- Elle est sublime ! S'extasia Lydia.

- Elle est moche et on dirait qu'elle est prête à s'effondrer, maugréa Stiles, de mauvaise humeur.

Deux points de vue radicalement différents qui s'affrontaient sans un bruit. Il était vrai que la bâtisse qui leur faisait face était quelque peu particulière. Son architecture rappelait un peu l'ère victorienne et ne laissait personne indifférent. Le bois particulièrement vieilli et noirci par endroits n'aidait pas, selon Stiles, à trouver l'endroit rassurant. Pas étonnant que la maison suscite certaines inquiétudes… C'était une émissaire qui avait fait appel à la meute de Scott McCall. Elle avait dit être certaine que quelque chose d'étrange se passait dans cet endroit. Selon elle, la bâtisse dégageait une certaine quantité de mauvaises ondes qui l'étouffaient lorsqu'elle osait s'en rapprocher. Et même si les preuves d'une manifestation d'ordre surnaturelle étaient sacrément manquantes – de mauvaises ondes ? –, on n'avait pas refusé la mission qui leur avait été confiée : celle de venir et d'enquêter sur cette étrange maison. Ce qui avait convaincu Scott de répondre à l'appel à l'aide de cette émissaire ? Le fait qu'il s'agissait de la maison d'un ancien mage. Il n'avait pas plus d'informations que cela, mais ça lui avait suffi à se dire qu'il y avait quelque chose à faire.

Debout à côté d'une Lydia admirative, Stiles soupira.

- Je continue de dire que c'est une idée de merde et qu'on ne devrait pas tous être là.

Car c'était effectivement ce qu'il disait depuis le départ. Pour lui, toute cette histoire puait : déjà, pourquoi se fier aux simples dires d'une émissaire ? Peut-être disait-elle la vérité, soit. En tous les cas, Stiles n'accordait pas sa confiance à grand-monde. A vrai dire, il fallait la mériter.

- J'avoue que pour une fois, je suis d'accord avec Stilinski, soupira Jackson.

Pas que cela lui plaise de lâcher ce fait, en particulier de dire qu'il partageait l'avis de ce stupide hyperactif, simplement… La maison ne lui semblait effectivement pas des plus solides. Si elle s'effondrait, les loups-garous pourraient survivre grâce à leur constitution et leur métabolisme. En ce qui concernait Lydia et Stiles, c'était autre chose. Lydia avait juste son cri pour prévenir d'une mort imminente et Stiles… Rien. C'était l'humain par excellence : faible et inutile. Quoique non, Jackson était un peu vache. En vérité, il était parfois admiratif de l'intelligence du châtain et surtout, de sa rapidité d'esprit. Ce qu'il ne disait pas non plus, c'était qu'il faisait confiance aux intuitions de cet humain… Qui côtoyait suffisamment le surnaturel au quotidien pour détecter une situation merdique. Son sens de l'observation ? Inutile d'en parler tant il était égal à ses autres « capacités » naturelles. En somme, Stiles était chiant, mais restait un atout non négligeable pour la meute. Cela n'empêchait pas Jackson d'avoir son avis et de partager le sien. Faire entrer des non-loups dans cette maison… Il n'était réellement pas fan de l'idée. Peut-être la bâtisse était-elle solide, mais… Jackson préfèrerait ne pas tenter le diable.

- J'y vais en premier.

L'on se tourna d'un même mouvement vers Derek, qui venait de s'avancer d'un air blasé. Vraisemblablement, il n'était pas très heureux d'être là – Stiles et Jackson le comprenaient, puisqu'ils partageaient la même pensée. Seuls Scott, Lydia et Malia semblaient à leur aise, ici.

- Un autre volontaire pour tester la vétusté de cette vieillerie ? Railla Stiles en croisant les bras sur son torse.

Malia haussa les épaules.

- Tant qu'à faire, fit-elle.

Personne d'autre ne s'avança. Ni Jackson, ni Peter, ni Liam n'émirent la moindre parole supplémentaire. Disons que de son côté, Liam était un peu… Impressionné par l'endroit, et pas forcément à son aise. C'était encore le bleu de la meute, celui qui, malgré son audace, réfléchissait un peu et attendait d'être suffisamment familier avec son pouvoir lupin pour se mettre en danger de cette façon. Mieux valait pour lui maîtriser tous les nouveaux aspects de son métabolisme lupin avant de se lancer sans craintes. Concernant Peter… Il était du genre précieux, et sa nouvelle veste aux motifs sophistiqués était neuve – il n'avait pas la moindre intention de l'abîmer. Scott décida également de rester à l'extérieur, histoire de surveiller les environs. Il était l'alpha, ici, celui qui avait les sens les plus aiguisés. Si un danger quelconque se rapprochait, il le sentirait ou l'entendrait venir de loin. Plus loin que ses bêtas, en tout cas.

Après quelques minutes de discussion supplémentaires avec, en prime, de nombreuses mises en garde et conseils de la part de Stiles, Derek et Malia s'engouffrèrent à l'intérieur de la maison. S'il y avait bien une chose qu'on ne pouvait pas reprocher à l'hyperactif, c'était bien sa capacité à prendre les choses aux sérieux.

- Je trouve quand même que tu en fais un peu trop, soupira Scott.

Il avait l'habitude d'un Stiles alarmiste. A contrario, lui ne l'était pas assez. Jackson, qui les regardait du coin de l'œil, ne pouvait que confirmer ce fait.

- Je sens pas cette baraque, Scott. J'ai un mauvais feeling.

- Rappelle-moi la dernière fois où tu as été optimiste pour quelque chose, j'ai du mal à m'en souvenir, ironisa l'alpha.

Stiles fit preuve d'un self-control qu'il était aisé de juger étonnant, lorsqu'on le connaissait. L'hyperactif était du genre à laisser exprimer la plupart de ses émotions, de se plaindre lorsqu'une situation le dérangeait. C'était d'ailleurs ce qu'il avait fait. Cependant, il ne soupira même pas face aux piques de Scott, piques qu'il lui lançait régulièrement ces derniers temps. Dire que Stiles ne participait jamais à ces étranges joutes verbales serait mentir. Néanmoins, il n'avait pas l'air d'être d'humeur à jouer à lancer quelque sarcasme que ce soit, pas même de lui montrer clairement que ses remarques l'agaçaient. On ne savait pas pourquoi ils se comportaient ainsi l'un envers l'autre, ces derniers temps et à vrai dire, on ne le leur avait pas demandé. Il s'agissait de leurs affaires et… Comme dans toute relation, même amicale et fusionnelle comme la leur, ils avaient à affronter des hauts et des bas.

- En attendant, je réfléchis avant d'agir, finit par rétorquer Stiles sans lui lancer un regard. Rappelle-moi combien de fois j'ai sauvé ta peau poilue ?

Il n'y avait même pas d'animosité dans sa voix, pas même alors qu'il avait repris la formule employée par Scott. Et c'était là qu'on reconnaissait qu'il était véritablement préoccupé : il restait sérieux. Fixait la maison sans détourner le regard. Jackson avait beau ne pas l'apprécier plus que de raison, il fallait avouer qu'il commençait à s'inquiéter. Pas pour lui à proprement parler, mais bien par rapport à cette mission. Pour que Stiles soit aussi réticent et montre une aussi grande méfiance, il fallait y aller.

Cette fois-ci, Scott ne trouva rien à répondre, mais tout le monde vit le regard agacé qu'il lança à son meilleur ami. Si autour d'eux, l'on se taisait, Lydia fut la seule à avoir le cran de prendre parti sans se cacher : ne supportant que difficilement ce genre de rixes verbales, elle rappela à Scott que le cerveau des opérations, ici, c'était Stiles et que sans ses plans, au moins la moitié de la meute aurait déjà fini six pieds sous terre. Certes, Stiles n'avait pas besoin d'être défendu, mais Lydia avait besoin de rappeler à son ami alpha qu'il ne pouvait pas s'attribuer le mérite de chaque vie sauvée. Il avait beau être le décideur… Il restait aussi l'exécutant. Celui qui s'occupait de réparer les pots cassés, de créer ou d'ajuster les plans, c'était toujours Stiles. Celui qui pensait aux risques, à préserver tout le monde, c'était Stiles. Ne faire aucun mort et aucun blessé relevait en premier lieu du credo de Scott, mais Stiles faisait toujours tout pour le mettre en application au mieux. Et Lydia, peut-être plus encore que les autres, le voyait sans arrêt s'échiner à la tâche. Se torturer l'esprit, passer des nuits blanches à réfléchir à ce qui était le mieux pour tout le monde. Elle avait même été là, lorsqu'il avait eu sa première et unique crise de larmes à ce sujet.

Alors elle détestait le fait que Scott puisse le rabaisser de la sorte sans savoir à quel point Stiles se donnait pour lui, pour la meute, pour tout le monde.

Et même si Lydia n'avait pas dit grand-chose – et bien évidemment gardé le craquage de Stiles pour elle –, ses quelques mots suffirent à faire ravaler à Scott les paroles acerbes qu'il se préparait à sortir. On ne manquait jamais d'obéir à Lydia Martin, surtout lorsque son regard s'enflammait de la sorte. Stiles lui lança un pâle sourire de reconnaissance et du reste, personne n'émit le moindre commentaire. Tout le monde sentait la manière dont l'ambiance était tendue depuis qu'ils attendaient devant cette immense maison… Et plus personne n'était à l'aise. On attendit alors le retour de Derek et de Malia, qui eut lieu un petit quart d'heure plus tard.

Lorsque Derek leva son pouce en l'air pour signifier que se risquer à l'intérieur était sans danger, Stiles sentit son souffle se couper l'espace d'un instant.

Il n'arrivait pas à se défaire du mauvais pressentiment qui ne cessait de l'assaillir.