Chapitre 13
Quelque-chose se pose sur mes épaules, je me rends compte que c'est sa veste et ses mains restent autour de mes bras, je suis en train de trembler.
« Tu as froid, murmure-t-il au-dessus de ma tête, il a dû s'accroupir derrière moi.
Je ne ressens pas sa chaleur dans sa veste, il ne devait pas la porter mais je sens son parfum sur le col. Il s'assoit à mes côtés mais je ne veux pas le regarder, je laisse la manipulation derrière nous, parce qu'il va partir de toute façon et ça ne sert plus à rien de lui mentir.
« Au moins, je ressens ça.
Je n'ai pas voulu sortir ça mais je l'ai tout de même murmuré. Maintenant que c'est dit, autant continuer.
« Je ne peux même pas être en colère ou triste ou même avoir peur parce que ton père a raison, je ne ressens rien.
Son bras se déplie de lui, je le vois en périphérie et il le pose autour de mes épaules, il m'approche de lui, je laisse ma tête tomber dans le creux de son épaule et je continue de ne rien ressentir.
« C'est pour ça que ton kidnapping ne te fais rien, que ta possible mort ne te panique pas, que tu ne trouves pas d'intérêt à mettre le type derrière les barreaux, par vengeance ou pour te rassurer.
« J'imagine. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?
« Carlisle pense que tu es atteinte de psychopathie.
« Mais je ne suis pas mauvaise, je ne veux pas tuer des gens ou leur faire du mal.
La seule chose qu'on peut me reprocher, c'est de mentir mais même ça, on ne peut pas parce que personne ne se rend compte de mes mensonges sauf quand je décide de l'avouer ou si je fais une erreur. L'idée de tuer mon kidnappeur si besoin ne m'a pas dérangée, ça aussi on pourrait me le reprocher si quelqu'un venait à être au courant mais personne ne le saura jamais.
« La majorité des psychopathes ne sont pas des tueurs. Certains tueurs en série et autres criminels sont des psychopathes, parce qu'ils ne ressentent pas la souffrance des autres, ils sont dépourvus d'empathie alors c'est facile pour eux de faire du mal mais ça ne veut pas dire que tous les psychopathes tuent ou torturent, c'est en fait une minorité d'entre eux. La plupart sont des menteurs pathologiques ou manipulent pour obtenir ce qu'ils veulent.
Un instant, je me demande s'il sait, s'il a compris et qu'il me vise.
« Ils ne ressentent pas la peur, de remord ou de culpabilité mais ils peuvent ressentir certaines émotions. N'en ressentir aucune est assez rare, toutefois, mais il faut que la récompense soit grande pour qu'ils soient vraiment heureux de quelque-chose.
« Je...
« Mh ?
Non. Il ne sait pas. De toute façon, il ne peut pas le savoir puisqu'il ne lit pas dans ma tête, il n'arrive pas à me cerner non plus et personne n'a jamais su. Il sait juste que j'ai menti à son père pour le psy et au mien pour le vol de ma voiture mais c'est tout.
« Je crois que je ne suis pas empathique. Je reconnais les émotions des autres mais ça ne me fait rien. Quand mon père a pleuré devant moi, je ne savais pas quoi faire alors j'ai fui pour me fixer dans le miroir pendant deux heures en essayant de trouver qui j'étais. Et je n'ai pas trouvé.
« Tu m'as dit que tu cernais bien les gens, je suppose que ça compense ton absence d'empathie. Les femmes ont tendance à mieux s'adapter que les hommes dans certains troubles.
C'est pour ça que je l'ai pris dans mes bras quand je suis redescendue, parce que je sais ce qu'il faut faire quand quelqu'un est triste, pas parce que je ressens sa peine. Même dans mes actes, je mens. C'est si naturel pour moi, de mentir. Edward me tient toujours contre lui, son bras sur mon épaule mais je ne sens pas sa chaleur à travers son pull. Je tends la main pour toucher la sienne posée sur sa cuisse et lorsque je le touche, sa peau est aussi froide que la température extérieure.
« Tu es si froid, commenté-je.
« Je ne suis pas... exactement quelqu'un de normal non plus, m'avoue-t-il.
Il doit avoir une maladie, lui aussi mais physique et pas mental, comme moi. Il doit avoir un traitement qui le maintient en vie parce qu'une si faible température, c'est mortel, normalement. Je crois.
« Tu n'as pas peur que je révèle ce secret ? Il ne m'enverra pas à l'HP, lui, surtout que c'est vérifiable.
« Tu comptes le divulguer ?
« Non, avoué-je. Un secret pour un secret, je ne dévoile pas ta maladie frigorifique et tu ne dévoiles pas ma psychopathie.
« Deal, sourit-il. Tu veux un autre secret ?
« Ouais, accepté-je.
« Je sais que tu ne l'aurais pas révélé, de toute façon.
« Pourquoi es-tu si sûr ?
« Quel intérêt ? Souffle-t-il. Si tu ne veux pas envoyer ton kidnappeur derrière les barreaux, pourquoi révéler mon hypothermie à nos camarades ? Comme si ça intéressait quelqu'un.
« Certes, t'es plutôt malin, soufflé-je. Tu as pu décaler ton vol ?
« Ouais.
Je soupire. Il se trouve que je n'ai pas envie qu'il parte. Je n'ai pas envie de manipuler qui que ce soit d'autre. Seulement lui. Bien sûr, je continuerai de manipuler mes autres camarades, ma famille, pour obtenir ce que je veux, descendre Lauren dans l'échelle alimentaire du lycée ou aider pour ma manipulation sur Edward mais lui, il n'y a aucune foutue raison. Juste... ça doit être lui.
Jusqu'à ce que j'en ai assez.
Précepte 6
L'amour est la meilleure des chaînes
Maintenant que ta cible se sent redevable, il te sera facile de te faufiler pour trouver une place dans son cœur. Tu ne seras jamais aussi proche de la finalité de ton apprentissage et pourra accueillir avec sérénité le jour de ta révélation. L'amour est l'émotion humaine la plus pure et la plus loyale, elle peut durer dans le temps si elle est entretenue. Passe du temps avec ta cible, nourris-la d'attentions. L'écoute est un excellent outil pour toi, à ce stade de ta mission. Voici une liste des choses/besoins que tu pourras faire/combler : [...]
Je ferme le bouquin. La partie la plus difficile pour moi, à priori... parce que je ne ressens pas cette émotion alors comment la créer chez Edward ? Bien sûr, il y a la liste. Resto, cinéma, promenades romantiques, trouver un endroit et le définir comme notre endroit. Notre endroit d'amoureux. Je n'ai jamais pensé pouvoir... penser ça un jour. Le dernier de la liste, c'est le sexe. Ça ne m'a jamais intéressée, j'ai vu des scène érotiques dans certains films sans qu'ils ne montrent vraiment les choses, juste une insinuation de ce que les personnages faisaient et ça ne m'a jamais émoustillée ni rien. Parce que je ne ressens pas d'émotion donc pas de désir. Ça m'indiffère alors j'essaye d'imaginer Edward et moi et je ne ressens ni l'envie ni le besoin de pousser la manipulation jusque là mais ça ne me dérangerait pas non plus si je devais le faire.
Cette partie émotionnelle de la manipulation sera donc difficile mais ça le sera d'autant plus qu'Edward est en Alaska, à présent. Je ne sais même pas s'il est rentré chez lui pour repartir le lendemain ou s'il est reparti directement à Port Angeles ou à Seattle pour prendre le prochain avion qui décollerait. Je me demande si vivre dans un pays si froid est conseillé quand on souffre d'hypothermie chronique.
Je n'ai plus besoin de lire ce livre, j'ai failli à ma mission, je n'ai même pas pu atteindre la 4e étape de ma quête – le sauver. Je ne lui ai montré qu'une facette de moi-même vendredi soir mais ce n'est sûrement pas la meilleure alors je n'ai pas entamé le 3e précepte non plus.
J'ai été tellement peu avancée dans ma quête, j'étais loin de ce que je pensais.
Il ne me reste qu'un chapitre à lire, un précepte à découvrir mais je laisse tomber, si Edward n'est plus là, ça ne vaut pas la peine, pas tant que j'ai toujours envie – ou besoin? – que ce soit lui.
Charlie regarde la télé quand je redescends, je pose ma main sur le mur pour m'arrêter sous l'arche. Il tourne la tête et me sourit.
« Un problème, ma fille ?
C'est nouveau depuis hier, le "ma fille". Je pense qu'il essaie de se persuader que je suis toujours sa fille. Ça a vraiment tout changé mais je l'ai mérité, tout ça ne serait pas arrivé si je ne lui avais pas menti... ou dit la vérité ? Je ne suis même plus sûre de si j'ai menti ou pas, du coup.
« J'ai envie de profiter de ce dimanche ensoleillé pour aller voir Jacob, je peux ?
La Push est hors de la ville donc je dois lui demander.
« Oui bien sûr, ne rentre pas trop tard et sois prudente.
Ça aussi c'est nouveau, depuis tout de suite. Il essaye d'être un meilleur père pour rester mon père.
« Bien sûr, papa, pas trop tard et prudence. » je joue le jeu.
Il hoche la tête, satisfait. Je prends la voiture et profite des 20 minutes de trajet pour me vider la tête en écoutant la musique. À la réserve, je me gare sur le parking de la plage, en espérant croiser Jacob au cours de ma promenade. Je doute que Billy le prenne bien si je venais frapper à sa porte, il a sans doute peur que je remplisse sa maison de serpents. Comme si j'avais une affinité particulière avec eux, j'en ai même jamais vu de ma vie à part à la télé.
Je ne suis pas la seule à vouloir profiter du soleil à la plage, il y a surtout les résidents de la réserve mais quelques visages pâles sont présents aussi. Je repère un gars adossé contre un arbre, les bras pliés sur son torse, ses biceps gonflés. Il est l'un des seuls à avoir les cheveux courts et il me fixe. Tout le monde sait pour les serpents, j'ai l'impression. Je ne peux même pas réclamer mon privilège de descendance parce que je ne suis pas vraiment la descendante de Charlie.
C'est pour ça que je veux voir Jacob, pour qu'il me dise tout ce que son père lui a dit à mon sujet et pour qu'il lui pose des questions sur ce qu'il n'a pas encore dit. Parce que si Billy m'a regardé bizarrement chaque fois qu'il m'a croisée, c'est forcément parce qu'il se doutait que je pouvais ne pas être la fille de Charlie. Il vérifiait les ressemblances. Peut-être qu'il sait qui est mon père, peut-être que j'ai hérité ma maladie de mon père et peut-être que Billy sait que je l'ai. C'est pour ça qu'il rechigne à laisser son fils passer du temps seul avec moi. Il a peur.
Je continue de marcher, je n'ai plus l'amérindien baraqué dans mon champ de vision mais je sens toujours son regard sur moi. Je décide de me rafraîchir l'esprit et me dirige vers l'océan. À quelques mètres des vagues, là où le sable est encore sec, je retire mes converses et mes chaussettes puis remonte les pans de mon pantalon, les enroulant au-dessus de mes genoux. Je laisse mes chaussures sur place et me dirige vers les vagues et le contact de l'eau me force à reculer, elle est tellement froide. Je m'avance doucement, le temps de m'habituer, je ne sais pas pourquoi je me torture alors que mes pieds gèlent mais je sens que je dois le faire. Quand mes pieds sont submergés par l'eau glacée, je m'arrête, je ne suis pas capable de faire un pas de plus. Je suis la seule folle qui est entrée dans l'eau au mois de mars sans combinaison de plongée et je comprends pourquoi.
Je me contente alors de regarder les vagues rouler autour de mes chevilles et déformer mon reflet à peine visible à la surface. Je tourne la tête pour regarder l'un des surfeurs dans sa tenue hermétique tenter de s'équilibrer sur sa planche en prenant une vague, loin devant moi, sur ma gauche. Quand je repose mon regard sur les plus petites vagues à mes chevilles, je remarque que mon visage est encore tourné en haut et vers la gauche. Je plisse les yeux parce que le reflet n'est pas tant visible et je me fais peut-être des idées mais je le vois se tourner vers moi, la peau autour de ses yeux est devenue noire.
– Va-t-en ! Grogne furieusement la voix dans ma tête pendant que mon reflet prononce ces mots avec un air sauvage.
Je recule vivement en fixant l'endroit où se tenait mon reflet bien qu'il n'existe plus, ne me trouvant plus dans l'eau. Je décide de compter jusqu'à six pour voir si la voix reviendrait sans le reflet.
Un
deux
trois
quatre
cinq
six
La voix ne revient pas, je décide de suivre son conseil puisque cette fois, mon hallucination ne me demande pas de tuer quelqu'un et qu'il y a peut-être une raison logique à vouloir que je m'en aille – même si je n'en vois pas. Je fais demi-tour et récupère mes chaussures dans lesquelles j'ai coincé mes chaussettes. Je ne les remets pas pour m'éviter la sensation du sable roulant sous mes pieds et me dirige vers ma camionnette. L'amérindien baraqué n'est plus contre son arbre.
Quand je passe le panneau de sortie de La Push, je me demande pourquoi la voix voulait que je parte et pourquoi je l'ai écoutée. Ce n'était qu'une hallucination ou bien je suis une psychopathe schizophrène, parce qu'un seul trouble mental serait trop facile.
Je me suis réfugiée dans ma chambre pour éviter Charlie, je fixe le livre "Faîtes ressurgir le bon en vous" qu'Angéla m'a offert le jour de notre rencontre. N'y a-t-il rien de bon en moi ? L'a-t-elle sentie d'une façon ou d'une autre ? Je ramasse le livre, joue avec les pages en glissant mon pouce sur la tranche. Angéla est quelqu'un d'empathique, à l'opposé de moi et donc peut-être que son empathie n'a rien décelé chez moi et du coup... du coup, elle sait ? Peut-être...
Je prends le livre et ma voiture puis je parcours le chemin qui me sépare de sa maison. Je traverse la petite allée, il y a une étiquette collée sous la sonnette "Frappez, si aucune réponse, sonnez". Je frappe puis j'attends jusqu'à six, comme je n'ai pas de réponse, je sonne. J'attends un peu puis je fais demi-tour mais après quelques pas, la porte s'ouvre finalement. Je me tourne pour découvrir un homme d'une quarantaine d'années, roux et une barbe taillée, je sais qu'il est pasteur et je me fais la réflexion qu'il en a l'air. Son regard est attiré par mon livre et un sourire chaleureux s'étirent sur son visage quand il relève le regard.
« Bonjour, tu dois être Bella, n'est-ce pas ?
« Bonjour, oui.
« Je suis Mickael, le père d'Angéla. Enchanté de faire ta connaissance. Veux-tu entrer ?
« Hum, je cherche Angie, en fait.
« Elle ne va pas tarder, tu peux l'attendre à l'intérieur, si tu veux.
« Ok, soufflé-je.
Je le suis, il me présente le canapé de son salon pour que je m'y assois alors je m'y installe et pose le livre à côté de moi.
« Du thé ? Nous en avons de toutes sortes.
« Juste de l'eau, ça ira.
« Tu es sûre ?
« Je n'aime pas le thé, expliqué-je.
Il répond d'un sourire étiré en joignant ses mains l'une dans l'autre et fait demi-tour. Je regarde la pièce, elle ne croule pas sous d'innombrables décorations ce qui aère la pièce et la fait sembler plus grande mais aussi étrangement minimaliste. J'ai l'impression d'être dans un salon témoin d'un magasin de meubles. Mr Weber revient avec un verre d'eau et une tasse de thé. Il me tend le verre que je prend puis s'assoit sur le fauteuil, à gauche du canapé et se met à tourner sa cuillère dans la tasse tout en fixant mon livre du regard.
« Tu aimes lire ? Me demande-t-il.
Son regard se relève sur moi pour attendre ma réponse.
« Ça m'occupe l'esprit et c'est toujours sympa d'imaginer les histoires.
« Ce n'est pas une histoire, ici, il me semble, remarque-t-il.
« Non, pas celui-là, souris-je. C'est un cadeau de votre fille.
« Tu l'as lu ?
« J'ai commencé.
« Tu en penses quoi ?
« Je n'en ai pas lu assez pour pouvoir juger mais pour l'instant, je n'ai pas appris grand chose de plus que ce que je connaissais déjà.
Mr Weber hoche la tête et semble satisfait de ma réponse, tant mieux parce que je n'ai même pas lu le résumé du livre.
« Vous lisez, aussi ? Demandé-je.
« De temps en temps, quand j'ai du temps libre, je suis souvent fort occupé.
« Vous êtes pasteur, c'est ça ?
« Tout à fait, opine-t-il.
« Ça consiste en quoi, exactement ?
« Essentiellement à aider les gens, les aider à trouver leur voie, les remettre sur le bon chemin.
Je fais un mouvement de tête pour montrer ma compréhension puis j'avale un peau d'eau.
« Angéla m'a dit que tu étais nouvelle, toi aussi.
Mon regard se fixe à nouveau sur le pasteur et je hoche la tête.
« Oui, je suis arrivée quelques-jours avant vous et ai intégré Forks high school le jour précédent l'arrivée d'Angéla. On s'est rencontrée le jour où vous êtes venus l'inscrire.
Il se penche pour poser sa tasse de thé vide sur la table basse puis se déplace pour se tenir devant la fenêtre et regarder l'extérieur.
« Tu as réussi à te faire beaucoup d'amis ?
« Oui, quelques-uns.
Un mouvement dans le reflet attire mon regard, je regarde de l'autre côté et voit Angéla entrer dans le salon. Je pensais qu'elle n'était pas là mais le reflet m'a indiqué qu'elle venait des escaliers. Elle me sourit ravie, je me lève et la salue.
« Salut Bella.
« Bella te cherchait, lui annonce Mr Weber.
« Tu veux faire un tour dehors ? S'enquiert Angie.
« On peut aller dans ta chambre, sinon.
« Elle n'est pas très présentable, grimace-t-elle. Vaut mieux aller marcher.
« Ok.
Nous sortons et même le pasteur n'est pas aussi surprotecteur que la nouvelle version de Charlie, il ne lui dit rien à propos de ne pas rentrer tard ni d'être prudente. Nous retraversons l'allée et marchons sur le trottoir.
« Tu ne regrettes pas de ne pas être venue avec moi, hier ? Me demande-t-elle.
« Non, j'avais mes propres problèmes à régler.
« Tu as des problèmes ? S'inquiète-t-elle.
Angie, la gentillesse incarnée. Je hausse les épaules sans répondre.
« Tu as commencé à le lire, finalement ?
Je m'arrête et m'adosse contre le lampadaire, elle se tient face à moi et attends ma réponse.
« Pourquoi tu me l'as offert ? Demandé-je en ignorant sa question.
« Je te l'ai dit, me sourit-elle. Pour te remercier de m'avoir emmener à Port Angeles. En plus, tu n'as même pas demandé à partager l'essence, c'était vraiment gentil de ta part.
« Pourquoi ce livre-là ?
Angie hausse les épaules.
« Je pensais qu'il te plairait.
« Pourquoi ?
Elle affiche une expression déconfite.
« Ça ne te plaît pas ? On dirait... j'ai l'impression que tu prends ça comme une mauvaise intention de ma part. Tu m'en veux ?
« Non, je t'en veux pas. C'est juste... je sais pas, je me pose des questions, en ce moment. Sur moi-même et je me demandais si ce livre signifiait quelque-chose, si tu pensais... je sais pas, si tu pensais que, peut-être, je n'étais pas assez bien.
« Je te l'ai offert parce que tu semblais prendre les choses à la légère, ne pas attendre Eric, abîmer un panneau de ton ancien lycée, insulter quelqu'un qui t'a dérangée, ce genre de trucs. Je me suis dit que, peut-être, tu ne savais pas toutes les choses de bien que tu pouvais faire.
« Tu... essayes de me manipuler pour que je fasse... euh, le bien ?
« Non, je n'essaye pas de te manipuler, j'essaye de te montrer la bonne voie.
« Je vois, tu suis les traces de ton père, en fait.
« C'est comme ça qu'il m'a élevée, j'essaye d'aider, c'est tout.
« Eh bien, fais-je en regardant le livre. Je n'ai pas besoin d'être aidée.
Je lui tends le livre pour qu'elle le reprenne mais elle secoue la tête.
« Garde-le, tu voudras peut-être le lire plus tard, on ne sait jamais.
J'abdique et le garde dans la main. Nous retournons sur nos pas, elle pour rentrer et moi pour prendre ma voiture.
« À demain, Angie.
« À demain, Bella, passe une bonne soirée.
« Toi aussi, lancé-je en entrant dans ma voiture.
En rentrant à la maison, je me dirige à la cuisine, ouvre la poubelle et jette le livre dedans.
