08/10/23 NDA : Bonsoir à tous et pardon pour l'attente. Je fais au mieux pour avancer sur plusieurs fronts en même temps, et il y a l'IRL aussi. Quoi qu'il en soit, je vous offre ce chapitre, avec beaucoup de sentiments et de drama, mais l'aventure continue !

Une bonne lecture à tous, en espérant que ça vous plaise. Et n'hésitez pas à poster des reviews (quitte à patienter à cause des bugs du site)


Chapitre 12 : Les larmes d'Hylia.

Se tournant vers sa compagne, à peine une seconde après le départ de Firone, Link fut estomaqué de la voir aussi fragile et brisée. Sa main droite couvrait sa bouche sous le voile rouge, et elle tremblait comme une feuille à l'automne, prête à tomber dès la moindre secousse. Secousse qu'elle subissait d'ailleurs, vu les hoquets qui l'agitaient. Un sanglot terrible qui allait sans cesse, l'empêchant de reprendre son souffle. Link avait eu raison. C'était sa disparition qui l'avait blessé.

Et son retour qui la chamboulait totalement.

« Auryn… J'ai voulu te le dire… je… »

« T'avais la trouille, oui ! » Assura Midona en réapparaissant dans son ombre.

« La ferme ! » Gronda le toalien en s'agenouillant devant la jeune femme. « Auryn… Je… Tu avais raison, et je suis un abruti. Tu as toujours raison, d'ailleurs. Tu voulais me protéger, et moi j'ai foncé dans le tas. C'est pour ça que j'ai eu peur, et n'ai rien dit. Je… » Il déglutit, aussi malheureux qu'inquiet. « Je ne voulais pas que tu me voies comme un monstre, ce que je suis devenu… Ce loup… Qui peut tuer… Qui t'a blessé… » Link tendit la main vers elle, pour la poser sur son épaule, mais subitement, elle se recula, secouant la tête de gauche à droite.

« Non… Non… NON ! »

« Auryn… Pardonne moi… »

« Non ! Tu étais mort ! Mort ! Et là tu… Tu ne peux pas. Ce n'est pas possible… » Tentant de se relever, ses jambes ne portèrent pas le reste de son corps, et elle s'écroula de nouveau dans l'eau.

« Auryn ! » Cette fois, ignorant ses cris, il se saisit d'elle et la serra contre son torse.

« Non ! Lâche-moi ! Arrête ! Tu es mort ! Tu étais… Tu ! » Se débattant comme un beau diable, elle ne parvint pourtant pas à le faire lâcher-prise.

La main à l'arrière de son crâne, frôlant les plumes de sa coiffe et l'appuyant contre son cou, Link se retrouva assis à bercer celle dont il était tombé amoureux. La terreur dans ses yeux lui avait fait mal, parce que c'était forcément sa nouvelle nature qui y était pour quelque chose, n'est-ce pas ? Pourtant, elle ne le fuyait pas pour ça. Elle n'arrêtait pas de répéter qu'il était mort, qu'il ne pouvait pas être là. Et il devait bien admettre qu'il ne comprenait pas pourquoi elle réagissait aussi mal.

Tout comme lui, elle avait entendu le discours de l'être de lumière, alors pourquoi est-ce que son retour lui paraissait tant impossible ? Il resserra sa prise sur elle, la bloquant pour de bon et glissant son visage contre sa nuque, frissonnant au contact du bijou qui ornait son cou.

« Je suis là… Avec toi… Et je ne te laisserai plus… » La princesse de l'entre-deux cessa de se battre et éclata pour de bon entre ses bras.

« Pourquoi… Pourquoi tu me fais ça… J'étais résignée… Je ne peux plus… Je ne peux pas mourir seule… »

« Tu ne mourras pas, et tu ne seras pas seule. Je te le promets, Auryn. Peu importe le pouvoir qu'on me donne, ou la tache que je dois accomplir, je ne te laisserai pas. Jamais. » Il la força à relever un peu la tête, et sa main vint essuyer les larmes qui dévalaient le haut de ses joues pour s'échouer sur son voile rouge.

« Link… Je ne veux plus te perdre… » Finit-elle par déglutir lourdement. Profitant d'un retour au calme, il libéra l'une de ses mains pour tirer sur le nœud du voile et libérer le bas de son visage.

« Tu ne me perdras plus. Je t'en fais la promesse. » Il la rapprocha de lui pour embrasser son front avec tendresse, ce qui fit redoubler les pleurs.

« Tu ne sais pas ce que tu dis… Arrête… »

« Je suis sincère. » Et il prit son visage en coupe, la forçant à le regarder dans les yeux pour de bon. « Auryn, écoutes moi bien. » Les turquoises fuyants furent obligés de rencontrer les saphirs. « Je t'aime, Auryn… Depuis que je t'ai entendu conter cette histoire sur le rocher de guet, et un peu plus à chaque rencontre. J'ai cru mourir quand je t'ai vu partir vers la forêt, et je comprends parfaitement ce que tu as ressenti en me voyant disparaître. »

« Link je… » Il la coupa en posant son index sur ses lèvres.

« Je sais. Tu as menti, sur pleins de sujets. Même avant que je ne devienne un monstre… Mais je sais que tu avais une bonne raison, et je ne t'en veux pas. Je te connais, Auryn, j'aime ton sourire autant que tes larmes. Surtout que personne n'a jamais pleuré pour moi comme tu l'as fait. » Elle renifla piteusement devant cette remarque, et lui, il lui offrit un petit sourire amusé. « Je t'aime… Toi et tes coups de gueule, ton coté autoritaire, tes histoires et tes secrets. Tu me diras les choses en temps venus, quand tu seras prête, ou peut-être jamais. Qui sait ? » Il se racla la gorge. « Ce que j'essaie de dire… C'est que héro des déesses, ou simple berger… Mes sentiments pour toi ne changent pas… » Et cette fois, il la laissa voir sa crainte du rejet. « Est-ce que… Est-ce que toi, tu veux toujours de moi… ? Même si je suis un loup monstrueux ? »

« Tu étais plutôt mignon… Pour un loup… » Avoua Auryn d'une petite voix, avant de renifler, voulant cacher ses larmes.

« Je suis presque rassuré. » Et si ça l'amuse un peu, il reste tout de même inquiet. Elle a voulu le fuir dés qu'elle l'a vu. « Est-ce que tu veux toujours de moi… ? » Il se crispa, parce que la réponse semblait ne pas vouloir venir. Et pendant un moment, il douta. Allait-elle lui demander de ne plus la revoir… ? « Je ne t'en voudrais pas… Tu le sais… Tu n'as qu'un mot à dire et je m'en fais. Je te lâche tout de suite même… » Sauf que s'il lui lâche les bras, elle, elle s'accroche désormais à ses épaules.

« Tu es le seul… » Un aveu à mi- mot.

« Pardon ? » Il a beau avoir l'audition d'un loup, cette fois, il demeure incertain.

« Tu es le seul que j'aime… Link… Loup, homme, héros… C'est toi… C'est tout… » Et finalement, c'était encore pire. Elle allait devoir le trahir… Et quand il la haïrait pour avoir pris tout ce qu'il a de plus cher, elle serait contrainte de mourir pour ce monde qu'il aime.

Il souffrira probablement moins, si je le blesse juste avant la fin… Fut sa seule pensée pour l'avenir.

Le soulagement et le bonheur étaient visibles sur le faciès de l'ancien berger. Et dans un soupir, il colla son front contre le sien.

« Tu m'as manqué… Même si tu étais là, ce n'était pas pareil… Tu ne savais pas et… » Il rouvrit brusquement les yeux, et se pencha sur le haut de sa poitrine, n'hésitant absolument pas à effleurer sa peau, comme s'il n'y avait qu'eux dans la clairière. La plaie était encore fraiche, et la métisse frissonna à son contact. « Est-ce que c'était… ? » Il n'eut pas besoin de terminer sa phrase.

« Oui… » Le toalien se ferma un peu.

« Je ne l'ai pas… Moi… » L'ancienne coutume voulait que les deux époux se tatouent la rune au même endroit. Il comprenait pourquoi elle s'était marquée, mais la rune les séparait, à présent qu'il était officiellement en vie. Elle rosit, avant d'esquisser une sorte de sourire grimaçant.

« En fait… Si… Plus ou moins… » Il haussa un sourcil.

« Je t'écoute… »

« Je… » Elle ne pouvait pas véritablement lui expliquer comment elle avait récupéré la galactique sword, et encore moins lui dire ce que cette lame représentait. Cependant, après les mots de l'esprit, il était évident qu'il allait devoir se rendre au temple du temps. Donc il allait récupérer Excalibur, et donc… Elle était condamnée. « J'ai… J'ai gravé cette rune sur moi, et dans le cuir de ton bracelet de force… » Il tiqua, avant de dévoiler un sourire.

« Alors tu l'as bel et bien sur toi ! » Cette fois, elle se mordilla la lèvre.

« Non. Je l'avais… Mais… » Un demi mensonge ferait moins de mal qu'un entier. « Quand j'ai vu que je le portais… ça m'a… J'ai repensé à notre dernière nuit, et je n'ai pas supporté… Je… C'est pour ça que j'ai gravé la rune, mais je l'ai laissé… »

« À la maison ? » Ce qui était bien, avec Link, c'était qu'il ne doutait absolument plus de ses sentiments. Il partait toujours du principe que sa cabane était la leur. Leur cocon. Et ça la touchait, bien trop…

« Non… » Elle soupira, et détourna les yeux. « Là où je me trouvais lorsque tu es venu me chercher… dans la tempête. »

« Les ruines… »

« Oui. Les ruines du temple du temps… » La réalisation se fit. Un rappel qu'elle avait jeté la tempête qui avait presque failli le tuer. Et elle s'était visiblement enfuie au temple. Le temple dans lequel il devait se rendre précisément. Il fronça les sourcils, doutant de nouveau.

« Est-ce que tu savais… ? Qui j'étais… ?» Auryn secoua la tête.

« Non. » Elle fut prise d'une sorte de rire larmoyant, mais vint essuyer son visage par réflexe. « Si j'avais su, je ne t'aurais pas cru mort derrière ce putain de mur, j'aurais simplement cherché à te rejoindre. » Il fut soulagé.

« Tu m'as retrouvé. Et je ne te laisserai plus jamais… » Il se pencha sur elle, déposant un baiser particulièrement chaste sur ses lèvres, sans savoir que cette annonce lui brisait le cœur, et chercha à se relever pour l'aider.

Link ne lui avait jamais menti, hormis par omission, sous sa forme de loup. Aussi, elle trouvait ça particulièrement horrible que le destin le force malgré lui, à mentir à ce sujet. Elle récupéra cependant sa main et se laissa tirer sans même faire d'effort. Finalement, la voilà, l'origine de sa force et de sa vitesse. Le héros élu des déesses. C'était risible, finalement. Tous deux avaient été choisis par ces mêmes déesses, l'un pour protéger le monde, l'autre pour le purifier. Mais aucun des deux ne pourraient subsister en présence de l'autre.

Il n'avait cependant pas lâché sa main, caressant le dos de cette dernière de son pouce. Il la couvait du regard, d'ailleurs, comme s'il attendait quelque chose. En fait, il avait ce petit sourire en coin, qui semblait littéralement savoir ce qu'elle allait dire. Elle craqua.

« J'ai douté quand tu étais loup, oui… » Le sourire triomphant qu'il arbora à la suite, lui donna envie de le frapper.

« Je le savais ! » Il se rassombrit cependant. « Après t'avoir mordu… Tu m'as touché les oreilles, et tu étais… tu ne me regardais plus de la même manière. » il soupira. « Je ne voulais pas te faire de mal… Je suis désolé. »

« Cette blessure, tu n'en es pas responsable, c'est moi qui nous aie dévié, sinon je t'aurais transpercé, et je ne le voulais pas, même si je ne te connaissais pas. Tu ne méritais pas de mourir. Alors tu n'as pas à t'en vouloir pour ça. » Assura Auryn en revenant vers lui.

« Tu ne m'en veux vraiment pas ? » Elle secoua la tête.

« Non. Je ne t'en veux pas. Je n'arrêtais pas d'y penser… à toi… Quand on s'est vu au palais, tes yeux… Puis tes oreilles lorsqu'on s'est battu pour faire diversion. Tu avais toujours les anneaux… Ton bracelet de force n'était que le premier souvenir d'une longue suite. »

Link se permit de la saisir par la taille et la rapprocha de lui, collant sa poitrine contre son torse. Il étira un sourire un peu moqueur, et grignota les centimètres qui séparaient leurs visages.

« Finalement, j'ai bien fait de ne pas te dire qui j'étais sous ma forme de loup, je n'aurais pas pu faire ça à nos retrouvailles. » Et sans plus de mot, il captura ses lèvres avec autant de passion que s'ils ne s'étaient pas vu depuis des mois.

Le raclement de gorge de Midona n'eut absolument aucun effet sur la vigueur du jeune homme.

Auryn, plaquée contre son torse, avait enroulé ses bras autour du cou du toalien et s'y accrochait comme à une bouée. Il était son air, et même si sa destinée n'était pas de finir sa vie avec lui, ce serait mentir que de dire qu'elle n'avait pas rêvé de ce moment pendant des jours. Que son souffle ne lui avait pas manqué, et sa chaleur non plus.

Un nouveau raclement de gorge de Midona finit par les faire rompre le baiser, mais pas se lâcher. Auryn pleurait encore malgré elle, et Link vint essuyer les larmes qui coulaient sur ses joues.

« Auryn, mon amour… acceptes-tu d'être à mes côtés pour cette mission, et pour toute notre vie ensuite… ? » Une demande officielle.

Une demande qu'elle ne voulût jamais entendre à cause de leur destin cruel, et pourtant, que chacun de ses rêves avaient murmurés. Le sanglot menaça de revenir à la charge, mais elle força. Par habitude, son visage se coucha dans la main qui le couvrait, appréciant la caresse qu'offrait le nouveau héro.

« Je t'ai appartenu dès notre premier diner, Link… » Pas une vraie réponse, mais elle suffit à faire sourire le garçon.

« Je savais que tu ne pourrais pas résister à ma cuisine. » Et après un petit rire mutin, il vint l'embrasser de nouveau, plus doucement. « Allons sauver les enfants et récupérer la preuve de notre union, d'accord… ? »

Auryn hocha la tête, pourtant, elle eut du mal à le lâcher pour de bon, ses mains frôlant ses épaules, puis ses bras, ses poignets et ses doigts, jusqu'à devoir le quitter. Link se pencha de plus belle, embrassant le haut de sa tête, avant de s'écarter, à la fois content et confiant.

Ils se mirent en route, toujours à pieds, vu qu'Epona était encore blessée des derniers ennuis, et Naboo… Perdu dans la plaine d'Hyrule. Bien qu'Auryn puisse l'appeler si elle le désire, l'étalon risquait de mettre plusieurs heures avant de les rejoindre. Et s'ils bougeaient en même temps, les retrouver serait difficile.

Passant entre les fourrés, ils aperçurent la petite boutique ambulante de Kikolou, et Link plissa le nez. Son odorat lupin n'appréciait pas des masses l'odeur de l'huile à brûler. C'est au bout de plusieurs reniflements qu'il vit rouge. Auryn lui tendait le voile qui couvrait son visage plus tôt, et il le récupéra. Le tissu sentait comme elle, ce mélange de fleur de pêchers, de pluie et de sable chaud. Et une pointe de miel… Nouvelle.

Saluant le vendeur qui paraissait toujours aussi détendu - Link était persuadé que ça provenait des herbes qu'il fumait toute la journée - il se demanda si cette nouvelle fragrance ne venait pas de la magie qu'elle utilisait. Claquant sa langue contre son palais, il hésita. Il avait dit qu'il lui laisserait le temps de parler, si et seulement si, elle le désirait.

Mais c'était quelque chose d'acté. Ils l'avaient vu faire, cette tempête qui avait certes, sauvé leur peau, mais manqué aussi de le tuer, des mois plus tôt. Techniquement, ce n'était plus secret, elle faisait de la magie. Etrange d'ailleurs. Mais il venait de redevenir humain après plusieurs jours en loup, il n'allait pas chipoter là-dessus.

« Est-ce que tu pratique souvent la magie… ? » Rougissant parce que finalement, la question lui avait échappé, il couvrit sa bouche avec sa main gantée et le voile. « Non, ne réponds pas, je n'aurais pas dû demander. »

« Pas souvent… » Replaçant une mèche blonde derrière son oreille, Auryn soupira. « La magie nécessite un bon contrôle émotionnel. Sinon, ça dégénère… Et tout le monde en fait les frais… »

Link écarquilla les yeux de surprise. Outre la réponse qu'il pensait ne pas recevoir, cet aveu était touchant. Et le rassurait un peu, ça voulait dire qu'elle n'avait aucune intention de raser le village par colère contre Iria.

« Tu ne voulais pas de cette tempête, alors ? »

« Si. » Voyant qu'il palissait, elle se mordit la lèvre et s'expliqua un peu mieux. « Pas de ce niveau. Je voulais juste masquer mon départ. Si l'orage était violent, je me disais… Que tu ne me suivrais pas, ou qu'on me penserait… »

« Disparue dans la rivière… » Elle hocha la tête, peu fière.

« Oui… Je ne voulais pas te blesser. C'est juste devenu incontrôlable parce que je n'étais pas… Pas très lucide sur ce que je ressentais. »

« Comme avec les gobelins » cru bon d'ajouter Midona dans leur ombre. Link grogna.

« Pas le même genre d'émotions, mais oui. Même problème de contrôle. » Elle en avait chaque fois que le garçon était concerné, finalement.

« Et… Tu sais faire d'autres choses que des tempêtes… ? »

« Je connais plusieurs sorts, oui… »

« Tu nous as suivi comme ça, n'est-ce pas ? » Auryn rougit. Comment lui dire que ça, c'était aussi un raté ? Du moins un raté parce qu'elle n'avait pas su interpréter les écrits convenablement.

« Non… Oui… Compliqué. »

« Tout est compliqué avec toi, Blondie. » Répliqua la Twili.

« Midona… » Gronda Link. Cette fois, il ne se priverait pas de la remettre à sa place. Il n'avait plus aucune crainte d'être lui-même.

« Quoi ? ça lui va bien ce surnom, tu ne trouves pas ? Toi tu seras louloup. »

« Ce n'est pas le surnom le problème… » Poursuivit le toalien. Mais la main de sa douce se posa sur son bras.

« Tout va bien… J'admet que je suis compliquée, et pas facile à suivre non plus. »

« Tu vois ! » L'ombre de la rouquine croisa les bras et lui tira la langue. « Du coup, tu suivais ou non ? »

« Je vous suivais, oui… Mais le sort n'avait pas cette vocation-là. J'ai raté votre portail, et j'allais m'écraser… Alors j'ai lancé un autre sort… »

« Tu es capable de te… téléporter ? Ou d'ouvrir un portail ? » Demanda Midona, intéressée. Mais Auryn parut gênée et commença à détourner les yeux, fixant les pampilles accrochées à la décoration de sa ceinture, l'ensemble se balançant contre son sarouel à chaque pas.

« Non… Juste… » Elle s'arrêta. L'amertume de cette découverte ne l'avait pas quitté. Sa douleur d'aimer le seul qu'elle ne pouvait avoir aussi. Tout était douloureux. Mais elle ne pouvait pas flancher. Plus maintenant. Et après ses paroles précédentes, sa demande, elle lui devait au moins ça.

« Auryn… ? Ne répond pas si tu ne te sens pas, d'accord ? C'est déjà bien assez… »

« J'ai lancé un sort qui devait me conduire en sécurité. Je pensais que ça voulait dire à l'endroit où l'on m'a appris ce dernier… »

« Tu étais devant la maison… » Constata Link, soudainement perdu.

« Oui. Parfois, l'intitulé des formules est plus compliqué qu'on ne le pense. Et le sort ne m'a pas mené en sécurité. Il m'a mené là où je me sentais en sécurité, moi. »

« Est-ce que ça veut dire que tu réapparaîtras devant notre maison si tu le lances ? » Demanda finalement le toalien après un moment de silence, tout en hésitant à lui offrir une étreinte.

« Non. J'ai rejoint la maison… Parce que c'était tout ce qu'il me restait de toi. Mais tu es vivant… » Midona tiqua à son tour.

« Ça veut dire que ce sort te conduira toujours auprès de Link. » Pas de moquerie, pas de rires. Les deux princesses échangèrent un regard.

« Oui. Car Link… Tu es celui qui me fait me sentir en sécurité… Chez moi. » Commença Auryn après s'être arrêtée de marcher. « Mon foyer, c'est toi… » Termina-t-elle.

Midona se sentit de trop, mais remercia les déesses de lui avoir offert le don de se fondre dans l'ombre. Car elle n'aurait pu camoufler son regard brillant d'empathie. Elle savait déjà que rétablir l'ordre des choses allait être compliqué, elle savait qu'il y aurait naturellement des morts dans cette quête. Mais elle ne s'attendait pas à assister à cette tragédie-là. La princesse de l'entre-deux et le héros des déesses. Condamnée à mourir pour que lui puisse vivre.

La twili les laissa s'étreindre de nouveau, son cerveau fonctionnant à toute vitesse. Ça allait être un carnage, un vrai. Elle le sentait.

oOoOoOo

Les trois héros fixaient le portail qui menait au temple sylvestre. Il était désespérément verrouillé. Toujours. Et il aurait fallu rebrousser chemin pour aller demander la clef, la marchander, même, peut-être. Link allait d'ailleurs s'y mettre, lorsqu'il entendit le déclic, et que le cadenas tomba au sol, les deux grandes portes s'écartant d'elles-mêmes juste après.

Auryn se recoiffa d'une longue pince à plumes.

Il frissonna. Le peuple des guerrières du désert, ces voleuses en sarouel rouge et bleus… Ces femmes aux oreilles rondes, vivant sans hommes et combattant sans honte. Auryn… Un nouveau frisson, tandis que son rêve étrange lui revient. Ce grand homme à la peau mate et aux yeux dorés… Cette femme si pâle et blonde. Était-ce… Prémonitoire ? Ou bien… un souvenir qu'il aurait capté ?

« Si tes breloques deviennent utiles, alors je vais arrêter de me plaindre. »

« Merci, Midona… » Souffla Auryn.

« De rien, Blondie. Mais faudrait quand même revoir ton style… Trop collé-monté. Genre m'as-tu vu… Pour une guerrière ce n'est pas très discret. »

« Je n'ai pas choisi. »

Ils s'engouffrèrent dans le tunnel, mais une dizaine de pas plus tard, plus moyen de savoir quelle direction prendre. L'obscurité avait tout avalé. Une chauve-souris attaqua Auryn, qui n'évita la morsure que grâce à Link, ce dernier l'ayant non seulement entendu, mais aussi flairé.

« Ça vous dit d'aller acheter une lanterne à l'autre taré, à l'entrée ? » Proposa Midona.

« J'y vois très bien, moi… » Avoua le garçon, légèrement penaud.

« Oui bah pas nous. Alors, go… »

« Je n'ai pas assez de rubis, d'accord… ? L'argent ne pousse pas sur les arbres, au cas où tu ne l'aurais pas remarqué. » Gronda le toalien en croisant les bras.

« Combien tu as sur toi ? » Demanda Auryn pour apaiser les tensions naissantes.

« Pas assez pour une lanterne… Et tu ne vas pas payer, c'est hors de question. » Sa fierté en prendrait un coup. C'était à lui de prendre soin d'elle pour une fois.

« On va tout de même avoir besoin de lumière, tout le monde n'est pas nyctalope, Louloup. » Rétorqua la rouquine en sortant de l'ombre. Link lui jeta un regard inquisiteur.

« Pourquoi est-ce que ça ressemble à une insulte venant de toi ? »

« Pas ma faute si t'es susceptible, hein. »

« Bon ça suffit tous les deux ! » S'énerva Auryn. Et sa voix se répercuta sur les parois de la grotte dans un écho mortifère. Link grimaça, ses oreilles douloureuses. « Pardon. Mais vous me stressez, là… » Cette fois, les deux gamins s'excusèrent.

« Ça n'empêche qu'on a besoin de lumière… » Reprit la twili, mécontente.

« J'ai peut-être un moyen… Pour de la lumière, mais je ne veux absolument aucune question ni aucun commentaire… » Elle marqua une pause d'une seconde, avant de soupirer. « Et qu'on me couvre… Parce que je ne pourrais plus me battre. » Link fronça les sourcils à cet ajout.

« Tu commences à m'inquiéter… »

« Elle commence, juste ? T'as une épée pourrie et elle en a trois, dont une tellement décorée qu'elle pourrait racheter ton village dix fois avec si elle la vendait. »

« C'est Auryn, elle s'est toujours battue avec les cimeterres, je ne vois pas pourquoi tu… »

« Auryn elle est là et elle vous entend. » Link rougit, Midona sorti de l'ombre brièvement pour se moquer, mais croisa les bras. « Vous êtes prêts ? »

« Eblouit nous, Blondie ~ » Susurra Midona, faisant rouler des yeux la guerrière.

Auryn délassa légèrement son bustier, faisant rougir son compagnon une seconde, mais il comprit ensuite pourquoi cette manœuvre. Car une fois plus lâche, elle put tirer sur la chaine qui pendait entre ses seins, et remonta un bijou. Un bijou qu'il avait déjà vu, mais sans comprendre sa fonctionnalité jusque-là. Le triangle aux trois encoches de cristal. Rattachant le bustier, le pendentif reposant désormais sur son ventre, tant il était long, elle soupira. Link n'avait aucune chance de savoir ce que c'était, et bien que ce soit mieux ainsi, la princesse du crépuscule savait.

La métisse récupéra l'objet entre ses mains, et ce dernier se mit à flotter juste entre ses doigts après quelques murmures incohérents. Les encoches laissèrent alors filer une douce lumière blanchâtre, comme la pleine lune à son apogée.

« Wow… »

« Est-ce que c'est assez, Midona ? » La rouquine se ferma à la question. L'objet était tout aussi important que l'épée des déesses.

« Oui. Merci pour la lumière… » Et elle se glissa dans l'ombre de la guerrière sans plus un mot.

Link dû parer plusieurs attaques de chauve-souris à nouveau, usant généralement du bouclier pour les assommer et non les tuer. Les pauvres ne faisant que défendre leur territoire. Il trancha aussi plusieurs plantes carnivores, récupérant les graines délaissées sous les racines, puisqu'elles étaient utiles au lance-pierre. Ça restait, certes, une arme vétuste, mais toujours utile pour le combat à distance.

C'est à la sortie du tunnel, de retour coté marais, que la question se posa. Comment passer la brume toxique ? Auryn rangea vivement le médaillon dans son bustier, à l'abri des regards, et bailla. Le sort était certes, très léger, il consommait de l'énergie spirituelle malgré tout.

« On fait comment ? » Demanda la Twili, mais elle n'eut pas de réponse orale.

La petite guenon perdue passa entre leurs jambes en courant, armée d'une torche luisante de graisse et enflammée, et commença à donner des coups dans les airs, juste devant la brume qui s'écarta sous la gestuelle.

« Venez, Princesse ! Alpha et les enfants sont par-là !» Indiqua la guenon.

« On te suit. » Répondit Link, tout en constatant qu'une fois encore, sa compagne avait compris le langage animalier. Si lui, il avait conscience que c'était son pouvoir de loup qui ressortait, il se demandait vraiment d'où venait celui d'Auryn.

Ils traversèrent ainsi l'immense nuage de brume toxique, Link plissant les yeux à chaque « princesse » du petit singe. Il avait promis de ne pas poser de question directement, mais ça ne voulait pas dire qu'il ne se les posait pas à lui-même. Les mains libres, Auryn le rejoignait cependant dans la découpe des plantes carnivores qui elles, subsistaient aux vapeurs.

C'est ainsi qu'il put constater que l'épée décorée comme un bijou dont s'était moquée Midona restait essentiellement dans son fourreau. Auryn ne l'avait sorti que contre les trolls. Pour tout le reste, elle usait des cimeterres, non seulement plus larges, mais aussi plus accessibles. D'où venait cette lame ? Link avait le sentiment que c'était quelque chose de très important, là aussi. Ses réflexions mentales lui valurent une estafilade sur la joue, offerte par un coup de liane.

« Arrête de rêvasser, Louloup, ta chérie te devance sur le nombre d'ennemis, là ! »

« Me devance ? » Auryn soupira.

« Midona fait le compte de nos victimes. »

« Ouais, 9 à 8 en faveur de Blondie. » Link fusilla son ombre dans laquelle se gaussait la Twili.

« Tu pourrais aussi nous aider, au lieu de compter. »

« Je vous aide ! Preuve, je te motive. Aller ! Plante moche à deux heures ! »

Lorsqu'ils arrivèrent au second portail, éventré celui-là, les deux combattants soupirèrent de concert. La rouquine était insupportable. Elle commentait, raillait, comptait, bien entendu… Et les deux trolls, à l'entrée, ne furent pas suffisant pour calmer son ennui. Mais Midona s'était donnée une mission toute aussi importante que sauver Hyrule ou les trois royaumes. Elle ne laisserait pas ces deux amoureux s'enliser dans leurs dépressions. Elle comptait bien les aider à s'en sortir. Coûte que coûte.

Car la fin prévue à cette histoire ne lui plaisait pas du tout. Et quitte à changer son destin, autant faire de même avec celui de ses nouveaux compagnons.