Chapitre 4 : 1966
– Évelyne, est-ce que ça va ?
Elle avait souvent le regard dans le vide depuis quelques jours. À quoi pouvait-elle bien penser ?
– Oui, oui.
Sa voix était comme absente.
– Ève ?
Elle cligna des yeux et le fixa.
– J'ai un mauvais pressentiment, Severus. Nous sommes les seuls plus vieux du groupe. Tous les autres enfants ne restent jamais très longtemps avec nous. On est même en Angleterre juste pour toi et ça ne donne rien.
– Où tu veux en venir ?
– Qu'ils ne nous garderont plus très longtemps ! Je les ai entendu se plaindre qu'on leur devenait trop cher. Ils vont se débarrasser de nous et j'avoue que cela me fait peur…
Elle jeta un coup d'œil autour d'eux et il l'imita. Patron était au téléphone, Futé et l'Arbitre jouaient aux cartes à la table. La Belle sortait avec un bébé en pleurs et le tenait à bout de bras.
– Oui, mais qu'est-ce qu'on peut faire ?
– Fuir.
– Quoi ?!
Elle plaqua ses mains sur sa bouche.
– Chutttttt !
Et regarda autour d'elle…
– Je suis sûre que c'est mieux que ce qu'ils nous réservent.
– Mais…
Et si Patron les rattrapait ? Elle devait arrêter de penser à ça ! C'était impossible ! Et tellement dangereux !
– Comment on va faire pour manger et dormir ?
– J'en sais rien, j'étais rendue là dans mes réflexions, mais je n'y connais rien en dehors d'ici. Je ne sais pas à qui on peut faire confiance, tout ce que je sais, c'est que j'aimerais bien retrouver mes parents… je me souviens de moins en moins d'eux…
Elle en avait de la chance.
– Moi je n'ai aucun souvenir.
– Raison de plus pour partir d'ici !
– Ils vont nous rattraper, Eve !
– Pas si on choisit le bon moment ! Ils ramènent toujours des bébés ici et personne ne vient nous déranger dans ces moments. On en profitera !
Sa posture était tendue, les traits de son visage plus durs et safaçon de parler… Ce n'était pas la première fois qu'elle réfléchissait à ça. Il n'arriverait pas à lui faire changer d'idée. Mais il ne pouvait pas la suivre… Qui prendrait soin des nouveaux enfants ? Qui leur dirait quoi faire à leur arrivée pour éviter la première gifle, comme Eve l'avait fait avec lui ?
– Ça va aller Sev, je te promets…
Des bras qui l'enserrent doucement…
— Regarde, le truc c'est quand c'est un « p » on met toujours un « m » devant…
– Attention !
Une main sur sa bouche, des lèvres près de son oreille.
– Ne bouge pas. Ils ne doivent pas nous voir…
– Non, monsieur, c'est ma faute…
– Tiens, je t'ai gardé un morceau de pain…
Il déglutit et croisa ses yeux noisette. Il ne la reverrait plus, elle ne serait plus là pour l'aider et l'empêcher de s'attirer des ennuis. Sa gorge se serra. Ses cheveux ne lui chatouilleraient plus le visage au matin. Plus personne avec qui parler, à qui faire confiance. Personne ne restait longtemps ici…
– C'est d'accord !
Elle sourit de toutes ses dents. C'était la bonne chose à faire. À son tour de l'aider ! Il prendrait soin d'elle dehors. Il ne savait pas encore comment, mais il ne laisserait personne lui faire de mal.
– Peut-être qu'on pourrait trouver… Elle s'arrêta un instant. Comment ils disent déjà ? Tu sais, ces adultes dont ils ont peur, car ils ne veulent pas se faire prendre.
– La police ?
– Oui, c'est ça ! Eux pourraient sûrement nous aider à retrouver notre famille, et sauver les bébés ! Mais pour ça, il faut qu'on parte d'ici.
– Bientôt. – Patron était en train de raccrocher. – Avant qu'on quitte la ville.
– Oui.
XxX
– Severus, chuchota Évelyne.
Il releva la tête de la petite fille des photos.
– C'est le moment.
Elle portait son manteau et tenait le sien dans sa main. Quel mom… ? Il écarquilla les yeux. Oh celui-là !
– Maintenant ? Il prit son manteau.
Le couloir derrière lui était vide.
– T'es sûre ? En plein jour ?
– Lourdaud est en haut à vérifier une dernière fois que rien n'est oublié. As s'amuse avec ses cartes dans le salon. Il ne reste que Chef à la cuisine et Patron change la couche de Tom.
Elle lui prit la main et le tira à sa suite. Et si quelque chose tournait mal ? Ils n'en avaient même pas discuté ?
Son manteau battait à ses côtés. Il devrait le fermer. Mais Évelyne lui tenait la main. Et elle venait d'ouvrir la porte d'entrée.
– Évelyne.
Le patron. Ses paumes devinrent moites.
– Tu pourr…
Leurs yeux se croisèrent et le temps se figea un instant avant qu'Évelyne lui tire le bras et se retrouve dehors.
– As ! hurla Patron. Prends les bébés et va sur le bateau ! Lourdaud, Chef avec moi ! Évelyne et Severus s'enfuient !
Ils allaient se faire prendre ! Ils allaient se faire prendre ! Pourquoi avait-il accepté ?!
Ses oreilles bourdonnaient ; ses pas crissaient sur les petits cailloux.
Il tenait fermement la main chaude d'Évelyne dans la sienne.
Il ne devait pas la lâcher ! Derrière lui, le Patron courrait.
Il allait les attraper !
– Allez, les enfants, il est encore temps d'arrêter ! Vous ne serez pas puni ! Ça arrive à tout le monde de faire des erreurs !
Pas puni ? Tu parles ! Ils allaient être enfermés dans une pièce minuscule, attachés, pouvant à peine marcher un mètre et avec peu de nourriture pour… ce genre de chose devait valoir au moins un mois !
– Arrêtez-vous immédiatement ! Hurla Patron. Non, mais attendez que je vous attrape ! Vous ne vous reverrez plus ! Je connais un groupe qui se cherche justement des jeunes de vos âges !
Il frissonna. Quelle sorte de groupe ? Ceux qui les vendaient à des adultes qui mettaient leur main où il ne fallait pas ? Non, cette fois il ne se laisserait pas faire ! Ils pouvaient enfin être libres, Évelyne avait eu raison de le pousser ! Mais… comment allaient-ils faire ? Ils n'avaient même pas parlé d'où ils iraient en quittant la maison. Quel côté devaient-ils prendre ? Comment se cacher avec le Patron derrière eux ?
Une sueur froide coula le long de son dos. Chef venait de les rejoindre et Patron avait le visage rouge. Et si proche, assez pour que ses doigts frôlent le bas de son manteau. Non ! Il regarda lechemin devant lui. Il ne pouvait pas se permettre de ralentir ou de trébucher sur ses propres pieds.
– Plus vite, Eve !
Une flaque d'eau sèche. Il perdit ballant. Ses doigts touchèrent les petites roches, mais il se rattrapa de justesse. Son souffle saccadé résonnait dans ses oreilles. Les pas précipités de Lourdaud et Patron étaient pratiquement sur lui.
Ça ne pouvait pas se terminer comme ça ! Pas si près du but ! Encore quelques pas, et ils seraient sur la rue principale, ils devaient y arriver ! Évelyne bougea la tête.
– Non, ne te retourne pas !
Ses poumons brûlaient. L'air n'entrait pas assez vite.
– cours !
Ça y était, le coin du magasin de brique. Il pouvait entendre des voitures rouler.
Son pied toucha le trottoir crème et quelque chose agrippa son manteau.
– Non !
– Je te tiens !
Patron ! Il se débâtit. Il devait enlever son manteau. Il n'y retournerait pas ! Sur sa droite, Évelyne revenait. Non, elle ne devait pas ! L'un d'eux devait s'en sortir !
– Va-t'en !
– Lâchez-le !
Non, non ! Il devait à tout prix se libérer avant qu'elle se fasse prendre elle aussi !
Elle tapa sur le bras du Patron, mais il avança sa main libre pour l'attraper et elle se recula d'un bond. Elle ne devait pas s'approcher de ce monstre.
– Aide-moi à enlever ce manteau !
Ni de Lourdaud qui allait arriver d'une seconde à l'autre. Et où était Chef ?
– Laissez-nous tranquilles ! dit-elle.
– Hey !
Une femme. Ils se figèrent.
– Qu'est-ce que vous faites ?
Un homme cette fois et qui courait vers eux.
– Laissez ses enfants !
Il devait en profiter ! Fallait qu'il sorte de ce manteau !
Enfin !
Il prit la main d'Évelyne et s'éloigna. Un bruit mat. Son manteau était au sol et le Patron faisait demi-tour. L'homme le suivait. Bien, si le patron ne les voyait plus, ils auraient le temps de trouver la police.
– Les enfants, vous allez bien ? S'accroupit une femme blonde.
– Oui, merci, répondit Évelyne.
La femme dans une jolie robe bleu et blanc tendit la main vers eux.
Ses yeux s'agrandirent et il eut un mouvement de recul. Qu'est-ce qu'elle lui voulait ?
La femme réussit à le toucher. Non ! Il bougea sèchement son épaule. Il ne se laisserait pas faire ! Il serra la main d'Évelyne. Ils devaient se tenir prêts à courir ! Ils ne se feraient pas enfermer à nouveau !
La femme reposa son bras et regarda un instant la ruelle derrière eux puis autour.
Severus se tendit. Qu'est-ce qu'elle cherchait ? Il y avait quelques passants, mais ils se tenaient à l'écart.
– Où sont vos parents ?
– Je ne sais pas. Parla Evelyn, une respiration plus normale. Nous courrons depuis un moment.
– Oh, mes pauvres chéris ! Venez – elle se releva – nous allons vous conduire chez la police, ils pourront contacter vos parents.
La police ? C'est justement ce qu'ils cherchaient ! Mais les conduire ? Elle ne pouvait pas leur indiquer le chemin plutôt ?
Des pas crissèrent dans la ruelle. L'étranger.
– Je l'ai perdu de vue.
– Ce n'est pas graves Jaques, cet homme est peut-être dangereux. Allons voir la police, leurs parents vont être soulagés de les savoir sains et saufs.
Pouvait-il leur faire confiance ? Et si…
– Excellente idée, vous allez bien, les enfants ?
– Oui monsieur, dit Évelyne.
L'homme tendit sa main.
– La voiture est par là. Allons-y.
Severus la regarda. Devaient ils les suivirent ? Les doigts d'Évelyne se crochetèrent aux siens. Ils n'avaient pas tellement le choix.
Il ne la lâcha pas de tout le trajet.
Ils s'arrêtèrent finalement devant un édifice gris pâle. Ils sortirent. Cinq étages. Mais pourquoi le dernier avait une forme plus bizarre que les autres ?
Évelyne le poussa légèrement et suivit le couple vers la porte plus foncée que le reste du commissariat. Juste au-dessus d'elle était écrit en gros « Police ». Ils touchaient au but ! Ils allaient rentrer chez eux ! À quoi pouvaient ressembler ses parents ? Étaient-ils gentils ?
À l'intérieur, une lourdeur flottait dans l'air.
Erk.
Ne pouvaient-ils pas ouvrir les fenêtres ?
Des talons claquèrent au sol. Des gens parlaient aussi, mais c'était trop bas pour comprendre les mots.
Et sa gorge piqua.
Non, non, non, il ne devait pas tousser.
– Bonjour ! Puis-je vous aider ?
Une femme avec une jupe noire et un chemisier blanc s'approcha d'eux. Derrière, d'autres adultes travaillaient, quelques portes, un long couloir. Sur sa gauche, un dessin sur une porte d'un homme et une femme. Les toilettes.
– Oui, bonjour, Parla la dame en bleue, ces enfants étaient poursuivis par un homme et cherchent leurs parents.
– Oh, mes pauvres…
La porte derrière lui s'ouvrit avec fracas, le faisant sursauter.
Un homme, les mains menottées dans le dos, se débattait et se rapprocha d'un coup de lui. Il recula et serra plus fort la main d'Évelyne en même temps que le cri aigu d'une femme se fit entendre derrière lui. C'était qui celui-là ? Il…
– Ne vous en faites pas, il est sous bonne garde ! Dit la femme à la jupe noire tandis que les deux policiers avec des chapeaux traînaient l'homme qui lançait des menaces dans le couloir.
Il se figea. L'avait-elle vu ? Il rendit son visage lisse. Il ne devait pas leur donner un avantage à prendre sur lui.
– Venez, suivez-moi. On va vous aider !
Elle marcha entre trois bureaux, chacun de ses pas raisonnait sur le sol. Un policier de dos se dérangea sans se retourner. Puis ils arrivèrent près d'un bureau en bois noir tous au fond de la pièce à côté de la fenêtre.
– Voilà, vous pouvez vous asseoir. Leur sourit-elle avant de tirer deux chaises. L'inspecteur-chef va venir vous voir. Mr et Mme…
– Nightingal, mentionna l'homme.
– Mr et Mme Nightingal, veuillez me suivre, un autre policier prendra votre déposition. Ne vous inquiétez pas les enfants, ils seront juste à côté. Vous pourrez les revoir tout à l'heure.
La femme passa une main dans ses cheveux et il se retint de grogner. Qu'est-ce qui lui prenait ? Puis elle repartit.
Sa gorge piquait encore. Il ne devait pas tousser, on s'intéressait déjà trop à eux comme ça. Penser à autre chose, penser à autre…
Le bureau qui lui faisait face était très ordonné. Des papiers d'un côté avec un pot de plumes, mais le centre était vide. Sur le bord, une petite plaque rectangle avec « Paul Fleming » écrit dessus. Qui pouvait-il être ? À quoi ressemblait-il ?
Un grattement derrière lui le fit se tourner. Un policier avait le nez plongé dans un carton jaune, une plume tenue lâchement entre deux doigts avec une cigarette à la bouche qui produisait beaucoup de fumée. Une odeur désagréable. … Ni Patron, ni les autres ne fumait dans la maison ou sur le bateau. C'était mauvais pour les affaires. Ça ne l'était pas pour eux ? Et comment faisaient-ils pour supporter cette odeur ? C'était tellement étouffant !
Une porte se referma doucement. La femme de l'accueil sortait d'une pièce et se dirigea vers l'entrée.
À la fenêtre, des hommes et des femmes marchaient dans les deux sens. Un homme s'arrêta même devant la vitre pour retoucher ses cheveux. Il ne le voyait pas ? Derrière des voitures passaient.
Une sonnerie de téléphone le fit sursauter et ilse tourna à l'instant où un policier rondelet en uniforme bleu foncé s'approcha d'eux.
Quelle étrange idée de porter un chapeau à l'intérieur.
Sur sa poitrine, bien visible, était écrit « Inspecteur-chef » et juste en dessous « Police de la cité de Londres ». C'était donc lui qu'ils devaient rencontrer.
– Bonjour, les enfants ! Je suis l'inspecteur-chef Paul Fleming. Dit-il en s'asseyant devant eux et déposant son casque. Vous avez été très courageux de fuir cet individu.
L'inspecteur sortit un calepin de sa poche avant de prendre une plume dans le pot. Qu'est-ce qu'il voulait faire avec ça ?
– Pensez-vous pouvoir me le décrire pendant que l'on prévient vos parents ?
– Oui, dit Évelyne.
– Vous avez un numéro pour rejoindre vos parents ?
– Non, monsieur.
Elle baissa la tête.
– Ce n'est pas grave, petite. Sourit-il.
Le ton de cet homme était plaisant. Mais pouvait-il lui faire confiance ? Patron était comme ça lui aussi, tout gentil, et une seconde plus tard, il se mettait en colère.
– Tu peux me dire comment ils s'appellent?
Évelyne secoua la tête et il se tendit. Allait-il les aider ? Il ne voulait pas retourner là-bas.
– Je ne me souviens plus d'eux.
– Pardon ?
L'inspecteur… Freman ? Non… Severus baissa ses yeux sur la petite plaque du bureau – Fleming – il en avait échappé son crayon et s'était redressé sur sa chaise en les fixant.
– Nous… on était tout petit quand ils nous ont emmenés.
– Quoi ? Par qui ? Reprit son crayon l'inspecteur Fleming.
Un policier passa près d'eux. Mais n'arrêtaient-ils donc jamais de bouger ?
– Patron.
L'inspecteur Fleming fronça les sourcils.
– Pa… connaissez-vous leur nom ?
— Oui
Évelyne tordit ses doigts et Severus s'empressa de déposer sa main sur la sienne. Elle se débrouillait bien, il l'aiderait au besoin. Elle inspira.
– Pourquoi vous voulaient-ils ?
– Ils nous donnent à d'autres familles. Mais Severus et moi… Personne ne nous veut. Ils ont été obligés de nous garder. Mais ils n'aiment pas ça, je les ai entendus, on devient trop vieux et les autres enfants, ils portent encore des couches. Ça se vend mieux.
L'inspecteur Fleming s'arrêta d'écrire pour les regarder.
– Il y a donc d'autres enfants ?
– Oui, trois bébés qui doivent partir bientôt et d'autres enfants vont être pris. Ils attendent toujours avant de trouver d'autres enfants.
Un téléphone sonna à nouveau et des talons claquèrent au sol. La femme de l'accueil s'arrêta au premier bureau pour remettre un papier avant de repartir après quelques mots chuchotés.
– Un trafic d'enfant, marmonna l'inspecteur Fleming avant de reprendre. Et comment est-ce que vous vous appelez ?
Severus fronça les sourcils. Un quoi ? Qu'est-ce que c'était ?
– Évelyne Rodriguez et lui c'est Severus Toretto.
– Je vais voir ce que je peux faire, mais si c'est comme je le pense, ce n'est pas vos vrais prénoms et noms de famille, cela va être difficile de retrouver vos parents.
– Ce sont nos vrais prénoms ! Je le sais parce qu'on est là quand ils font une nouvelle… Comment ils disent déjà ? Elle se tourna vers lui.
Severus la regarda avec des yeux ronds. Mais non, il ne voulait pas parler. Ce n'était pas prévu ! Elle gérait mieux ça que lui ! Et puis, quelqu'un devait s'occuper de ce qui les entourait, savoir quand se sauver, découvrir de qui se méfier ! Et c'était difficile avec tout ce monde qui bougeait tout le temps !
– Acte de naissance.
– Oui, c'est ça ! C'est pour les nouveaux. Je crois que les années sont bonnes aussi. Les marchands, ils préfèrent les bébés. Je les ai entendus quelques fois se disputer là-dessus. Surtout quand ça n'allait pas comme ils voulaient et qu'ils se retrouvaient encore avec un enfant qu'ils ne pouvaient pas revendre ou en prenait un trop vieux sans faire exprès.
– Bien.
L'inspecteur Fleming referma son calepin et se leva.
– Je vais vous confier à un de mes hommes et vous lui direz ce que vous savez des personnes qui vous ont kidnappé. Peut-être que vous pourrez nous en faire un portrait, notre dessinateur, Don, va tout vous expliquer comment faire. Vous n'avez pas à vous inquiéter, faites juste de votre mieux.
Quoi ? C'était tout ? Ne devaient-ils pas lui dire où ils vivaient ? Patron posait bien plus de questions que ça quand ils devaient faire un coup. Comment l'inspecteur allait les aider ? C'était suffisant ce qu'Eve avait dit ?
– Bien monsieur.
L'inspecteur Fleming se tourna vers eux.
– Où avez-vous appris à être si polis ?
– Lourdaud disait que c'était pour mieux se faire acheter et c'est pour ça qu'on a dû apprendre à ajouter certains mots dans nos phrases, comme monsieur et acquiescer… ils nous punissaient sinon.
– Ils vous frappaient ?
– Non, ce n'est pas bon pour les ventes, un a voulu le faire, mais il s'est vite fait reprendre par Patron. Il nous séparait des autres pour qu'on soit seul, parfois sans nourriture. Ils en ont même enchaîné lorsqu'on devait changer d'endroit et tout.
Changer d'endroit.
Avec leur fuite, le Patron devait avoir déjà changé les plans et probablement de planque et il fallait sauver le petit Tom.
Eve, dis-lui ce que Patron avait prévu s'il y avait un problème, pensa-t-il, n'oublie pas Tom !
Mais elle n'ajouta plus rien. Il devait parler.
– On changeait souvent d'endroit. Patron… ils doivent déjà être ailleurs. Tom devait partir aujourd'hui.
Est-ce que le petit Tom pourrait être retrouvé à temps ? Et les nouveaux bébés qui arrivaient aujourd'hui, fallait les sauver !
L'inspecteur Fleming hocha la tête.
– Ne t'en fait pas petit, je vais préparer une équipe et nous allons les retrouver. Venez, suivez-moi.
À suivre…
