OS se déroulant après l'album 'La Vallée des bannis'
Les choses étaient toujours ainsi.
Personne ne se rappelait jamais de son nom. Tout le monde répétait sans arrêt le nom de son ami journaliste et ajoutaient:
«Et son collègue.» sans les oublier les divers «Et son partenaire.», «Et son compère.» ou encore «Et son compagnon de route.»
Personne ne se souvenait jamais de son nom. Il ne faisait que signer ces articles de reportages impressionnants dont l'autre était toujours la tête d'affiche.
En effet, Spirou était toujours loué pour ses voyages lointains, son courage, son caractère casse-cou et son intégrité. Il récoltait toujours tous les honneurs tandis que son ami restait en permanence dans l'ombre. Cela au point que les gens ignoraient jusqu'au prénom de Fantasio. Pourtant, Fantasio travaillait autant que Spirou et, bien qu'il fut moins adroit que ce dernier, s'était révélé aussi bien compétent sur le terrain que dans l'écriture. Spirou était même allé jusqu'à lui dire que qu'il écrivait mieux que lui. Spirou avait même dit, lors de diverses conférences, qu'il ne serait jamais celui qu'il était à ce jour sans Fantasio.
Cependant, même si Spirou le traitait comme son égal et, qu'à ses yeux, il avait autant de mérite de lui, Fantasio n'avait pas pu s'empêcher d'éprouver de la jalousie, qu'il pensait avoir, à son égard. Après chacun de leurs exploits à travers le monde, Spirou avait été vigilant et vaillant, Fantasio maladroit au point d'avoir gaffer et failli faire tourner au vinaigre divers périlleux voyages aux quatre coins du globe.
Il avait donc eu beaucoup de mésestime de lui-même parce qu'il se demandait s'il était un poids pour Spirou et avait voulu plusieurs fois lui demander si c'était le cas. Mais il connaissait assez bien pour Spirou pour savoir qu'il aurait été très gentil et aurait voulu lui dire un mensonge rassurant pour lui redonner de l'estime de lui-même. De plus, Fantasio savait également que son ami était trop modeste au point d'être très gêné quand on vantait son courage.
Mais même s'il le connaissait bien, Fantasio n'avait pas pu s'empêcher de se demander si Spirou agissait ainsi, non pas pour lui donner confiance en lui, mais par hypocrisie afin de se donner bonne conscience alors qu'en réalité, il rêvait de le voir disparaître pour qu'il ne soit plus en gêne lors de ses confrontations contre de dangereux criminels.
Cependant, il avait gardé tout ça au plus profond de son être parce qu'il avait honte de sa jalousie car il se disait que bien peu auraient la chance d'avoir à ses côtés quelqu'un qui le réconfortait quand il allait mal.
Hélas, ou peut-être heureusement, un jour, tout avait basculé.
.
Cela s'était passé lors de leur mésaventure dans la Vallée des bannis. Fantasio s'était fait piquer par un insecte l'ayant rendu fou et en colère.
Même s'il ne souvenait de rien après avoir été guéri, il avait vu de nombreuses traces de coup et des cicatrices sur le corps de Spirou après qu'ils se furent tous deux échappé et que Fantasio avait retrouvé la raison par miracle. Et même si Spirou avait fait comme si rien ne s'était passé et que tout irait pour le mieux afin de ménager son partenaire et éviter de lui parler de ses actes violents, il avait du mal à sourire en présence de son compagnon. Fantasio avait compris qu'il lui avait fait du mal. Pas seulement physiquement mais, également, moralement.
Il avait donc compris que Spirou avait besoin de parler et l'avait incité à le faire malgré la réticence du jeune journaliste. Pour cela, il avait attendu qu'ils furent dans une chambre d'hôtel et que Spirou se fut assis sur son lit. Fantasio s'était assis à ses côtés et s'était approché.
«-Spirou, je vois bien les blessures sur ton corps. Et je vois aussi que tu ne vas pas bien.
-Quoi? Mais non je…
-Ne me mens pas, ça te fera encore plus de mal. Dis-moi ce qui s'est passé. Et, surtout, dis-moi la vérité.»
Tout d'abord, Spirou avait posé ses jambes sur le lit et pris ses genoux entre ses bras. Ses lèvres avaient tremblé tandis que Fantasio avait entouré ses épaules d'un bras. Spirou avait été silencieux pendant un long moment. Le journaliste blond avait pensé qu'il n'aurait pas dû agir comme il l'avait fait et s'était apprêté à partir mais Spirou avait soupiré et s'était décidé à parler.
«-Après t'être fait piqué, tu t'es jeté sur moi et tu as hurlé de colère. Mais, surtout, tu as dit ça
Des années qu'on est sur le même bateau. Toi en première classe, moi en classe cataclysme. Qu'il se commette un sale coup et j'en prends plein la bougie! Toi, tu t'agrafes les médailles! Traversons le désert, tu t'en sors bronzé comme un dieu et moi le nez grillé à l'huile solaire.
Puis tu…tu…tu m'as…tu m'as…frappé…donné…des…des coups de pieds. Je…je…je n'ai pas eu d'autre choix que de…de…me…défendre…alors j'ai dû te…te frapper aussi. Quand j'ai été…seul…j'ai cherché un moyen pour qu'on s'échappe. Mais c'était…difficile parce que tu…tu revenais à la charge. Tu as même…même…même…»
Tandis qu'il parlait, Spirou tremblait de tous ses membres tandis que Fantasio n'arrivait pas à croire ce qu'il entendait. Il avait frappé son partenaire? Lui avait fait ça? Alors qu'il s'était juré d'être toujours présent pour lui et ne jamais lui faire de mal? Lui qui avait juré d'être son confident et de l'aider dans les pires situations?
Fantasio s'était senti monstrueux. Il avait eu envie de se maudire, de se frapper, de se dire à lui-même qu'il n'était qu'un monstre mais avait gardé son sang-froid et été fort pour Spirou qui avait eu besoin de se confier avait été primordial. Il s'était retenu de hurler contre lui-même, de s'insulter et avait regardé Spirou en demandant d'une voix douce:
«-Qu'est-ce que j'ai fait?
-Tu as…tu as…, avait dit Spirou en bégayant, Tu as…Tu as essayé de me brûler vivant.»
Une fois de plus, Fantasio s'était retenu de hurler contre lui-même. Mais il s'était aussi intérieurement traité de monstre et, surtout, d'assassin. Assassin qui avait trahi la confiance de son fidèle compère et qui méritait un châtiment. Spirou avait continué de parler et Fantasio avait dû garder toute maîtrise de lui-même afin que son partenaire gardât la force de continuer ses confidences.
«-J'ai pu t'échapper mais tu continuais à me poursuivre. J'avais peur qu'à un moment ou un autre, nous serions obligés de nous entretuer à cause de maudit moustique. Et quand il m'a piqué, je m'étais dit que…que si je n'arrivais pas à nous sortir de la Vallée, il aurait été mieux que je…meure dans cette dernière. Quand nous en sommes en sortis par miracle, tu as…tu as failli…failli réussir à me tuer. Mais, au dernier moment, même fou, tu ne l'as pas fait. Comme si…comme si tu avais encore eu un brin de conscience et de lucidité à ce moment-là.»
En réalisant que ce lien si précieux que vous avez créé avait sauvé la vie Spirou, Fantasio se sentit heureux. Même la folie et la colère n'avaient pas été assez fortes pour briser votre complicité et ce lien magnifique entre vous. Peu importe les situations dans lesquelles vous vous mettiez, vous seriez toujours plus forts face à n'importe quelle situation car ce lien entre vous ne se détruirait jamais.
N'y tenant plus, Spirou avait caché sa tête dans ses genoux et éclaté en sanglots. Ayant compris qu'aucune parole réconfortante ne servirait à quelque chose, Fantasio avait pris Spirou entre ses bras et bercé comme un enfant. Il avait fallu plusieurs minutes pour que les pleurs de Spirou se calmèrent mais il avait eu besoin d'un cocon protecteur pour soulager sa terrible douleur.
«-C'est fini, avait dit Fantasio une fois que les sanglots de son partenaire s'étaient calmés, Nous avons réussi à nous en sortir et nous vivrons encore bien des choses ensemble. Nous ferons de superbes articules, de beaux reportages, nous voyagerons, rencontreront des gens. Nous ferons pleins de choses, tu verras.
-Fantasio, est-ce que je te rends malheureux?»
Le journaliste blond s'était attendu à tout sauf à une telle question. Il avait été tellement surpris qu'il n'avait pas su quoi répondre face à de telles paroles. C'était Spirou qui avait eu besoin de réconfort, de parler, de se confier pour aller mieux. Et pourtant, il avait demandé à son compère s'il avait fait quelque chose de mal au point de ne plus penser à lui-même. Au bout d'un certain temps, Fantasio avait réalisé pourquoi Spirou lui avait demandé ceci.
C'était à cause de ce qu'il avait dit après que le moustique l'eut piqué. Il lui avait fait dire ses pensées profondes: son amertume d'être ignoré, d'être toujours dans l'ombre de son compère, sa jalousie qu'il n'avait pas voulu montrer parce qu'il avait su, au fond de son cœur, que Spirou ne cherchait pas à attirer l'attention mais juste de faire son travail et agir selon ce qu'il estimait être juste. Mais ce manque d'attention lui avait été si insupportable que, lorsque le moustique avait fait surgir ses pires démons, c'était Spirou avait subi la boule de colère s'étant formée dans le cœur de Fantasio car Spirou était le seul face à Fantasio dans cet environnement isolé et hostile d'où ils pensaient ne pas sortir.
Mais, en réalité, Fantasio avait réalisé à cet instant que cette colère et cette jalousie n'étaient pas envers Spirou mais envers les gens et les médias pour qui il comptait pour du beurre. Pire, pour qui il n'existait même pas. C'était insupportable et injuste. Mais, au fond, est-ce que c'était si important? Est-ce que ces mêmes gens et ces mêmes médias valaient-ils la peine que Fantasio fût amer envers eux?
«-Fantasio…»
Spirou avait attendu une réponse précise. Fantasio savait qu'il devait lui en donner une car Spirou ne renonçait jamais à une question une fois qu'il l'avait posé. Fantasio avait décidé d'être franc sans être brusque car même si lui-même avait besoin de dire ce qu'il ressentait, il devait le dire sans se mettre en colère afin que Spirou n'eût pas à se blâmer de choses dont il n'était pas responsable.
«-Spirou, tu ne me rends pas malheureux. Au contraire, je crois que je ne serais pas heureux si je ne t'avais pas à mes côtés. Quoique j'ai pu dire, ça n'était absolument pas contre toi. C'est juste qu'il y a des moments où des fois, j'ai eu l'impression que j'étais plus un poids qu'autre chose pour toi car j'ai souvent failli faire tourner des situations à la catastrophe parce que je suis maladroit. Tu as même été obligé de me sauver plusieurs fois à cause de gaffes que j'ai fait.
Mais il n'y a pas que ça. J'ai souvent l'impression de compter pour du beurre aux yeux des autres ou même que je n'existais pas parce que l'attention était toujours tournée vers toi. C'est toujours Spirou qui a la gloire et on ne retient que son nom même si Fantasio signe aussi les articles et les reportages. Mais ça n'est pas du tout de ta faute. C'est uniquement de celle des autres qui adorent les casse-cous et les admirent davantage que les maladroits. Seulement, malgré moi, je ne peux pas m'empêcher…d'en avoir assez d'être toujours le second.»
En entendant ces mots, Spirou avait réalisé tout le mal-être qu'éprouvait Fantasio et, surtout, ne l'avait pas montré parce qu'il voulait que son partenaire allât bien et gardât son assurance. Et cela, au prix de se négliger. Comment cela avait-il pu être possible? Alors que Fantasio l'avait parfois empêché d'agir de manière trop impulsive et l'avait même aidé à mettre des criminels hors d'état de nuire!
Et sans lui, il serait probablement mort noyé dans la Vallée.
Spirou avait eût envie de dire quelque chose. Que Fantasio se trompait, qu'il était courageux, que sans lui, son existence n'aurait été ce qu'elle était. Mais il n'avait rien fait de tout cela.
Sans réfléchir, sans se poser de questions, sans avoir prévu quoi que ce fût, il s'était emparé du visage de Fantasio et avait dit:
«-Pour moi, tu ne seras jamais le second.»
À cet instant, il s'était saisi des lèvres de son compagnon et l'avait embrassé avec fougue. Tout d'abord, trop surpris, Fantasio n'avait pas su comment réagir. Face à ce manque de réaction, Spirou avait failli se détacher des lèvres de son partenaire mais, pris d'une impulsion inexplicable, celui-ci l'avait embrassé à son tour.
Au fil des minutes, les vêtements s'étaient envolés et avaient atterris sur le sol. Le baiser s'était transformé en une succession de suçons tandis que les deux journalistes avaient poussés des gémissements de plaisir. Il avait fallu bien de temps avant que le pénis de Spirou ne durcisse et qu'un liquide en surgisse brutalement tandis que Spirou avait hurlé. Fantasio s'était alors jeté sur le membre droit comme un I et goûté la gâterie qui s'était offerte à lui. Pour faire du bien à Spirou, Fantasio avait fait goûté à son compagnon sa propre semence. Ce qui les avait fait rire tous les deux. Pour le remercier de cette «friandise particulière», Spirou avait demandé à Fantasio de se relever. Celui-ci n'avait pas discuté tandis que Spirou lui avait demandé de fermer les yeux. Il avait fallu à peine quelques secondes pour que Fantasio sentit les lèvres de Spirou s'emparer de son membre qui n'allait pas tarder à faire la même chose que celui de son compagnon.
Pour la première fois de leurs vies, ils avaient été dans le même lit, s'étaient livrés au plaisir de la chair pendant plusieurs heures avec délectation. Ils s'étaient surpris à se découvrir très gourmands au lit et s'étaient goûtés comme des sucreries. Ils avaient été tellement heureux que lorsque des clients de l'hôtel avaient frappés à leur porte en grommelant:
«-Oh! C'est pas bientôt fini ce boucan?»
Ils les avaient totalement ignorés au point que les grincheux s'étaient résignés à ne rien faire et supporté leur «boucan» pendant presque toute la nuit.
De longues heures après, épuisés, Spirou et Fantasio s'étaient allongés dans le lit. Il y en avait bien un deuxième à côté d'eux car les deux compagnons avaient demandé une chambre avec deux lits mais les deux avaient préféré partager un même lit pour se sentir apaisés et, surtout, aimés.
Ils ne se l'étaient pas dit de vive voix avant de le découvrir à travers l'impulsion soudaine mutuelle qui les avaient poussés à se livrer mais ils l'avaient compris. Chacun des deux voulut dire quelque chose à l'autre mais était tellement fatigué qu'il n'était pas arrivé à parler.
Finalement, c'était Spirou qui avait eu la force de tourner la tête vers Fantasio et dire:
«-Je t'aime Fantasio.»
Fantasio avait tourné la tête à son tour et regardé Spirou dans les yeux en souriant. Il lui avait fallu très peu de temps pour dire
«-Je t'aime aussi Spirou.»
Et les deux avaient partagés un autre baiser juste avant de s'endormir.
.
Ce matin-là, Fantasio fut réveillé par une bonne odeur de café. Il avait toujours eu le sommeil lourd et seul quelque chose de brutal comme une odeur intense ou un contact avec quelque chose pouvait le réveiller. Ou plutôt quelqu'un.
Bien qu'il ne vit pas, il comprit qu'il s'agissait de son conjoint. Le journaliste blond ouvrit les paupières pour voir les jolis yeux noisette et les cheveux rouges de son amant.
Spirou avait toujours été plus matinal que Fantasio qui aimait les grasses matinées. Cependant, il était toujours prêt à les mettre de côté quand Spirou désirait se lever plus tôt. Après tout, cela en valait la peine car ça lui permettait de prendre le petit déjeuner en même temps que lui; car, oui, Spirou adorait prendre des petits-déjeuners au lit avec Fantasio. À cet instant, il portait un plateau d'œufs à la coque, de jus d'orange, de croissants et de pain au chocolat répartis soigneusement.
«-Bonjour, dit Spirou en déposant le plateau sur le plateau
-Bonjour, dit Fantasio à son tour en s'asseyant sur le lit tandis que le journaliste roux le rejoignait»
Tandis que Fantasio commençait à avaler son petit-déjeuner préparé avec amour par son amant, celui-ci sortit une photo de ses vêtements et la tendit vers son compagnon.
«-Regarde, dit Spirou»
Fantasio fit ce que le journaliste roux lui demandait. Surpris, il reconnut la photo de l'hôtel où les deux amants avaient échangés leurs premiers ébats. Un sourire de tendresse se dessina sur les yeux du blondinet.
«-Je l'ai retrouvé alors que je rangeais un peu la maison juste avant de faire cuire les œufs, dit Spirou d'une voix émue
-C'était le plus jour de ma vie, dit Fantasio d'une voix douce»
Les deux journalistes regardèrent la photo pendant plusieurs instants le sourire aux lèvres en se remémorant leur délicieuse première nuit dans le même lit. Jamais ils ne l'oublieraient. C'était si magique qu'ils n'avaient pas eu envie que cette nuit s'arrêtât. Au fil du temps, il y en avait eu tant d'autres qu'ils disaient être les plus heureux des humains.
Tandis qu'ils continuaient d'observer la photo, Fantasio ne put s'empêcher de poser une question.
«-Spirou?
-Oui?
-Tu sais, je me suis souvent demandé ce qui t'avais poussé à m'embrasser ce soir-là.
-Vraiment? demanda le jeune homme roux surpris
-Oui.
-Et bien, dit Spirou après quelques instants, Lorsque tu as dit que tu en avais marre d'être toujours le second, je me suis rendu compte que, pour moi, tu avais toujours été le premier. Cela au point que j'ai réalisé que je t'aimais. J'avais très peur de ta réaction mais j'avais compris que si je ne te disais pas que je t'aimais, j'allais le regretter toute ma vie.
-Tu es tellement romantique, dit Fantasio touché en déposant un bref, mais doux, baiser sur les lèvres de Spirou
-Et toi? demanda Spirou à son tour, Qu'est-ce qui t'a poussé à me laisser t'embrasser?
-Et bien, dit Fantasio à son tour après un certain temps, J'ai d'abord senti que ton geste ne me déplaisait pas. Et quand tu as commencé à arrêter, je voulais que ça continue. Alors, j'ai seulement suivi mon instinct et réalisé que je t'aimais à ce moment-là.»
Sur ces mots, Spirou déposa sa tête sur le torse de Fantasio sans cesser de sourire.
« -Je t'aime, dit Spirou
-Moi aussi, je t'aime, dit Fantasio à son tour, De tout mon cœur.»
Sur ces mots, les deux tournèrent la tête l'un vers l'autre et s'embrassèrent. D'abord doucement puis de manière beaucoup plus gourmande. Quand Fantasio commença à mordiller le cou de Spirou, les deux comprirent que le petit-déjeuner ne les intéressait plus mais, surtout, qu'il fallait éviter de salir les draps s'ils voulaient encore profiter du lit. Spirou se leva et plaça le plateau sur le haut d'une étagère avant de rejoindre à nouveau son amant au lit.
Avec le temps, rien n'avait changé. Fantasio vivait encore dans l'ombre de Spirou. Il continuait de signer et faire modestement des reportages desquels Spirou était toujours la tête d'affiche. Les gens ne cessaient dire «Spirou et son collègue.», «Spirou et son partenaire.», «Spirou et son compère.» ou encore «Spirou son compagnon de route.». Mais Fantasio ne faisait plus attention à tout ceci car il avait compris que ça n'était pas important. Pourquoi? Parce qu'il avait quelque chose que tous les admirateurs du journaliste roux n'auraient jamais. Il avait l'amour de Spirou. Spirou qui ne cessait de se montrer attentionné envers lui en lui amenant des repas au lit ou en cuisinant avec lui. Spirou qui était toujours attentif à ce que Fantasio ressentait et écoutait ce qu'il disait. De plus, il était toujours le compagnon d'aventures du journaliste roux duquel il savait qu'il ne l'abandonnerait jamais.
Bref, il avait l'amour de Spirou. Spirou qu'il aimait par-dessus tout, avec lequel il passait une bonne partie de son temps au lit. Spirou qui se confiait à lui quand quelque chose le rendait triste; et qui l'écoutait également quand Fantasio était mélancolique.
Et grâce à tout ceci, Fantasio avait réellement compris que Spirou disait toujours la vérité quand il disait qu'il ne serait rien sans lui et, surtout, que même si Spirou n'avait pas la gloire qu'il avait, il serait toujours heureux car l'essentiel était que Fantasio fût avec lui. Mieux encore, Fantasio avait compris que si Spirou n'avait que la gloire sans lui à ses côtés, il serait très malheureux car il voulait, avant tout, être à ses côtés.
Et Fantasio ne cessait de se promettre d'être aux côtés de Spirou pour toujours.
