Chapitre 56 : Le poids des décisions
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Aujourd'hui, les directrices allaient faire une grande annonce lors du repas du soir et cela faisait deux jours que le tableau du classement du meilleur élève de Poudlard avait disparu. Les rumeurs allaient bon train et beaucoup d'élèves pensaient qu'elles allaient annoncer le gagnant. Rien qu'à l'idée, le cœur du Serpentard battait la chamade et il se sentait nerveux. Il savait qu'à un moment donné, il avait occupé la première place mais il pouvait l'avoir perdue depuis le temps. Il ignorait à quel moment exactement le concours avait pris fin. Les notes n'étant pas le seul moyen de départager les différents élèves, les choses pouvaient avoir bougé.
En plus, Regulus ne voulait pas se faire de faux espoirs. Il avait encore en mémoire sa déception lors de la sélection du Grand Tournoi de Duels. Et puis, Regulus le savait, généralement les bonnes choses arrivaient aux autres et n'étaient pas pour lui. Que ce soit à cause de ses erreurs de jugements, sa maladresse ou la cruauté de certain, le fait était que le brun avait rencontré de nombreuse difficulté et de désillusion. A présent cela allait mieux, néanmoins Regulus n'arrivait pas à se défaire du sentiment de fatalité qu'il ne pouvait accéder au bonheur qu'à petite dose. Remporter la compétition et gagner la récompense il en rêvait. Il avait voulu en discuter avec James, mais il s'était abstenu. James et lui se monteraient la tête et ce n'était pas ce qu'il voulait. Il était inutile de parler d'un évènement qui ne s'était pas encore produit.
Si par chance il avait réussi à conserver la première place, alors James serait la première personne à qui il l'annoncerait. Le Gryffondor pourrait alors partager son bonheur.
Il ne restait que quelques heures avant que l'attente ne se termine et Regulus resta concentré tout le long de ses cours, prenant des notes. Bientôt, Poudlard se viderait de ses élèves. A l'origine, c'était pour leur permettre de se reposer et de préparer leurs examens à venir. Mais Regulus sentait qu'il y avait à présent une autre raison, un motif que les enseignants n'évoquaient pas devant eux.
Récemment, James avait reçu une lettre de Remus qui lui avait expliqué la situation. Il avait rassuré ses amis et leur avait dit qu'il sortirait bientôt. Ils avaient été à la fois soulagés et estomaqués d'apprendre ce que Jedusor lui avait fait. Malheureusement, ils avaient un plus gros problème encore car à présent, le psychomage connaissait beaucoup de leurs actions tandis qu'eux ignoraient encore presque tout de lui. C'était par le biais de Remus qu'il avait pu découvrir le secret de James et tenter d'envoyer Regulus à la mort par exemple.
Parfois, cela effrayait le 6ème année de savoir que le psychomage pouvait nuire à l'ancien Gryffondor. Il connaissait son secret et à tout moment, il pourrait l'exposer s'il le désirait. S'il ne l'avait pas encore fait, c'était pour ne pas alerter sur ses manigances et ses agissements en leur faisant croire qu'ils avaient encore l'avantage. Il était également possible qu'il n'ait encore rien dévoilé dans le but de les faire chanter plus tard.
Durant leur semaine de repos, Sirius et lui devraient dire la vérité à James. Ils avaient repoussé la discussion depuis trop longtemps déjà. Le Serpentard savait qu'il n'y avait pas de bonne façon de faire, il espérait simplement que le brun ne leur en voudrait pas d'avoir gardé une information si importante pendant si longtemps. James n'était pas quelqu'un qui s'énervait facilement mais cela ne signifiait pas qu'il n'était pas capable de ressentir de la colère, du ressentiment ou de la déception. Regulus ne le voyait pas leur faire la leçon ni tout casser autour de lui. Il était néanmoins presque sûr qu'il leur interdirait de l'accompagner pour ses prochaines pleines lunes.
Le 6ème année ne pourrait même pas protester. Même si James ne lui avait fait aucun mal, Regulus avait tout de même pu se rendre compte que rencontrer un loup-garou quand on n'y était pas préparé pouvait être dangereux. La spécialiste lui avait parlé des loups-garous non dangereux pour l'homme, ou qui comportaient un risque minime. James devait faire partie de la dernière catégorie, mais rien ne pouvait certifier qu'un jour, son loup ne ferait pas un carnage.
Le Serpentard avait envie d'y croire. Après tout, la spécialiste avait une connaissance extraordinaire sur le sujet. Mais il était difficile de faire face à un sorcier qui avait subi la morsure un soir de pleine lune, de se tenir droit, sans défense, et d'essayer d'avoir confiance. Regulus voulait aider son petit-ami malgré tout. Il voulait faire tout ce qui était en son pouvoir pour l'aider à supporter son fardeau. Malheureusement, il ignorait si un jour il pourrait devenir un Animagus et passer des pleines lunes avec James. Il ne pouvait rester avec des doutes et devait trouver dès à présent des solutions. Pour l'instant, la seule chose que le brun pouvait faire était de l'aider à comprendre les changements qui s'opéraient en lui et les solutions pouvant faciliter son quotidien.
James ne le laisserait probablement pas faire autre chose de toute façon. Il refuserait également que Sirius et Remus prennent encore des risques pour lui. Il n'accepterait aucune excuse, et surtout pas le fait qu'ils s'en soient finalement sortis la dernière fois.
James était quelqu'un de jovial, d'un peu enfantin et parfois d'un peu puéril. C'était toutes ces raisons qui faisaient qu'il était difficile de l'imaginer en monstre sanguinaire…
L'esprit du cadet de la famille Black s'égarait de plus en plus, si bien qu'il fut surpris lorsque son dernier cours se termina. Il rangea ses affaires sans rien laisser paraître et quitta sa salle de cours. Après le dîner, il essayerait de joindre son copain. Il avait pris l'habitude de lui parler avant d'aller dormir, cela lui donnait l'impression que le brun était encore à Poudlard, qu'il était à ses côtés. À cette pensée, le Serpentard ne put s'empêcher de sourire.
Dans le couloir, il croisa Rita Skeeter qui discutait avec une Poufosuffle. Il était surprenant de penser que la colporteuse de ragots qu'elle était pouvait bien se conduire et se lancer avec sérieux dans des projets importants. Le pire était qu'elle s'entendait bien avec James et Regulus n'en revenait toujours pas. Comme les deux travaillaient ensemble, ça obligeait la Serdaigle à venir le trouver quelquefois pour lui emprunter son miroir magique pour les réunions de Harry.
Regulus ne se faisait toujours pas à ce nom d'ailleurs. C'était étrange selon lui.
-Mini Black ! l'apostropha-t-elle en l'apercevant.
Regulus grinça des dents. Il détestait quand on l'appelait ainsi. James avait malheureusement lancé une mode auprès de certains des élèves. Même s'il n'en avait pas envie, il attendit que la blonde le rejoigne. Comme d'habitude, ce serait probablement pour lui emprunter son miroir.
-Comment vas-tu ? lui demanda-t-elle en s'arrêtant à sa hauteur.
-Ne faisons pas semblant d'avoir des choses à nous dire, soupira-t-il. Dis-moi ce que tu veux, ça ira plus vite.
Elle haussa les épaules puis sourit, pas du tout rebutée par sa froideur.
-Rien de spécial.
Il fronça les sourcils.
-Tu sais, pour le premier numéro, j'avais fortement suggéré à James de parler de sa bisexualité. Enfin, il n'est pas d'accord sur le terme, mais les gens comprendront mieux que s'il parle de pansexualité, attaqua-t-elle ensuite, l'air de rien.
-Je ne comprends pas de quoi tu parles, fit Regulus, mal à l'aise.
Après hésitation, il la dépassa et continua son chemin. Elle le rattrapa alors rapidement. Elle s'accrocha à son bras et les élèves autour d'eux les dévisagèrent.
-Pas la peine de paniquer, je sais que vous êtes ensemble. Il faudrait être aveugle pour ne pas s'en rendre compte, expliqua-t-elle, un sourire aux lèvres.
-Tais-toi, la coupa-t-il froidement.
Rita n'était pas discrète et Regulus craignait que quelqu'un ne les entende. Paniqué, il la tira jusqu'à un endroit plus calme et quasiment désert.
-Il n'y a rien entr-
-Il m'a déjà tout dit.
Regulus sentit une boule se former dans sa gorge à ces mots.
-En voyant ta réaction, je comprends mieux pourquoi il ne voulait pas le dire, soupira-t-elle ensuite. En soi, je ne lui ai jamais demandé de parler de toi, juste de balancer une bombe. Je voulais te parler pour que tu le persuades, mais je crois que c'est mort.
Le Serpentard la foudroya du regard et Rita leva les mains en l'air pour lui signifier qu'elle venait en paix.
-Tout va bien, je suis de votre côté. Je ne vais pas trahir, James, c'est lui qui me permet enfin de faire ce qui me passionne vraiment !
Regulus ne savait pas s'il pouvait lui faire confiance alors il n'ajouta rien de plus et la planta là. Il avait besoin d'aller se reposer avant d'aller dîner.
Dans la salle commune, certains révisaient alors que d'autres jouaient. Dans le dortoir, il n'y avait qu'une personne, un mec avec qui Regulus n'échangeait pas plus que des banalités. Ironie du sort, il lisait le magazine Harry. Regulus grogna et s'emmitoufla sous ses draps après avoir tiré ses rideaux.
Il tenta de se vider l'esprit, mais en vain. La conversation qu'il avait eue avec Rita tournait en boucle dans sa tête et il hésitait à appeler son petit-ami pour lui parler. Mais il ne voulait pas réagir à chaud. James pourrait lui reprochait d'avoir une réaction excessive. Apparemment, il avait déjà parlé avec la blonde et gérait la situation. Si la Serdaigle était venue le trouver, c'était bien parce qu'elle avait espéré qu'il lui fasse changer d'avis.
Regulus tenta de se rassurer et un peu avant 19h, il quitta sa chambre. C'était l'heure d'aller manger, mais surtout d'écouter le discours des directrices et de savoir si oui ou non, il avait gagné la compétition.
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-Apparemment, elles vont annoncer le grand gagnant de leur si prestigieux concours, souffla Sirius.
Regulus jeta un coup d'œil à son frère.
-Ca ne t'intéresse pas ?
-C'est juste que je n'ai jamais été pour le principe de compétition individuel, lui rappela son frère. Et surtout de publier en grand et partout qui sont les meilleurs et ceux qui ont plus de mal ! Je préférais l'ancienne méthode de notation par point et par maison qu'avait instaurée Albus. C'était l'essence même de Poudlard et ça promouvait de meilleures valeurs.
Assis à table, Regulus observa son frère jouer avec ses couverts en attendant que les professeurs ne s'installent. Le cadet n'y avait jamais prêté attention, mais il était vrai que Sirius ne s'était aucunement investi dans la compétition alors qu'il en avait les capacités. Mais ce n'était pas nouveau. Le Gryffondor n'avait jamais été adepte des études, peu importe qu'il ait un certain talent à ce niveau.
Même si Regulus n'était pas d'accord avec lui, il savait qu'il était inutile d'en parler. Sirius était constamment sur les nerfs en ce moment. Le Serpentard savait que cela avait beaucoup à voir avec Remus, mais il n'y avait pas que ça. Son frère n'était plus le même depuis plusieurs jours et il ne savait pas encore s'il devait s'en inquiéter ou pas.
Regulus préféra donc ne rien dire et laissa son frère s'engager dans une nouvelle conversation avec ses amis Gryffondor qui venaient de les rejoindre. Après hésitation, Pamela et Severus s'installèrent à leur côté. Regulus remarqua tout de suite le malaise palpable à l'arrivée de la Serdaigle et à quel point tout le monde en faisait beaucoup trop pour essayer de le dissiper.
Regulus ne tenta même pas de dire un mot. À chaque fois qu'il voyait la blonde, il voyait son courage et la force qu'elle avait eue de mener son combat jusqu'à son terme. Sans le vouloir, elle lui renvoyait sa lâcheté et cette blessure indélébile dont il n'arrivait pas à se débarrasser.
Quelques minutes plus tard, les co-directrices prirent la parole et le silence fut immédiat dans la Grande Salle. Tout le monde était suspendu à leurs lèvres. Il n'y avait plus aucun suspens à présent, tout le monde savait qu'elles allaient parler du concours de Poudlard.
Regulus se sentait nerveux. Rien qu'à ses côtés, il y avait 3 élèves qui pouvaient prétendre au titre : Lily, Pamela et Severus. Chez les Serpentard, à part lui, Nott était aussi bien placé car il avait occupé un moment la première place. Remus avait un temps occupé le haut du classement lui aussi, mais avec sa longue absence, il avait manqué l'opportunité d'augmenter ses points et ainsi de conserver sa place. C'était plutôt injuste pour lui, mais n'étant pas là pour demander des comptes, les directrices ne s'étaient pas embarrassées de conserver une certaine éthique quant au concours.
Alors que Mundock parlait, Regulus sentit quelqu'un lui prendre la main. Il jeta alors un coup d'œil à son frère, étonné.
-Elle est pour toi celle-là, fais-moi confiance.
Regulus haussa un sourcil. Son frère qui affirmait que c'était un concours stupide prenait quand même le temps de le rassurer et de l'encourager ? Regulus avait le sentiment d'être continuellement surpris par son aîné en ce moment.
-Qu'est-ce que tu…
-Regulus Black ! tonna la voix forte de la Russe.
Le brun faillit sursauter. Il y eut des applaudissements et son frère lui serra encore la main avant de le lâcher. Le 6ème année mit ensuite plusieurs instants à comprendre qu'il avait bel et bien fini premier et qu'il avait gagné la récompense. Tout le monde le regardait et certains lui firent signe de se lever pour qu'il se dirige vers la table des professeurs où les deux femmes l'attendaient. Si la blonde souriait, sa collègue avait comme à son habitude son air sérieux et implacable. Les directrices, debout derrière leurs pupitres, observèrent ensuite son avancée.
Le cadet des Black avait les jambes flageolantes et il craignait qu'à tout moment, celles-ci ne le portent plus. Il ne voulait pas trébucher et s'offrir une humiliation inutile. Il arriva finalement sans encombre devant elles.
-Félicitation M. Black.
-Merci, réussit-il à dire d'une voix claire.
-Vous avez eu d'excellentes notes dans pratiquement toutes les matières. Vous êtes volontaire et appliqué. Nous regrettons cependant que vous ne vous impliquiez pas davantage dans la vie étudiante et avec vos camarades. Néanmoins, vos résultats restent tout à fait remarquables.
Regulus continua à sourire. Il valait mieux qu'il se concentre sur le positif. Il avait toujours été un solitaire de toute façon. Et encore, il avait fait de gros progrès depuis l'arrivée de Padfoot.
-Nous allons d'ores et déjà prévenir le village de vela de votre prochaine venue et organiser avec eux votre voyage. Il se déroulera durant l'été et durera deux à trois jours. Vous serez bien accueilli et nous comptons donc sur vous pour donner une bonne image de Poudlard.
Il acquiesça.
Les directrices invitèrent ensuite son directeur de maison à s'avancer. Celui-ci avait dans ses mains une médaille en broche. Sans rien dire, il l'accrocha à la chemise du Serpentard et lui fit signe de se tourner face à tous ses camarades. Tout le monde l'applaudit et Regulus sentit ses joues chauffer. C'était comme vivre un rêve. Petit à petit, il commençait à prendre conscience que tout ceci était vrai, que cela lui arrivait bien à lui. Ses efforts avaient payé et il en était enfin récompensé.
C'était agréable.
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Dawlish se sentait à la fois en colère et frustré. C'était la première fois dans l'histoire que le sérieux et le professionnalisme de l'élite spéciale du ministère de la magie subissaient de tels camouflets. Poudlard avait subi des dommages alors qu'elle avait été placée sous la responsabilité du bureau des Aurors. Peut-être pas directement la première fois, mais tout de même. Après tout, ils avaient eu la responsabilité d'arrêter les prisonniers en fuite.
Le sorcier avait l'impression que depuis la visite d'élèves à Azkaban, beaucoup de choses avaient commencé à dégénérer. Pour ce qui était arrivé à Remus Lupin, le ministre avait couvert l'affaire. On l'avait laissé faire sans trop de mal parce que c'était un avantage non négligeable dans l'enquête que celui qu'il cherche se pense invulnérable. Mais probablement que cela retomberait sur le ministre de l'Intérieur si un jour cette affaire venait à se savoir. Combien de temps la famille Lupin accepterait-elle de ne pas ébruiter l'affaire ? Si les raisons de tels agissements pouvaient se comprendre, la famille du Poufsouffle pouvait aussi penser que si le ministre tenait à garder cette affaire secrète, c'était pour éviter d'être éclaboussé par un nouveau scandale, et non pour l'enquête comme il l'affirmait. Dawlish connaissait un peu les Lupin. Il s'agissait de personnes raisonnables. De plus, Lyall travaillait au ministère dans la section régulation des animaux magiques, il savait un peu comment ce monde fonctionnait. Mais il n'était pas seul à prendre les décisions et il s'agissait de leur fils.
L'Auror avait relu plusieurs fois la déposition du Poufsouffle. Il expliquait comment se passait sa vie à Poudlard, donnait le détail de ses relations. Il ne semblait pas avoir d'ennemi. Il expliquait également quand il avait remarqué les premiers symptômes. John savait qu'il avait lui-même été voir l'infirmière de l'école pour indiquer un changement dans sa santé. C'était fort de sa part d'avoir pu s'en rendre compte. Il avait beau être intelligent et futé, cela restait très difficile à détecter. À présent, Dawlish comprenait mieux pourquoi Maugrey avait fait des éloges au châtain.
Lors d'un interrogatoire un peu plus poussé, le jeune homme avait indiqué qu'à part l'entrevue avec le psychomage de l'école, son quotidien n'avait rien eu d'inhabituel. Remus Lupin ne faisait pas partie des élèves ayant besoin d'un suivi psychologique mais avec l'attaque, il aurait pu avoir besoin de parler. Pourtant, il avait indiqué qu'il n'avait pas vu Jedusor à sa demande, mais sous l'instance de celui-ci. Fait encore plus étrange, il affirmait ne pas se souvenir exactement de ce qu'il s'était passé.
Bien entendu, ce détail avait alerté l'Auror. Avec Maugrey, cela faisait un moment qu'ils enquêtaient sur l'homme. Maugrey s'était même mis en congé pour pouvoir se consacrer entièrement à son arrestation. Grâce à Marlene McKinonn, il savait que l'homme était dangereux. Alors même si ses collègues n'avaient interrogé que brièvement le psychomage, John était décidé à bien creuser cette piste. Le Poufsouffle leur avait donné assez d'éléments pour que ce soit perturbant, mais à part des faisceaux d'indices troublants, il n'y avait pas grand-chose. La seule manière de pouvoir confondre le psychomage serait que les analyses prouvent clairement qu'il était le responsable de l'état de Remus Lupin.
Il en avait eu la possibilité. Jedusor fréquentait le même établissement que la victime et possédaient la puissance et les connaissances nécessaires. La seule chose qui manquait était la raison. Il était également compliqué de chercher un alibi étant donné que les Aurors ne pouvaient déterminer le jour exact et encore moins l'heure où c'était arrivé. Comme la possession du virus n'avait pas eu le temps de trop avancer, il n'y avait qu'une infime trace de l'empreinte magique. Dawlish mettrait tout en œuvre pour que les investigations ne soient pas arrêtées en cours de route. Il ne leur restait que ça car malheureusement, Tom Jedusor avait démissionné de son travail. S'il avait trouvé le timing suspect au début, en parlant avec les directrices, il avait découvert que Tom Jedusor s'était déjà entendu avec Albus Dumbledore pour partir à la fin de l'année scolaire. Il partait avec quelques semaines d'avance finalement alors cela ne constituait pas en soi une preuve d'une tentative de fuite.
John se gratta le menton, constatant que sa barbe avait encore poussé. Depuis combien de temps ne s'était-il pas rasé ? Avec tout ce qu'il avait à faire ces derniers temps, il n'avait pas le temps de prendre soin de lui. Il était tellement heureux et reconnaissant d'avoir une femme si aimante et compréhensive à ses côtés. Le travail d'Auror était dur et compliqué. Beaucoup finissaient seuls et c'était aussi pour cette raison qu'ils se soutenaient autant entre collègues. John s'était ainsi pris d'affection pour Maugrey, leur dernière recrue. C'était un fou du boulot qui, malheureusement, négligeait sa santé.
Il se demandait bien dans quel état il pouvait être à cet instant d'ailleurs. Il devait être le seul à prendre des vacances exprès pour continuer à travailler ! Lui qui n'avait jamais pris de repos avant, c'était triste de se dire qu'il n'en profitait même pas.
Comme Dawlish avait de l'affection et du respect pour lui, il espérait qu'il se trouverait très vite quelqu'un pour le soutenir. Que ce soit un simple ami ou une compagne. L'Auror esquissa un sourire en imaginant tenir ce genre de conversation avec l'agent ronchon. Habituellement, leurs appels étaient toujours strictement privés et aujourd'hui ne ferait pas exception.
Quand le sorcier se fut assuré qu'il était seul et tranquille, il appela par cheminée son collègue. La vision floue du logement du châtain lui apparut alors. Même si ce n'était pas clair, il semblait au plus vieux que pour une fois, celui-ci ne ressemblait pas à un dépotoir. Il entendit ensuite le bruit d'une conversation : Maugrey discutait avec quelqu'un.
-Je t'ai dit de me laisser tranquille, j'ai à faire ! grognait-il.
-Ce n'est pas la peine de prendre ce ton-là avec moi. Tu sais que tu obtiendrais de meilleurs résultats encore si tu avais l'obligeance d'utiliser les bons mots !
Dawlish suivit l'échange sans rien dire. Il ne voyait pas les protagonistes et se demandait s'il devait intervenir. Il se racla finalement la gorge et Maugrey se rapprocha de la cheminée. La jeune femme qu'il avait entendue resta dans l'ombre.
-Je ne te dérange pas, j'espère ? demanda-t-il après que Maugrey l'ait salué.
-Non, pourquoi dites-vous cela ?
Dawlish ne savait pas si son collègue le faisait exprès ou s'il n'avait pas eu conscience qu'il était connecté depuis longtemps et donc qu'il avait pu entendre une partie de la conversation. Il préféra faire comme si de rien n'était.
-J'ai des nouvelles concernant Jedusor.
-Ça tombe bien, moi aussi, sourit Maugrey.
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James ne tenait plus en place. Il surveillait l'heure toutes les minutes. Il savait que le train allait bientôt arriver mais pour lui, il aurait déjà dû être là. Après des semaines à être séparé de ses amis et de son petit-ami, il allait enfin les voir et passer du temps avec eux. Sur le quai de la gare, il n'y avait que très peu de monde. Etant hors vacances scolaires, les départs n'étaient pas nombreux. Il y avait quelques familles venues là pour attendre la venue de leur enfant, mais c'était tout.
James jeta un coup d'œil à sa montre puis observa les rails. Regulus et Sirius avaient dû faire un changement de train pour venir jusqu'à Godric Hollow's mais il espérait qu'ils ne seraient pas pour autant fatigués. L'ancien Gryffondor avait déjà pensé à un tas d'activités qu'ils pourraient faire ensemble. Bien entendu, il n'ignorait pas la raison de la pause accordée aux élèves de Poudlard, mais Sirius aurait le temps de réviser. Si ce n'était pas le cas, il faisait confiance à son ami pour tout de même réussir à s'en sortir. Quant à Regulus, il n'avait aucun impératif donc James pourrait profiter à foison de son chéri !
Dans son euphorie, James oubliait que lui-même avait un examen à passer et qu'il serait difficile d'avoir du temps libre. Ses parents l'avaient déjà sommé plusieurs fois de s'atteler à ses révisions. Il avait parfois obéi, parfois fait semblant, mais surtout il avait réussi à s'en tirer en prenant son magazine comme excuse. Avec la sortie d'Harry, il était difficile d'être concentré sur les deux projets. Ses parents n'avaient pas insisté, probablement pour ne pas être accusés une fois de plus de ne pas être d'accord avec le projet de leur fils. Même si depuis plusieurs jours, ils avaient montré qu'ils acceptaient son choix, James était assez dramatique pour s'en servir comme excuse.
Parfois, il pouvait être une vraie drama queen !
Le sifflement du train se fit enfin entendre au loin et James observa son arrivée, tentant de voir à travers les fenêtres les frères Black. Il ne vit rien et observa les voyageurs sortir au fur et à mesure du train. Et puis enfin, il les vit.
-Regulus !
Il prit une grande inspiration pour ensuite crier le second nom.
-SIRIUS !
James avait un coffre impressionnant. Tout le monde sur le quai l'avait entendu et le regardait, sidéré. Mais tout le monde connaissait le fils des Potter, ce genre de comportement de sa part n'était donc pas inhabituel. Aussi, les habitants de Godric's Hollow se désintéressèrent vite de lui, sauf Sirius qui, heureux d'enfin revoir son ami, se jeta sur lui.
-James ! C'est génial de revenir à la maison !
-C'est ça, profite bien tant que tu le peux encore ! Toi et moi, on va avoir une longue discussion, lui rappela son meilleur ami après l'avoir serré dans ses bras.
Sirius fronça les sourcils. Le ton sérieux de James lui laissait entendre que la discussion ne serait pas forcément plaisante.
-Si c'est encore au sujet de Remus, ce n'est pas la peine, soupira-t-il.
-Bien sûr que c'est la peine ! De toute façon, tu n'y échapperas pas. Maintenant, pousse-toi que j'embrasse Regulus.
James poussa sans ménagement son meilleur ami qui se massa l'épaule pour aller prendre le 6ème année dans ses bras.
-Arrête, tu me fais honte, râla Regulus. Étais-tu obligé de hurler de la sorte ? se lamenta-t-il.
-Tu es trop timide.
James se retourna ensuite et déclara qu'il était temps qu'ils rentrent à la maison parce qu'il y avait un véritable festin qui les attendait. Comme les Black n'avaient envie que d'une seule chose, se poser, le trio ne traina pas sur le chemin.
Euphémia et Fleamont réservèrent alors le même accueil que leur fils aux deux frères, même s'ils furent plus modérés. Ils mangèrent ce que leur elfe de maison avait préparé et discutèrent des derniers évènements à Poudlard.
Dans le milieu de l'après-midi, Regulus eut enfin du temps seul pour ranger ses affaires. Il n'avait pas ramené beaucoup de choses comme il restait tout juste une semaine.
-Tu veux de l'aide ? lui proposa James en entrant dans sa chambre.
-Je devrais m'en sortir tout seul.
James garda le silence et s'installa sur le lit, observant le Serpentard qui semblait si impliqué pour une tâche qu'il jugeait barbante. Il esquissa alors un sourire, amusé et attendri.
-Tu sais, je me disais que pour le temps où tu étais ici, je pouvais peut-être partager ta chambre ?
Regulus s'arrêta et le regarda pendant quelques secondes.
-Ce serait bizarre, tes parents se poseraient des questions.
-Pas spécialement. Ils n'ont jamais rien dit quand je dormais avec Sirius.
-Avec Sirius ?
-C'est un ami, ça ne veut rien dire.
James sentait qu'en insistant un peu, Regulus pourrait céder. Il n'avait pas l'air contre, mais plus de s'inquiéter de l'image que ça donnerait d'eux.
-Tu n'as pas envie que je te serve de nounours à câliner ? sourit-il.
-Ce n'est pas ça et tu le sais très bien.
Regulus croisa les bras sur son torse et James se demanda s'il avait raté quelque chose. S'il avouait ne pas savoir, est-ce que Regulus allait s'énerver parce qu'il n'était pas assez vigilant et attentif ?
-Oui, je sais, fit-il d'un ton dramatique. Mais si tu pouvais énoncer clairement le problème, je pense que ça éviterait les malentendus.
-Rita m'a parlé. Elle m'a dit que tu ne parlais pas de nous à tes parents à cause de moi.
-Rita t'a dit ça ?
James n'en revenait pas.
-Pas dans ces termes-là, admit Regulus après quelques secondes.
L'ancien Gryffondor se prit la tête dans les mains et soupira.
-Ne t'inquiète pas, Regulus. Je me fiche que mes parents savent pour nous deux. D'ailleurs, ils sont loin d'être aveugles et il est plus que probable qu'ils s'en doutent déjà. Je ne me suis jamais vu faire d'annonce solennelle pour leur dire que je t'aime, c'est tout. Ce n'est pas le type de conversation que j'ai envie d'avoir avec mes parents donc j'avoue y être réticent parce que ce serait trop gênant ! Rita m'a pris la tête à ce sujet parce qu'elle voulait que je fasse une annonce dans Harry.
-C'est ce que j'ai cru comprendre.
-Bien sûr que je prends en compte tes sentiments, c'est toi qui devras subir les regards et les jugements. Si encore j'étais avec toi... Je ne veux pas que la moindre décision que je pourrais prendre ait un impact négatif sur ta vie.
-Ce n'est pas que je doutais de toi ou que j'étais en colère… Je voulais juste savoir, se justifia le plus jeune.
James se leva du lit et alla enlacer son petit-ami. Regulus le laissa faire et au bout d'un moment, il décroisa enfin ses bras pour lui rendre son étreinte. James ferma les yeux et profita de l'instant. À la sortie du train, il n'avait eu qu'une seule envie, embrasser son petit ami.
-De toute façon, même si j'avais accepté l'idée de Rita, je n'aurais pas précisé que j'étais en couple, ni qu'il se passait quoi que ce soit entre nous, lui souffla-t-il à l'oreille.
-Je sais, James, le rassura Regulus. Même si ça m'a un peu fait paniquer quand je l'ai appris, je crois que je m'en fiche. Je veux dire que ça n'aurait pas d'importance. Ça en avait encore quand Walburga et Orion surveillaient tout ce que je faisais, mais maintenant ce n'est plus le cas.
-Je t'adore.
James déposa un baiser sur le bout du nez de Regulus et celui-ci se sentit instantanément mieux. Discuter avec James était étonnamment facile. Il pouvait parler librement et James l'écoutait sans le juger.
xXx
Ce fut avec fébrilité que Remus passa le seuil de la porte. Son père était venu le chercher plus tôt dans la matinée. Il avait dû remplir beaucoup de papiers et avait été vu une dernière fois par l'Auror Dawlish qui lui avait posé les mêmes questions auxquelles Remus avait donné les mêmes réponses. Si avec ses accusations à peine cachées les Aurors ne s'orientaient pas sérieusement sur sa piste…
Mais cela allait probablement s'avérer plus dur que prévu. Remus avait ainsi appris par Isabel que Tom Jedusor n'officiait plus à Poudlard. Apparemment, il était parti quelques jours après qu'il ait été admis à St-Mangouste sans même faire d'annonce ni même prévenu les élèves qu'il avait en consultation. Ceux-ci avaient dû se retrouver bien démunis. Les directrices avaient simplement fait une annonce lors d'un des repas du soir. Le Poufsouffle avait compris à travers la révélation de sa meilleure amie que le psychomage cherchait à partir loin avant que les soupçons ne pèsent sur lui. Il n'était pas idiot, il savait les risques et les conséquences d'utiliser un tel sort. Mais sans doute ne pensait-il pas qu'on découvrirait si vite le mal dont souffrait Remus.
Le châtain voulait rester optimiste et croire que Jedusor n'allait pas s'en sortir. Il savait que cela pouvait prendre du temps mais le psychomage ne pouvait pas être un éternel chanceux. Il devait payer pour ce qu'il avait fait, pour qu'enfin ceux qui avaient perdu des êtres chers lors de l'attaque de Poudlard aient des réponses.
Pour l'heure, Remus voulait se concentrer sur sa convalescence. Il avait eu peur lorsqu'il avait appris ce dont il souffrait et à quel point c'était dangereux. Il savait aussi que ses proches avaient craint pour lui. Il devait donc prendre soin de lui et se ménager.
Le châtain sourit en voyant sa mère et Isabel l'attendre impatiemment dans le séjour. Son père posa une main sur son épaule et lui sourit pour l'encourager à aller les voir mais il n'eut pas le temps de réfléchir à la manière dont il devait les saluer que sa mère le prit dans ses bras puis l'embrassa sur les deux joues avant de le lâcher.
-Bon retour, mon garçon.
-Merci, maman, sourit-il.
Elle se retourna et regarda Isabel qui attendait son tour. Les deux amis s'étreignirent alors brièvement avant que Lyall déclare qu'il fallait fêter le rétablissement du Poufsouffle. Comme attendu de sa mère qui était une cuisinière hors pair, elle s'était surpassée et avait concocté une multitude de plats. Remus le savait, aucun d'eux ne pourrait finir les plats et probablement allaient-ils passer des heures à table, à discuter et profiter du moment. Ça lui allait.
-Tu sais si tu pourras revenir à Poudlard ou si c'est trop tôt ? lui demanda soudain Isabel.
-Comment ça ? intervint la mère de famille.
Remus et son père qui les rejoignaient à table se jetèrent un regard discret.
-Il est hors de question que mon fils retourne là-bas ! Il a failli mourir alors que cette école est supposée être sûre ! continua Espérance.
Isabel ne pouvait que la comprendre.
-Ce n'est pas la faute de l'école, tenta Lyall. Mais c'est vrai qu'on peut s'interroger sur la sécurité. Il y a déjà eu l'attaque de Poudlard, maintenant ça. Je ne comprends pas comment de tels actes ont pu être possibles.
-Je ne veux pas avoir encore à m'inquiéter pour toi, Remus, insista sa mère. Je sais que tu as un examen qui approche et tu le passeras en candidat libre, nous irons t'inscrire dès demain. Je pense que nous sommes suffisamment compréhensifs avec cette école et la manière dont elle est gérée. Le ministre en personne est venu nous demander de ne pas ébruiter l'affaire !
À son ton, Remus pouvait sentir que sa mère n'avait pas apprécié la démarche.
-Pour enquêter, les Aurors ont besoin de discrétion. De plus, ce serait désastreux pour l'image de Poudlard, c'est ainsi, soupira Lyall.
-Nous ne devrions pas parler de sujet qui fâche, tenta de les apaiser Remus.
Il vit aux traits figés de sa mère que celle-ci ne souhaitait pas en rester là. Remus avait pu voir au fil du temps que malgré l'harmonie qu'affichaient ses parents, il y avait un sujet compliqué et douloureux pour eux. La magie et ses lois. Son père qui travaillait à la régulation des animaux magiques était un fonctionnaire, il connaissait les lois et les approuvait. Il était souvent trop conciliant même quand il y avait des ratés parce que tous ceux qui travaillaient au ministère étaient en quelque sorte ses collègues. Il savait également combien c'était compliqué d'être parfois considéré comme du mauvais côté de la barrière par les civils.
Espérance, quant à elle, ne perdait jamais une occasion de critiquer le gouvernement et plus particulièrement la politique trop rigide du monde magique en général. Elle n'aimait pas tous les secrets qu'entretenaient les sorciers et qui empêchaient une certaine ouverture auprès des moldus. Elle avait également l'impression qu'il y avait beaucoup d'inégalités et de racisme, ce que Lyall se refusait à voir.
Ses parents s'aimaient et ne s'étaient jamais disputés devant lui, Remus était donc persuadé d'avoir une famille unie. Néanmoins, il savait reconnaître les moments de tensions. Isabel, qui avait l'impression d'avoir gaffé, se sentit responsable.
-Je suis désolée, ma question était mal venue.
-Mais non, ne t'inquiète pas, ma puce, la rassura la mère de son ami.
-La seule chose dont tu dois te préoccuper, Remus, c'est de te mettre à jour au niveau des cours et de suivre à la lettre tes prescriptions médicales, approuva Lyall.
-Pour la première partie, tu n'auras pas à t'en faire, je t'ai dupliqué les cours que tu as ratés.
-Merci, Isa.
-Pour ce qui est du repos, je crois qu'on sera tous aux petits soins pour toi ! ajouta-t-elle ensuite en riant.
Sa remarque fit rire tout le monde.
-Je sais déjà que je pourrais à peine débarrasser une assiette avec vous, pouffa Remus. Mais vous ne devez pas vous en faire pour moi, j'aurais la visite quotidienne d'un infirmier. On m'a dit à St-Mangouste que c'était une simple mesure de sécurité, une manière de suivre l'évolution de mon rétablissement. Ça m'évitera de me rendre à l'hôpital, ce qui est une bonne chose.
-C'est rassurant de savoir qu'ils vont continuer à te suivre, nota Lyall.
-Je savais que tu dirais ça, papa, s'amusa son fils.
-Même si ça n'a pas été simple, on a réussi à surpasser cette épreuve. Nous devons nous concentrer sur l'avenir à présent, déclara sa mère. Tu vas pouvoir dans quelque temps reprendre une vie normale. Je sais déjà que tu n'as envie d'une seule chose, c'est de voir Sirius, rigola-t-elle ensuite. Je voulais l'inviter, mais Isabel m'a dit qu'avoir trop de visites te fatiguerait peut-être.
Remus était reconnaissant envers son amie d'avoir pu lui épargner la présence de Sirius. Dans son état, il n'aurait pas pu faire semblant devant le Gryffondor. Pourtant, il savait bien qu'il ne pourrait l'éviter éternellement.
-Sirius est sans doute un peu trop énergique pour moi en ce moment, approuva-t-il en prenant soin de sourire. Mais plus tard, j'aimerais bien revoir tous mes amis, je sais qu'ils se sont inquiétés pour moi. J'ai reçu beaucoup de lettres quand j'étais à St-Mangouste.
Remus sourit à nouveau et commença à déguster le premier plat de sa mère.
Le repas dura longtemps. Remus n'avait probablement jamais passé autant de temps à table, et encore moins à manger. Mais durant son séjour à St-Mangouste, les bons petits plats de sa mère lui avaient terriblement manqué. Et manger avec appétit était bien la moindre des choses qu'il pouvait faire, étant donné que sa mère s'était donnée du mal en cuisine.
Son estomac demandant grâce, ainsi que celui de son amie, Remus et elle s'éclipsèrent finalement dehors pour une petite balade digestive. Ses parents lui avaient demandé de ne pas trop s'éloigner et Remus n'avait même pas pensé à protester. Il savait à quel point ses parents étaient protecteurs et qu'il leur avait fait très peur. La dernière chose qu'il voulait était de les inquiéter plus encore. Il les laisserait le materner quelques jours encore avant de demander à retrouver son autonomie et son indépendance.
-Merci d'être venue, répéta le châtain.
-Tu sais bien que je ne pouvais pas rater ça, sourit Isabel.
Les deux amis s'installèrent dans l'herbe à quelques mètres de la maison des Lupin.
-Merci pour ce que tu as fait au sujet de Sirius, ajouta-t-il en soupirant.
Remus secoua la tête, il se trouvait un peu pitoyable.
-Je me sens bête à l'éviter comme ça. Ce n'est pas en agissant de la sorte que je vais pouvoir rétablir les choses entre nous, murmura-t-il.
-Rétablir les choses ? tiqua la Poufsouffle. Qu'est-ce que tu veux dire par là ? Tu… n'espères pas retourner avec lui, j'espère ?
Remus haussa les épaules. Il n'en savait trop rien.
-Je ne veux pas le perdre, fit-il, sincère. J'aimerais être son ami si je ne peux pas être à ses côtés en tant que petit ami. Je ne veux pas tout gâcher et…
Il eut du mal à finir. C'était toujours aussi difficile de penser à Sirius et à ce qu'il avait perdu.
-Tu n'as rien gâché du tout ! lui fit remarquer Isabel. J'apprécie Sirius, mais reconnais que depuis le début, il a mal fait les choses et il ne s'est pas toujours bien comporté avec toi. C'est dur pour l'instant, mais il ne faut pas que tu culpabilises ni que tu ressasses. Il a fait son choix, pense à toi maintenant.
-Il avait ses raisons, ce n'est pas quelqu'un de mauvais, tenta-t-il de le défendre. Il a le droit de ne plus vouloir de moi, je n'ai pas à le punir pour ça.
Isabel hausse les sourcils, surprise.
-Le punir ? Que veux-tu dire ?
-Je l'ignore mais j'ai l'impression d'être immature. J'agis comme si c'était insurmontable. J'ai honte d'avoir pleuré et d'avoir ruminé pendant si longtemps. Rompre, c'est ce qui arrive à la plupart des couples. Surtout à notre âge… Dès le début, c'est moi qui l'ai entraîné là-dedans alors qu'il…
Il souffla pour chasser les larmes et la tristesse.
-Je vais mieux maintenant que j'ai pu être soigné. Je veux aller de l'avant.
-Ce que tu as subi et l'état dans lequel tu étais après que Sirius t'a laissé tomber n'ont rien à voir, pointa son amie.
-Quand même un peu, s'entêta le châtain et Isabel écarquilla les yeux. C'est vrai, ça a intensifié tout ce que je ressentais, tenta de se justifier Remus. À présent, je vais mieux et je vais passer à autre chose. Quand on y pense, ça n'a duré que quelques mois à peine. Ça m'a semblé plus long parce que quand on a 18 ans et quand on est amoureux, le temps ne s'écoule pas pareil.
Il étouffa un rire amer.
-Je pensais que je ferai ma vie avec lui. Qu'après Poudlard, on vivrait ensemble et qu'on ferait des projets. Je me suis emballé pour une histoire qui a tout juste duré 5 mois. C'est ridicule…
-Arrête de te déprécier comme ça ! Tu es triste et c'est tout à fait normal ! Ça a duré 5 mois et alors ? Tu étais amoureux, bien sûr que tu t'es emballé ! Le mieux est de ne garder que le positif de cette histoire et de te laisser le temps de t'en remettre convenablement, sans faux semblant et sans pression.
-Qu'est-ce que je fais s'il vient me voir ? hésita le Préfet-en-chef.
-S'il a un minimum de jugeote, il n'osera pas se représenter devant toi. Tu n'as pas répondu à ses lettres, c'est bien un signe que tu as besoin de temps.
-Je n'aurais pas dû faire ça, ce n'était pas correct, culpabilisa encore son ami.
-Tu as tous les droits, Remus !
Isabel le prit dans ses bras et le châtain lui sourit.
-Tu peux lui envoyer une lettre pour lui demander du temps et de la distance, lui proposa-t-elle ensuite.
Remus ne répondit pas. Il devait étudier cette possibilité. Il craignait qu'en étant trop distant avec le Gryffondor, celui-ci n'éprouve plus aucun intérêt pour lui, même amical, et qu'ils redeviennent des étrangers l'un pour l'autre.
Cela l'effrayait.
xXx
-J'y vais, maman ! lança Lily.
Elle referma la porte avant d'entendre la réponse de sa mère.
La veille, elle avait eu une longue et douloureuse discussion avec sa famille. Même sa grande sœur y avait assisté. De mauvaise grâce apparemment, mais Lily n'avait pas pensé que Pétunia aurait été à la maison en même temps qu'elle. Suite à son rendez-vous avec le psychomage de l'école, la rousse avait beaucoup pensé à son avenir. Elle avait également pensé à sa santé et à son entourage. Après des jours d'interrogation, elle était enfin arrivée à une décision qui la satisfaisait.
L'annoncer à sa famille avait été simple. Ses parents étaient son premier soutien, elle savait qu'elle pouvait compter sur eux en toute circonstance. Au cours d'une discussion ouverte, elle avait ainsi pu parler librement et exprimer sincèrement ses sentiments et ses envies. Pétunia n'avait pas compris son choix et l'avait sans surprise critiquée. Mais aussi étonnant que cela puisse paraître, Lily en avait été soulagée. Tout redevenait normal.
À présent, il ne lui restait qu'une chose à faire : parler avec Severus.
Il avait pris une chambre dans une auberge non loin de Poudlard. Qu'il ne veuille pas retourner chez son père ne l'avait pas étonnée mais elle avait moins compris qu'il ne veuille pas réduire la distance entre eux. Sans doute avait-elle sous-estimé le malaise présent dans leur couple. Elle savait ce qu'elle avait fait vivre à Severus. Elle était celle qui, en premier, avait instauré ce mauvais climat. Maintenant qu'elle avait pu faire le point et éclaircir certaines zones d'ombre de son avenir, elle se sentait plus apaisée. Suffisamment à l'écoute pour comprendre ses propres fautes et tenter de sauver sa relation en tout cas.
Elle espérait simplement qu'il n'était pas trop tard et que le Serpentard avait encore la patience pour la supporter. Mais surtout, qu'il l'aimait toujours et qu'elle n'avait pas terni l'image qu'il avait d'elle.
Se rendre à son hôtel lui prit plusieurs heures. Elle ne pouvait pas prendre un train magique et le magicobus n'était pas ce qu'il y avait de plus pratique. Elle prit donc un portauloin avec trois autres personnes. La Gryffondor marcha ensuite jusqu'à l'hôtel et s'annonça à l'accueil. Une femme rondelette avec une énergie débordante la reçut et Lily patienta jusqu'à ce que Severus descende la voir. Il était habillé simplement, avec des vêtements sombres et avait attaché à la va-vite ses cheveux. Lily l'avait rarement vu avec le visage dégagé. Ça lui allait bien.
Le Serpentard fut surpris de la voir mais Lily se dirigea vers lui en souriant.
-Bonjour, j'avais envie de te voir alors je suis passée. Ça ne te dérange pas, j'espère ?
-Non, bien sûr, la rassura-t-il.
-Est-ce qu'on peut aller discuter dans ta chambre ?
Severus haussa les sourcils d'étonnement. Il regarda derrière lui les escaliers et posa ensuite de nouveau son regard sur elle.
-Ne t'inquiète pas, ce n'est pas quelques marches qui vont me fatiguer.
-Très bien.
Il se retourna et l'emmena dans sa chambre. De dos, la Préfète en cheffe pouvait voir qu'il était tendu et nerveux. Elle pouvait le comprendre. Elle avait débarqué sans même le prévenir au préalable. Qu'aurait-elle fait s'il n'avait pas été disponible pour la recevoir ? Cela l'aurait gênée de devoir repartir si vite après avoir payé le déplacement aussi cher. Heureusement, tout s'était bien passé.
Lorsque Severus ouvrit la porte de sa chambre, Lily balaya du regard la pièce. C'était petit et minimaliste. Néanmoins, c'était rangé et lumineux. Le lit était fait et la malle du jeune homme dépassait légèrement en dessous. Sur le bureau, on pouvait voir divers manuels ouverts, des parchemins raturés et d'autres affaires scolaires.
-Je suis désolée de te déranger alors que tu es si occupé. Je devrais être aussi en train d'étudier d'arrache-pied à l'heure qu'il est, plaisanta-t-elle.
-Non, ce n'est pas grave, je devais faire une pause de toute façon.
D'un signe de la main, Severus l'invita à s'asseoir. Comme il n'indiquait aucun endroit en particulier, elle s'installa sur le lit. Après quelques secondes d'hésitation, le Serpentard tira la chaise du bureau pour s'asseoir face à elle.
-Comment vas-tu ? lui demanda-t-elle.
-Quoi ? bredouilla-t-il.
-Je suis désolée, Severus, je ne me pensais pas si égoïste, soupira Lily. Je me suis rendue compte que si ces dernières semaines tu as toujours été là pour moi...
Elle s'arrêta et soupira encore.
-En fait, c'est le cas depuis qu'on se connaît, se corrigea-t-elle. Mais je sais que pour ma part, j'ai souvent failli. Je te demande pardon. J'ai envie de savoir si tu vas bien car ça m'intéresse et je sais que si ce n'était pas le cas, tu ne me le dirais pas. Je veux que tu saches que tu peux me parler.
-Ce n'est pas… Ce n'est pas très important. Par rapport à ce que Pamela traverse ou même toi, ce n'est pas bien grave...
-Tu te trompes, fit Lily.
Elle posa sur lui un regard doux et pendant un moment, ils ne se lâchèrent pas du regard.
-Ce n'est pas parce que les gens autour de toi ne vont pas bien que tu n'as pas le droit de te plaindre. Je suis ta petite-amie, je me dois aussi d'être là pour toi.
Severus baissa la tête un instant et se gratta le front avant de soupirer.
-Il n'y a rien de problématique, je me dis juste que j'en ai bientôt fini avec Poudlard. Que je vais pouvoir commencer quelque chose de nouveau et avoir de nouvelles connaissances dans un domaine qui me passionne. Finies les moqueries, les attentes, la course à la popularité, l'envie d'être invisible et le harcèlement. Tout n'a pas été mauvais à Poudlard, loin de là. Mais le fait que ce soit bientôt la fin m'a fait réaliser que je n'ai pas aimé cette période de ma vie. C'était physiquement et moralement difficile.
-Je suis… désolée, Severus.
Lily ne savait pas quoi dire d'autre. Elle n'avait jamais imaginé que le jeune homme se sentait encore aussi mal. Elle savait que jusqu'au milieu de la 5ème année, James et Severus s'étaient livré une sorte de guéguerre qui était parfois allée trop loin. Sirius aussi s'en était mêlé, ce qui n'avait pas arrangé les choses. Lily avait cru que lorsque les deux Gryffondor s'étaient excusés, tout s'était arrangé. Mais c'était impossible que les Maraudeurs aient été les seuls à embêter le brun. Severus s'était toujours défendu lorsque ça avait été trop loin, et s'était contenté d'ignorer le reste. Elle pouvait comprendre avec ce qu'il lui disait qu'il n'avait pas pu vivre l'adolescence dont il avait rêvé et son père violent n'avait pas été le seul responsable. Lorsqu'il s'était lié d'amitié avec Pamela, elle aussi sujette à de nombreux ragots et souffrant d'une mauvaise réputation, cela avait dû le replonger dans l'enfer des rumeurs et des commérages.
Lily ne s'était jamais vue comme une fille populaire, mais à part l'impression de toujours devoir prouver qu'en tant que née-moldue, elle était autant capable qu'un sang pur, elle avait adoré Poudlard.
-Je m'inquiète aussi pas mal pour Pamela, souffla Severus. Parfois, je trouve son fardeau trop lourd à porter. Mais c'est mon amie, je ne veux pas la laisser traverser ça seule.
-Tu es un ami en or, je sais qu'elle en a conscience. Peut-être devrais-tu lui conseiller de voir un psychomage ?
-Elle a eu plusieurs séances avec Tom Jedusor quand c'est arrivé. Mais je ne sais pas si elle a envie de recommencer.
-C'est triste de se dire que Nott s'en est sorti. À chaque fois que je le croise, j'ai un frisson d'horreur. Je me dis que s'il a pu lui faire ça, il est aussi possible qu'il recommence avec quelqu'un d'autre. J'ai l'impression que le procès a été expédié grâce à son argent, c'est injuste…
Severus haussa les épaules.
-C'est comme ça que ça marche ici.
-Je suis désolée que tu n'aies pas pu me parler de ça avant, j'aurais dû être là pour toi, regretta à nouveau Lily.
-Ne t'en fais pas. Comme je t'ai dit, ce n'est pas bien grave. Et puis, tu n'as pas été la seule à ne pas avoir été présente, murmura-t-il.
-De qui parles-tu ?
Severus la regarda un instant avant de détourner le regard et de jouer avec l'une de ses plumes d'écriture.
-Regulus et moi ne nous parlons plus.
Lily était surprise. Les deux Serpentard étaient pourtant si proches !
-Moi-même je ne comprends pas bien, admit le Serpentard. On ne se voyait plus trop ces derniers temps, ensuite on s'est pris la tête sur un sujet sans importance. Les mots ont dépassé la pensée, du moins de mon côté. Je ne sais pas comment réparer tout ça. Je me demande même si ça en vaut la peine. Après Poudlard, chacun fera sa vie de son côté. On n'avait même pas beaucoup de points communs…
-C'est vraiment ce que tu penses ? s'étonna-t-elle. Si on suit ton raisonnement, nous aussi nous perdrons le contact après Poudlard.
Severus avait l'air étonné par ses propos et il voulut la contredire, mais ne trouva rien à répliquer. Lily sentit alors son cœur se serrer.
-Severus, il faut que je te dise quelque chose.
Il releva la tête si brusquement qu'elle entendit son cou craquer. Le pauvre avait l'air anxieux et Lily prit une grande inspiration.
-Comme tu le sais, je me suis toujours interrogée sur ma place dans le monde sorcier. Je ne savais pas si j'en avais réellement une et en même temps, je ne me voyais pas faire ma vie ailleurs. Du moins, avant l'attaque. Les interrogations sont alors revenues, je ne sais pas pourquoi j'avais l'impression de devoir choisir. Bien sûr, la mentalité de certains sorciers est à vomir, mais certains moldus sont pareils. Et si ce n'est pas moi qui subis de la discrimination, ce sera quelqu'un d'autre. Les gens ne peuvent s'empêcher d'être intolérants et de voir du mal partout, c'est malheureux. Je me suis alors posée la question différemment. En choisissant le monde moldu ou sorcier, est-ce que j'étais prête à renoncer à certains de mes proches ?
Lily fit une petite pause. Face à elle, Severus ne la lâchait pas du regard.
-La réponse est bien sûr que non. Pourquoi couper les ponts ? Je veux mener ma vie comme je l'entends. J'ai pris conscience il y a peu que si j'avais autant de mal à accepter les critiques, c'était parce que j'avais moi-même du mal à m'accepter. Je suis une née-moldue. C'est quelque chose d'incroyable et grâce à ça, j'ai pu découvrir un monde fantastique dont je ne soupçonnais même pas l'existence. Je veux penser au positif. Alors…
A cet instant, Lily releva la tête et planta son regard dans celui du Serpentard.
-Après la semaine de pause, je ne pense pas retourner à Poudlard, Severus, ça me rappelle trop l'attaque. Je passerai mon examen en candidat libre. Pour la suite, je vais prendre une année pour moi et me remettre. Soigner ma jambe et prendre le temps de penser à mon avenir professionnel. Tu seras en formation et probablement trop occupé pour avoir du temps pour moi, mais j'espère que tu ne m'oublieras pas pour autant. Je t'aime, Severus. Tu as toujours été une constante dans ma vie et pour rien au monde je ne serai prête à renoncer à toi.
Lily sourit et essuya les larmes qui perlaient au coin de ses yeux. En voyant le visage à la fois ému et joyeux de son petit-ami, elle sut qu'elle s'en était fait pour rien. Il vint s'installer près d'elle et la prit dans ses bras. Il pleurait, mais pas seulement à cause de ce qu'elle avait dit. Plutôt parce qu'il relâchait tout ce qu'il avait retenu et s'était interdit d'exprimer ces dernières semaines.
La Gryffondor le sentait. A partir de maintenant, ça irait mieux pour eux. Peu importe ce que l'avenir leur réservait.
xXx
Marlene tenta de ne pas sourire. Du moins, de ne pas le faire quand Maugrey pouvait la voir. Elle avait réussi à le faire céder, il fallait maintenant qu'elle se montre digne et démontre qu'elle avait la victoire modeste. La dernière chose qu'elle voulait provoquer était la colère et la frustration de l'Auror et que, vexé, il ne change d'avis. Elle avait eu assez de mal à lui faire accepter sa présence. Enfin, elle ne lui avait pas vraiment laissé le choix, que ce soit pour sa présence dans le logement du châtain ou encore les règles de cohabitation qu'elle avait instaurées.
Une fois de plus, elle s'était imposée. Il était hors de question qu'elle rate la réunion qu'avait l'Auror avec un de ses collaborateurs. Marlene n'avait pas eu toutes les informations, elle avait simplement entendu que le sorcier avait rendez-vous avec Hugo Leroy pour mettre en commun leurs dernières découvertes sur Tom Jedusor. Elle avait appris la nouvelle lors de l'appel entre Dawlish et Maugrey et ne voulait pas être mise à l'écart. Pas après avoir traversé tout ce chemin. L'ancienne Serdaigle désirait simplement apporter son aide pour arrêter Tom Jedusor.
Maugrey avait plus l'impression de subir sa présence qu'autre chose, mais surtout qu'elle n'était qu'une gêne et elle était déterminée à montrer qu'elle pouvait être utile. Marlene voulait faire partie de l'équipe.
Si Hugo Leroy pouvant en être, elle aussi ! Elle ne savait rien sur l'explorateur et regrettait presque de ne pas s'être intéressée à lui lors de son séjour à Poudlard. Elle imaginait qu'il était puissant, sinon il n'aurait pas gagné le Grand Tournoi de duels, mais il devait forcément avoir autre chose pour lui. La jeune femme avait tenté d'interroger Maugrey à ce sujet. Il était normal qu'elle soit curieuse. Et pour l'être, elle l'était !
Comment les deux individus s'étaient-ils rencontrés ? Comment en était-il venu à collaborer et depuis combien de temps cela durait-il ? Maugrey et Leroy étaient très différents. Par Merlin, comment arrivaient-ils à s'entendre ?! À chaque fois qu'elle parlait, elle avait l'impression d'agacer l'Auror. Mais peut-être était-il plus tolérant avec les autres. Après tout, les autres n'avaient probablement pas fait évader des prisonniers très dangereux et caché pendant des mois des informations capitales.
Parfois, l'ancienne Serdaigle se demandait à quel point le châtain lui en voulait encore pour ce qu'elle avait fait.
-Tu as voulu me suivre, ne me mets pas en retard, bougonna l'Auror.
La Serdaigle tenta de ne pas lever les yeux au ciel mais comme Maugrey s'était déjà détourné et ne pouvait pas la voir, elle le fit.
Elle pressa cependant le pas jusqu'à se retrouver à la hauteur du châtain. Elle le sentit lui jeter un regard sans pour autant dire quelque chose. Elle n'y prêta pas attention et tenta de se faire discrète. Cela faisait plusieurs jours qu'elle était revenue en Grand Bretagne et l'ancienne Serdaigle n'avait repris contact avec aucune de ses amies. Ce n'était pas l'envie qui lui manquait mais elle ne s'en sentait tout simplement pas le droit. Elle était honteuse, autant en raison de ce qu'elle avait fait que pour avoir fui. La jeune femme avait beau avoir eu ses raisons dans le passé, ce n'étaient pas des choses qu'elle désirait expliquer. C'était plus simple comme ça. Elle avait beau tout faire pour réparer ses erreurs et se repentir, cela ne lui donnait pas pour autant le droit de retrouver une vie normale.
Elle avait pourtant tenté de s'en persuader en France, sans succès. Tant que sa famille était réunie et heureuse, elle pouvait surmonter le reste. Elle imaginait simplement que depuis le temps, ses amies étaient passées à autre chose. Après tout, elle n'avait jamais donné de nouvelles.
La jeune femme soupira discrètement. Elle observa ensuite le profil concentré de l'Auror. La première chose sur laquelle elle tomba fut ses quelques cicatrices et son air froid et concentré. Elle se demanda alors ce qui avait bien pu lui arriver. Qui était-il ? Il avait la vingtaine, mais parfois il semblait infiniment plus vieux. Ils étaient si différents. Pourtant, parfois, Marlene se sentait étrangement proche de lui.
Quelques minutes plus tard, ils arrivèrent dans un café. Maugrey observa la salle et trouva le français assis à une table à l'écart. Le café était presque vide et il n'y avait qu'une seule employée occupée à discuter avec un habitué.
Quand Hugo l'aperçut, il fronça les sourcils, surpris, et Marlene comprit qu'à aucun moment, Maugrey ne l'avait prévenu de sa présence. Probablement que jusqu'à la dernière minute, il avait espéré la faire changer d'avis.
-Bonjour, le salua-t-elle.
-Bonjour, répondit-il prudemment.
Maugrey s'installa sans prendre la peine de dire quoi que ce soit.
-Je ne pensais pas qu'on aurait une invitée. Les frères Black et Remus m'ont parlé de toi, ajouta alors le blond à l'adresse de la jeune femme. Je pensais que tu n'étais plus ici.
Marlene n'avait aucun mal à imaginer ce que les garçons avaient bien pu dire sur elle. D'où sa surprise et son apparente méfiance. Elle tenta alors de ne pas penser à la mauvaise opinion que l'explorateur pouvait avoir d'elle.
-J'imagine qu'ils n'ont pas dit que du bien de moi, plaisanta-t-elle. Je suis revenue en Grande-Bretagne parce que je pense avoir à peu près cerné Tom Jedusor, que j'ai des informations et que je pourrais témoigner le moment venu. Pour l'instant, je suis simplement là pour aider, j'assiste l'Auror Maugrey.
-Je n'ai pas besoin d'aide, grogna aussitôt le concerné.
-Bien sûr que si, il ne sait pas prendre soin de lui, expliqua-t-elle.
Le châtain et elle échangèrent ensuite un long regard avant d'être interrompus par la serveuse qui vint prendre leur commande. L'ancienne Serdaigle se contenta d'un jus de fruits alors que Maugrey prit un café avec un biscuit. Le Français quant à lui déclina : il n'avait toujours pas fini sa tasse de thé et encore moins son gâteau.
-Tom Jedusor a démissionné de Poudlard, commença Maugrey. A partir de maintenant, ça va être plus difficile de le surveiller sans avoir l'aide adéquate du bureau.
A ses côtés, Marlene et Hugo tentèrent de cacher leur surprise. C'était une très mauvaise nouvelle.
-Est-ce que ça a à voir avec l'hospitalisation de Remus Lupin ? demanda le blond.
Maugrey acquiesça.
-Dawlish m'a dit que c'était une démission prévue depuis le temps de Dumbledore. Néanmoins, elle n'aurait dû être effective qu'à la fin de l'année scolaire. On peut donc penser qu'il a légèrement avancé son départ après que l'état de santé du jeune Lupin ait été découvert aussi vite.
-Est-ce que Remus va bien ? demanda Marlene.
Elle n'avait jamais été spécialement proche du Poufsouffle, mais elle l'aimait bien. Elle se souvenait encore de leur dispute dans la tente lors du Tournoi de duels.
-Il est sauvé, mais on ignore encore les conséquences sur le long terme pour sa santé, indiqua Maugrey.
-Qu'est-ce qu'il avait réellement ? James Potter m'a tenu au courant, mais il n'en savait pas beaucoup non plus, voulut savoir Hugo.
Marlene put voir les lèvres de Maugrey se tordre en une fine ligne serrée. La serveuse vint leur apporter leurs commandes et l'Auror montra son badge à la dame. Il lui indiqua ensuite d'un ton mesuré qu'il ne désirait plus être dérangé jusqu'à leur départ. Quand celle-ci se fut suffisamment éloignée, il leur expliqua exactement les informations qu'il avait pu récolter au sujet de l'état de santé de Remus.
-C'est cruel, lâcha Marlene après son explication.
Mais cela n'aurait pas dû l'étonner. Elle se sentait stupide d'avoir fait confiance à Jedusor à l'époque. À aucun instant il n'avait pensé à elle et au fardeau qu'elle portait en lui proposant de l'aider à libérer son frère. Elle se demandait même comment il pouvait être si bon à écouter et guider les élèves en ayant un cœur aussi sombre. Faisait-il semblant à longueur de temps ?
Il y eut un silence où chacun prit encore plus conscience de l'ampleur de la motivation et de la puissance de l'homme à qui ils s'en prenaient.
-Regulus, Sirius et Remus prenaient leurs précautions pour qu'il ne découvre pas ce qu'ils mijotaient ni ce qu'ils savaient déjà. C'est triste de savoir que c'était inutile. Je comprends mieux pourquoi il est venu me menacer la première fois, il attendait simplement le bon moment, soupira finalement Hugo. Il savait depuis des jours que je cherchais des informations sur lui.
-La question est de savoir comment il en est venu à les suspecter. Il faudrait que j'ai une discussion avec eux, fit Maugrey.
-Regulus m'a dit que ça avait débuté lors des visites des psychomages après l'attaque de Poudlard. Une information lui a échappé et Jedusor a alors compris qu'ils en savaient plus qu'ils ne voulaient bien le dire, expliqua le blond.
Maugrey avait l'air dubitatif et l''ancienne Serdaigle aussi. Les Maraudeurs et leurs amis avaient toujours semblé bien trop informés. Ils cachaient autre chose.
-Qu'as-tu découvert en enquêtant de ton côté ? demanda l'explorateur.
-Sans surprise, je n'ai pas pu m'approcher de Dumstrang. J'ai néanmoins pu retrouver les endroits où le psychomage avait ses habitudes. Il a fait attention à laisser une bonne image de lui. Il n'a pas non plus caché ses ambitions politiques. Cela expliquerait toutes ses précédentes manœuvres pour rencontrer des personnalités influentes. Il a participé à un nombre hallucinant de soirées mondaines et récemment, il a pu s'entretenir avec les Black. J'ignore par contre à quel sujet.
-Je suis impressionnée que tu aies pu rassembler autant d'informations. Je comprends mieux pourquoi tu étais si épuisé quand je suis arrivée chez toi, remarqua alors Marlene.
-Chez lui ? s'étonna le blond, amusé.
-Ce n'est rien, sourit Marlene. Il m'héberge simplement le temps de mon séjour ici.
-Ce n'est pas le cas, elle m'impose sa présence !
Maugrey lui jeta un petit coup d'œil et Marlene soutint son regard.
-On en a déjà discuté, clôtura-t-elle.
L'Auror secoua la tête.
-Enfin bon, les plus bavards m'ont aussi parlé d'une impression étrange à son sujet. Il a de l'ambition politique, il veut réussir à tout prix, cela transparaît clairement chez lui. Il dégage un sentiment de rancune, de revanche contre la vie. Je me suis dit au début que c'était dû au fait qu'il avait eu une enfance difficile, qu'il avait passé quelques années dans un orphelinat. Mais je me demande si c'est tout.
-Lorsque j'étais encore à Poudlard, il était très apprécié des élèves, réfléchit Marlene. Je l'ai pourtant aperçu une ou deux fois faire une grimace ou s'essuyer la main après avoir tourné le dos à l'un d'entre eux. Aujourd'hui, je comprends qu'il jouait un jeu avec eux, qu'il ne les appréciait pas. Il aime son travail parce qu'il est bon dans ce domaine et qu'il peut exercer son penchant de manipulateur. Il souffre peut-être d'un trouble psychique qu'on ignore. Il a fait tuer des dizaines de personnes pour une raison encore obscure mais qui servirait son but. Il n'a montré aucune hésitation ni remords. Il était tellement calme après la visite à Azkaban et aussi après l'attaque de Poudlard ! Il se fiche de la souffrance des autres, il pense probablement que c'est un mal nécessaire.
Maugrey et Hugo la dévisagèrent, sidérés, avant de sourire.
-Tu as peut-être raison, approuva finalement le blond. J'ai continué à enquêter sur son enfance et sur ses origines et j'ai enfin fini par apprendre plus de choses. Sa mère est morte en couche, mais son père était encore vivant. Pourtant, il a été placé à l'orphelinat, cela m'a donc intrigué. J'ai tenté de retrouver son père et ce n'était pas facile. Je pensais que c'était un sorcier, mais c'est en fait un moldu. J'ai mis du temps à le retrouver. Au début, il ne voulait pas me parler. Dès que j'évoquais son fils ou même son ancienne compagne, il s'énervait. Il a refait sa vie. Il est âgé maintenant et veut juste être tranquille et oublier cette partie-là de sa vie. J'ai insisté et pour avoir la paix, il a fini par me raconter ce qu'il s'est passé. Merope Gaunt, la mère de Jedusor, a séduit son père en lui donnant un philtre d'amour pendant un moment. Le temps passant, elle a arrêté en pensant qu'il avait développé de vrais sentiments pour elle mais ce n'était pas le cas. Il l'a rejetée quand il a tout appris. Tom Jedusor Sr n'a pas voulu reconnaître l'enfant. Il s'est senti trompé et c'est pour cette raison qu'il ne veut plus en entendre parler. Il ne se sent pas concerné par la vie de son fils. D'après lui, Jedusor n'a jamais cherché à le recontacter mais je ne sais pas si c'est vrai.
-J'ai du mal à le croire, intervint Maugrey. Après Poudlard, il est parti travailler un temps chez les moldus et je ne vois pas pourquoi si ce n'est pas pour retrouver son père. Peut-être qu'il n'est pas allé au bout de sa démarche, c'est tout.
-Sans doute, soupira l'explorateur.
-Ce serait donc pour lui une manière de prendre une revanche sur sa vie, de montrer qu'il a pu réussir sans l'aide de son père ? Qu'il vaut mieux qu'un sorcier moyen ? s'interrogea Marlene.
-Ça a dû peser dans sa décision mais à mon avis, il y a autre chose, fit Maugrey.
-Je suis du même avis, affirma Hugo.
-Du côté de sa mère, ça n'a rien donné, résuma Marlene. Elle a donné un philtre d'amour à un homme pendant quoi, des années ? Elle est spéciale.
-Elle est morte, je ne voyais pas bien ce que je pourrais obtenir de son côté. De plus, comme je suis français, il m'est difficile d'obtenir les registres des arbres généalogiques, approuva Hugo.
-Je peux m'en occuper !
Marlene sourit.
-C'est un travail fastidieux, mais j'ai l'habitude. Comme ça, pendant ce temps-là, vous pourrez continuer à être sur le terrain.
-Ça me paraît être une bonne idée, s'enthousiasma le blond.
Marlene regarda Maugrey et, sans surprise, celui-ci faisait la tête.
-Très bien, faisons comme ça, décida-t-elle alors sans attendre sa réponse.
Étonnamment, l'Auror ne tenta pas de l'en empêcher.
-Pour ma part, je vais discuter avec les frères Black, James Potter et Remus Lupin, fit-il. J'ai besoin qu'ils soient complètement honnêtes. Mon mentor Dawlish se charge de savoir ce que trafique Tom Jedusor et de le traquer. Hugo, j'aurais besoin que tu gardes à l'œil les Black.
-Pourquoi ? demanda-t-il en même temps que la sorcière.
-C'est une famille puissante avec un bon réseau. Il est parti les voir, mais on ne sait pas s'ils ont accepté une alliance avec lui, ni quoi que ce soit de ce genre. Il faudrait garder un œil sur eux, savoir s'ils ont changé leurs habitudes, mais aussi si le psychomage tente de les contacter à nouveau. Nous devons surveiller ses contacts pour potentiellement avoir un coup d'avance sur lui.
-Je ne sais pas si j'arriverais à être discret, mais j'aime bien ce plan ! On forme vraiment une bonne équipe ! lança le français, ravi. Je suis sûr qu'on arrivera à l'arrêter !
Marlene acquiesça. Elle avait envie d'y croire aussi.
xXx
C'était étrange pour Sirius de se dire qu'il allait repasser ses examens. Mais il le fallait bien, il ne pouvait pas laisser le Sirius de ce monde rater une telle opportunité. Personne ne comprendrait, et la dernière chose qu'il voulait était d'attirer l'attention avec un comportement étrange. Il notait déjà parfois de l'interrogation et de l'incompréhension chez son petit roi. Regulus était d'une nature méfiante et curieuse. Cependant, il était impossible qu'il aille jusqu'à penser que Padfoot avait pris la place de son frère. Pour lui, l'esprit était parti depuis des mois. Le comportement parfois étrange de son frère, il l'attribuait sûrement à son traumatisme et à sa rupture avec le Poufsouffle.
Padfoot soupira en tournant la page de son livre de révision. D'un point de vue extérieur, Sirius et lui pouvaient sembler être deux individus différents, mais ce n'était pas son opinion. Ni celle de Sirius. Ils partageaient un même noyau, une même base. Ils étaient similaires, mais avaient simplement poussé différemment.
Tous deux avaient été inquiets lorsqu'ils avaient appris l'hospitalisation de Remus, mais à présent que le Poufsouffle était sorti d'affaire, ils allaient mieux. Padfoot ne voulait pas penser que si tout était rentré dans l'ordre, c'était simplement parce qu'il avait l'ascendant sur le Sirius de ce monde. Le Gryffondor n'était pas au mieux de sa forme, incapable d'affronter la triste réalité et profitant du giron réconfortant et rassurant de ce double.
-Tu travailles encore ? l'interrompit James.
Padfoot prit une discrète inspiration pour étouffer ses pensées et se concentrer sur ce qui se passait à l'instant. Sur James.
-Je fais de mon mieux, plaisanta-t-il. Je ne peux pas me permettre d'échouer après avoir fait autant d'efforts !
-Ça m'étonne de toi ! s'exclama James. Surtout quand on sait que tu n'as fait aucun effort pour bien te classer à Poudlard !
James tira une chaise pour s'installer à côté de son ami au salon.
-Ce type de concours n'a jamais été mon truc, approuva Sirius. Et puis, je ne pense pas que même avec tous les efforts du monde, j'aurais pu battre Regulus. Il est bien plus intelligent que moi ! J'ai du talent, mais je manque de discipline et je ne retiens que les trucs qui m'intéressent.
James rigola.
-Je suis comme toi ! Regulus était tellement content quand il me l'a annoncé ! C'est vraiment chouette pour lui. Il va me manquer, j'espère qu'il ne sera pas trop sous le charme de ces véla, soupira-t-il ensuite.
-C'est un risque, le taquina son ami, et James fit la moue. Tu veux qu'on bosse un peu ensemble, histoire de voir si on est au point ?
-Par Merlin ! Mais c'est que tu es vraiment déterminé !
Sirius haussa un sourcil mais James secoua finalement la tête.
-Franchement, non merci, je ne fais que ça depuis une semaine. Mes parents sont derrière moi, Regulus est derrière moi ! J'ai besoin d'une pause pour respirer. Si je vois encore une seule fois le schéma d'une libellule pissière, je vais devenir fou.
-C'est quoi encore cette espèce que tu viens d'inventer ?
-Aucune idée, mais c'est très joli. Enfin bon, j'étais venu te voir car je me disais qu'on pouvait aller voir Remus. Il n'est plus à St-Mangouste et… Je ne sais même pas quoi dire pour argumenter, je pensais que tu serais le premier à proposer !
Sirius eut un sourire contrit. Il se passa ensuite une main gênée sur la nuque. Bien sûr qu'il avait pensé à aller voir son ami dès son retour à Godric's Hollow mais il avait dû renoncer car une partie de lui se disait que le Poufsouffle n'avait pas envie de le voir. Pas seulement parce qu'il était encore fatigué et fragile après ce qui lui était arrivé, mais parce qu'il voulait limiter leurs interactions. Comment le lui reprocher ? Sirius lui avait demandé de tourner la page, d'oublier cette idée d'être un couple. Remus avait besoin de prendre du temps pour savoir si ça valait la peine d'être encore son ami alors qu'il savait qu'il était capable de le blesser comme personne ne l'avait jamais fait avant.
Avoir le mauvais rôle, Padfoot y était habitué. Mais c'était bien la première fois qu'il merdait autant. Rompre avec Remus n'avait pas été nécessaire, même si cela avait en partie soulagé Sirius. Pas lui, mais le jeune homme blessé qui ne se sentait plus capable d'aimer et d'être aimé, qui avait peur. Padfoot avait donc décidé qu'il fallait libérer Remus et ne pas l'enchainer à une relation qui, peut-être, ne mènerait nulle part. Padfoot voulait croire que les choses pourraient changer, mais il ne savait pas si un jour, Sirius pourrait sortir de cette pièce dans laquelle il s'était enfermé.
Néanmoins, cette décision l'avait arrangé et il avait agi avec des intentions purement égoïstes. Il ne savait pas combien de temps il se ferait passer pour un jeune homme de 18 ans en dernière année à Poudlard. Il voulait que cela dure toujours et il s'était parfois emporté en se projetant trop loin. Mais s'il devait rester, il savait qu'il ne pourrait pas faire semblant d'être intime avec Remus. Bon sang, c'était son meilleur ami et il était si jeune… C'était inenvisageable pour lui. Et puis, il n'avait jamais eu d'attirance pour les hommes, contrairement au Sirius de ce monde. C'est vrai qu'il avait toujours traité James et Remus différemment et qu'il aurait pu mourir pour eux. Il les aimait, mais n'avait pas d'attirance pour eux.
Tout était tellement compliqué. Alors il s'était simplifié la vie en oubliant la force des sentiments de Remus et il n'aurait pas dû car sa présence ici n'était que temporaire. Peu importe ses excuses, il avait failli et agi égoïstement. Les regrets étaient vite venus, les siens comme ceux de Sirius.
Padfoot se crispa. Son corps était tendu et sans même s'en rendre compte, il s'éloigna de son ami, juste légèrement. Tout comme Remus avant lui, James lui servait sur un plateau d'argent l'excuse parfaite pour expliquer l'inacceptable. Et tout le problème était là. Padfoot ne pouvait donner de réelles raisons à sa décision. Pas une que ses amis pourraient entendre et admettre. Il aurait aimé que ses amis acceptent tout simplement sa décision et ne cherchent pas à en savoir plus. Ainsi, Remus aurait pu imaginer l'excuse qu'il voulait à son comportement, celle qui l'aiderait à passer à autre chose.
Padfoot soupira et jeta un coup d'œil rapide à son meilleur ami. James n'avait pas bougé, il était toujours debout à ses côtés, dans l'attente d'une réponse.
-Je ne peux plus…
Padfoot ne savait pas comment parler de ce qu'il ressentait. James avait tenté de le questionner un nombre incalculable de fois mais face à face, c'était plus dur de se dérober. De plus, James était d'une douceur infinie avec lui et cela lui donnait envie de parler.
-Tu ne peux plus ? reprit l'ancien Gryffondor.
-Je ne supportais plus son toucher. Je me sentais mal à l'aise à chaque contact physique. Il y avait aussi cette voix dans ma tête qui me disait que c'était mal…
James eut tout d'abord une petite exclamation surprise avant de garder le silence. Padfoot n'avait pas l'impression de mentir, mais plutôt de dire des demi-vérités. C'était en partie ce que ressentait Sirius mais le fait que leur relation n'aurait jamais dû évoluer ainsi et le malaise lors de leurs contacts, c'était Padfoot qui les ressentait.
-Remus ne t'aurait jamais forcé à rien ! lui fit remarquer son ami. Il connaît en partie ta situation, tout ce qu'il demandait était d'être avec toi et de t'aider à aller mieux.
-Et si ça n'allait jamais mieux ?! s'énerva soudain son ami.
James le dévisagea.
-Mais tu vas déjà mieux, Sirius ! Tu ne te rends pas compte des progrès que tu as faits depuis le début ? Tu ne parlais à personne, tu avais juste le regard perdu dans le vide ! Tu étais si loin dans ton monde qu'on ne pensait pas pouvoir t'atteindre !
Padfoot passa une main dans ses cheveux. Il s'attarda sur ses longues mèches et les tira un peu avant de fixer sur James un regard triste.
-Tu te trompes si tu penses que j'ai beaucoup évolué depuis cette fois-là. Au moindre coup de vent, au moindre choc, j'ai l'impression que je m'effondrerai…
Il devait préparer ses amis à cette éventualité. Cette situation était éphémère. A un moment, Padfoot devrait s'effacer pour de bon. Lorsque Jedusor serait définitivement mit hors d'état de nuire, Padfoot ne serait plus qu'un souvenir. Sirius serait alors seul de nouveau et rien ne garantissait qu'il aurait la force nécessaire de revenir dans sa réalité. Son entourage devrait alors souffrir de son silence, de son mal être, sans pouvoir rien faire.
Padfoot avait tenu à libérer Remus avant que ça n'arrive. Qu'il soit triste maintenant, qu'il le déteste si cela pouvait l'aider à avancer. Pourvu qu'il ne souffre pas trop le moment venu.
Padfoot vit alors la douleur sur le visage de James.
-Oh Sirius, pourquoi tu ne m'as rien dit avant ?
Celui-ci haussa les épaules.
-À quoi bon ? Il faut que j'arrive à surmonter ça seul.
James fronça les sourcils mais Sirius secoua la tête.
-Si, il y a certaines choses que je dois accomplir seul, et d'autres que je ne pourrai pas. Celle-ci rentre dans la première partie.
-Je suis désolé, mon ami. Est-ce que je peux te prendre dans mes bras ?
Padfoot acquiesça, il en avait grand besoin. Cette étreinte lui fit du bien. Il venait de se dévoiler, lui avait même donné des informations capitales, mais à présent, il se fichait bien d'être découvert. Il avait eu besoin de se confier à un ami.
-James, si tu veux aller voir Remus, ne te prive pas pour moi. Ça lui fera plaisir. Quant à moi, je suis là et j'attends. Dès qu'il voudra de nouveau de moi à ses côtés, je viendrai le trouver. Il n'a répondu à aucune de mes lettres pour me faire passer un message. Il a été gentil et patient avec moi mais comme tout le monde, il a ses limites. Ne pense pas à moi, mais plus à lui. Dis-lui que ça ira. Il trouvera vite quelqu'un qui le mérite vraiment.
James se détacha de lui et sourit avant d'acquiescer. Mais Sirius n'était pas dupe, il savait qu'il ne dirait rien au Poufsouffle et il en ressentit un petit soulagement. Il était toujours aussi contradictoire. S'il était seul aux commandes, il ne pouvait pas pour autant brider les sentiments de Sirius. C'était parfois compliqué à gérer. Il se sentait perdu, oubliait des choses ou s'énervait pour rien. Si l'appropriation du corps du jeune sorcier se passait bien, l'esprit n'oubliait pas quel désastre cela avait été la première fois. Les migraines étaient parfois là et quelques fois, à cause de la frustration et de la douleur psychique, Padfoot avait l'impression de sombrer dans la folie car plus rien n'avait de sens…
James le laissa à ses révisions et alla proposer à Regulus de sortir. Ses parents l'accusèrent alors de vouloir simplement sécher ses révisions jusqu'à ce qu'il brandisse l'excuse Remus. Padfoot leur dit au revoir avant de chercher le chapitre qu'avait évoqué James plus tôt. Il chercha un moment avant de se rendre compte que son pauvre ami avait révisé un chapitre qui n'était même pas au programme ! Il sourit, mais la tristesse était encore là.
Il avait l'impression d'être tout le temps triste en ce moment. Où était passée sa joie du début ? Il avait perdu son sourire, mais sa motivation était toujours présente et tant qu'elle serait là, il se battrait pour deux.
xXx
Quand James lui avait dit qu'il dormirait avec lui, Regulus avait pensé que ce serait tous les soirs. Pourtant, il était seul dans son lit et la nuit était déjà bien entamée ce soir. Ce n'était pas la première fois que ça arrivait parce que James avait révisé longtemps après le repas et s'était assoupi dans sa chambre. Ou encore parce qu'il avançait doucement sur le prochain numéro de Harry car s'il le faisait la nuit, ses parents ne pouvaient lui dire qu'il gâchait son temps de révision. Dans ces cas-là, Regulus savait qu'il pouvait être celui qui rejoignait son petit-ami dans sa chambre.
Mais depuis qu'Euphémia était tombée sur James un beau matin à peine réveillé qui quittait la chambre du Serpentard, Regulus était gêné. La mère de famille n'avait pourtant rien dit et elle les avait salués comme d'habitude avant de sortir s'occuper de ses affaires. James n'avait pas semblé déboussolé non plus mais il n'était pas du matin. Regulus avait été le plus mal à l'aise dans l'histoire.
Il se sentait un peu pathétique à ce sujet. Mais Euphémia n'avait rien dit, pourquoi en faire toute une histoire ? De plus, ils n'avaient rien fait, enfin presque. Les deux amoureux avaient discuté une partie de la nuit, s'étaient embrassés lorsque James avait commencé à le toucher et à le taquiner. Leur jeu innocent n'avait alors plus rien eu d'innocent mais ils avaient été discrets et n'avaient pas dépassé les limites. Regulus en avait été presque déçu. Bien sûr, il s'était bien gardé de le dire à James. Il ne voulait pas déclencher en lui quelque chose qu'il aurait du mal à maîtriser après.
Regulus se tourna dans son lit et souffla. Il avait envie de dormir avec lui. À cette heure-ci, tout le monde dormait dans la maison, personne ne risquait de le surprendre à s'introduire dans la chambre de son petit-ami. Il hésita encore quelques secondes et quand enfin il trouva le courage de le faire, il sortit précipitamment de son lit avant de changer d'avis. Il se dirigea vers la chambre de l'ancien Gryffondor sur la pointe des pieds et frappa un unique coup avant d'entrer.
-Regulus ?
L'ancien Gryffondor était à son bureau et s'était perdu dans son travail. Comme le jeune homme détestait potasser ses cours, il ne pouvait s'agir que d'une rubrique pour son magazine.
-Tu me manquais, répondit Regulus.
James sourit et se leva avant d'écarter les bras, l'invitant pour un câlin.
Regulus ferma la porte et alla se blottir dans les bras du plus vieux. Il profita de l'étreinte et fit à peine attention aux papiers sur le bureau et aux quelques babioles que James utilisait pour faciliter son travail.
-Il est tard, tu devrais dormir.
-Je pense aussi, répondit James. Je vais me débarbouiller et j'arrive.
Regulus acquiesça et laissa James aller se brosser les dents et passer un pyjama. Il observa le lit puis monta dessus et serra un des nombreux oreillers du brun contre lui en l'attendant. C'était la première fois qu'il allait dormir dans la chambre du Maraudeur. Cette pensée fit battre son cœur plus vite. La literie sentait bon, c'était la même odeur que celle de son petit-ami. Regulus patienta ainsi et quand James revint, il avait commencé à somnoler. Il sentit le baiser qu'il posa sur sa joue avant que James ne vienne se blottir contre lui.
-Merci de m'avoir rejoint, lui chuchota-t-il.
Il sentait un peu la menthe et ses petits cheveux étaient mouillés. Regulus caressa sa joue avant que James ne lui prenne la main pour déposer un baiser dessus.
-Je t'aime, James.
L'ancien Gryffondor fut surpris avant de lui chuchoter la même chose et Regulus frissonna.
-Je suis heureux avec toi, je ne pensais pas ça possible.
-Parce que j'ai été con avec toi au début ? Ou parce que je suis affreusement maladroit et un peu fou ? s'amusa James.
Regulus sourit.
-Non, ça n'a rien à voir. Je…je me disais juste qu'après Rosier, je ne pourrai jamais être aussi proche d'un autre garçon, vouloir une telle intimité.
James perdit son sourire et Regulus se demanda s'il n'avait pas gaffé en parlant du Serpentard.
-Hier, j'ai discuté avec Sirius avant qu'on aille voir Remus. Il m'a parlé des conséquences de ce qu'il avait vécu avec cet instructeur, soupira alors James.
-Sirius t'a parlé de ça ?
Regulus était étonné. Son frère n'évoquait jamais le sujet. Les seules choses qu'il disait semblaient être dans le but de le rassurer, comme cette histoire de psychomage. Pourtant, son frère n'avait encore fait aucune démarche dans ce sens-là.
-Il m'a dit que ça avait laissé des séquelles, que c'était pour ça qu'il ne pouvait plus être avec Remus car il ne se sentait plus capable d'être intime avec lui. Ça m'a fait prendre conscience d'une chose… Ce n'est pas parce qu'on a l'air d'aller bien que c'est le cas. Regulus, est-ce qu'à un moment donné avec moi, tu as ressenti du malaise, de la peur ou du dégoût quand je t'ai touché ? Est-ce que sans le vouloir, j'ai pu te rappeler ce qu'il t'avait fait vivre ?
Regulus sentit son cœur manquer un battement. Il voyait la tristesse et la culpabilité dans le regard du brun alors même qu'elle n'avait pas lieu d'être. Aussitôt, Regulus voulut nier et le rassurer, mais ce serait lui mentir. Il ne savait pas comment lui dire. Il avait honte.
-Je sais, James, que tu n'es pas comme lui et que jamais tu ne me feras du mal.
-Tu ne réponds pas à ma question.
Regulus déglutit et James caressa ses cheveux dans un geste rassurant.
-Dans le motel, pour notre première fois, j'étais nerveux, admit-il finalement. Je voulais bien faire, j'en avais envie. De toi, mais aussi d'avancer. Mais je pense qu'à un moment, j'ai laissé la nervosité et la peur prendre le dessus car je me suis revu avec lui et je n'ai pensé qu'à la douleur et à la honte qui suivait.
-Je suis tellement désolé, bredouilla James. Tu aurais dû me le dire que ça n'allait pas…
-Ce n'était pas la peine, ça a duré quelques secondes. Parce que tu m'as regardé, tu m'as rassuré et je me suis souvenu que tu m'aimais. Pas de manière possessive et malsaine, mais vraiment. Je me suis souvenu que c'était aussi mon cas et que j'avais envie de toi. Il ne faut pas que tu t'en veuilles.
Il soupira.
-Rosier a beau être mort, mon calvaire a beau être fini, je pense encore parfois à lui. J'en fais des cauchemars, je me souviens de tout si distinctement… Parfois, je souhaite oublier, et puis je me souviens que ça ne m'est pas permis. J'entends souvent parler de lui chez les Serpentard, et même au-delà. Les gens pensent qu'il est mort en tentant de me sauver durant l'attaque de Poudlard. Pour tout le monde à part moi, c'est un héros.
-Ils se trompent tous, lui rappela fermement son petit ami.
Regulus se blottit encore plus contre James pour tenter de faire reculer ses larmes et son désarroi.
-Je sais mais… un jour, lors de ma seule séance avec Tom Jedusor, il m'a dit que si j'avais autant de mal à avancer, à surmonter ce qui m'était arrivé, c'est parce que je n'avais pas pu exprimer ma douleur et que Rosier n'avait pas payé pour ce qu'il m'a fait.
Le 6ème année savait que Tom Jedusor était un horrible manipulateur, mais une partie de lui savait qu'il avait raison à ce sujet. James devait aussi s'en douter car il resta silencieux, cherchant ses mots.
-Tu as déjà pensé à le faire ? À porter plainte contre lui ? lui demanda-t-il finalement.
-Tu vas peut-être penser que je suis stupide, mais non, murmura le Serpentard. Du moins, pas au début. J'avais honte. De ce que j'étais, mais aussi du fait d'avoir eu besoin de lui à un moment où j'étais si vulnérable. Je me disais aussi que j'avais eu ce que je méritais pour avoir eu la sottise de faire un serment inviolable avec lui ! Quand Sirius m'a dit que j'étais libre, j'étais heureux. Je voulais passer à autre chose. Mais le mal était fait. Il avait beau me laisser tranquille dans la vraie vie, la nuit dans mes cauchemars, il était là.
Regulus eut soudain envie de pleurer. Mais il ne devait pas craquer maintenant, il se sentait bien avec James et pour une fois, il avait envie de se confier. Il n'avait jamais raconté à personne ce qu'il s'était vraiment passé avec Rosier. Lâchement, il avait préféré laisser les gens imaginer plutôt que de rétablir la vérité et mettre des mots sur ses maux.
Ne rien dire, c'était aussi encore prétendre que ce n'était pas arrivé, pas totalement. Ne pas se confronter à la réalité.
-Le temps passant et les cauchemars persistants, j'ai fini par comprendre que je n'allais pas juste aller mieux et oublier, reprit-il dans un souffle. J'ai pensé quelquefois à en parler, mais ça me faisait peur. Et puis, il est mort. Je pensais que mes problèmes disparaitraient en même temps que lui, mais non. Avant, je ne me sentais pas prêt pour en parler, c'était trop tôt… Et puis, il y a eu l'histoire de Pamela. Elle a perdu son procès, tu sais. Je me suis imaginé à sa place, devant un tribunal avec mon tortionnaire à côté, devoir expliquer ce qu'il m'avait fait, me justifier, tenter de les convaincre, voir leur jugement. J'admire son courage car je ne l'ai pas eu. Elle a perdu et je me dis que j'aurais obtenu le même résultat qu'elle en portant plainte contre Rosier. J'aurais alors eu l'impression d'être mutilé pour la deuxième fois.
-Je suis désolé, Regulus, je ne sais pas comment faire pour que tu ailles mieux…
-Il n'y a rien à faire. Je dois juste apprendre à vivre comme ça. Il est mort ! hoqueta-t-il brutalement. Je ne peux pas obtenir réparation !
-Bien sûr que si !
-Je ne vois pas comment… Tout le monde pense que c'est un héros alors qu'il…
Regulus s'arrêta et buta sur ses mots. À travers ses larmes, il pouvait également sentir la tristesse et les tremblements de son corps. Il ferma les yeux comme pour se couper du monde et avoir le courage de continuer.
-Quand il me rejoignait dans mon lit la nuit, il aimait que je me débatte, ça l'amusait. Il utilisait la force pour me soumettre, me montrer qu'il était plus fort, qu'il pouvait me faire du mal s'il le voulait. Il…i-il ne m'a jamais violé, mais il passait son temps à évoquer cette possibilité pour que je redoute les prochaines fois encore plus. J'avais honte des réactions de mon corps et il le savait.
Les pleurs de Regulus le submergèrent et sa voix s'étrangla. James tenta de le calmer en le berçant et Regulus s'accrocha fort à lui pour ne pas se perdre. À un moment, il parvint enfin à se calmer. James ne disait rien et il n'osa pas le regarder. Quand il reprit la parole, sa voix était légèrement enrouée. Il était fatigué et ne ressentait plus rien à part la fatigue.
D'un ton monocorde, il parla des humiliations, de la façon dont Rosier l'avait rabaissé et lui avait dit que sa vie lui appartenait. Il avait soufflé le chaud et le froid en étant dur avec lui, cruel, tout en lui assurant qu'il l'aimait et que peu importe qu'il soit différent, lui l'acceptait. Il avait voulu que Regulus développe une dépendance à lui. Il l'avait isolé et s'était vanté de ce qu'il arrivait à lui faire auprès des autres garçons du dortoir. Le 6ème année parla des sévices, du harcèlement et des agressions sexuelles quotidiennes. Rosier avait aimé s'introduire dans son lit au beau milieu de la nuit pour se soulager sur lui. Il n'avait pas activé de sort de silence pour que les autres entendent, qu'il ait honte. Il avait posé sa main sur sa tête, l'avait enfoncé dans l'oreiller. Avec son autre main, il avait baissé son pantalon de pyjama et s'était masturbé entre ses fesses.
Toujours d'un ton froid, presque éteint, Regulus parla des interdictions, de la manière dont Rosier en avait fait sa chose. Il lui avait imposé des tenues vestimentaires, avait exhibé sa beauté auprès des autres, s'en était servi comme d'un trophée. Ça avait été une manière de lui montrer les regards que les autres hommes pouvaient poser sur lui et que Regulus n'avait jamais remarqués avant. Qu'il pouvait être cruel, le partager et en faire son jouet.
-Quand il est mort, j'étais soulagé car même si je n'étais plus contraint de rester à ses côtés, il continuait de me tourner autour. Il était prêt à tout pour m'avoir et j'avais peur qu'il réussisse. Il répétait tellement constamment qu'il tenait à moi, que j'étais tout pour lui et d'autres idioties du même acabit, qu'à un moment, je l'ai cru… J'ai alors pensé que des hommes qui s'appréciaient de cette manière ne pouvaient que le faire de la mauvaise façon, car c'était mal. Alors j'ai été soulagé quand j'ai vu son visage écrasé et que j'ai compris qu'il ne respirait plus et je me suis senti coupable de ce que je ressentais.
-Tu n'as pas à l'être. Je pense que s'il avait survécu à l'attaque, je l'aurais tué de mes propres mains, répondit James d'un ton étrangement dur.
Regulus cligna des yeux, revenant peu à peu à la réalité. Il jeta un regard à James. Celui-ci avait les traits figés par la colère et ses yeux avaient un reflet doré propre à son loup. Regulus pensa alors à la prochaine pleine lune et à ce que lui avait dit la spécialiste des loups-garous mais aussi à la discussion compliquée que son frère et lui allaient devoir avoir avec le brun.
Il ferma les yeux et caressa les cheveux emmêlés de l'ancien Gryffondor. Il y penserait demain. Il y avait eu suffisamment de larmes et de colère pour cette nuit. Il n'aimait pas voir ce genre d'expression sombre chez son petit-ami. Il savait que James n'avait jamais aimé Rosier et que celui-ci le lui avait bien rendu.
-Il était jaloux de toi parce qu'il savait ce que je ressentais. S'il était comme ça avec moi, c'était pour me faire payer de ne pas l'aimer.
-C'était un minable. Je ne peux pas croire que personne n'ait jamais découvert quelle ordure c'était !
-Peut-être pas. Barty s'en doutait. Il m'a dit un jour avoir surpris une dispute entre Rosier et une Poufsouffle, une fille avec qui il serait sorti.
James ne fit qu'acquiescer, visiblement perdu dans ses pensées, et Regulus le regarda, troublé.
-James ?
-Je veux qu'il paye, déclara le Maraudeur.
-C'est trop tard. De toute façon, ça ne servirait à rien.
Une fois de plus, James ne dit rien et Regulus eut un mauvais pressentiment mais après s'être confié sur un sujet aussi douloureux et avoir autant pleuré, il était trop fatigué pour analyser le comportement du brun. Il s'endormit rapidement, toujours dans les bras de James.
Je m'excuse de l'attente, j'aurais dû poster ce chapitre plus tôt dans la semaine mais j'ai eu des imprévus. Sorry, j'espère que la qualité du chapitre vous fera oublié l'attente. Je remercie également ma bêta pommedapi qui comme d'habitude fait un super boulot et qui m'aide beaucoup à améliorer mes chapitres.
Avec cette fin de chapitre, vous devez commencer à sentir qu'il va se passer quelque chose. La colère aveugle James, mais est-ce qu'il réussira quand même à faire le bon choix. Est-ce que c'est à lui de décider si Rosier doit payer ou non, comment ?
