficialité et son humour souvent orienté vers l'esthétisme d'une situation. Ils leur arrivaient parfois de rester une heure ou deux en jinzen (1) pour discuter avec leur zanpakuto. Et ni l'un ni l'autre ne ressortait satisfait. Kazeshini et Ruriiro Kujaku, de son vrai nom, n'étaient pas des sabres faciles à maîtriser. L'un était d'une cruauté innommable, l'autre était narcissique au dernier degré. Les conversations avec leurs Shinigamis étaient compliquées.
Ils en parlaient et en riaient. De toute manière, les zanpakuto n'avaient pas d'autre choix que de leur obéir et eux de les contraindre à la docilité. Ce qui rendait le Bankai d'autant plus inaccessible que la lame ne se laissera pas faire si facilement. Mais à force d'exercice et de volonté, ils finiraient pas y arriver un jour ou l'autre. À partir du moment que le shinigami et son katana étaient en osmose et que ce dernier acceptait d'offrir toute sa puissance à son manieur, rien ne pouvait leur résister. Ensuite, ils s'entraînaient encore et encore, jusqu'à ce que leurs bras ne puissent plus se lever.
Ils utilisaient rarement les capacités de leur sabre. Yumichika voulait améliorer son Kenjutsu (2) et il n'aurait pu trouver un meilleur professeur. Madarame n'avait pas la fibre pédagogique alors qu'il s'était tourné vers celui qu'il considérait comme l'un des meilleurs. Il aurait aussi pu voir avec le capitaine de la Sixième Division, mais comme ses homologues, il était très occupé. Après son devoir auprès du Gotei Treize, il devait également assumer sa charge de chef du clan Kuchiki, une des quatre grandes familles de la noblesse du Seireitei. Hisagi s'était imposé sans compter qu'il l'attirait terriblement. Il lui trouvait un air rebelle un peu agressif, alors qu'en réalité, il n'y avait pas plus gentil. Et il le trouvait très sexy. Ce qui n'était pas peu dire de la part de cet adorateur de la beauté selon ses propres critères bien entendu.
Un jour qu'ils s'étaient entraînés jusqu'à ne plus pouvoir marcher, ils décidèrent d'aller sous la colline du Sokyoku pour se baigner dans l'onsen et son eau chaude régénératrice. Tout en cheminant en shunpo, ils se disaient qu'ils auraient pu y songer bien avant vu qu'il s'agissait de simplement se requinquer. Quelle importance qu'il y ait quelqu'un, Ayasegawa n'allait pas libérer Ruriiro Kujaku juste pour prendre un bain. Tellement dans l'inquiétude qu'un shinigami découvre le secret du cinquième siège, qu'ils n'avaient pas pensé à utiliser l'onsen pour ses bienfaits. Ils n'étaient que deux idiots, et ça les fit rire. Depuis des semaines, ils rentraient chez eux fourbus alors qu'ils auraient pu se retaper en quelques minutes.
Yumichika songea que ce pouvait être là, l'occasion rêvée pour avancer encore ses pions. Non pas qu'il prenne cela comme un jeu, loin de là. Mais il voulait savoir s'il avait une chance de séduire le beau lieutenant et faire partie de sa vie un certain temps. Un temps assez long de préférence… Ils arrivèrent sur les lieux et ils virent, un peu déçus, qu'ils n'étaient pas les seuls ce soir-là à se refaire une santé. Tant pis, songea Ayasegawa, ce sera pour une autre fois. Ils se dévêtirent et entrèrent dans l'eau, seulement habillés d'une petite serviette attachée autour des hanches. Hisagi détailla son compagnon discrètement et remarqua qu'il avait maigri. Ou plutôt que son corps s'était asséché et de ce fait, ses muscles étaient plus saillants. Tout ce qu'il voyait n'était qu'harmonie des formes et gestes souples empreints d'une certaine élégance.
Par contre, Yumichika ne se gêna pas pour observer l'objet de son désir. Et si celui-ci s'en apercevait, ce serait toujours ça de gagner. Au moins il comprendra qu'il lui plaisait et ça lui permettra de savoir s'il avait une chance. Sauf qu'il ne s'attendait pas à ce qu'il découvrit. Dans la même tenue, Hisagi entra dans le bassin. Jamais le cinquième siège n'avait jamais vu un corps aussi harmonieux. Madarame et Abarai étaient plus massifs avec des muscles un peu plus volumineux alors qu'Hisagi était plus fin et on devinait sans mal la puissance qu'il cachait. Il était encore plus sec que lui et sa musculature était légèrement plus développée que la sienne. Elle jouait sous la peau créant des collines et des sillons qui changeaient à chaque mouvement. Il avait gardé ses bracelets explosifs qui lui donnaient un petit côté bad boy absolument craquant. Ayasegawa déglutit et réalisa qu'Hisagi l'observait avec une étrange lueur dans le regard.
— L'effet est assez rapide, fit-il pour cacher son embarras.
— Tant mieux, murmura Hisagi en fermant les yeux pour mieux apprécier les bienfaits de cette source miraculeuse.
Il bascula la tête en arrière d'un geste d'une telle sensualité que Yumichika crut qu'il n'allait pas tenir plus longtemps et lui sauter dessus.
— T'es fatigué ?
— Plutôt… J'ai passé la journée avec mes hommes…
— Tu sais, si un soir tu es trop crevé, dis-le-moi. Ce n'est pas très grave si de temps en temps on se repose.
— Je sais… mais j'aime m'entraîner avec toi… On a bien progressé tous les deux…
— Avant-hier, j'ai fait un combat contre Ikkaku, il m'a dit la même chose… mais je ne suis toujours pas à son niveau…
— Ne cherche pas à l'égaler, reprit le lieutenant en rouvrant les yeux et en clouant son ami du regard, vous n'avez pas le même potentiel physique…
— Je sais, on fait ce qu'on peut avec ce dont la nature nous a dotés… Je ne serai jamais non plus aussi fort que toi…
— Ce n'est pas non plus une question de force… Je te donne un exemple… Imagine un bol de fraises sur une table situé à une dizaine de mètres. Il va te falloir huit pas pour l'atteindre alors qu'il ne m'en faudra que sept. Pourquoi ?
— Tes enjambées sont plus longues parce que tu es plus grand que moi…
— Exact, mais au final, tu mangeras les fraises. Si j'abats un Hollow en quatre coups, il t'en faudra peut-être cinq ou six et le résultat…
— … le Hollow sera tué…
— Tu as tout compris. Il n'y a pas de compétition sérieuse entre shinigamis. Nous poursuivons tous le même but. Ce n'est parce que je vais arriver avant toi que j'vais manger toutes les fraises, je partagerai, termina Hisagi avec ce petit sourire en coin qui le faisait fondre.
— Tu te sens comment après ce bon bain ?
— En pleine forme… Va falloir rentrer…
Les deux hommes sortirent du sous-sol et regagnèrent le quartier d'habitation des lieutenants (3). Arrivés devant chez Hisagi, ils s'arrêtèrent un moment. Alors que tous les autres soirs, ils n'avaient eu aucun problème pour se séparer, là il semblait y avoir quelque chose de différent sans qu'ils sachent exactement quoi. Peut-être parce qu'ils avaient partagé ce bain et que de se voir presque nus avait modifié la vision qu'ils avaient de l'autre. C'était une intimité nouvelle et très agréable qui venait de s'établir. Ils avaient particulièrement apprécié ce qu'ils avaient vu et si Hisagi avait bien vu la manière dont Yumichika le détaillait, il n'avait pas été en reste. Il n'avait pas les yeux dans sa poche surtout qu'il n'avait pas de poche dans la serviette qu'il portait dans l'onsen. Inutile de faire semblant de n'avoir rien remarqué. Ils s'étaient dévorés des yeux, c'est tout. Et leur désir n'en fut que plus intense.
— On se voit demain ? fit Yumichika pour rompre le silence embarrassant qui s'était insidieusement installé entre eux.
— Même heure ?
— Parfait…
Hisagi se détourna pour rentrer chez lui lorsque une poigne ferme l'attrapa par le bras pour le faire pivoter. Yumichika le regardait avec une expression indéfinissable quand soudain, il l'embrassa. Un baiser simple, qui dura peut-être deux secondes et il disparut en shunpo. Le lieutenant resta figé un instant puis sourit. Il franchit le seuil de son appartement le cœur battant et léger à la fois. Rien ne laissait présager un tel comportement de la part du cinquième siège. Il avait bien senti que son intérêt pour lui s'était accru depuis qu'ils passaient toutes leurs soirées ensemble, mais pas de là à fantasmer ce qu'il pourrait arriver entre eux. Pas encore. Il trouvait Yumichika très à son goût, mais il n'était pas du genre à forcer les choses. Il préférait les laisser se faire d'elles-mêmes. Si vraiment il souhaitait que cela aille plus vite, il pouvait toujours se montrer plus entreprenant et c'était ce qu'il avait justement décidé de faire sauf que Yumichika l'avait devancé.
Ayasegawa rentra chez et referma la porte contre laquelle il s'adossa. Mais qu'est-ce qu'il lui avait pris ? Pourquoi avait-il fait une chose pareille ? D'accord, ça faisait des jours qu'il en rêvait. Et ce soir il n'avait pas pu retenir ce geste. Il n'avait pas réfléchi, il avait seulement fait ce dont il avait envie. Il en tremblait encore. Il sentait toujours la pression de sa bouche sur la sienne. Il avait répondu à son baiser par réflexe, sans vraiment y penser, mais bon sang ! Que c'était bon ! Il lécha ses lèvres pour retrouver cette saveur qui avait affolé ses sens. Un démon furieux s'agitait dans son ventre et devait l'apaiser d'une manière ou d'une autre. Il glissa ses mains dans son hakama et les laissa faire ce qu'elles faisaient de mieux, lui donner du plaisir tandis qu'il imaginait ce qu'ils pourraient bien faire tous les deux… ensemble… l'un contre l'autre…
Et maintenant ? Que fallait-il faire ? Le lendemain soir ils allaient se retrouver dans cette vallée pour s'entraîner. Comment devait-il se comporter ? Comme s'il ne s'était rien passé ou bien devait-il le coincer contre un arbre et l'embrasser à son tour ? Plus Hisagi y pensait, plus son désir grandissait. Il lécha ses lèvres pour tenter de sentir le goût de cette bouche qui l'avait surpris. Jusqu'à présent, il avait réussi à ne pas trop montrer qu'il était terriblement attiré par son compagnon. À l'instar du capitaine Kuchiki, il savait très bien cacher ses émotions. Mais il les ressentait très fortement quand même. Et plus le temps passait, plus il avait du mal à se contrôler. Alors qu'Ayasegawa ait fait le premier pas était une très bonne chose. Il se coucha, l'esprit serein et le corps en feu, mais avant de s'endormir, il fantasma jusqu'à souiller son ventre…
Le lendemain, Hisagi avait choisi de consacrer sa journée au à l'hebdomadaire du Seireitei. Il n'avait pas pris de retard dans la publication et il se demandait encore comment. Il visait un énième article lorsque l'alarme retentit. Il bondit en appelant ses hommes et se dirigea vers le lieu indiqué par le papillon noir qui s'était posé sur le dos de sa main. Ils filèrent comme le vent en shunpo. Le lieutenant ne fut pas étonné de voir la Onzième Division déjà sur place bien qu'elle soit amputée de plus de la moitié de ses effectifs en soins à la Quatrième. Il repéra bien vite Zaraki qui s'élançait vers le plus gros des Hollow, encadré de Madarame et de Yumichika. La combinaison de ces trois-là était mortelle tant ils étaient complémentaires. Malgré la puissance qu'ils étaient capables de développer, les Hollow étaient bien trop nombreux.
Le combat commençait à s'éterniser, les hommes encore valides accusaient la fatigue et de ce fait, les risques de blessures devenaient plus grands. Un cri glaça le sang d'Hisagi.
— Yumichika !
Il reconnut le hurlement de Madarame aux prises avec trois monstres. Il venait de se débarrasser du sien et fila à une vitesse folle pour essayer de rattraper son ami qui tombait, sans connaissance. Il le réceptionna dans ses bras et le serra contre lui. Il avait la poitrine lacérée de l'épaule droite à la hanche gauche. L'hémorragie était importante et il ne réfléchit pas plus longtemps. Il l'emmena vers l'arrière du champ de bataille où le capitaine Unohana avait déployé une antenne médicale pour donner les premiers soins aux blessés. Il déposa son précieux fardeau sur un brancard qu'un shinigami lui désigna.
— Il va mal, murmura-t-il.
— Nous allons nous en occuper, le rassura le lieutenant Kotetsu qui s'était approchée.
— Isane, je t'en prie, sauvez-le…
— Nous ferons tout notre possible…
En quelques secondes, la jeune femme avait compris pourquoi il y avait tant de frayeur dans les yeux de son ami. Hisagi repartit se battre et elle se demanda s'il avait conscience de ses sentiments. Elle sourit et commença les soins de Yumichika. Son capitaine passa Minazuki en Shikai et les blessés les plus atteints furent avalés par son zanpakuto dont les acides de l'estomac guérissaient les lésions les plus graves. C'était impressionnant la première fois qu'on voyait l'immense animal qui ressemblait à une raie Manta faire cela et même effrayant. C'était à se demander si elle allait les rendre.
L'esprit en proie à une grande inquiétude, Hisagi continua à se battre. La Sixième et la Dixième vinrent leur prêter main forte et les Bankai des capitaines Kuchiki et Hitsugaya ainsi que celui de Renji ne furent pas de trop. Hisagi enrageait de ne pas encore avoir accompli le sien. Kazeshini était si difficile à contraindre. Le combat se termina enfin et les hommes regagnèrent leur division ou allèrent à la Quatrième pour soigner des blessures légères. Après avoir demandé où se trouvait Yumichika, Hisagi entra dans la chambre plongée dans la pénombre. Il s'approcha du lit et vit son ami entouré de pansements assez épais et taché de sang par endroit. Il mit une main devant sa bouche pour étouffer un hoquet d'émotion.
— C'est impressionnant, mais il va s'en remettre, fit la voix douce du capitaine Unohana derrière lui.
— Je sais pas ce qu'il s'est passé, murmura le lieutenant, il avait bien progressé pourtant…
— Tu penses que tu as été un mauvais professeur ?
— Je l'ignore… peut-être... à voir le résultat…
— Vous étiez à trois contre un, tu n'es pas responsable, le rassura le Médecin. Ça aurait pu arriver à n'importe lequel d'entre vous.
— Je sais… je culpabilise quand même…
— Il sera sur pieds dans deux jours, tu pourras venir le chercher pour le ramener chez lui
— Merci capitaine Unohana…
Hisagi s'assit au bord du lit et prit la main de Yumichika dans la sienne. Il la regarda en détail. Les ongles étaient parfaitement manucurés et les doigts étaient longs et fins. À les voir, on n'aurait jamais imaginé qu'ils possédaient une telle force lorsqu'il maniait son Zanpakuto. Il y avait des cals qui prouvaient avec quelle assiduité il s'entraînait et depuis de très nombreuses années. La peau était veloutée. Hisagi sourit doucement, persuadé que le cinquième siège se servait une crème hydrante ou protectrice. Ce serait bien son genre. Il n'était pas aussi bon que les shinigamis de la Quatrième Division, mais il pouvait utiliser son reiatsu pour l'aider à guérir. Il plaça ses mains au niveau du cœur et envoya un peu de son énergie à son ami.
Le lendemain, Yumichika reprit connaissance. Il sut immédiatement où il se trouvait. Le combat contre les Hollow lui revint en mémoire ainsi que sa blessure. Elle devait être assez sérieuse pour qu'il se sente engourdi. Il toucha son ventre et sa poitrine. Vu l'épaisseur et l'étendue du pansement, il se dit qu'il avait eu de la chance. Par contre il ne se souvenait pas comment il était arrivé à la Quatrième. Son autre main était coincée et en tournant la tête, pas trop vite pour ne pas aggraver la migraine qui lui vrillait le crâne, il reconnut Hisagi qui s'était assoupi. Il sourit et passé la surprise, sa gorge se serra. Qu'est-ce que le lieutenant faisait ici ? De puis combien de temps était-il là pour s'être finalement endormi ? Il ferma les paupières et songea qu'il devait être affreux à voir. Il bougea son bras et Hisagi ouvrit les yeux.
— T'es enfin réveillé, fit-il avec un petit sourire de soulagement.
Et il l'embrassa. Un baiser doux qui ne réclamait rien de plus. Un baiser qui montrait simplement l'atténuation des craintes éprouvées.
— Pourquoi ? souffla Yumichika quand Hisagi se recula.
— Tu m'as embrassé le premier… J'ai eu envie de faire pareil, murmura le lieutenant un peu gêné malgré tout.
— Et… où ça va nous mener ? demanda le cinquième siège avec un sourire timide.
— Je sais pas… sors d'ici et on verra… répondit Hisagi en l'embrassant encore une fois avant de quitter de la chambre.
Le cœur de Yumichika battait si vite que le moniteur de surveillance émit plusieurs bips d'alarme et deux infirmières accompagnées du lieutenant Kotetsu vinrent voir ce qu'il se passait. Elles trouvèrent le patient qui souriait béatement et qui paraissait aller très bien.
Le cinquième siège fut enfin autorisé à sortir des locaux de la Quatrième, mais pas à reprendre ses fonctions. Ses points de suture étaient frais et il fallait qu'il change son pansement tous les deux jours. Heureusement, la capacité des shinigamis à récupérer d'une blessure était rapide et bientôt, il retournerait dans sa Division. Pour l'instant, il lui devait encore un peu se reposer. Hisagi vint le chercher accompagné de Madarame.
— C'est gentil… vous pouvez m'laisser, je vais m'débrouiller…
— T'es sûr ? T'es capable de t'ébouillanter avec la bouilloire, le railla son meilleur ami.
— Ce serait vraiment un accident très affreux, sourit le convalescent.
— J'vais rester avec lui pour le protéger de lui-même, sourit Hisagi.
— Mais c'est pas fini vous deux ? protesta Yumichika, peu habituer à être dorloté.
— J'retourne à la Onzième sinon le capitaine va m'couper en deux si y a une alerte, déclara Madarame un peu craintif.
— Tu lui as pas dit que tu venais chez moi ?
— Non… Y dormait…
— File, j'm'occupe de lui, réitéra le lieutenant de la Neuvième.
— J'compte sur toi, Hisagi…
Madarame s'éclipsa laissant seuls ses deux amis. Immédiatement, l'atmosphère s'alourdit. Ni l'un ni l'autre n'avait oublié le baiser échangé dans la chambre d'hôpital ni les mots prononcés. Où cela allait-il les mener maintenant que Yumichika était sorti ? En ce qui le concernait, s'il n'y avait pas sa blessure, il lui aurait sauté dessus, mais il éprouvait toujours de la timidité face au séduisant lieutenant. Il n'arrivait pas à avoir une attitude naturelle, il ne savait pas comment engager la conversation. Il restait là, assis sur son canapé, incapable de faire quoi que ce soit sans que ça lui paraisse déplacé.
— Tu veux un thé ? lui demanda Hisagi.
— Oui… merci…
Le lieutenant n'était pas non plus très à l'aise. Il avait bien remarqué la gêne de son ami et il ignorait comment y remédier. D'un autre côté ça le faisait sourire. Yumichika était quelqu'un qui débordait d'énergie et son sens de l'esthétisme assez particulier faisait de lui quelqu'un qui il était plaisant de fréquenter. Hisagi l'avait toujours trouvé sympathique et chaleureux. Il paraissait frêle par rapport à Madarame ou Abarai ou lui-même qui avaient un physique un peu plus massif, mais pour avoir eu droit aux véritables capacités de son zanpakuto, le lieutenant savait très bien quelle force il était capable de déployer lors d'un combat.
— Et voilà ton thé…, dit-il en s'asseyant à côté de son ami.
— Merci…
— T'as toujours pas montré ce que fait ton sabre ?
— Non, et j'le f'rai jamais, tu l'sais…
— J'comprends toujours pas…
— Toi tu pourrais très bien intégrer la Onzième, ton zanpakuto est adéquat pour cette Division…
— ... alors que le tien utilise le kido, oui… mais ça n'empêche rien… ça ne diminue pas ta force ni tes capacités…
— Pas dans ma division et j'en changerai pas pour une histoire de katana…
— Je trouve ça un peu dommage… Un jour tu auras le niveau pour accomplir ton bankai, il faudra bien que tu dévoiles sa vraie nature…
— J'en suis pas encore là… je verrai le moment venu… ton thé est très bon, sourit Yumichika avec un regard en coin à son ami.
Ils restèrent un long moment silencieux, savourant simplement la présence de l'autre. À nouveau, Hisagi sentit la timidité reprendre le dessus chez Yumichika. Il ne savait pas quoi penser. Il était le premier à l'avoir embrassé, c'est donc qu'il avait réussi à faire fi de son embarras et là, il n'osait même pas le regarder. Bien qu'à cela ne tienne. Il fera le premier pas. Il posa sa tasse sur la table basse et débarrassa Yumichika de la sienne.
Et il l'embrassa.
Il n'y avait pas de surprise comme pour la première fois ni une simple envie comme la seconde. Il s'agissait d'un désir qui ne voulait plus se cacher. Ils éprouvaient une très forte attirance et il fallait la laisser s'affirmer. Le baiser, qui au début était chaste, devint plus exigeant et expressif. Chacun jouait avidement avec les lèvres de l'autre quand leurs langues entrèrent enfin dans la partie. Ils découvraient leur saveur et leur souffle se fit plus erratique. Une toute petite plainte échappa au cinquième siège qui s'agrippa au cou du lieutenant. Maintenant qu'il le tenait, il n'était pas question de le laisser filer.
Ils commencèrent à s'embrasser avec plus de voracité. Leur envie les y poussait et ils lui cédaient volontiers. Quand les lèvres d'Hisagi se perdirent dans le cou chaud à la peau douce et particulièrement réactive, Yumichika ne put retenir un gémissement d'une affolante sensualité qui provoqua une sensation pétillante dans le ventre du lieutenant. Ils glissèrent paresseusement sur le divan jusqu'à se retrouver allonger l'un sur l'autre, bien conscients du désir ferme qu'ils pressaient dans un lent mouvement de hanches. Une plainte, mais cette fois de douleur les stoppa net.
— On devrait s'arrêter, souffla Hisagi frustré au possible, ton pansement est taché…
— C'est pas juste.… Regarde dans quel état on est…
— C'est pas grave… J'préfère que tu sois totalement remis pour pouvoir te dévorer sans m'retenir, sourit son amant.
— C'est peut-être moi qui vais te dévorer, sourit le convalescent, aguicheur.
— Si tu veux… on se dévorera mutuellement alors…
— D'accord…
— Et si je nous préparais à dîner ?
— Ça te dérange pas ?
— Je l'aurais pas proposé, si c'était le cas…
Le repas fut simple, mais excellent. Leur embarras semblait s'être complètement estompé. À partir du moment où les choses avaient pris une tournure plus intime, ils n'avaient plus été gênés. Ils savaient où ils allaient. L'image d'une relation de couple se profilait et ils en étaient satisfaits. Ils s'habituèrent à dîner ensemble. À la fin de sa journée, si tant est qu'un shinigami ait des horaires plus ou moins fixes, ils se retrouvaient chez Yumichika qui se sentait de mieux en mieux. Ces plaies étaient cicatrisées, mais elles lui laisseraient trois belles marques en travers du corps, un peu comme celles qu'Hisagi avait sur le visage. Et ils finissaient bien souvent leur soirée à se rendre fous d'un désir frustré, car inassouvi. Ils n'avaient même jamais pensé à se satisfaire avec leurs mains ou leur bouche. Lorsqu'on souhaite obtenir quelque chose, ne commence-t-on pas par offrir ce que l'on veut recevoir surtout dans de telles circonstances ? Et ils voulaient tout ou rien.
Le cinquième siège avait fini par guérir complètement et il se garda bien d'en faire part à son amant. Il le considérait comme tel même s'ils n'avaient jamais fait l'amour. Et ce soir-là, Yumichika avait bien l'intention de ne pas laisser repartir son lieutenant sans avoir finalisé leur relation, sans avoir posé la cerise sur le gâteau qu'ils allaient déguster ensemble.
Ce jour-là, il avait été déclaré apte à reprendre son poste et donc il n'allait pas se gêner. Le simple fait de penser à Hisagi provoquait des frissons dans tout son corps parce qu'il savait qu'il allait le voir dans quelques heures. Il avait préparé du katsudon et il avait acheté des fruits pour le dessert. Ensuite, ils boiraient quelques coupes de saké pour digérer.
Hisagi était passé chez lui pour prendre une bonne douche. Il avait passé l'après-midi sur un terrain d'entraînement avec ses hommes. Être capitaine suppléant n'était pas de tout repos. Il devait également s'occuper du journal du Seireitei. Plusieurs des contributeurs n'étaient plus là, il fallait pallier à l'absence d'articles. Raison pour laquelle il avait demandé conseil au capitaine-commandant Yamamoto qui l'avait rassuré en lui disant que ce n'était pas très grave si l'hebdomadaire avait quelques pages en moins. Il sortit de chez lui, habillé d'un yukata sobre et élégant qui lui allait très bien. Même lorsqu'il ne travaillait pas, il gardait ses bracelets explosifs et Kazeshini glissé dans sa ceinture. Il lui fallut une dizaine de minutes tout au plus pour se rendre chez Yumichika, et tout le long du chemin, il songea au plaisir qu'il aurait de le voir, et après le dîner, de le prendre dans ses bras et l'embrasser. Il se demandait si sa convalescence aller durer encore longtemps. Il le désirait tellement, tout son corps en frémissait d'anticipation. Il frappa à la porte et fut invité à entrer.
— Ça sent drôlement bon, dit donc, sourit-il en embrassant Yumichika qui finissait de servir.
— Du Katsudon avec du riz et des fruits en dessert…
— J'adore ce plat… dit-il en attrapant ses baguettes. Mmh… c'est délicieux ! s'écria-t-il.
Yumichika, qui commençait à assez bien le connaître, fut sensible au compliment dont il ne doutait pas de l'honnêteté. D'un autre côté c'était un des traits dominants d'Hisagi. Lorsqu'il avait quelque chose à dire, il ne se mettait pas de gant.
— Ta journée ?
— J'imaginais pas tout l'travail que doit abattre un capitaine, soupira-t-il en buvant une gorgée.
— C'est pour ça qu'ils ont besoin d'un lieutenant… Encore un peu de saké ?
— Tu veux me saouler ?
— Peut-être, minauda le cinquième siège en coulant un regard espiègle tout en remplissant le petit verre.
— Je tiens pas aussi bien l'alcool que Matsumoto, mais mieux qu'toi, le taquina Hisagi. Et toi, comment tu t'sens ?
— Ça va, mais j'm'ennuie à ne rien faire toute la journée… J'ai voulu aider à la Onzième sans forcément aller sur le terrain, mais mon capitaine m'a viré en m'gueulant dessus…
— Zaraki est brutal, mais il a un cœur énorme, observa le lieutenant.
— Mouais… quand t'es pas à deux doigts de t'faire trancher parce que tu t'es pas éloigné assez vite de sa proie, sourit Yumichika.
— Je vais piquer une pêche dans ta jolie corbeille de fruits… T'en veux une ?
— Non, j'ai envie d'autre chose en dessert…
— Dis-moi, j'te l'apporte…, fit naïvement le Hisagi.
— Toi…
Le regard brûlant de Yumichika détailla son invité de la tête au pied avec une lenteur toute calculée pour bien lui faire comprendre le sens de son propos. Hisagi sourit et reposa le fruit. La suite se perdit dans les voiles obscurs et mystérieux de la nuit. Ce fut d'abord des baisers avides pour combler cette envie de l'autre depuis de si longues semaines. À travers leurs entraînements et les combats, chacun savait que leur corps de renfermait une force que ne laissait pas soupçonner leur physique fin et élancé. Ils l'avaient bien vu en se baignant dans l'onsen et cette vision n'avait fait qu'attiser leur désir.
Les vêtements volèrent à travers la chambre qui fut rapidement envahie de sons propres à une sarabande venue du fin fond des âges, profondément ancrée dans les gènes. Une danse dont les pas n'avaient jamais été appris, mais que l'on connaissait d'instinct. Des gestes qui augmentaient lentement leur excitation. Ils l'auraient voulu plus véloce, pour assouvir cette envie impérieuse, mais la perspective du terme les faisait ralentir pour apprécier chaque seconde et la rendre éternelle. Tête-bêche, ils donnaient à l'autre ce qu'ils souhaitaient obtenir. Ils goûtaient leur peau, les recoins cachés les plus sensibles, engloutissant sans retenue la chair tendue par un désir violent.
Les murmures lascifs amplifiaient leur excitation, tout comme les soupirs rauques empreints de stupre. Yumichika s'étendit sur le ventre, invitant Hisagi à s'allonger sur son dos. Leurs hanches ondulaient sur un rythme lent et terriblement frustrant, mais si délicieux. L'esthète se tourna légèrement et passa son bras autour du cou du lieutenant pour l'embrasser avec voracité. Quand soudain son souffle se bloqua dans sa gorge. La fusion des corps se fit dans un râle de volupté intense. Les formidables sensations qui déferlèrent en eux faillirent avoir raison de leur résistance, mais très vite, ils entamèrent ce corps à corps source d'un plaisir qu'ils avaient si longtemps attendu. Ils tentèrent de contrôler la cadence, mais elle se fit plus rapide. Dans un éclair de lucidité, Hisagi se modéra.
À son tour, il se coucha sur le dos tandis que Yumichika le chevaucha avec une sensualité féline qui lui embrasa les reins. Il le laissa mener la danse à son rythme, ondulant des hanches ou en se mouvant de bas en haut. Sa poitrine se soulevait à chaque respiration, plus haletante, émaillée de petites plaintes à la limite de l'indécence. Le cinquième siège n'était du genre à se restreindre. Quand il aimait, il le faisait savoir et sentir son amant emprisonné dans son corps, il adorait ça. Surtout lorsque celui-ci caressait sa virilité à la même cadence. Il le regardait, les yeux fous, emplis de luxure, souhaitant y exprimer son envie de lui, qu'il comprenne qu'il le voulait toujours plus loin, plus fort. Ces mouvements devinrent rudes.
Hisagi eut un sourire salace, saisissant parfaitement ce qu'il souhaitait. Il avait rarement éprouvé autant de désir pour quelqu'un. Il avait connu des hommes et des femmes tout au long de sa vie, mais ce qu'il ressentait pour Yumichika était différent et plus fort. Il y avait quelque chose de plus. Un sentiment ? Non. CE sentiment si beau qui permet de déplacer des montagnes, si fort qu'il a déclenché des guerres dans le monde réel, qui a inspiré des chansons magnifiques. Il aimait Yumichika. Passionnément. Totalement. Il était tombé amoureux sans s'en apercevoir, mais il avait décidé de l'aimer parce qu'il savait qu'il était la moitié qui lui manquait. Et depuis le début de leur étreinte, Yumichika lui avait confié que pour lui, c'était la même chose. Ces mots chuchotés au creux de leur cou étaient un aveu sans fard de l'amour qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre pour des raisons identiques.
Hisagi se redressa pour enlacer le corps qui se mouvait sur lui, souple comme une liane. Il caressa des lèvres la peau luisante d'une sueur salée et sous laquelle il voyait jouer les muscles puissants. Il agaça un téton récoltant une plainte de pure concupiscence alors il recommença avec l'autre, titillant et suçotant cette chair érigée si sensible. Entre eux, le phallus se tendait avec arrogance en quête d'un peu d'attention, mais personne de s'occupait de lui et il pleurait d'un désir inassouvi. Le lieutenant ceintura son amant et le renversa sous lui. Il voulait le voir grimacer de plaisir sous ses coups de reins. Ils ne tardèrent pas à ne plus pouvoir retenir leurs plaintes sensuelles. Hisagi sentant que son contrôle s'amenuisait, ses mouvements se devinrent plus rapides, plus profonds à tel point qu'un cri le freina, mais Yumichika poursuivit ses ondulations. Il venait de toucher son paradis intérieur (4). La surprise leur tira un sourire, comme un but enfin atteint, puis ils mirent encore plus d'ardeur à reproduire cette exaltation qui fit perdre la tête au cinquième siège. Devant cette beauté sublimée par l'euphorie des sens, Hisagi jeta ses dernières forces dans ce combat où il n'y aurait que des vainqueurs.
Il pilonna sans relâche, aussi longtemps qu'il le put la source interne du plaisir de son amant qui n'en finissait plus de gémir et de crier sous les déferlantes de cette jouissance qui le dévastaient en se caressant offrant une image sulfureuse. Lui-même aurait voulu ressentir pour l'éternité cette moiteur brûlante tout autour de lui. Son visage déformé par la passion était d'une sensualité que Yumichika avait rarement rencontrée. Et même jamais. La vision extatique de l'autre alimentait leur propre excitation et ils s'épanchèrent à quelques secondes d'intervalle avec des cris étouffés et des souffles hachés, le corps broyé et le cœur gonflé d'un bonheur ineffable.
Ils s'éveillèrent quelques heures plus tard, sans se rappeler de s'être endormis. Ils s'étirèrent comme des chats et Yumichika prépara le petit déjeuner. Tout en riant, ils se donnèrent la béquée entre deux baisers.
— Tu reprends ton poste ? demanda Hisagi en se léchant les doigts pleins du jus d'une pêche.
— Oui, Unohana m'y a autorisé, j'ai retrouvé la forme ! clama le cinquième siège, tout sourire.
— J'confirme, t'es en forme, le chambra son amant avec un rictus amusé.
— Toi aussi, tu l'as prouvé cette nuit…
— Je peux recommencer si t'es pas convaincu…
— Mmh… je pense que tu devrais me le montrer à nouveau…
Ils plaisantèrent encore jusqu'à ce que le moment de se rendre à leurs Divisions respectives soit venu. À la fin de la journée, Hisagi et Yumichika se retrouvèrent chez le lieutenant pour apporter les preuves qu'ils étaient en pleine forme…
Fin.
(1) Jinzen = pose méditative, assis en tailleur avec le sabre posé sur les genoux pour discuter avec le zanpakuto.
(2) Kenjutsu = technique du sabre. Ne pas confondre avec le kendo qui ajoute une dimension plus philosophique tout en utilisant les mêmes techniques que le Kenjutsu. Wikipédia est votre ami.
(3) Quartier d'habitation des lieutenants. Rien n'est précisé dans le manga ou l'animé alors j'ai imaginé que chacun d'eux avait sa maison ou son appartement.
(4) Expression utilisée avec l'autorisation de son auteur à qui appartient le texte où je l'ai lu.
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