Disclaimer : Tout l'univers de One Piece que vous reconnaîtrez aisément appartient à Oda Eiichiro. Je ne retire aucun profit de son utilisation si ce n'est le plaisir d'écrire et d'être lue.
Note de l'auteur : un Luffy tout fou et puéril c'est adorable et on l'aime comme ça. Mais je ne peux m'empêcher de penser qu'il est beaucoup moins idiot qu'il ne le laisse paraître. À certain moment, il sait faire preuve de maturité et c'est ce que j'ai voulu exploiter dans cette petite histoire. J'espère que ça vous plaira, n'hésitez pas à me le faire savoir. Merci.
Bonne lecture.
Question ? Réponse. Et conclusion
Punk Hazard. Quel enfer ! Ils avaient bien failli y laisser leur peau. Et tout ça pour quoi ? Parce que Luffy fonçait tête baissée sans réfléchir aux conséquences. Combien de fois avaient-ils été blessés ? Combien de fois avaient-ils risqué leur vie pour sauver la sienne ? Il avait toujours trop eu confiance en lui, en ses capacités. Il s'était reposé sur elles dès qu'il avait mangé ce Fruit du Démon sans concevoir un seul instant que, même si eux étaient effectivement devenus plus forts, ils ne l'étaient pas autant que lui ni aussi résistants. C'était ses compagnons qui devraient s'appuyer sur lui et non le contraire. Ou disons à parts égales.
Il savait très bien que tout le monde pensait qu'il n'était pas très futé. Mais il l'était bien plus qu'ils ne le croyaient. Le soucie c'était qu'il avait un foutu caractère. Il était égoïste par moments, ne songeant qu'au plaisir qu'il allait retirer d'une situation. Il allait s'amuser et il ne pouvait pas résister à ce qu'il considérait comme un jeu. Eux aussi étaient contents lorsqu'ils voyaient se profiler une aventure et qu'ils allaient se défouler un peu. Mais le Nouveau Monde recélait des dangers inimaginables. Pourtant, ils le suivront jusqu'au bout, il n'avait aucun doute et chacun pour ses propres raisons.
Ils avaient un point commun. Cette amitié qui les liait les uns aux autres. Cette crainte que si l'un d'eux venait à disparaitre, ce serait comme si on leur arrachait un membre, un morceau de leur cœur ou de leur âme. Sachant tout cela, Luffy se demandait pourquoi il les mettait en danger ? Il ne parvenait pas à se départir de cette peur de les perdre. Ace était mort dans ses bras. S'il fermait les yeux, il pouvait toujours sentir son poids contre lui, son odeur qui l'enveloppait mêlée à celle du sang, il entendait encore les derniers mots qu'il avait tout juste eu la force de lui murmurer.
Ils avaient ensuite été séparés pendant deux ans et alors qu'ils s'étaient enfin retrouvés, ils furent à nouveau entraînés dans des évènements violents et dramatiques. Certes, ils en sortirent vainqueurs. Mais à quel prix ? Meurtris dans leur corps et dans leur tête. Les raisons qui les avaient incités à s'investir dans ces combats étaient multiples et ne les avaient pas laissés indemnes. Il y avait des limites à ce qu'ils pouvaient accomplir. Luffy les repoussait, ces limites, et malgré tout, ils le suivaient. Ils râlaient, ils tentaient de le modérer, mais au final l'équipage entier fonçait vers le danger. Pourquoi ? Parce que Luffy l'avait décidé. Parce qu'il était leur capitaine.
Parce qu'ils l'avaient accepté comme tel, ils obéissaient à ses ordres.
Ce jour-là, la mer était calme. Le Thousand Sunny avait mis le cap vers l'île de Dressrosa. L'inconnu se dissimulait derrière l'horizon. Qu'allait-il se passer cette fois ? Luffy avait senti une angoisse sourde lui étreindre le ventre. Plus il découvrait le Nouveau Monde, plus il avait peur.
De prendre la mauvaise décision.
De les perdre.
De le perdre lui.
Il ne savait pas comment les choses en étaient arrivées là. Il n'arrêtait pas de se poser des questions. Il était plutôt du genre à agir d'abord, à suivre son instinct et à réfléchir après. Et voilà où il en était. Il avait été le premier membre de son équipage, son second. Parfois il semblait que c'était Nami qui commandait en son absence, mais s'il avait fallu, Zoro aurait pris les rênes et personne ne s'y serait opposé.
Depuis plusieurs jours, Luffy restait assis sur la figure de proue du Sunny. Il se doutait bien que tous se demandaient ce qu'il avait. Pourquoi ne parlait-il pas, lui d'ordinaire si volubile ? Pourquoi ne faisait-il pas l'idiot avec Chopper ou Usopp ? Il ne harcelait pas non plus Sanji pour manger. Ils avaient deviné que quelque chose ne tournait pas rond, mais aucun ne lui aurait posé la question. Pour le moment, il ne pouvait pas leur confier les angoisses qui lui tordaient le ventre. S'il faisait le choix de rentrer chez eux, ils ne comprendraient pas que c'était parce qu'il tenait trop à eux pour continuer à leur faire risquer leur vie. Ils lui répondraient que chacun était libre de son choix, qu'il ne les avait pas obligés à le suivre et qu'ils l'avaient fait de leur plein gré, parfaitement conscients des conséquences de leur décision. Bon, ça lui était arrivé de les harceler un peu comme pour Chopper ou Sanji, bien qu'en réalité, ils avaient déjà fait leur choix depuis longtemps et qu'ils n'attendaient plus que l'occasion se présente pour prendre le large.
Et quand bien même Luffy déciderait de faire demi-tour et de retourner à East Blue, ses compagnons seraient tout à fait capables de trouver un autre bateau pour repartir à la poursuite de leur rêve. De toute façon, jamais il ne ferait ça. Ils avaient vécu trop de choses ensemble pour renoncer maintenant qu'ils avaient été si loin. Ils leur restaient encore tant de chemin à faire, de merveilles à découvrir et sans eux, il n'y arriverait pas. Sans lui. Il allait encore mettre leur vie en danger, il le savait. Mais c'était ça d'être pirate, non ? Ils avaient tous embrassé cette vie en toute connaissance de cause malgré les souffrances que cela leur avait occasionnées. Zoro blessé et laissé pour mort par Mihawk, Robin torturée par le CP9, Nami qui était tombé malade sur l'île de Drum où ils avaient rencontré Chopper, lui-même gravement touché par l'amiral Akainu lord de la bataille de Marineford. Ils avaient tous choisi cette vie pleine de risques, de dangers et d'aventures.
Toutes ces considérations pesaient lourdement sur sa détermination. Cette frayeur était là, au fond de lui et même s'il parvenait à la museler, il était parfaitement conscient qu'elle l'affaiblissait. Sans elle, il serait beaucoup plus fort pour les protéger. Seulement elle était là et il devait faire avec. On dit que la peur rend prudent. En ce qui le concernait, c'était complètement faux. Rien ne l'empêchait de foncer tête baissée dans les aventures les plus folles. Et son équipage le suivait alors qu'eux avaient pris pleinement la mesure du danger. Mais il était Luffy, leur capitaine trop sûr de lui et de ces capacités. Ça ne faisait pas disparaitre cette peur, elle était juste occultée. Et maintenant elle le rongeait comme un acide. Et l'ambiance sur le bateau était lourde. Il savait que c'était de sa faute, mais que pouvait-il faire ?
— Tu l'as dit, lui répondit Franky. Nous sommes libres de nos décisions.
Luffy avait trouvé le courage de se confier à lui parce qu'il avait estimait que le charpentier était le plus censé de tous. Ce n'était peut-être pas le terme le plus approprié pour Franky quand on voyait ce qu'il avait fait de son propre corps. Mais c'était lui qui avait certainement le plus d'expérience de par son âge. Sa vie lui avait fait mieux appréhender la nature des hommes par rapport à eux qui étaient bien plus jeunes. Il aurait aussi pu parler avec Brook, mais ses cinquante ans de solitude sur un bateau plein des fantômes de son passé avaient peut-être altéré sa vision des relations humaines.
— Si on l'avait pas voulu, ou si les circonstances nous avaient pas poussées à t'suivre, on s'rait pas ici avec toi, alors arrête de culpabiliser…
— Tu penses que j'suis un bon capitaine ?
— Oh oui, tu l'es. T'es humain, t'as un cœur énorme. Tu refuses l'injustice, tu aides les gens au péril de ta vie. Tu nous as donné un coup d'main à Water Seven contre le CP9 qui nous aurait tués, Iceburg et moi, pour récupérer les plans de Tom. T'as été chercher Robin à Enies Lobby, t'as voulu secourir ces gens à Punk Hazard, t'as épaulé Vivi pour sauver son pays de Crocodile. Personne ne t'a forcé, mais tu l'as fait parce que t'estimais que c'était c'qu'y avait de plus juste à faire. Bien sûr que l'attrait d'l'aventure et des combats t'excite, mais y a pas que ça…
— Et mes sentiments ? J'les comprends pas, fit-il d'une voix gênée.
— Qu'est-ce que tu saisis pas ? Le fait qu'tu puisses les éprouver ? Ou bien qu'ils soient dirigés vers un homme ?
— Pour lui…
— Aussi soudés qu'on soit, aussi fort que soit le lien qui nous unit, celui qu'tu partages avec Zoro est au-delà de ça. Il s'est développé naturellement, sans que ni toi ni lui ne fassiez rien pour ça. Il a été ton premier compagnon. Tu l'as tiré des griffes du colonel Morgan lors de votre rencontre. Dès c'moment, une connexion très puissante s'est créée entre vous. C'est pour ça qu'vous êtes si proches. Vous vous comprenez sans avoir besoin d'parler, d'un simple regard.
— Mais Mihawk a failli le tuer ! s'écria Luffy en proie à l'angoisse qui l'avait saisi ce jour-là à la seule évocation de ce souvenir. Et je me demande toujours ce qui s'est passé à Thriller Bark pour qu'il ait été blessé si gravement.
— Pour c'que vous m'en avez raconté, Zoro l'a défié parce qu'il poursuivait son rêve tout en t'aidant à atteindre le tien. Il a saisi une opportunité… Pour le reste, j'sais pas… Mais j'crois aussi qu'il s'est découvert un autre but…
— Ah ? Lequel ?
— J'en suis pas sûr… Faudrait qu't'en discutes avec lui… il te l'dira peut-être.
— Que j'lui parle…, répéta Luffy, pensif. Ça fait des jours que j'rumine dans mon coin. J'ai réussi m'confier à quelqu'un, à toi, mais j'sais pas si j'suis capable d'aller vers les autres pour l'instant. Je sais qu'ils n'osent pas m'aborder et qu'mon attitude leur fait beaucoup de mal. Mais…
— Mais ? insiste Franky, espérant un peu plus d'aveux.
— J'dois d'abord y voir plus clair en moi. J'suis… Enfin… C'est la pagaille dans ma tête… J'arrive plus à réfléchir… un coup j'suis heureux, et deux minutes après… j'suis triste et j'ai envie de tout casser…
— Je sais… L'amour ça nous apaise pas quand ça nous tombe brusquement dessus.
— L'amour ?
— Que t'éprouves pour Zoro. Tu l'avais pas encore compris ?
— Mais c'est un homme !
— T'as pas reconnu ce sentiment parce qu'il concerne un homme. À aucun moment t'as pensé qu'c'était possible. Pourtant, tu peux pas l'ignorer. Il est là dans ton cœur et y demande qu'à s'épanouir…
— Et tu crois qu'ça résoudrait mon problème de culpabilité vis-à-vis d'vous tous ?
— Non, probablement pas, mais ce s'rait un poids en moins à supporter. T'es pas tout seul, Luffy. Chacun à notre manière, on peut t'aider à porter ton fardeau. Mais tu dois l'admettre…
— Et aller vers Zoro…
— … serait un début d'acceptation. En commençant par c'qui t'semble le plus compliqué, la suite te paraitra plus simple.
— Et j'suis obligé d'en passer par là ?
— C'est à toi d'trouver ta méthode. Il en existe autant qu'il y a d'êtres humains. Tu devras t'adapter.
— Merci, Franky, déclara son capitaine après de longues secondes de silence. Ça reste entre nous…
Luffy lui sourit, ou plutôt il grimaça. Une expression qui se voulait reconnaissante de l'avoir écouté. Ça n'avait pas été facile, mais il se sentait un peu mieux. S'être confié lui avait permis de mettre des mots sur ce qu'il ressentait même si ce n'était pas du tout ce à quoi il s'attendait. S'entendre dire qu'il aimait Zoro était perturbant. Surprenant surtout. Il n'aurait jamais imaginé que ses sentiments pouvaient le bouleverser à ce point. Tous le voyaient comme un gamin irresponsable qui ne pensait qu'à s'amuser, comme si la quête du One Piece était un jeu et que toutes leurs aventures n'avaient été que des diversions plaisantes durant tout ce temps. Des diversions pourtant bien dangereuses.
Il alla s'asseoir à la proue du Sunny, cette superbe tête de lion qui rayonnait comme le soleil qui s'était couché, mais dont l'horizon était encore enflammé de ses dernières lueurs. Il faisait plutôt frais, mais il n'y faisait pas attention. Les paroles de Franky tournaient en boucle dans son esprit et il n'arrivait pas à y mettre de l'ordre. Il avait très envie de revenir en arrière, à une époque où il ne s'interrogeait pas autant. Les choses étaient tellement plus simples. Il sentit qu'on lui posait une veste sur les épaules et d'un coup d'œil derrière lui, il reconnut Robin. Elle toujours aussi prévenante et se souciait du bienêtre de ses compagnons.
— Tu veux parler ? lui intima-t-elle d'une voix que personne n'aurait pu entendre.
— De quoi ?
— De c'qui t'perturbes et qui nous inquiète tous…
Le regard de Luffy se perdit sur les vagues qui naissaient de chaque côté de l'étrave sous la figure de proue. Ce bateau que Franky avait construit avec son ami Iceburg et qu'ils leur avaient offert pour succéder au Vogue Merry, était un bijou. Il se rappelait encore le premier navire avec lequel il avait commencé sa vie de pirate. Une coque de noix qui prenait l'eau de toute part et qu'il avait dû abandonner en se cachant dans un tonneau récupéré par le capitaine Alvida. Que de chemin il avait parcouru depuis... Et combien de fois avait-il risqué son existence et la leur ?
— Merci Robin… C'est une chose que j'dois régler moi-même…
— Ton état d'esprit influe sur celui de l'équipage, mais tu n'es pas seul…
— Le moral est pas bon, hein ?
— Pas vraiment… On s'inquiète… On ne comprend pas…
— J'suis désolé…
— On est tes amis, ta famille… Laisse-nous t'aider…, tenta également l'archéologue pour l'inciter à lui parler.
Il n'était pas seul, il le savait. Mais pour ce qu'il avait nommé "le problème Zoro", il considérait qu'il l'était. Il ignorait quoi faire. Et quand bien même il l'aurait su, trouverait-il le courage d'aller le voir pour éclaircir la situation ? Il était capable de faire preuve de bravoure et de témérité dans beaucoup de cas, mais là, il n'avait qu'une envie, s'enfuir au bout de la terre. Pourquoi le danger lui paraissait-il plus facile à affronter qu'une simple discussion avec son second ? Peut-être parce que se confronter à la Marine ou à des Rois des Mers ou même à d'autres pirates n'impliquait pas d'étaler ses sentiments intimes et très forts.
— On a tous notre jardin secret, reprit l'archéologue en s'asseyant près de lui. Et il arrive qu'on y plante tellement d'choses que ça finit par ressembler à une friche. Et le tien est envahi d'une mauvaise herbe nommée "déni".
— Déni ? s'étonna l'homme élastique.
— Tu refuses certaines choses qui y ont poussé, mais c'est pourtant toi qui les y as semés. Peut-être sans le vouloir, mais elles sont là…
— Où t'avais mis ton oreille ? demanda-t-il brusquement en comprenant que Robin avait très certainement écouté sa conversation avec Franky.
— Derrière un baril de cola, avoua-t-elle avec un petit rire. C'est le seul moyen qu'j'ai trouvé pour découvrir c'qui te tracasse et pouvoir t'aider.
— Je sais… J't'en veux pas, mais dis rien, OK ?
— Bien sûr… Tu sais, reprit-elle, tout c'que Franky t'a dit est juste. Ton lien avec Zoro est particulier et très fort. Tout comme vos sentiments…
— Nos sentiments ? Non, les miens…
— Ils ne sont pas à sens unique, Luffy… Tu veux que j'te dise c'qui s'est passé à Thriller Bark ?
Il tourna brusquement son regard vers Robin. Il était dur et plein d'interrogations. Zoro avait été très gravement blessé sur cette île et il était resté longtemps inconscient. Il n'avait jamais su ce qu'il s'était réellement déroulé. Deux pirates avaient bien dit qu'ils avaient vu ce qui était arrivé à Zoro, mais Sanji les avait emmenés dehors. Il lui avait tout expliqué et celui-ci leur avait fait promettre de n'en parler à personne. Luffy n'aurait pas supporté de voir un de ses compagnons si gravement blessés à cause de lui.
— Tu le sais ? sursauta-t-il en lui agrippant la main.
— Absolument tout…
Robin raconta ce qui s'était passé sur l'île du capitaine Gecko Moria, tout doucement sans omettre le moindre détail. Kuma, un des sept grands corsaires, avait pour mission de tuer Luffy. Zoro s'opposa à lui en lui offrant sa vie à la place. Sanji s'en était alors mêlé en lui faisant la même proposition. Mais le sabreur ne l'entendit pas de cette oreille et assomma le cuisinier. Kuma sortit toute la souffrance provoquée par ses blessures du corps de Luffy et en fit ressentir une infime partie à Zoro. Il faillit en mourir. Mais il ne renonça pas et dans un lieu à l'abri des regards, il plongea les mains dans l'immense bulle de douleur. Lorsque Sanji le trouva, il était à peine vivant.
— Sanji et Zoro étaient si déterminés à prendre ta place qu'ils sont parvenus à influencer Kuma. À l'époque, on ignorait qu'il faisait partie de l'Armée Révolutionnaire commandée par ton père. C'est peut-être l'argument qui a fait changer d'avis ce corsaire.
— Il a fait ça, murmura Luffy complètement sonné par cette histoire. C'est pour ça que j'me suis réveillé en pleine forme… Et pas lui…
— Tu doutes encore de ses sentiments ? Tous les deux croient en toi, mais Sanji a plus agi par loyauté et respect envers toi, même s'il t'aime beaucoup. Il a estimé que t'aurais plus besoin d'un bretteur que d'un cuisinier, sourit Robin se disant que ça ressemblait bien à Sanji. Mais pour Zoro, reprit-elle, c'était plus un réflexe pour te protéger qui est venu du fond de son cœur, de son âme et parce qu'il a fait de ton rêve une partie du sien. Il a pas réfléchi, il a accepté, c'est tout.
— Je sais pas quoi dire, déclara le capitaine au Chapeau de Paille.
— Luffy, quoi qu'tu penses de tes décisions et de tes actes, ton équipage t'aime. Tu es le ciment de notre famille. Si ta détermination se fissure, alors tout notre édifice s'effondrera. Nous avons besoin de toi comme tu as besoin de nous. Nous t'aimons, tu nous aimes et nous le savons…
— Vous êtes prêt à vous sacrifier pour moi… fit-il dans un souffle douloureux en prenant conscience de la chance formidable qu'il avait de les avoir trouvés. Zoro à Thriller Bark, poursuivit-il, toi à Enies Lobby…
— Tu f'rais la même chose pour nous…, l'interrompit-elle en souriant avant qu'il n'énumère toutes les fois où ils étaient intervenus pour le sauver du danger.
— Bien évidemment…
— Tu es assailli par cette culpabilité parce que t'as du mal à concevoir qu'on puisse tenir à toi autant qu'tu tiens à nous. C'est pareil pour Zoro, sauf que vos sentiments sont d'une tout autre nature. Ils se sont développés sans que n'ayez rien fait pour ça. Une telle chose est rare, elle a sa propre volonté et elle veut s'épanouir à travers vous deux. Pour avancer, tu dois l'admettre…
— Et lui ? Comment j'peux savoir s'il a accepté ?
— Pour ça, il vous faudra avoir une conversation longue et honnête…
— Rien que d'y penser, j'suis terrifié…
— Je t'accorde que ce doit être plus difficile que d'affronter les dangers du Nouveau Monde, sourit l'archéologue, mais si tu parviens à surmonter cette crainte, plus rien ne pourra t'arrêter. Tu deviendras bien plus fort que tu n'peux l'imaginer… Et dis-toi que Zoro éprouve peut-être la même crainte que toi…
— Comment j'vais pouvoir vivre avec la peur qu'il soit encore blessé ? Ou tuer ! Ou l'un de vous ! s'écria Luffy en colère contre cette impuissance qu'il ressentait.
— La vie est ainsi faite. Tu devrais l'avoir compris… En devenant pirates, on savait pertinemment c'qui nous attendait. Marineford en est le parfait exemple. La perte de nos amis ou notre propre mort nous guette à chaque virage.
— Et tu sais de quoi tu parles…, compatit le capitaine.
— Absolument… toutes ces années où j'ai échappé au Gouvernement Mondial, à chaque pas que j'ai fait, je pouvais rencontrer ma fin. Mais chacun de ces pas m'a aussi mené jusqu'à toi. Jusqu'à vous tous. Alors, ça vaut l'coup de prendre des risques, non ?
Luffy regarda sa coéquipière comme s'il la voyait pour la première fois. Elle venait de mettre des mots sur ce qu'il éprouvait de puis longtemps sans parvenir à y voir clair.
— Merci Robin…
Elle s'éloigna, le laissant seul avec ses pensées. Tout était si confus. Il ébouriffa ses cheveux comme si ce geste allait l'aider à faire le point. Il s'allongea, les yeux perdus dans l'immensité du ciel. La nuit était entièrement tombée. Les étoiles étaient magnifiques et si nombreuses. Elles avaient dû en voir des choses se dérouler sur ces océans. De très belles, mais d'horribles également. Pourtant, rien ne semblait pouvoir ternir leur éclat. Elles brillaient parce que c'était ce qu'elles devaient faire. Et lui ? Que devait-il faire ? Ce qui était sûr, c'est qu'il ne pouvait pas continuer ainsi. Comme l'avait dit Robin, s'il se fissurait, c'était l'équipage tout entier qui se disloquerait. Pour lui conserver son intégrité, son unité, il devait prendre une décision. Tous souffraient de le voir dans cet état parce qu'il n'arrivait pas à gérer ses sentiments. Il avait parfaitement conscience que c'était égoïste de leur faire ressentir son propre mal-être, mais jusqu'à présent, il ignorait que ça avait un tel impact. Parler avec Zoro ? De toute sa vie, rien ne l'avait autant terrifié. Il finit par aller se coucher…
La voix de Sanji réveilla tout le bateau. Le petit-déjeuner était près et le cuisiner n'aimait pas que les plats refroidissent. Luffy entra dans la salle à manger et s'assit à sa place. À sa gauche, Nami et à droite, Zoro. Son second et sa navigatrice. Il essaie d'être un peu plus enjoué, mais le cœur n'y est pas. Et qu'il se force n'arrangeait pas les choses tant c'était visible. Il n'avait jamais été doué pour la subtilité. Zoro est encore plus sombre que d'habitude et la déprime de Luffy semblait avoir peu à peu gagné tout le monde.
Ce voyage lui paraissait interminable. Il observait son équipage. Usopp et Chopper pêchaient la plupart du temps pour remplir l'aquarium du Sunny. Franky pilotait et entretenait le bateau. Robin lisait beaucoup et parfois elle discutait avec Brook qui composait de nouveaux airs. Nami était penchée sur ses cartes. Sanji s'occupait des estomacs de tous et Zoro était dans la vigie transformée depuis longtemps en salle d'entraînement. Quant à Caesar et Law, il préfère oublier qu'ils étaient à bord. Ils ne faisaient pas partie de l'équipage et toute cette affaire ne les concernait pas.
Pendant plusieurs jours, il observa Zoro. Il était visiblement sur les nerfs et plus d'une fois, ils avaient dû intervenir dans ses disputes avec Sanji. S'ils se respectaient et savant parfaitement se coordonner quand il s'agit de combattre, c'était avant tout dans l'intérêt de tous. Mais ils ne s'appréciaient pas du tout et Luffy avait toujours trouvé ça regrettable. C'est alors qu'il remarqua les regards que son second posait sur lui. Il essayait d'être discret sans toujours y parvenir. Luffy ne comprenait pas l'expression qu'il y avait dans ses yeux. De la colère, mais aussi de la tristesse. Presque du fatalisme. Une idée commença à germer dans son esprit et il entrevoyait peut-être une issue à cette situation qui n'avait que trop duré.
En tant que capitaine, c'était à lui à prendre soin du moral de son équipage. Voilà un argument tout trouvé pour parler avec tout le monde, pour voir ce qu'ils pensaient et s'ils avaient des suggestions à faire. Il lui faudrait donc discuter également avec Zoro. Une fois la conversation entamée, il verra bien quelle sera son évolution. Soit il en maîtrisait le déroulement, soit c'était Zoro, soit elle leur échappait à tous les deux et là, advienne que pourra. Mais il ne fallait surtout pas que pour une raison ou une autre, Zoro se sente dans l'obligation que quitter l'équipage malgré le serment qu'il lui a fait après avoir été blessé par Mihawk. Il lui avait promis de ne plus perdre un combat jusqu'à ce qu'il devienne le roi des pirates.
Il décida donc de discuter avec chacun en privé de manière à ce que tous puissent se confier librement. Malheureusement, ce genre de conversation n'était pas ce que Luffy maîtrisait le mieux, mais il se jura de faire tout son possible. Il était responsable de cette situation, c'était à lui à trouver une solution. Pendant les jours qui suivirent, il parvint à parler à chacun de ses équipiers. Ce ne fut pas facile de trouver la bonne approche pour chacun, mais voyant les efforts que leur capitaine faisait, ils ne furent pas trop difficiles bien qu'ils fussent un peu surpris de sa démarche. Ça ne lui ressemblait pas du tout. Mais la tentative était louable et ils apprécièrent. Enfin de compte, il ressortit pour tous que le problème venait de lui. Eux ils allaient bien, mais le voir déprimer ainsi, ça les attristait beaucoup en particulier parce qu'ils ne comprenaient pas pourquoi. Comme lui au début, avant que Franky ne lui ouvre les yeux.
Il ne restait que Zoro à qui il devait parler. Il ignorait complètement comment s'y prendre, comment engager la conversation. Il monta à la vigie où son second s'entraînait et entra. Zoro était là, torse nu en train de soulever de la fonte. Il était en sueur et ses muscles gonflés par l'effort, ondulait sous sa peau tannée par le soleil du grand large. Luffy déglutit à cette vision qui lui tordit le ventre. La cicatrice que Mihawk lui avait faite était encore bien visible, souvenir d'une époque où les choses semblaient plus simples. C'était aussi la première fois que l'un d'eux était si gravement blessé et qu'il avait ressenti une telle frayeur. Mais voir son second ainsi provoquait des frissons d'excitation dans tout son corps. Il n'était pas ignare de ce genre de choses et il savait parfaitement ce que ça signifiait. Innocent, oui, idiot, certainement pas. Il sourit pour lui-même et alla s'asseoir sur l'une des banquettes qui courraient le long du mur tout autour de la pièce.
— Tu viens m'parler à moi aussi ? lui demanda le sabreur tout en poursuivant son exercice.
— Normal, j'ai discuté avec tout l'monde…
— Pourquoi moi en dernier ?
— J'ai gardé l'meilleur pour la fin, plaisanta Luffy.
— Le meilleur ?
— Bien sûr, t'es mon second…
— J't'écoute…
À l'évidence, Zoro ne semblait pas vouloir lui faciliter la tâche. Était-ce de la malice pour le mettre gentiment dans l'embarras ? Était-ce une petite vengeance parce qu'il était vexé de passer après tous les autres malgré l'explication de son capitaine ?
— J'suis désolé de vous avoir fait endurer mon humeur… j'pensais pas qu'ça vous affecterait à c'point…
— Pourquoi t'étais comme ça ?
— J'l'ignore… j'ressens des choses sur lesquelles j'arrive pas à mettre des mots… C'est pas votre faute, mais vous en avez fait les frais… Et toi ? Comment tu t'sens ?
— De mauvais poil…
— Pourquoi ?
— Parce que tu t'sens mal dans ta tête…, déclara-t-il en le fixant du regard. J'te connais mieux qu'personne et quand tu vas mal, j'vais mal et c'est bien c'qui m'tape sur nerfs parce que j'sais pas pourquoi…, termina Zoro en posant son altère et en prenant une serviette pour s'essuyer.
— Je serai bien incapable de l'dire…, fit Luffy à mi-voix.
— Tu mens et j'apprécie pas du tout, grinça Zoro en haussant le ton.
— Non, je ne…
— M'insulte pas, Luffy…, gronda-t-il. Je sais c'qui t'arrive, alors sois honnête et franc comme tu l'as toujours été…
Un silence lourd tomba entre les deux hommes. L'un patientait de plus en plus difficilement, l'autre temporisait pour trouver le courage d'avouer ses sentiments. Comment dire ce genre de choses ? C'était tellement embarrassant, presque humiliant, de devoir mettre son cœur à nu sans même savoir si ça en valait la peine.
— Alors Luffy ? Qu'est-ce que t'attends ? s'agaça son second qui s'était pendu au plafond par les pieds pour travailler ses abdominaux avec des poids dans chaque main.
Finalement, Luffy songea qu'au lieu de tergiverser et de tourner autour du pot, parfois, il valait mieux une approche directe. Et il ne voulait surtout pas que Zoro pense qu'il pouvait lui mentir. Ça, c'était hors de question. Alors, il se leva et marcha vers son second, son ami, le tout premier membre de son équipage et lorsqu'il redescendit à son niveau la tête à l'envers, il le bloqua avec ces mains sur son visage et l'embrassa. C'était encore la meilleure réponse qu'il pouvait fournir comme explication. Et tant pis s'il se faisait jeter violemment. Il n'avait jamais vu Zoro avec un homme ni avec une femme d'ailleurs. Donc voilà. Il avait joué son meilleur atout, la surprise. Le sabreur en laissa tomber ses poids sur le parquet. Luffy s'attendait à être repoussé et il commença à s'éloigner vers la porte. Il entendit le choc de quelqu'un qui saute sur le sol et une main le retourna soudainement.
— Où tu vas ?
— T'as la réponse à toutes les questions que tu t'posais, j'ai rien d'autre à dire…
— Ah bon… Tu m'embrasses et tu t'en vas… Tu veux pas savoir pourquoi j'étais d'mauvaise humeur ?
— C'était à cause de moi, tu m'l'as dit…
— Mais tu t'es pas d'mandé si c'était la seule raison…
— Sois plus clair…
— J'suis nerveux pour les mêmes motifs que toi, crétin…
Zoro se pencha et posa lentement ses lèvres sur celles de son capitaine qui eut un gémissement à la fois de surprise et de plaisir. Son cœur fit un looping dans sa poitrine et il sourit contre la bouche de son second qui commença à s'en délecter. Peut-être était-il encore pur, mais il n'était pas ignorant. À son tour, il répondit à ce baiser avec voracité. Il réalisa qu'il en avait le désir depuis longtemps sans en avoir conscience. Il avait besoin de prendre Zoro dans ses bras depuis… depuis presque leur rencontre. Il voulait sentir son corps contre le sien. Il en avait un désir fou comme si ça lui était brusquement devenu indispensable pour vivre au même titre que respirer ou manger. Plutôt manger en ce qui le concernait.
— J'risque d'être un peu brutal, souffla Zoro à son oreille en le faisant frissonner, j'en ai tellement envie…
— Surement pas… La brutalité, c'est quand on s'bat, mais là, pas question, répondit Luffy de la même manière en perdant ses lèvres dans le cou puissant.
— À tes ordres, capitaine…
Zoro poussa doucement Luffy qui tituba jusqu'au mur en gémissant de plaisir sous les vagues pétillantes que provoquaient les frôlements de son second qui effleurait sa peau du bout des doigts. Il s'appuya contre sa boule de gomme et chacun ressentit le désir qui s'exprimait sans vergogne au bas de leur ventre. Ils restèrent un bon moment ainsi à s'enivrer de cette émotion de la chair, pressant légèrement leurs corps pour en éprouver toutes les sensations. Les caresses qu'ils échangeaient les faisaient frissonner délicieusement. Leurs souffles devinrent plus rauques et plus rapides, leurs plaintes de volupté étaient plus nombreuses. Luffy glissa une main jusqu'à l'entrejambe de Zoro qui ne put retenir un hoquet de surprise. Il ne l'aurait pas cru capable d'un tel aplomb en le regardant droit dans les yeux.
— Nnh… doucement…
— Et c'est toi qui disais qu'tu risquais d'être brutal parce que t'avais envie…
— Oui… mais j'voudrais pas qu'tu sois déçu…
— Tu m'décevras jamais…, tu fais pas partie des gens qui déçoivent, fit l'homme élastique en débarrassant le bretteur de son haramaki avant de dénouer les cordons de son pantalon.
Zoro prit une brusque inspiration quand la main de Luffy se referma sur sa virilité pour la caresser sur toute sa longueur. Décidément, il était très entreprenant et ça n'était pas pour déplaire au sabreur. Il avait toujours pensé que, si un jour ce genre de choses se produisaient entre eux, il lui faudrait y aller avec beaucoup de délicatesse pour ne par heurter sa candeur. Et là il était agréablement surpris de voir que son capitaine était au fait de certaines choses qui se passaient entre adultes consentants.
— On reste contre ce mur… ou on va sur la couchette ?
Sa voix était d'une telle concupiscence que Zoro crut qu'il allait s'épancher comme ça, d'un coup sans autre stimulation que cette main chaude et habile qui manipulait si divinement son quatrième sabre.
— Accroche-toi, j't'emmène…
Luffy sourit et entoura son second de ses bras et de ses jambes. L'élasticité avait du bon parfois. Le bretteur ferma à clé la porte de la vigie en passant devant et se dirigea vers la couchette qu'il lui arrivait d'utiliser après une séance d'entraînement. Il s'agenouilla et déposa, avec beaucoup de douceur, son homme qui s'agrippait à lui comme un bébé koala. Ils s'embrassèrent à nouveau avec beaucoup plus de passion, découvrant la saveur de l'autre et attisant le feu qui leur brûlait les veines. Luffy se dégagea pour chevaucher son compagnon et lui ôter ses derniers vêtements. Zoro se laissa faire et lorsqu'il fut aussi nu qu'à sa naissance, il accueillit son capitaine entre ses jambes.
Le contact de leur corps et de leurs désirs tendus les fit gémir de concert, un son si sensuel qu'il rajouta à leur excitation. Ils étaient dans l'urgence de l'assouvissement de leur envie et, mais ils le contrôlaient pour ne pas y mettre un terme trop rapide. Ils voulaient en savourer la moindre miette. Ils attendaient ça depuis trop longtemps pour se précipiter. Ils pourront recommencer, mais une première fois est unique par définition en particulier pour Luffy. Zoro se sentait honoré de ce cadeau et en même temps, il craignait d'être maladroit. Luffy n'était pas le premier homme avec qui il allait faire l'amour. Ces amis croyaient qu'il se perdait parce qu'il avait un sens de l'orientation absolument déplorable, ce qui était vrai, mais ce n'était pas toujours le cas. Il lui arrivait de s'égarer volontairement s'il avait repéré une lanterne rouge au-dessus d'une porte discrète. Et, quelle que soit l'île sur laquelle on débarquait, cette veilleuse écarlate ne voulait dire qu'une chose : maison close.
Mais Luffy était trop ignorant de ce genre de détail pour deviner ce qui se cacher dans ces établissements et le sabreur n'était jamais tombé sur un partenaire vierge. Son capitaine serait le premier et il allait devoir déployer des trésors de douceur et de contrôle. Mais il était prêt à relever le défi. Et ça commençait par laisser faire son élastique pour découvrir par lui-même les capacités du corps humain à offrir et à éprouver du plaisir. Celui-ci se coula sur le corps athlétique pour embrasser la peau humide et salée à cause de la transpiration, glisser sa langue dans chaque creux et chaque sillon formé par les muscles durs et bien dessinés. De chaque baiser naissait un frisson qui lui donnait la chair de poule. Il souriait, heureux de constater que rien ne semblait gêner Luffy. Pas même lorsqu'il se retrouva tout près de son sexe fièrement dressé comme une invitation à ce qu'on s'occupe de lui. Et tout naturellement, il mit un coup de langue si inattendu sur toute la longueur que Zoro cria presque en se redressant sur les coudes pour voir son novice de capitaine le faire disparaitre dans sa bouche. Cette vision lui raidit les reins à tel point qu'il faillit perdre son contrôle.
— T'es fou… grogna-t-il… préviens…
— Ben sinon c'est pas drôle…
— Oui, mais…
Un autre gémissement plus fort lui échappa quand Luffy recommença avec un sourire lubrique. Alors qu'il le pensait innocent et pur, celui-ci était en train de lui démontrer tout le contraire. Oui, physiquement il n'avait jamais eu de rapport avec quiconque, mais il n'était pas aussi ignorant que tous le croyaient. Il savait parfaitement ce qui pouvait advenir entre deux personnes et il n'éprouvait pas le moindre embarras à expérimenter. Ce n'était qu'ainsi qu'il deviendrait moins maladroit.
Zoro s'arc-bouta pour se placer à l'envers et lui offrir le même plaisir. Il n'était pas égoïste pour un berry et surtout pas avec son homme. Luffy s'attendait à cette caresse, mais pas au plaisir qu'il ressentit. Il ne fallut que quelques mouvements pour qu'il perde tout contrôle et se répande dans la gorge de son second avec un cri qu'il étouffa avec son poing. Le bretteur gouta cette saveur et sourit. Il ne bougea pas jusqu'à ce qu'il sente l'assouplissement du membre. Il le libéra et remonta vers lui pour l'embrasser à suffoquer.
— C'est la première fois qu'tu ressens c'plaisir ? lui demanda-t-il à mi-voix en le serrant dans ces bras.
— Non, mais ma main c'est pas ta bouche…
Zoro haussa les sourcils et ferma les yeux. Non, il ne devait pas se plaindre. C'était bien lui qui lui avait dit d'être honnête et franc. Il récoltait ce qu'il avait semé. Il eut un léger rire et laissa Luffy s'allonger sur lui et lui souffler doucement sur le visage. Qui aurait cru que ce petit bout d'élastique en mesure de se faire obéir d'une vache des mers (Meuh-Meuh) ou d'une pieuvre géante (Surume) pouvait être capable de tant de tendresse ? Et le cœur de Zoro se gonfla de bonheur. Pas que son cœur, d'ailleurs. Et s'apercevant de la forme que retrouvait son second, Luffy se pressa contre lui et l'embrassa.
— J'ai envie d'toi, Zoro… complètement…, murmura son capitaine en se mettant à califourchon sur lui.
Le sabreur plongea son regard dans celui de son homme pour y chercher la plus infime trace de crainte, celle qui accompagnait toujours une première fois de ce genre. Parce que faire l'amour pour la première fois ce n'était pas comme pêcher par-dessus le bastingage, ou nager dans les nuages de Skypiea. S'offrir si intimement impliquait d'avoir une confiance absolue en l'autre. Et Luffy avait déjà remis sa vie entre les mains de son ami à de nombreuses reprises. Là, il ne s'agissait que de son corps. Du moins c'est ce qu'il pensait sans avoir vraiment conscience de ce que cela pouvait signifier. Il se tourna sur le flanc et Zoro se plaça derrière lui tout en poursuivant ses caresses et ses baisers sur ses épaules et sa nuque.
Et il obéit à son capitaine.
La sensation ineffable de cette fusion de leur chair leur arracha un puissant gémissement de pur bonheur. Ils s'appartenaient enfin. Définitivement. Zoro entama de lents mouvements pour que le plaisir croisse progressivement de manière à le savourer longtemps tout en effleurant cette fierté dressée qui semblait supplier pour avoir un peu d'attention. Luffy avait passé un bras derrière le cou de Zoro qui l'avait ceinturé pour s'ancrer entre ses reins. À chaque retour, il allait plus loin et les plaintes des deux hommes prenaient de l'ampleur. Leurs souffles étaient devenus des halètements de pure concupiscence rythmés par les ondulations de leurs hanches. Luffy lâcha les épaules pour s'agripper à une fesse et inciter Zoro à accélérer la cadence. Ils restèrent ainsi longtemps, n'allant pas trop vite pour apprécier ce plaisir qui les dévastait comme une tempête des sens. Mais le capitaine voulait essayer autre chose et il se dégagea délicatement pour chevaucher son homme qui ne se fit pas prier.
Zoro put ainsi se délecter jusqu'à plus soif du corps qui s'activait sur le sien en caressant son ventre et en agaçant la chair érigée de son torse lui arrachant de petits soupirs lascifs. Il enveloppa le sexe raide et sensible pour le flatter de bas en haut attisant toujours plus ce désir qui se déployait comme la grand-voile sous le vent. Luffy commença à perdre le contrôle et ses mouvements devinrent plus rudes, ses plaintes plus fortes à chaque fois que Zoro revenait en lui. Son amant le laissa faire. Ce n'était pas comme s'ils n'allaient plus jamais recommencer. La prochaine fois ce sera différent et ce sera certainement dans peu de temps. Mais la première se devait d'être spéciale et inoubliable par définition. Elle devait marquer leur chair et leurs esprits au fer rouge, comme un sceau indélébile. Oui, ils appartenaient l'un à l'autre. Depuis toujours. Et à jamais.
Leurs cœurs battaient fort, leurs respirations étaient erratiques, leurs corps crispés par le plaisir se tendirent tels des arcs quand l'orgasme les dévasta. Luffy eut un puissant cri de jouissance qui crucifia Zoro de bonheur. Il retomba sur la poitrine du bretteur à bout de souffle, en sueur avec son magnifique sourire rayonnant sur les lèvres.
— Dis…, marmonna Luffy en relevant la tête pour regarder son compagnon.
— Mmh…
— C'est quoi l'amour ?
— J'crois qu'il existe autant de définitions que de personnes…, répondit le sabreur après quelques secondes de réflexion.
— Chacun a la sienne ?
— Oui, j'pense…
— C'est quoi la tienne ?
— J'y ai jamais vraiment songé…
— Pour moi, c'est être tout l'temps avec toi…
— On est constamment ensemble…
— Non pas toujours… t'étais pas à Marineford… on a été séparé pendant deux ans, et tu m'as affreusement manqué… Je sais qu'les choses auraient été différentes si t'avais été à mes côtés…
— Ça, on n'en sait rien… Moi, j'suis heureux quand je te vois… quand j'entends ta voix ou ton rire, quand j'me bats avec toi… Mais j'ai aussi terriblement peur que tu t'fasses blesser, que tu tombes à l'eau et que personne le voie…
— J'arrive pas à imaginer qu'un jour tu sois plus à mes côtés… Ça m'fait mal…
— Moi aussi ça m'fait mal…
— Alors on n'y pense plus…, déclara Luffy en effleurant la peau de Zoro dont il sentit immédiatement la réaction. J'ai envie de recommencer…
— Tant qu'tu voudras…
Et depuis ce jour, l'atmosphère sur le Thousand Sunny redevint beaucoup plus détendue. Luffy s'était remis à faire l'idiot avec Chopper et Usopp, et tous les autres vaquaient à leurs occupations – si, si pour Zoro la sieste était une occupation – et le temps passait paisiblement. À toute heure, ils entendaient la vigie qui résonnait de gémissements ou de plaintes significatives quand Luffy et Zoro s'y enfermaient. L'équipage était heureux pour eux. Tout était rentré dans l'ordre.
L'île de Dressrosa se dévoila à l'horizon quelque temps plus tard, par une belle matinée ensoleillée…
Fin.
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