Hey !

Et voilà, la bataille finale arrive (du coup, évidemment, gros TW guerre et violence physique sur ce chapitre). Il reste genre deux chapitres avant la fin de la fanfic, que je vais essayer de corriger au plus vite pour ne plus cumuler deux mois de retard entre chaque post. Mais en attendant, je vous laisse profiter de celui-là !

Bonne lecture !


L'enfer est en avance

.

Riku n'interroge pas Vanitas. Les flammes qui en lèchent les murs du manoir parlent d'elles-mêmes.

— Putain, le noiraud jure. Il nous restait une semaine !

— Elle a dû passer plus vite que prévu.

Il ne réalise pas que la plaisanterie sort de sa bouche. En revanche, il se sent bien vomir sur l'herbe orangée. Son corps n'a pas apprécié le déplacement éclair de Vanitas, et son estomac expulse tout ce qu'il peut encore faire sortir. Ses jambes flageolent.

— C'est pas le moment de flancher.

— C'est bon, je… Juste, deux minutes.

— On a pas deux minutes.

Riku se reprend. Il crache, se redresse et contemple le feu qui s'avance, lentement mais sûrement. Il n'en est qu'à ses débuts, et ils n'auraient aucun mal à l'arrêter, s'il n'y avait pas tous ces vampires à l'intérieur.

Il les entend. D'un coup, il réalise que ce qu'il prenait pour le crissement du feu est un ensemble de cris difformes et affamés. Des craquements secs, comme un bruit d'os qu'on brise. La chaleur explosive le gifle alors qu'un corps passe par la fenêtre et court au hasard, sa tenue prise par le feu. Ce n'est pas un visage familier, mais le soulagement est de courte durée.

— Il faut qu'on y aille.

— Pas toi, Vanitas rétorque. Tu vas te faire bouffer en moins de deux.

— Aqua voulait qu'on rassemble les humains avec Sora.

— Si Sora veut s'en occuper, laisse-le faire. Il a moins de chances d'y rester-

— Van.

Riku sait que c'est dangereux. Mais il n'a pas le temps d'avoir peur, ni pour sa peau, ni pour celle de Van. Aqua comptait lui confier une mission. C'est qu'elle avait besoin de lui. Et vu la situation, il n'est pas sûr que Sora puisse s'occuper des autres garde-manger.

Il doit le faire.

— Couvre-moi le temps que je rentre. Je m'occupe de mettre tous ceux qui ne participent pas à la bataille à l'abri.

— Bien, Van capitule.

Il répond comme on crache du verre, mais il acquiesce. Riku ne lui en demande pas plus.

Ensemble, ils contournent la bâtisse pour trouver l'entrée arrière, celle qui donne sur le jardin. Un vampire isolé les repère. Il s'élance depuis une fenêtre. Malheureusement pour lui, Vanitas lui brise la nuque avant qu'il ne touche le sol.

Le gris s'arrête. Ça dure une seconde, peut-être moins. Un instant, le noiraud est près de lui. Riku cligne des yeux, le temps d'un craquement net, et un corps de poupée roule devant lui avant de terminer sa course dans un rosier.

Vanitas a du sang tout autour de la bouche.

— Dépêche !

Abasourdi, Riku reprend sa course.

À l'intérieur, la chaleur grimpe. Il sent la langue tiède qui pulse contre sa peau alors qu'il avance. Un autre corps passe au-dessus du sien et s'éclate contre un vieux meuble. Il ne sait pas duquel des deux vient le bruit qui lui tord l'estomac, et il préfère ne pas savoir.

— Là !

Vanitas désigne l'entrée de la cave. On ne distingue pas grand-chose mais il suffit de s'approcher pour reconnaître la chevelure rousse de Neku, dressée au côté d'une tignasse tout aussi peu commune. Roxas. Riku soupire avant de les rejoindre.

— Eh !

Il leur fait signe.

— Riku ! Roxas s'exclame, regardant autour de lui avant de s'approcher. On te cherchait. T'as vu Larxene et Ienzo ?

— Non. J'étais dehors. Avec Vanitas.

Son cœur palpite. D'un instant à l'autre, un vampire pourrait leur tomber dessus. Ils n'auraient pas le temps de le voir venir.

— Ils sont trop nombreux, Neku marmonne.

Riku note le tisonnier dans sa main. Roxas tient également un couteau de cuisine. Bien. Donc, il est le seul ici qui n'a pas pensé à s'armer.

Autour d'eux, la multitude s'affronte. Des rugissements secs fusent, un cri perce au milieu des crépitements. Une main immobile gis-là, sous une commode trop lourde pour ce qui n'est sans doute plus qu'un cadavre inanimé. Il n'y a que le soleil qui puisse être fatal aux vampires, mais certains sont déjà hors jeu. Uniquement des têtes inconnues.

Pour l'instant.

— On va jamais tenir, le rouquin jure.

— Les sous-fifres d'Ardyn sont jeunes. Ils ne feront pas long feu face à nous, Vanitas ricane.

Riku sursaute. Il se tourne vers son amant, s'assure de ne trouver aucune blessure sur son visage. Sa face est intacte.

— Vous pouvez gérer seuls ? Roxas demande.

— Non, Vanitas reconnaît. Pas avec le vieux endormi. Mais je n'ai pas encore aperçu leur chef. Si on réveille l'ancien avant que l'autre se pointe, on a une chance d'équilibrer le jeu.

Merde. Ça ne se passe pas comme prévu.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? Riku s'exclame.

Il sait qu'il crie, pourtant, il s'entend à peine.

— On se fait attaquer, Vanitas ironise.

— J'avais remarqué, mais on avait encore une semaine devant nous !

— Ardyn n'est pas connu pour sa patience.

— C'est aussi l'avis de Joshua, Neku répond, si bas que Riku lit la réponse sur ses lèvres.
— Vous êtes là !

Sora apparaît soudain devant eux. Au même moment, un bruit noir explose au fond de la salle. Une poutre craque et Xemnas apparaît brièvement, le corps brisé d'un vampire ennemi dans les bras. Deux autres adversaires se tiennent devant lui, incapable d'avancer. Paralysés par ce qui a ruiné le cerveau de Riku la première fois qu'il l'a vu.

— Aqua t'a dit ce qu'elle avait prévu pour nous ? il demande, ses mains dans celles de Sora.

— Ouais, mais c'est mort. Saïx devait nous déposer en ville.

Et vu la situation, il n'a sans doute pas le temps de sortir la voiture du garage. Si tant est qu'il y ait encore une voiture.

— Riri !

La voix de Larxene perce le bruit. Elle saute les dernières marches de l'escalier en passant par-dessus la rambarde, mais vu la tête qu'elle tire, sa cheville apprécie mal la réception. Elle jure et se redresse.

— T'es là ! Ienzo est avec toi ?

— Non, je viens d'arriver.

— Merde, elle crache en se tournant vers les deux autres humains. Vous l'avez trouvé ?

— Pas encore. On a fait tout le rez-de-chaussée.

Il manque quelqu'un à l'appel, et leur plan est tombé à l'eau. Si Riku prenait le temps de réfléchir, il sombrerait dans la panique. Mais son instinct de survie le pousse à se concentrer sur les jumeaux.

— On doit réveiller Xehanort, il déclare.

— Super, et tu fais ça comment ? Van le raille.

— Comment vous avez fait, la dernière fois ?

— Aucune idée, j'étais en train d'essayer de rattraper tes conneries, je te rappelle.

— Le sang ! Sora les coupe. Il lui faut du sang.

Jusque là, c'est logique.

— Du sang d'un de ses héritiers. Ça pourrait marcher sans, mais il lui en faudrait beaucoup plus. Aqua comptait sur Xemnas…

Un autre vampire vole à travers une fenêtre dans un sifflement douloureux. Riku croit reconnaître le roux flamboyant d'Axel. Il préfère croire qu'il se trompe.

— … Mais je crois qu'on va devoir se dévouer, Sora termine.

Il échange un long regard avec son frère. Vanitas feule, dents serrées.

— C'est mort.

— On sera moins fatigués si on partage !

Il désigne le carnage face à eux. Derrière sa main, on distingue le visage déformé de Saïx, lequel fracasse ce qui ressemblait autrefois à un corps à l'air une arme lourde. Le sang qui s'étale prend une couleur noir.

Pour la première fois, Riku remarque l'odeur de chair brûlée qui règne dans la pièce.

— On a besoin de lui, Van, Sora insiste.

Le vampire montre ses plus belles dents aiguisées. À la lueur des flammes, elles prennent la couleur mielleuse de ses yeux, ces yeux qui brûlent en échos au chaos.

— Vous, il tranche enfin. Vous venez avec nous.

Il désigne les humains qui l'entournent.

— Puisqu'on ne peut pas vous faire sortir, vous irez vous plaquez au sous-sol. On pourra facilement bloquer l'entrée.

— Et si on a besoin de sortir ? Neku rétorque.

— Priez pour qu'on vous ouvre.

— Il y a une autre sortie. Elle donne sur le jardin, Sora explique.

Riku hoche la tête.

— Attendez ! Larxene crie. Il manque Ienzo.

— On sait pas où il est, Neku s'impatiente. On a fait tout le rez-de-chaussée, et on a fouillé sa chambre

— La bibliothèque ! Roxas s'exclame.

Ils se regardent tous, soupirent d'un même souffle. Evidemment. Il y était sans doute avant le début de l'attaque, et il s'y sera caché en entendant le bruit.

— J'y vais, Larxene déclare. On vous rejoindra au sous-sol.

— Tu vas te faire défoncer, Vanitas déclare.

— C'est moi qui vais te défoncer si tu bouges pas ton cul tout de suite !

Pas le temps de discuter. Ce n'est pas la meilleure idée qui soit, mais c'est la seule qu'ils ont, alors Riku adresse un regard d'encouragement à la jeune femme. Elle est débrouillarde. Et ils ont intérêt à l'être aussi, s'ils veulent s'en sortir.

— On descend dans la crypte. Pour nous retrouver, tourne une fois à droite, puis toujours à gauche quand tu seras dans la cave, Sora lui explique.

Elle leur adresse un geste, signe qu'elle a entendu. Une fois à droite, puis toujours à gauche.

Ils filent, et elle en fait de même. Sa cheville la ralentit. Elle jure, les dents serrées. Mais elle n'a pas le droit de flancher. Plus tard, elle aura mal. Elle se plaindra pendant qu'Aqua reprendra des forces à son poignet. Mais pour l'heure…

Allez.

Elle s'appuie contre un mur et s'élance. La douleur, c'est dans la tête. Dans la sienne, et dans celle de ceux qu'elle entend hurler. Elle ne s'attarde pas sur le bruit qui lui saccage les oreilles.

De peur de reconnaître une voix familière.

Comme le feu gagne du terrain, la chaleur monte et son corps la trahit. Elle qui se réjouissait de la fin de l'été, elle se retrouve à transpirer dents serrées, en avançant à l'aveuglette dans le cauchemars. Un ennemi la repère, mais il n'a pas le temps d'ouvrir la bouche que sa tête saute et va rouler dans les flammes. Larxene détourne le regard.

Un pas après l'autre, elle jure. Le couloir est interminable, mais quand enfin sa main trouve la poignée de la porte qu'elle cherche, elle lui semble étrangement fraîche. Elle la pousse.

Le feu n'a pas encore pénétré la pièce, mais ça ne saurait tarder.

— Ienzo !

— Je suis là !

Le pauvre gosse est tassé dans un coin. Droit comme un piquet, il se tient contre un mur, l'oreille attentive aux bruits du dehors. Clairement, il a compris ce qui se passait. Et il s'est cru plus à l'abri ici.
Pour l'instant, il n'a pas tort. Mais ce n'est qu'une question de temps avant que l'armée de vampires ne débarque. Ils sont tellement nombreux, presque le double de leurs effectifs. Et ce n'est qu'une partie de l'armée qu'Ardyn a montée. C'est…

Merde. Elle aurait dû réfléchir avant de se barrer de chez elle pour se caser avec une créature de la nuit.

— T'es entier ?

— Pour l'instant. Qu'est-ce qu-

— Les crevards sont arrivés plus tôt que prévu. J'ai pas le temps de t'expliquer, il faut qu'on bouge.

— Où ?

Elle lui attrape la main pour le tirer à elle, mais n'arrive qu'à s'appuyer sur lui.

— Le sous-sol. C'est du solide et le feu descendra pas.

L'avantage de crécher dans un bâtiment en pierre comme celui-là. Les poutres et le mobilier crament, mais sous la terre, ils seront tranquilles. Sauf si l'ennemi gagne. Là, ils seront morts.

Ienzo hoche la tête. Il ressemble à un chaton terrifié, mais il attrape sa main plein de confiance et il l'aide à avancer hors de la pièce.

Putain de cheville. Qu'est-ce qu'il lui a pris de sauter ? L'adrénaline, oui. Et le feu, le feu lui a foutu la trouille. Oh, merde, pourvu qu'il n'ai pas gagné l'entrée du sous sol avant qu'ils arrivent. Elle n'avait pensé à ce détail, mais…

— Tu es blessée, Ienzo fait remarquer.

— C'est rien.

Elle s'est même pété un ongle. Ça vaut toujours mieux qu'un doigt, remarque.

Ils avancent lentement, quand elle le remarque. C'est ténu. Un détail qu'elle n'aurait pas perçu, si elle ne cherchait justement pas à se focaliser sur les détails pour éviter de penser à Aqua.

— Eh, Larxene siffle. T'as senti ça ?

Ienzo la regarde, étonné. Puis il ouvre les yeux.

Un courant d'air frais. Froid. Vraiment froid, comme en plein hiver.

— C'est quoi ?

Elle se tourne. Là, elle a un mauvais pressentiment. Du genre grosse merde qui va leur tomber sur la gueule.

— Descend, elle ordonne.

— Mais tu-

— Descend !

Dans le coin de la pièce. Une ombre, qui grandit.

— Dis aux autres que j'arrive.

— Tu y arriveras plus vite si je t'aide.

Merde. Il est borné, hein ? Seigneur, pourquoi Demyx s'est choisi un garde-manger comme celui-là ?

— Je vais te ralentir.

— C'est plus sûr d'avancer à deux.

Il n'a pas tort. Et parce qu'elle n'a pas le temps de débattre plus, elle pose ses deux mains sur ses épaules. Elle le regarde droit dans les yeux.

Et elle le pousse hors de la bibliothèque, avant de fermer brusquement la porte.

— Désolé, elle murmure pour elle-même.

Elle se tourne, lentement. C'est bien ce qu'elle pensait.

L'ombre a déjà avalé tout un mur, et elle se répand à une vitesse affolante.

— Tiens tiens, mais qu'avons-nous là.

Une voix inconnue résonne contre les parois étranges qui englobent bientôt toute la pièce.

— Téméraire, pour une humaine.

— T'es qui ?

La lumière s'efface. Et avec elle, les ombres et les formes de la pièce. Tout ce qui se distinguait au milieu des ténèbres.

— Je crois que nous n'avons pas été présentés.

La chaleur de l'incendie n'est plus qu'un souvenir. Même la douleur dans sa cheville s'engourdit. Et le froid… Le froid monte, partout. Le froid l'enrobe. Il lui prend la main.

Elle tremble en reconnaissant une forme dans la brume opaque. De longs doigts griffus.

— Oh. Tu es le garde-manger d'Aqua, donc. Quelle surprise.

Un ricanement bref lui entre dans la tête.

— Elle sera sans doute mécontente, s'il t'arrive malheur. Aqua n'aime pas qu'on touche à ses affaires. Elle les défend férocement.

— T'es qui, putain !

Elle sait. Elle l'a compris au moment où elle a vu cette noirceur pâteuse ramper. Personne ici ne peut faire ça, pas même Xemnas.

Il ne reste qu'une seule option.

— Si tu insistes.

Le timbre millénaire s'abaisse soudain, le froid mordant gagne sa joue. Comme une caresse. Une sentence. Larxene tremble violemment.

Une poignée de mots glissent tout bas dans son oreille.

Elle écarquille les yeux.

Et puisqu'elle n'a plus que ça à faire, elle hurle. Elle hurle de toutes ses forces.

Et elle pense à Aqua.

. . .

Riku avance à l'aveuglette, la main de Sora dans la sienne. Il observe autour de lui ces murs qu'il n'a vu qu'une fois, alors qu'Aqua les emmenait graver dans leur chair un lien donc il ne soupçonnait pas tout ce qu'il entraînerait. Maintenant la chaîne pend à son cou, le bijou tape contre sa peau. Riku essaye de ne pas se prendre les pieds dans le dallage irrégulier d'un couloir obscur. Vanitas a bien allumé une torche, mais la lumière ne suffit pas au petit groupe éparpillé.

— On devrait pas se planquer avant de réveiller Xehanort ? Roxas fait remarquer.

— C'est pas vous qu'il va bouffer, Van balance.

Rien n'est moins sûr pour les trois humains présents, mais ils n'ont pas le loisir de tergiverser là-dessus.

— S'il mordait l'un d'entre vous, ça perturberait le vampire auquel il est lié, Sora ajoute. Il ne prendrait pas ce risque en pleine bataille.

Un soupir soulagé lui parvient, mais Riku ne saurait dire qu'il vient de Neku ou Roxas. En revanche, il remarque qu'ils serrent tous les deux leur pendentif.

Il effleure le sien.

Pour l'instant, personne ne s'est effondré. Joshua et Axel sont encore en vie. Vanitas aussi, mais là-dessus, Riku n'a pas encore à s'en faire. Il avance à la suite de son meilleur ami, jusqu'à ce qu'ils s'arrêtent tous derrière une porte plus lourde que les autres.

Le bois noir ressemble à la chair des sapins. Riku croit en percevoir l'odeur, mais c'est seulement la résine qui imprègne ses doigts. Dire qu'il y a quelques minutes, il était dehors dans la forêt, à courir après le noiraud…

— On y est, Van confirme.

Il tend la torche à son frère, puis il pose ses mains blanches sur l'énorme bar d'acier qui bloque les deux pans de la porte. Même pour lui, l'effort est visible alors qu'il la déloge.

— Vous gardez votre chef enfermé ? Neku s'étonne.

— Oh non, c'est pas avec un bâton du genre qu'on tiendrait Xehanort dans son cercueil, Sora le détrompe. C'est là pour éviter qu'un humain trop curieux entre ici. Des fois qu'il arriverait un truc au manoir.

Un truc. Comme en cet instant.

Riku devine au bruit que la barre fait quand Vanitas la lâche qu'il n'aurait jamais pu la faire bouger. Même à deux ou trois humains, la tâche serait ardue.

Il jette un coup d'œil moins assuré à l'autre partie du couloir, encore plongée dans l'ombre. Sa mémoire est trouble mais si ses souvenirs sont bons, c'est ici que Neo a été enfermé.

Il entend encore le bruit des grilles qui tremblaient sous ses coups d'épaules.

Vanitas croise son regard.

— Vous irez vous planquer dans les geôles. C'est la partie la plus éloignée de l'entrée, et avec l'écho, vous saurez tout de suite si quelqu'un entre dans la cave.

Une sécurité dont ils préfèrent ne pas se passer. Ils n'iront jamais assez vite pour échapper un vampire, mais s'ils sont prévenus tôt, ils pourront toujours s'enfuir par la sortie extérieure.

Après un dernier échange de regard, tout le monde se tourne vers ce qui ressemble à l'entrée dissimulée des enfers sur terre. La pierre qui entoure la porte est sculptée. Des traits grossiers mais non moins reconnaissables, qui évoquent la gorge longue des dragons.

Riku inspire.

Il voit Sora sortir les clefs qu'Aqua a dû lui confier pour préparer le réveil, sans savoir qu'ils en auraient besoin si tôt. Leur tintement lui glace le sang.

Une peur électrique parcourt son corps. Il doit se faire violence pour franchir l'entrée de cette pièce.

— Non.

Vanitas pose sa main sur son torse.

— Vous, vous allez aux geôles. C'est Sora et moi qui gérons le vieux.

Neku et Roxas ont déjà pris la direction désignée, une nouvelle torche en main. Mais le gris ne peut pas se résoudre à les suivre.

Il attrape ses doigts pour les enrouler autour des siens.

— J'irai après.

— Riku…

— Fais-moi confiance.

Il devine comme ces mots l'irritent. Mais Vanitas ne peut pas vivre dans la peur constante de le voir disparaître. Se présenter à Xehanort au moment de son réveil, c'est une preuve de bonne foi qui ne devrait pas passer inaperçue.

— Bien.

La réponse lui arrache la langue. Le vampire se retourne et entre dans la pièce à la suite de son double, dont le regard, plus tendre, l'invite à les suivre.

La salle n'est pas bien grande. Surtout, elle est vide. Pas de trésors entassé ni de murs riches en décoration comme l'est l'entrée. Il n'y a que de la pierre, de la pierre et encore de la pierre, inégalement répartie. Une odeur humide. Pas un rayon de lune pour éclairer les lieux. La flamme dans la main de Vanitas danse, et il croit voir nombre de dessins mouvants déchirer l'ombre, mais il n'en est rien.

Le seul point digne d'attirer son attention, c'est le cercueil au milieu de la pièce, donc Vanitas haute le couverte sans s'attarder. Riku s'attend à l'odeur putride qui devrait en sortir, mais non. Rien. Juste le silence lourd des souterrains et les tintements de chaînes qui leur parviennent depuis les geôles.
Il déglutit.

Il a été ici, des heures, des jours durant. Asservi par la soif. Trahi.

— Je commence, il lance à Sora avant de s'entailler le poignet et de le plonger dans le cercueil.

Il le voit grimacer comme le font les gens en nettoyant le siphon gluant d'un évier. Une expression qui lui donne un haut le cœur – et un brin de colère qui s'y cache.

Près de lui, Sora serre sa main.

— Ça va aller. Il est moins impressionnant que Xemnas. Enfin, disons qu'il ne joue pas de ses pouvoirs comme lui.

Riku hoche la tête. Il sait.

Les secondes s'égrainent alors que le noiraud attend. Quand il se redresse enfin, les doigts encore rouge, il s'essuie sur ses vêtements avant de s'écarter. À la posture de son corps adossé au mur, on devine la tension qui le crispe. Riku sent qu'il a la trouille. Une trouille monstre.

— Prêt ? Sora lance.

— On a pas le choix, Van raille.

Riku se contente de lui adresser un sourire. Il le regarde qui grimpe sur le bord du cercueil plus confiant que son frère. Le bois qui grince semble fragile sous lui, et pourtant, ce lit maudit tient depuis des siècles. Est-ce que c'est vraiment du bois ? Il ne devrait pas pourrir, depuis le temps ? À moins que les vampires ne l'ai enchanté, d'une manière ou-

Un rugissement guttural se répand dans la pièce. Riku sursaute, mais il n'a pas le temps de réagir qu'une masse grisâtre se redresse soudain. Sora a tout juste entaillé son poignet. Il n'aura pas besoin d'aller plus loin. Le glapissement qu'il pousse laisse deviner les crocs qui viennent de s'enfoncer dans sa chair.

— Sora !

Le cœur de Riku s'emballe. Il sent comme une douleur diffuse dans sa propre main mais il n'a pas le temps de s'avancer qui le retient.

— Laisse-le faire, Vanitas ordonne.

Riku voudrait. Mais c'est Sora, une grimace inconfortable déforme sa bouche au sourire continuel. Il comprend la douleur qui traverse sa main, la force qui s'échappe doucement de son corps. Comme un bout de vie qu'on prend. C'est beaucoup moins doux que ce qu'il ressent, quand les vampires le mordent.

Comme le sang glisse dans ce corps gris, il retrouve peu à peu un semblant de couleur. Et la panique passe. S'efface. La peur aussi. L'angoisse. La guerre en haut, et l'avenir. Son cœur se vide au même rythme que le cœur de Sora.

Il ne remarque même pas que son bras est libre. Que son ami s'éloigne. Que Vanitas le serre contre lui, sur la défensive.

Non. Il caresse ce creux qui vient de se creuser en lui, étonnant et familier. Une quiétude troublée.

La forme se tourne vers lui. C'est là qu'il les voit.
Deux yeux jaunes comme des soleils, impossible à soutenir. Un nez éclaboussé du sang qu'il a bu, donc l'odeur flotte autour d'eux.

Un sourire décharné aux dents longues et aiguisées.

— Eh bien, qu'avons-nous là.

Un rire qui vient de partout, des murs, de cette gorge humide. De sa propre tête.

Riku inspire, mais l'air ne vient pas.

Il devrait paniquer. Mais la peur tarde, elle aussi.

Il n'y a rien. Ni tremblement, ni angoisse, ni joie, ni peine.

Pas d'espoir.

Juste deux yeux, et la peau froide de Vanitas entre lui et le monde.