Hello!
Après pas mal de temps sans publier, je reviens avec cette petite fic en deux parties sur mon ship préféré (et pourtant c'est la première fois que je publie sur eux, ne me demandez pas pourquoi...).
Je suis partie d'une idée simple, Zoro et Sanji dans le lieu et l'ambiance du film Lost in Translation, et j'ai écrit sans trop me prendre la tête. J'espère que ça vous plaira!
Je voulais au départ attendre d'avoir fini d'écrire les deux parties avant de publier, mais je me rends compte que j'ai envie d'avoir quelques retours avant de boucler la seconde partie, étant donné que le style de la fic est quand même un peu particulier. Alors à vos reviews !
Les personnages appartiennent à Eichiro Oda. Bonne lecture à tous!


Il met un moment à vraiment y croire, au début, quand il le voit.

Après tout ce temps, il fallait qu'ils se recroisent maintenant ?

Il ne sait même pas ce qu'ils se disent pour commencer. De toute façon, c'est facile, le cadre est parfait pour les rencontres. Il est seul accoudé au bar, les lampes diffusent une lumière trop faible pour qu'il se sente réellement observé par ceux qui les entoure. Dans un coin de la grande pièce, un orchestre de jazz joue tout doucement, étouffant les conversations. Non, il ne sait pas ce qu'ils ont dit pour commencer. Zoro s'est assit à côté de lui et ça a semblé parfaitement normal. Maintenant ils ne disent rien et c'est comme s'ils s'étaient quittés la veille, tout en ayant eu le temps de devenir d'autres personnes. L'épéiste de renom se fait servir un verre. Sanji garde le nez dans le sien, le visage appuyé sur l'une de ses mains tandis qu'ils bavardent par demi-phrases. Il voit du coin de l'œil le regard de Zoro buter contre son alliance, qui luit doucement dans la pénombre.

Eh ouais.

-T'es pas le seul à avoir fait du chemin, hein ?

Il voudrait avoir l'air moqueur mais il a seulement l'air triste, il s'en rend compte. À côté de lui, l'épéiste ne dit rien, il hausse légèrement les épaules, l'air bourru. Sanji s'en veut tout à coup. Il n'a pas envie de gâcher leurs retrouvailles avec son ego – pas comme il gâche à peu près tout en ce moment.

-Alors qu'est-ce que tu fais là ?

Il s'en veut d'avoir l'air aussi blasé. C'est pourtant pas rien de se recroiser à l'autre bout du monde comme ça, après autant de temps sans nouvelles. Zoro répond vaguement. Une compétition, des vacances. Des choses à voir. Profiter d'être au Japon pour prendre quelques jours loin de tout.

-C'est quoi, tout ?

En face de lui, l'autre sourit, amusé par la question implicite. Il répond, non, je ne suis pas marié, je n'ai personne. Pas d'enfants non plus. Juste la vie.

Sanji est content de la réponse. Il préfère se retrouver face à un Zoro solitaire. Quelqu'un qui n'est pas trop un miroir de lui-même. Quelqu'un qui ressemble à une possibilité.

-Et toi ?

La question qui fâche. Le cuistot ne cache rien. Oui, il est marié, depuis quatre ans. Il est ici uniquement parce qu'il a suivi son mari, le conférencier, le grand docteur.

Il jette un regard par-dessus son épaule et fait un mouvement du menton. Law est penché en avant sur son siège, les mains croisées devant lui. Il parle à mi-voix avec cet air un peu détaché, un peu mystérieux, cet air qui l'a rendu dingue dès le premier jour et dont il se rend compte maintenant qu'il ne le supporte plus. Les quelques personnes attablées avec lui boivent ses paroles, leurs yeux brillent dans la lumière tamisée – à une époque, Sanji aurait été agacé, jaloux. Maintenant il voudrait leur dire de le lui prendre, de l'emporter avec eux, de faire disparaître cet homme qui est son mari et dont il ne s'est jamais senti aussi éloigné.

Il voit Zoro suivre son regard et comprendre, et se demande de quoi ils ont l'air, de l'extérieur. On leur dit souvent qu'ils font un beau couple, mais il se doute que l'illusion ne tient pas pour tout le monde.

Il retourne à son verre. Il voudrait boire, se mettre minable, peut-être foutre une bonne fois la honte à Law, se venger à sa manière des nuits où il découche, des jeunes étudiants plus beaux que lui sans doute qui lui parlent de trop près, qui l'emmènent parfois dans des chambres d'hôtels.

Mais au fond, même ça, il s'en fiche maintenant.

-Allons marcher. Ça te dis de sortir ?

Zoro accepte. À une époque il ne l'aurait jamais suivi, il n'aurait pas accepté que Sanji décide, comme ça. À une époque ils n'auraient pas été capable de boire un verre ou de marcher comme ça, côte à côte, dans les rues de Tokyo, sans que quelque chose explose, sans qu'ils s'insultent sans qu'ils se battent, sans qu'ils finissent parfois peau contre peau dans les draps froissés de leurs chambres étudiantes.

Sanji se souvient de leur fierté, de leur incapacité à faire des concessions. Et il se sent usé, comme vieilli. Les jeunes hommes de vingt-cinq ans n'ont pas l'air de se sentir si vieux pourtant, en général. Est-ce que c'est juste lui ?

Ils ne disent pas grand chose. Leurs yeux se perdent dans les lumières des quartiers qu'ils traversent sans se presser. Sanji finit par s'apaiser un peu. Il regarde Zoro – il prend cette fois le temps de le voir pour de vrai. Il retrouve cette beauté brute qui ne s'excuse pas. Il n'a jamais pu oublier. Après tout, c'est avec elle qu'il a appris à désirer. Même si à l'époque, il ne s'en rendait pas vraiment compte...

Ils s'arrêtent pour manger quelque part, dans un restaurant modeste au coin d'une ruelle un peu cachée. Zoro demande s'il cuisine toujours.

-Évidemment. Je continue de bosser pour le vieux.

-Tu voulais pas lancer ta propre affaire ?

-Je l'ai fait. Puis Law m'a branché pour des trucs plus ambitieux. J'ai participé à des concours, des émissions culinaires, puis j'ai sorti mon propre livre de recettes...

Il parle de tout ça d'un ton morne, comme si c'était la carrière de quelqu'un d'autre.

-Ah ouais, la grande affaire. Pas étonnant venant de toi.

Zoro n'a pas l'air dupe. Il sent l'embrouille.

-Et tu vas continuer ?

-Je ne pense pas. C'était sympa jusqu'à ce que...

Il ne finit pas sa phrase. Il ne sait pas vraiment ce qui a merdé. Est-ce que tout ça lui plaisait vraiment au départ ? Ouvrir son propre petit restaurant de quartier, c'était ce qu'il voulait faire à la base. Il n'aurait jamais tenté de faire plus si Law ne l'avait pas poussé, lui qui connaissait des gens, lui qui pouvait faire marcher son réseau... Pourtant, il n'a pas détesté, au début. La reconnaissance de ses pairs, l'argent qui arrive à toute vitesse, les costumes sur mesure, pouvoir payer pleinement sa part du loyer dans leur loft.

Et puis le revers de la médaille s'est dévoilé, évidemment. Toutes les petites vicissitudes des gens de la télé, l'hypocrisie sans faille de la critique et des commerciaux, et puis la cocaïne -entre autres substances- partout, tout le temps. Law ne comprends toujours pas pourquoi il a tout arrêté. Il continue de faire comme s'il était en pause. Sanji ne dit rien et le suit, se complaisant dans le rôle de l'épouse charmante mais quelque peu délaissée et neurasthénique.

Il finit par secouer la tête. Il a un peu honte de laisser deviner tout ça à Zoro. Mais après tout, lui aussi est connu. Il doit connaître ça aussi, même si lui reste fort si facilement, comme il l'a toujours été...

-Tu aime la célébrité, toi ?

-Non.

Zoro reste impassible malgré sa réponse légèrement trop rapide.

-... J'ai appris à me faire discret.

Sanji hoche la tête. Nom de dieu. Ils ont pourtant tous les deux réussi. Et ils sont encore jeunes. Ils devraient être heureux et fiers, non ? Pourquoi est-ce que même Zoro a cette lueur mélancolique dans le coin de l'œil ?

Sanji le regarde et ne peut s'empêcher de sourire. Il n'y a pas à dire, il est quand même content de le voir.

-Pourquoi tu souris ?

-Je pense à nous au lycée.

-Et donc ?

-Tu ne m'a pas manqué.

Zoro grommelle en détournant le regard. Sanji se reprends, rapprochant instinctivement sa main de la sienne sur la table entre eux.

-Je veux dire... Je n'avais pas réalisé que tu me manquais. Mais maintenant, je sens que oui.

Face à lui, l'épéiste a l'air surpris. Puis il a un sourire un peu moqueur.

-Ah oui ?

-Plus personne ne se chamaille avec moi.

Il sens pleinement à quel point il a changé. Il n'aurait jamais osé dire ce genre de chose à Zoro, avant.

Ce dernier secoue la tête en ricanant.

-Abruti.

Il le regarde au fond des yeux. Sanji a envie de lui, tout à coup.

-Tu m'a dit que t'étais pas marié. T'a un mec ou une meuf, quand même ?

-Nan.

-Personne ?

-Je crois que je suis pas fait pour ça.


Ce soir-là ils rentrent dans la chambre de Zoro et ils n'ont même pas à réfléchir qu'ils se déshabillent dans le noir, dans cette semi-obscurité troublée par le bleu de la ville en contrebas. Ce soir-là l'avidité de Zoro qui lui dévore les cuisses, sa langue sa bouche sur son sexe ses mains sur ses fesses, ce soir-là tout cela le refait exister pour de bon l'espace d'un instant, et il se laisse aller sur les draps trop doux, le visage contre le matelas. Il apprécie tout d'abord sa propre soumission, la manière dont l'autre guide tout ses gestes, le poids du corps sur son dos, ses épaules, les mains qui le plaquent, qui l'empêchent, et ce sexe enfin qui le pénètre, qui fait entrer l'autre en lui tandis qu'il gémit et supplie. Sous les coups de reins qui lui font plaquer les mains contre le mur devant lui, il se sent tout à coup revivre, c'est comme un courant électrique qui lui remonte le long de la colonne vertébrale, et les forces lui reviennent avec un reste de fierté, l'instant d'après c'est lui qui renverse Zoro sur le matelas et qui le prend avec rage, avec passion, imprimant sur ses épaules la marque de ses dents. Ils s'endorment l'un sur l'autre, en silence, comme si d'une certaine façon tout ce qu'ils avaient à dire était déjà sorti.


Le lendemain, Sanji se réveille seul. Zoro a évoqué la veille un rendez-vous avec son agent, un débrief de sa compétition, ou quelque chose comme ça.

Il s'habille et se rend sans se presser dans sa chambre où il trouve Law en train de téléphoner, assis en tailleur sur le lit devant le plateau de petit-déjeuner qu'il s'est fait livrer par le room-service. En caleçon et chemise à manches courtes ouverte sur son torse, les cheveux encore emmêlés par le sommeil, magnifique dans la lumière du matin, il ressemble à une star de cinéma dans un film d'auteur à succès. Sanji ne se perds pas dans la contemplation – il trouve toujours Law à tomber, ce n'est pas la question, mais même sa beauté le déprime, maintenant – et retire ses vêtements qu'il met dans la corbeille à linge sale. Son mari jette un regard distrait à son corps nu tandis qu'il enfile un caleçon et une chemise blanche qu'il ne boutonne pas, avant de chiper sur le plateau un toast beurré et d'aller s'asseoir dans le canapé en face du lit. Dégustant son simulacre de petit-déjeuner, il attends patiemment que Law raccroche, croisant sagement ses jambes nues.

La conversation téléphonique finit par se terminer.

-J'étais surpris de ne pas te voir en rentrant hier soir.

Donc Law est rentré hier soir. C'est loin d'être systématiquement le cas, surtout ces derniers temps.

-C'est rare que tu découche, continue son mari. Je peux savoir où tu étais ?

Sanji est presque surpris de la question. Il ne pensait pas vraiment que ça l'intéressait.

-Je t'ai trompé.

Il lâche ça d'un coup sans réfléchir. Il y a un silence pendant lequel il regarde un instant par la fenêtre, laisse son regard couler sur les buildings en contrebas, dans la lumière du matin.

-C'est la première fois, ajoute-il, même sil Law sait pertinemment qu'il a toujours été sage.

-... Je vois.

Law repose sa tasse de café qu'il avait portée à sa bouche, sans rien ajouter de plus.

-Maintenant qu'on va voir ailleurs tous les deux, tu crois qu'on devrait divorcer ?

-Divorcer ? Pourquoi ?

Sanji ne répond pas. Il n'en sait rien, à vrai dire. Pourquoi maintenant ? Qu'est-ce que ça change au fond ? Ça fait longtemps que leur mariage se casse la gueule. Mais là, il a vraiment l'impression qu'ils ont atteint la consécration de l'union ratée.

-Tu es trop mélancolique en ce moment. C'est pas le bon moment pour réfléchir à un divorce.

Sanji hausse les épaules en détournant encore le regard. Peut-être. Après tout, ça marche encore entre eux, parfois. Law peut être vraiment attentionné quand il n'est pas pris par autre chose. Et ils font encore l'amour de temps de temps. Law est magnifique. Il est brillant. C'est un génie, un homme dont on se souviendra encore après sa mort. Tout ça, Sanji continue de le voir.

-C'était qui ?

-Quoi ?

-Ton coup d'hier soir. C'était qui ?

-Zoro.

-Qui ça ?

-Zoro. C'est... Une vieille connaissance, du lycée. On s'est croisés par hasard.

-A Tokyo ? Tu parle d'une coïncidence.

-T'es jaloux ?

-Sanji...

Law ne prends même pas la peine de répondre au-delà de ça. Il n'est pas vraiment du genre jaloux, non. Encore heureux, vu le peu de peine qu'il prends pour cacher la liaison qu'il entretient avec son assistant depuis six mois – entre autres coups d'un soir.

Sanji se souvient de ses premiers soupçons, après deux ans de mariage. Quand il a commencé à connecter les détails, les indices entre eux. Il a mis du temps à vraiment réaliser ce qu'il se passait. Lorsqu'il a confronté Law, ce dernier a réussi à lui faire accepter tous ses écarts avec une facilité déconcertante.

On est mariés. Ça veut dire que tu passeras toujours en premier. Tu n'as aucune raison d'être jaloux...

Est-ce qu'il a vraiment continué d'y croire, après ça ? Ou alors est-ce qu'il s'est menti à lui-même depuis, tandis que Law découchait de plus en plus et le cachait de moins en moins ?


-On va parler de ton mari ?

-Tu veux parler de mon mari ?

Zoro hausse les épaules. Ils se sont retrouvés ce midi au restaurant de l'hôtel. Aujourd'hui, Law a pris la peine de déjeuner avec Sanji, mais il a dû vite partir pour l'université donner sa conférence. Arrivé peu après, Zoro a pris sa place, puis ils sont sortis et ont marché au hasard jusqu'à un parc soigneusement entretenu, mais à peu près désert.

-Je sais pas, c'est pas rien quand même. Un mari.

-Non, c'est vrai.

-C'est pas n'importe qui, en plus.

-Haha. Tu t'es renseigné ?

-Tous le monde parle de lui à l'hôtel.

-T'exagère...

-À peine.

Zoro ne demande rien de plus. Il ne fait pas de commentaire sur l'infidélité manifeste de Sanji. Le cuistot aimerait lui en parler, mais il a trop peut d'être ridicule, d'en venir à l'apitoiement et aux larmes.

Ils s'assoient sur la pelouse soigneusement entretenue, sans se demander si c'est autorisé – de toute façon il n'y a personne pour les voir. Sanji se couche sur le dos, appuyé sur ses coudes.

-Tu aime Tokyo ? Demande-il.

-Pas plus qu'ailleurs. Toi ?

-J'aime bien, je crois. On se sent anonyme, ici.

-Je crois que je vois ce que tu veux dire.

Sanji reste surpris par leur calme. Autrefois, ils étaient incapable de rester assis comme ça, à discuter. Ça lui manque, quelque part, cette énergie débordante, leurs bagarres systématiques – toujours des excuses pour se toucher, pour se rapprocher. Il voudrait être à nouveau capable de lui sauter dessus et de rouler dans l'herbe avec lui. C'est comme ça qu'ils se sont embrassés pour la première fois, pendant l'été entre la première et la terminale. Leurs lèvres se sont jointes presque comme un accident au milieu de la lutte. Il se souvient de la main de Zoro écrasée sur la sienne, de leurs corps collés.

-Pourquoi tu me regarde comme ça ?

-Je pense à nous au lycée.

-Ah ouais ? Et alors ?

-Ça me manque, je crois.

Pourquoi ils avaient cessé de se voir, déjà ? Zoro avait changé de ville pour rejoindre un club d'escrime prestigieux. Sanji était entré dans la grande école hôtelière de la capitale. Ils s'étaient revus quelques fois... Quelques soirées à l'occasion, chez Luffy et ses frères, dans leur quartier natal. Ils continuaient de trouver des occasions de disparaître entre trois et cinq heures du matin, sur le vieux matelas du grenier, discrètement. Et puis un jour ils avaient cessé de se croiser.

Sanji sort son paquet de cigarettes de sa poche et en pince une entre ses lèvres, les yeux perdus dans la brume légère qui subsiste dans le parc. Il sent le regard de Zoro sur lui et sourit.


Ils passent la journée dehors. Ils se promènent, vont dans des magasins où ils n'achètent rien, goûtent quelques spécialités locales, finissent par entrer dans un cinéma au hasard pour regarder un film d'action en japonais auquel ils ne comprennent rien. Leurs langues se délient un peu, ils reprennent leurs anciennes habitudes, se moquent l'un de l'autre en se donnant des coups de coude, parlent de tout et de rien. Dans la salle obscure, Sanji laisse sa main s'égarer sur celle de Zoro en quelques caresses discrètes. Tout au long de la journée, l'épéiste tente de rester stoïque, mais il brûle d'envie de le toucher.

Sanji a changé et ça le perturbe. Il a cette tristesse qu'il ne prend pas la peine de dissimuler, ce désenchantement latent qui a l'air de lui avoir ôté toute timidité, toute fierté. Lorsqu'ils étaient plus jeunes, il avait toujours peur des réactions de Zoro, avançait prudemment, rougissait facilement. À présent c'est comme s'il n'avait plus aucune honte ni retenue, comme s'il agissait impulsivement, selon son envie du moment, sans vraiment réfléchir à ce qui suit. Ça le rend imprévisible – et, Zoro doit bien l'admettre, extrêmement attirant. La nuit de la veille se rappelle régulièrement à son souvenir par une contraction dans son ventre. Il n'avait pas ressenti ça depuis longtemps – est-ce qu'il a déjà ressenti ça seulement ?

Sur le chemin du retour à l'hôtel, Zoro craque. Il attrape Sanji par le poignet pour l'embrasser. Le cuistot se laisse faire avec un sourire.

-On rentre à l'hôtel ? Demande-il ensuite.

Son regard à travers son œil mi-clos donne à Zoro un frisson incontrôlable.

-Ouais.


Ils entrent dans l'ascenseur et Sanji enfonce la touche du douzième étage. Zoro s'étonne.

-On va dans ta chambre ?

-Non, il vaut mieux pas, mais j'ai besoin de mon chargeur de téléphone. On y passe vite fait et on monte ?

-Ok.

Mais à peine sorti de l'ascenseur, Sanji s'immobilise et attrape son poignet. Zoro a vu la même chose que lui. Plus loin dans le couloir, son mari vient d'entrer dans leur chambre, entraînant à sa suite un jeune homme au physique de mannequin.

Sanji souffle, l'air blasé.

-Tant pis pour le chargeur. Montons directement chez toi.

Zoro ne dit rien. Il retourne dans l'ascenseur et appuie sur la touche. Sanji a l'air parfaitement calme, mais il évite son regard.

-Il te trompe aussi, alors ? Finit quand même par dire l'épéiste.

Les portes s'ouvrent. Sanji a un petit rire en sortant dans le couloir.

-Il a commencé bien avant moi.

Il laisse Zoro passer devant pour ouvrir la porte de sa chambre. Une fois qu'ils sont tous les deux à l'intérieur, tout près l'un de l'autre dans l'espace exigu qui longe la salle de bain, il le regarde dans les yeux.

-Je l'avais jamais trompé jusqu'à ce qu'on se revoie, moi.

Zoro a l'impression que son cœur vient de manquer un battement. Il arrête de réfléchir et attrape à deux moins le visage de Sanji, l'embrasse et le pousse contre le mur derrière lui.

Ensuite, son torse chaud et un peu humide collé au sien, le sang qui afflue sur ses joues, ses cheveux blonds qui tombent en arrière sur le matelas, son souffle court et son regard bleu fixé sur lui, et ses mains qui lui agrippent le dos fort quand il gémit, le sentir jouir puis jouir en lui, serrer ce corps qui tremble entre ses bras, vouloir rester comme ça comme un seul être pour toute la vie peut-être.


-Pourquoi tu ne le quitte pas ?

-Oh. On parle encore de mon mari ?

Zoro a un léger soupir amusé. Il se redresse sur le lit. Sanji regarde son dos, ses cheveux emmêlés par l'amour. Il fait une petite grimace en se posant la main sur les yeux. Il a envie de faire l'amour à Zoro tout le temps, tellement leurs étreintes lui font tout oublier, tellement elles lui font quitter terre. Il voudrait qu'ils n'aient plus à quitter cette chambre d'hôtel, ou qu'une fois sortis tout ai disparu à l'extérieur.

Ouais, même son mari.

-C'est compliqué, tu sais, finit-il par répondre. Pendant longtemps, je me suis raconté des histoires...

-Longtemps ?

-Hum...

-ça fait combien de temps qu'il te trompe ?

-Un moment. Il m'a jamais vraiment avoué quand est-ce que ça a commencé... C'est le genre à se faire sucer par un autre le jour de son mariage avant d'aller te mettre la bague au doigt.

-Comment tu supporte ça ?

-Je...

Sanji se redresse à son tour et pose le menton sur l'épaule de Zoro, doucement.

-Je sais pas. J'ai commencé à faire des compromis et après...

Il entends Zoro soupirer.

-Tu sais, il n'y a pas que du mauvais dans notre relation, se sent-il obligé d'ajouter, comme pour se justifier. On a été heureux... Et puis Law est tellement... Enfin, il est tellement plus grand que moi...

-Abruti.


Zoro aimerait lui dire. Il aimerait lui dire tu ne mérite pas d'être trompé. Il aimerait lui dire personne n'est plus grand que toi. Il aimerait peut-être lui dire aussi moi je ne te tromperais jamais, je ne te ferais jamais sentir comme si tu n'étais pas assez.

Il ne peut pas, évidemment. Même s'ils se disent beaucoup plus les choses que lorsqu'ils étaient au lycée, il y a toujours des limites. Et puis il est bien conscient que tout ça va trop vite. Il se sont revus pour la première fois il y a quelques jours seulement. Pourtant sa seule envie actuellement -à part faire l'amour avec lui dans une chambre d'hôtel – c'est mettre Sanji dans son sac et fuir cet endroit, ce pays, ce mari, le ramener chez lui et qu'on en parle plus.

Si seulement ça pouvait être aussi simple...


Voilà, j'espère que ça vous a plu!
J'ai conscience que les personnages sont légèrement OOC, mais j'ai écrit ça en considérant que ce ne sont pas les Zoro et Sanji de 21 ans que l'on connaît, et que même si ce sont toujours les mêmes au fond ils ont eu le temps de changer. J'espère que vous avez trouvé ça cohérent!
Je m'excuse d'avance auprès des fans de Law. Je l'adore aussi, mais j'aime bien jouer sur l'ambiguïté de ce genre de personnage en les rendant un peu négatifs.
Je ne sais pas encore trop quand est-ce que la suite arrivera, même si elle est bien entamée. En tout cas j'attends vos retours avec impatience !