Le chat et la souris


Lorsque Emma retrouva Ruby deux jours après, son amie semblait gênée et particulièrement mal à l'aise. Elle n'était pas vraiment surprise, mais c'était la première fois qu'elle la voyait ainsi et c'était étrange.

– Eum… Emma, j'ai quelque chose à te demander… Est-ce que tu pourrais me rappeler ce qu'il s'est passé samedi soir ? l'interrogea Ruby en regardant ses pieds.

– Tu t'en souviens pas ? s'étonna-t-elle en s'empêchant de rire.

– Si, c'est juste pour être sure… Alors je l'ai vraiment fait ?

– Si tu parles d'avoir embrassé Belle alors que personne s'y attendait et encore moins elle, oui tu l'as fait.

Ruby soupira et leva les yeux au ciel lorsque Emma se moqua encore plus d'elle.

– Tu vas lui en parler ? finit-elle par demander sérieusement.

– Pour lui dire quoi ? Que je suis désolée ? Que je sais pas pourquoi je l'ai fait ? J'ai honte en plus, j'avais dépassé ma limite… Et j'arrêtais pas de penser qu'on n'avait pas parlé du fait qu'elle m'avait embrassé. J'ai même l'impression que je l'ai rêvé maintenant !

– T'es pas obligé d'en parler si elle le fait pas. C'est d'abord elle qui t'a pris par surprise pour t'embrasser la première fois et elle ne t'en a pas reparlé depuis. Je pense qu'elle comprendra.

Ruby approuva et réfléchit à la manière dont elle allait se comporter la prochaine fois qu'elles se retrouveront.

– T'en fais pas, t'as pas tout gâché avec Belle, la rassura Emma en lui donnant un léger coup d'épaule.

– On verra quand elle sera là…

Elle la dévisagea un instant avec ses épaules baissées et son air rêveur. Elle était inquiète, son amie ne semblait pas dans son état normal. Elle l'invita immédiatement à passer la prochaine soirée qu'elle avait de disponible chez elle.

À peine cinq jours plus tard, Regina se faisait couler un café, perdue dans ses pensées. Elle venait de finir un cours auquel Mademoiselle Swan avait assisté. Elle ne l'avait pas revue depuis la semaine précédente et depuis une bonne vingtaine de minutes, elle était plongée dans ses souvenirs de leurs dernières rencontres.

Elle en fut brusquement tirée lorsque Mary-Margaret s'approcha d'elle d'une démarche étrange.

– Qu'est-ce qu'il y a ? Tu vas me rendre nerveuse…

– C'est juste que… j'ai quelque chose à te demander.

D'un regard, Regina la pressa à tout lui lâcher.

– Avec David et des collègues, on va boire un verre ou deux vers dix-neuf heures, et j'apprécierais vraiment que tu te joignes à nous aujourd'hui.

– Je vais y réfléchir, répondit-elle sans même penser ce qu'elle disait.

– Regina, je suis sérieuse. Il faut que tu viennes. Je suis sûre que ça te fera du bien de sortir un peu et surtout de voir du monde.

Pour se rattraper de la dernière fois, Regina accepta la proposition. Cela faisait presque un an et demi qu'elle travaillait dans cette école et elle connaissait réellement très peu de personnes. Mais pour cette fois, elle se dit que se rapprocher de certains autres professeurs pouvait l'aider de différentes manières à pratiquer son métier.

Arrivée à l'adresse que Mary-Margaret lui avait envoyée, elle aperçut un collègue posé devant l'entrée.

– Bonsoir, lui lança-t-il.

Regina retrouva vite son prénom. Elle avait déjà déjeuné quelques fois à sa table mais elle le connaissait très mal. Ils étaient entrés la même année à Storybrooke mais il ne l'avait jamais vraiment intéressée. Ce fut probablement une des premières fois qu'elle lui adressa la parole lorsqu'elle le salua.

– Robin, c'est ça ?

Il acquiesça et Regina s'approcha.

– Qu'est-ce que vous faites là tout seul ?

– À vrai dire je vous attendais.

Regina le dévisagea en se demandant pourquoi cet homme portait un regard si intense sur elle. Elle se rappela alors que ce n'était pas la première fois qu'elle surprenait ce genre de regard. Avec un sourire, il ouvrit la porte et la laissa passer.

Ils entrèrent ensemble dans le bar et rejoignirent une grande table où se trouvaient cinq ou six professeurs tout au plus. Regina s'installa près de Mary-Margaret et Robin s'assit à côté d'elle.

Au fil des minutes, elle se sentit un peu mal à l'aise. Le groupe semblait habitué à se retrouver dans ce genre d'endroit, la conversation battait son plein sans interruption, elle avait presque du mal à suivre. Jusqu'à ce que Robin attire son attention et lui propose sans un mot d'aller discuter quelques mètres plus loin près du comptoir…

– Vous venez souvent ici ? lui demanda Regina en jetant un œil vers les autres.

– De temps en temps. Seulement quand je suis en bonne compagnie.

Le petit regard qu'il lui lança l'amusa avant qu'elle ne se retourne à nouveau pour épier.

– Et… ils sont toujours… comme ça ?

La question et la moue de répulsion fit rire Robin qui acquiesça et en profita pour se rapprocher imperceptiblement d'elle.

– Je viens de me rendre compte qu'on déjeune presque tous les midis ensemble mais on n'a jamais pris le temps de faire connaissance.

– En effet.

Son collègue avait une capacité surprenante à la mettre à l'aise. Elle se rapprocha à son tour et l'observa.

Durant ce même temps, Emma passa la soirée avec Ruby. Elle l'avait écouté pendant plus d'une heure et la blonde fut étonnée de découvrir que son amie était bien plus angoissée que d'habitude.

Elle la sentit se détendre seulement deux heures après son arrivée. Et lorsqu'elles changèrent de sujet, ce fut au tour d'Emma de trouver des difficultés à dénicher ses mots.

– Au fait, j'ai besoin d'entendre ton avis, la chose que tu voulais me parler la dernière fois, ce serait pas en rapport avec Madame Mills, si ? lâcha Ruby, prenant son amie de court.

Son cœur rata un battement. À son regard, elle semblait vraiment avoir quelques soupçons. Comment pouvait-elle savoir ?

– Tu es sérieuse là ? Ce serait… je sais pas en fait…

– Hm hm… Vous vous comportez un peu différemment ces derniers temps. Et puis j'ai l'impression qu'elle t'apprécie, tu trouves pas ? interrogea Ruby en notant chacune des microréactions de son visage.

Et ces microréactions, elle les connaissait bien évidemment par cœur.

Emma dévisagea son amie en fronçant les sourcils. Son ton indiquait des sous-entendus précis et elle n'arrivait plus à cacher la vérité face à son regard persistant, elle se sentait prise au piège et Ruby qui semblait tout déchiffrer l'intriguait.

La blonde se demanda si elle devait tout raconter à Ruby. Elle le voulait mais sa professeure risquait de la rendre paraplégique, ou sourde, ou aveugle, ou alors même les trois à la fois…

– Je te connais assez bien pour deviner qu'il y a quelque chose que tu ne me dis pas Emma. Je ne partirai pas d'ici avant que tu m'aies TOUT dit, insista Ruby. Alors lance-toi.

Ruby semblait déterminée. Rien que son regard lui indiquait qu'elle ne s'échapperait pas. Emma évita soigneusement de croiser celui-ci et elle parla d'une petite voix.

– D'accord… J'ai couché avec elle. C'est pas arrivé qu'une seule fois, et c'était seulement pour le sexe.

L'expression qu'eut Ruby fut indescriptible. C'était un mélange d'étonnement, de curiosité et d'excitation.

– Maintenant, j'ai l'impression qu'elle ne veut plus me voir. Alors je n'ai franchement pas grand-chose à te dire…

– Vraiment ? Dis-moi ce qu'il s'est passé.

– Je ne sais même pas. C'est ça le pire, déclara Emma en se levant pour faire les cent pas. On s'entendait bien et l'autre jour, tout a changé. Je voulais lui parler tranquillement, lui demander si on pouvait se voir… Et elle a complètement pété les plombs, elle a prétendu que j'étais un danger ambulant pour elle, que je ne la respectais pas…

Ruby n'eut besoin que d'un regard pour se faire comprendre.

– Je sais ce que tu penses. Ça ne t'étonne pas, elle est déjà horrible avec quasiment tout le monde ici. Mais avec moi, c'était différent. Enfin je veux dire qu'elle reste une peau de vache et tout ça, je crois qu'elle changera jamais, mais quand on était ensemble, elle était un peu plus aimable, du genre généreuse… Elle me disait jamais non et elle anticipait presque mes envies.

Emma se laissa tomber sur le canapé près d'elle.

– Tu as l'air d'avoir à en dire en tout cas.

– Je pourrais t'en parler pendant des heures… Ça fait une semaine que je cherche à la comprendre.

– Eh beh bonjour le mal de tête…

– Ruby, rit Emma qui trouva ce moment soulageant.

Son amie tenta d'enfoncer toujours plus leur professeure, la faisant rire encore plus.

– Ok d'accord, je veux bien te croire, elle n'est peut-être pas une horrible personne… finit-elle par lâcher en signe de résignation.

– Ça fait du bien de te parler… Elle me l'a interdit, elle m'a même interdit de le dire à la personne en qui j'ai le plus confiance… Et puis même si je me disais que c'était pas plus mal d'avoir un secret excitant dans ma vie, j'avais envie de te le dire. Je suis désolée de t'avoir caché la raison pour laquelle je suis si bizarre en ce moment…

– T'as pas besoin de t'excuser, j'ai été trop insupportable ces derniers jours pour te le demander. Je suis surtout heureuse d'être encore la personne à qui tu te confies.

Elle avait de l'importance dans la vie d'Emma depuis un sacré moment et Ruby était rassurée que c'était toujours le cas.

– Bon aller, lance-toi. T'as dit que tu pourrais en parler pendant des heures, alors fais-le je t'écoute.

En seulement quelques minutes, son amie lui avait permis de se sentir mieux que tout le reste la semaine. Dès lors Emma libéra toute sa frustration et se plaignit incessamment de leur professeure tout en racontant leur précédente conversation.

Ruby tâcha de suivre et de réaliser ce qu'elle lui expliquait malgré que cela lui paraissait presque insensé. Depuis qu'elle l'avait rencontrée, elle n'avait jamais eu ce genre de relation, elle n'arrivait pas à croire que c'était Madame Mills qu'elle avait finalement choisie. Cette femme devait être vraiment spéciale pour elle.

– Bref, j'ai l'impression qu'il manque quelque chose pour que ça ait du sens, conclut-elle d'un air perdu. Personne de sensé renoncerait au plaisir connu sans raison, si ?

– Emma, c'est pas ta faute, tenta de la convaincre Ruby. Tant pis pour elle si elle ne souhaite pas d'autres soirées avec toi.

– T'as pas tort mais… je suis juste dégoûtée. J'ai jamais eu autant d'affinité avec quelqu'un. Et cette personne s'avère être une pétasse absolue qui me considère à peine comme une demi-personne.

– Ah tu vois !

Cela faisait tant de bien de rire qu'Emma ne s'arrêta pas avant deux bonnes minutes.

– Plus sérieusement, cherche pas. Elle et toi vous venez d'un monde totalement opposé, c'est presque pas étonnant qu'elle ne veuille pas vraiment passer du temps avec toi. Peu importe si c'est du bon temps ou non.

– Ouais t'as raison…

Ruby savait qu'elle pouvait lui dire tout ce qu'elle souhaitait, Emma continuerait de se torturer…

– Ou sinon… tu lui demandes ou même tu lui exiges plus d'explications.

– Et tu crois vraiment qu'elle m'en donnerait ? l'interrogea Emma sans vraiment attendre de réponse, celle-ci étant évidente.

– Je sais pas, mais il y a dix minutes j'aurais mis ma main à couper qu'elle ne coucherait jamais avec quelqu'un comme toi ou moi. Je sais plus quoi croire.

– La dernière fois, elle était bien plus sévère avec moi qu'elle ne l'a jamais été…

– Si j'en juge tout ce que tu m'as dit, je suis sûre que tu peux la faire céder et te rapprocher d'elle sans qu'elle te repousse…

– Mouais… soupira Emma en s'allongeant avec toute cette fatigue soudaine qui lui tombait dessus.

Elle réfléchit un instant en laissant sa tête pencher en arrière.

– J'ai une question, lança-t-elle au bout de quelques secondes. Comment t'as deviné qu'il s'était passé quelque chose entre elle et moi ?

– Oh c'est juste une intuition… La dernière fois, elle t'a couru après et votre échange était étrange… J'y ai pensé et j'ai réalisé que c'était la seule chose qui sortait vraiment de l'ordinaire.

– Tu ne m'avais jamais dit que tu étais quelqu'un d'aussi attentif…

– C'est uniquement quand il s'agit des personnes auxquelles je tiens.

Emma sourit sincèrement et remercia immédiatement Ruby de sa place dans sa vie. Elle repartit dans ses réflexions concernant leur professeure mais prit en compte tout ce qu'elle lui recommanda. Elle se sentit tellement mieux après avoir déballé son sac et ne plus avoir de lourds secrets… même si c'était parce que la situation avait tourné au vinaigre.

Quand la soirée se finit, Ruby lui confia que cette histoire lui paraissait encore lunaire. En s'y penchant un peu, elle lui sembla tout aussi loufoque. Et en fin de compte son amie avait raison, c'était simple : elle devait lui demander des explications, c'était la seule preuve de respect qu'elle pouvait au moins exiger.

Le lendemain matin, Emma découvrit les résultats de ses examens. Elle ne fut pas si surprise de constater les pires notes qu'elle ait eues. Elle n'y avait pas pensé depuis que la professeure lui en avait parlé.

Cette chute était peut-être due à Madame Mills, mais Emma n'avait pas besoin qu'elle prenne soin de ses études pour elle. Puis c'était entièrement sa faute si suite à leur soirée elle avait eu la tête ailleurs, elle ne pouvait en vouloir qu'à elle-même.

Quand Regina entra dans son bureau, elle lança son sac sur la table et se laissa tomber dans son siège.

Elle se sentait étrange. Elle détestait le changement. Ce n'était pas nouveau mais ce matin, elle l'éprouvait mieux que n'importe quel autre jour.

Elle avait passé une bonne soirée la veille, du genre qui détend et où son besoin en sociabilité était satisfait par la suite. Et elle avait beaucoup discuté avec Robin.

C'était un homme très sympathique et respectueux et plus intéressant que ce qu'elle avait imaginé. Mais quand Mary Margaret lui confia qu'il craquait pour elle, elle n'avait pas pu s'empêcher d'écourter la soirée. Elle avait ensuite passé le reste de celle-ci à penser à lui, mais elle ne demeura pas plus longtemps dans son bureau à faire de même.

Quand Regina s'installa dans une salle quelques instants avant le début du premier cours de la journée, elle eut le malheur de croiser le regard de Mademoiselle Swan. Elle ne semblait pas vouloir la lâcher. Cette journée ne pouvait pas devenir pire.

Emma se demandait pourquoi la professeure avait une petite mine. Tout le long du cours, elle analysa le moindre de ses mouvements pour savoir ce qu'elle pensait et ce qu'elle taisait.

Elle se préparait mentalement à lui exposer ses questions dès la fin du X et se retrouvait de plus en plus impatiente. Mais quand celle-ci arriva, la salle se vida lentement et Emma remarqua un autre professeur entrer et adresser la parole à la brune. Celle-ci se tendit lorsqu'elle aperçut Robin.

– Bonjour Regina. Je tenais à m'excuser si je t'ai fait fuir hier.

Son collègue sembla si sincère qu'elle ne put s'empêcher de l'apprécier.

– Ce n'est rien.

Emma épia le professeur qui papotait avec Madame Mills, lui arrachant quelques sourires par la même occasion.

Regina perdit cependant son sourire lorsqu'elle la vit les observer. Le malaise l'envahit immédiatement et elle devina que la blonde voulait lui poser davantage de questions.

Elle s'approcha rapidement quand leurs regards se croisèrent mais alors qu'elle allait prendre la parole, son regard l'incita à sortir de la pièce. Ce dernier la fit s'exécuter sans joie et en serrant les dents.

Regina remarqua bien son expression, et c'était bien pour cette raison qu'elle ne devait pas encore lui parler, la jeune étudiante devait toujours digérer sa réponse négative de l'autre jour à propos de son invitation.

– Qu'est-ce qu'il y a ? s'interrogea Robin en se retournant pour découvrir qui lui prenait son attention.

– Rien d'important, marmonna-t-elle en rassemblant ses affaires.

Robin la regarda faire un instant.

– Je te vois au déjeuner alors ?

– Ce serait un plaisir. À toute à l'heure.

L'homme partit après un sourire et Regina soupira. Elle avait esquivé une discussion avec Mademoiselle Swan qu'elle n'était pas près d'avoir, mais ce n'était que retarder l'inévitable.

Les jours suivants s'enchainaient à grande vitesse, à l'image des semaines. Emma chercha sans arrêt une occasion de lui parler pour mettre les choses au clair, mais aucune ne se présentait à elle.

Elle aperçut à plusieurs reprises le même professeur à proximité de Madame Mills. Il n'avérait pas vraiment populaire mais contre toute attente, elle entendait fréquemment parler de lui, probablement en raison de son look et son comportement souvent décontracté.

La professeure l'ignorait de plus en plus, et après le Nouvel An qui semblait si lointain qu'elle commençait presque à douter l'avoir vraiment vécu, c'était un peu dur à avaler. Elle savait à quel point elle avait aimé leur précédente soirée, mais elle ne s'en rendait pas compte elle-même apparemment…

Elle était à présent convaincue qu'elle ne reviendrait pas sur ses mots. Elle avait été naïve de croire qu'elle l'avait amadoué et apprivoisé, mais tout paraissait tellement simple lorsqu'elles s'étaient retrouvées entre elles… Elle pensait qu'elles étaient devenues de vraies partenaires, qu'elles communiquaient sur la même longueur d'onde…

Quand elle se rappelait leur dernière conversation, elle avait l'impression qu'elle s'était jouée d'elle…

Emma réussirait bien à parler à Madame Mills tôt ou tard, et si cela devait prendre deux semaines de plus ou deux mois de plus, soit. Et elle n'aura pas d'autre choix que réaliser qu'elle n'aurait pas dû la faire attendre ainsi.

Pendant ce temps, Regina faisait petit à petit connaissance avec Robin. C'était un homme charmant et elle appréciait ce qu'elle découvrait au fil des jours. Les doutes de Mary-Margaret s'étaient avérés assez rapidement, mais elle ne s'en sentait plus gênée.

D'un autre côté, la professeure apparaissait si souvent en sa compagnie que cela ne laissait aucune opportunité à Mademoiselle Swan de l'approcher. Elle la voyait tourner autour d'elle tel un faucon sur sa proie.

Regina ne l'avouerait pour rien au monde, mais cela la peinait un peu de devoir l'éviter. La précédente soirée qu'elles avaient passée ensemble avait été si spéciale…

Mais elle ne pouvait pas changer d'avis. Elle éprouvait des difficultés à s'y habituer. La preuve : un matin, elle se réveilla sans réussir à croire ce dont elle venait de rêver.

Le temps d'un instant, elle avait été de retour à Helios. Elle avait vite compris que ce n'était pas réel, les sensations dont elle avait le souvenir n'étaient pas les mêmes.

C'était… putain de frustrant.

Son corps semblait, physiquement parlant, pas apte à oublier le plaisir qu'elle avait pris durant ces moments. Il paraissait imprégné à l'indélébile par ces sensations.

Non, il lui suffisait d'un peu de temps, rien qu'un peu.

Ou peut-être que…

En se redressant, Regina se battit avec ses draps emmêlés pour sortir du lit, relâchant sa frustration. Étonnamment cela lui fit un bien fou. Les nuits suivantes, ses rêves furent si vides qu'elle se demanda si elle pourrait un jour rêver d'autre chose.

Durant une fin de journée, Robin la trouva dans son bureau. Son ami tourna autour du pot pendant une bonne quinzaine de minutes mais la professeure évita tout commentaire, elle apprécia simplement sa présence. Quand il se lança un peu maladroitement, elle ouvrit grand les oreilles.

– J'ai envie que tu viennes chez moi pour qu'on puisse comparer nos recettes de lasagne ce weekend, si tu es disponible bien sûr… Je suis certain que je pourrais t'épater malgré ce que tu semblais croire la semaine dernière.

– Tu me proposes un dîner chez toi ? reformula Regina avec un étonnement plutôt positif.

– Oui mais n'y vois pas de connotation particulière… Ce sera juste l'occasion de se détendre un peu.

Son air l'amusa. Alors elle accepta. Cela ne pouvait pas lui faire de mal. Elle appréhendait légèrement la soirée mais celle-ci confirmerait ce qu'elle voulait que leur relation soit.

Le vendredi, Regina rejoignit Robin directement chez lui. Elle était prête à passer une bonne soirée et espérait qu'elle n'en ressortirait pas déçue.

Tout du long, ils se tournèrent autour gentiment. Son ami avait ouvert une délicieuse bouteille de vin, elle se régalait et se servait sans arrêt. Cela faisait au moins de longues années qu'elle n'avait pas vécu un si bon dîner. Lorsqu'elle voulut rentrer, Robin insista pour qu'elle reste un peu plus longtemps mais elle refusa. À la place, elle promit de l'inviter à son tour chez elle pour tester sa recette. Il sembla ravi, un peu trop au goût de Regina qui se demanda si elle ne devait pas réduire ses espoirs.

Elle sentait qu'elle avait besoin de voir d'autres gens, de changer ses horizons… sans pour autant pousser très loin ces horizons…

Le lundi, Regina rencontra Mary-Margaret autour de la machine à café. Elle l'interrogea sur son dîner et la jeune professeure hésita un instant à répondre mais elle savait très bien que son amie ne lâcherait pas l'affaire. Elle lui lança une réplique vague et entendit sa collègue réagir mais elle n'écouta pas, car Mademoiselle Swan venait d'apparaitre à quelques mètres et la croisa son regard aussitôt.

Son attention fut immédiatement attirée par ses yeux pénétrant, la fixant alors qu'elle marchait dans le sens inverse. Elle n'allait pas échapper à une discussion avec Mademoiselle Swan une fois de plus, comprit Regina en voyant son regard déterminé. Qu'allait-elle pouvoir lui dire ?

– Et tu as une idée de ce qu'il va se passer ensuite ? lui demanda Mary-Margaret, la tirant de ses pensées.

Regina se rendit compte qu'elle ne s'était même pas posé cette question. Elle était sur le point de répondre lorsqu'elle remarqua qu'elle ne captivait plus l'attention de sa collègue qui fixait droit devant elle. Elle aperçut Robin seul qui semblait attendre quelqu'un. Son amie lui lança un regard amusé et la laissa le rejoindre.

La journée s'enchaina, ordinaire du moins jusqu'à la fin du cours avec Mademoiselle Swan. Celle-ci l'avait passé à l'observer d'une manière bien différente que d'habitude. Son regard s'avérait presque sinistre.

Regina rassembla toute sa concentration lorsque le cours se finit. La salle de classe se vida pendant que Mademoiselle Swan prenait tout son temps.

La professeure l'ignora royalement mais cela n'effraya pas l'étudiante qui se leva et s'approcha sans crainte ni hésitation.

– Vous pouvez m'expliquer ce que vous êtes en train de faire ? reprocha immédiatement Emma en haussant la voix. Vous avez couché avec moi d'une manière dont je sais très bien que vous n'avez jamais imaginé le faire, et puis plus rien. Pourquoi vous avez changé du jour au lendemain ?

Il suffit d'une seconde à Regina pour réaliser que la discussion qui allait suivre serait plus mouvementée que toutes les autres qu'elles avaient pu avoir auparavant. Laisser la jeune femme mijoter ses pensées semblait inverser l'effet souhaité…

Elle ne pouvait plus attendre maintenant…

– Je vous l'ai déjà expliqué. J'ai pris du temps pour réfléchir et j'ai compris que je ne veux pas continuer comme ça, prononça-t-elle avec difficulté car elle savait qu'ils blesseraient la jeune femme. Je ne veux pas prendre de risques avec ma carrière… Je suis convaincue qu'à long terme nos rencontres n'apporteront rien de bien, à moi comme à vous.

– C'est après trois mois durant lesquels vous avez eu aucun regret que vous croyez cette bêtise ?

Emma se sentait étonnamment calme, elle avait tellement pensé à cette conversation qu'elle pouvait presque prédire chaque réponse que lui fournirait la professeure, et bien évidemment elle avait cherché quoi répliquer.

– Qu'est-ce qui vous dit que je n'ai jamais eu le moindre regret ?

Emma leva les yeux au ciel et souffla d'exaspération.

– Je sais depuis longtemps que vous avez une mauvaise influence sur moi.

Regina ne put s'empêcher de marquer une pause. Elle voyait le visage de Mademoiselle Swan se fermer de plus en plus.

– Je fais des choses que je n'aurais jamais imaginé faire en temps normal.

– Dites pas ça comme si je vous avais forcé à faire la moindre chose ! Arrêtez de me mettre dans la place de la méchante, c'est vous qui m'avez traité comme de la merde la dernière fois !

Regina perdit patiente, elle s'apprêtait à élever la voix à son tour lorsque la porte s'ouvrit soudainement.


Moi ? Aimer laisser les gens dans le suspense ? Noon c'est pas mon genre... (ce chapitre a été publié suite à un f*ck it mental) Bon vendredi 13 à tous !