Mon personnage secondaire imposé : Andromeda Tonks
Lieu imposé : Côté Moldu
Liste de mots à caser : fondre / bouteille / lézard / regarder / charme / fête / chaud / parfum / témoin / fauteuil
Andromeda passa la tête par la porte de la pièce pour jeter un œil à ce que faisaient ses habitués. Quelques années plus tôt, elle avait racheté et remis au goût du jour l'ancien karaoké. Quand Sirius avait enfin réussi à s'extraire des griffes des Black, il avait repris contact avec elle. Ils avaient fêté sa liberté nouvelle entre ces murs, s'étaient déchirés la voix sur les chansons les plus ringardes possibles et avaient fait la paix l'un avec l'autre autour d'une bouteille de gin. Ce soir, ils étaient là pour quelque chose de plus doux, quelque chose d'encore un peu frais pour certains.
Elle sourit en observant le tableau devant elle. Sans surprise, les regards étaient embrumés, les sourires détendus et les rires fusaient depuis le tas de personnes qu'elle apercevait sur le canapé.
Remus était au milieu. Il finissait toujours par atterrir au milieu dans ce genre de situation. Comme si tous s'étaient donné le mot pour le couvrir d'affection. Étalé comme un lézard en plein soleil, les jambes écartées, il était littéralement enfoui sous le petit groupe. Sirius, allongé en travers du canapé, laissait sa tête reposer sur la cuisse droite de son petit ami qu'il regardait avec un air béat en essayant de glisser les doigts sous sa chemise.
Lily s'était faufilée dans le peu d'espace qu'elle avait réussi à trouver entre le brun et le dossier du fauteuil. Ses jambes pendaient par-dessus le torse de Sirius et ses pieds ne touchaient pas le sol. Le bras de Remus reposait sur ses épaules et il enroulait distraitement une mèche rousse autour de son doigt. James avait été allongé entre les jambes de Sirius, la tête sur les cuisses de Lily, quelques minutes plus tôt avant qu'il ne se lève au moment où Andromeda avait ouvert la porte.
Silencieusement, Andromeda referma le battant avec un sourire. Elle réinitialisa l'horloge sur le mur et les laissa profiter de deux heures supplémentaires.
James observait son petit monde avec un sourire plein de joie. L'image lui rappelait les soirées dans la tour de Gryffondor, les longues discussions jusqu'au petit jour, alors que les dernières braises s'éteignaient dans la cheminée. Il se racla la gorge et s'empara du micro sur la scène. Le léger larsen attira l'attention du groupe et tous tournèrent la tête vers lui. Le sourire de Sirius menaça de faire craquer la peau de ses joues quand il remarqua James qui tripotait maladroitement la machine et faisait défiler les chansons.
La liste s'arrêta et James releva le nez pour croiser le regard de Lily sur le canapé. La jeune femme, les yeux clos et la tête pressée contre l'épaule de son meilleur ami ne se rendit même pas compte du regard qui glissa sur elle. James la regardait toujours de la même façon. Les yeux légèrement écarquillés, scintillant d'un éclat émerveillé, comme si, après des années à essayer d'oublier les contes de fées racontés par sa mère, il faisait face à la Princesse de sa propre histoire.
James ne faisait pas les choses à moitié. Lily n'avait pas échappé à la règle. Quand, à douze ans, il s'était rendu compte qu'il était amoureux de l'adorable rouquine, il n'avait pas cherché plus loin. Il avait poussé, forcé pendant des années, inconscient d'à quel point son comportement était problématique. Il avait rejeté les conseils, ignoré les mises en gardes et continué ses avances, jusqu'à ce que Marlène finisse par craquer. Elle l'avait assis sur l'un des canapés de la salle commune et lui avait expliqué en long, en large et en travers, à quoi ressemblait la vie d'une fille comme Lily.
James avait arrêté du jour au lendemain. Il avait continué à la saluer, à partager avec elle ses devoirs en tant que Préfet, mais les avances, les compliments et les taquineries avaient, tout à coup, disparu de son vocabulaire. De loin, il avait continué à la regarder avec les mêmes yeux brûlants d'une passion qu'il n'avait jamais su exprimer correctement, mais il s'était tu.
C'était tout ce dont Lily avait eu besoin pour se rendre compte que James Potter n'était pas, en réalité, un connard imbu de sa personne. Elle avait pu voir toutes les attentions qu'il avait pour ses proches, la façon dont il se pliait en quatre pour s'assurer que Sirius ne plongeait pas dans ses épisodes dépressif, que Remus ne souffrait pas outre mesure des pleines lunes, que Peter se sentait toujours à sa place. Une fois qu'il avait arrêté d'essayer désespérément d'en faire sa petite amie, elle avait pu découvrir un garçon drôle, attentionné et parfois maladroit qui était devenu son ami. Il n'en avait pas fallu plus pour qu'elle découvre aussi, qu'une fois tout le vernis retiré, Potter était… plutôt agréable à regarder.
Les premiers accords de guitare résonnèrent dans l'espace exigu aux murs couverts de décorations ridicules. Lily redressa la tête d'un coup sec. Ses yeux verts croisèrent le regard noisette de James qui lui sourit largement avant de prendre une profonde inspiration.
— All I knew this morning when I woke is I know something now. Know something now I didn't before…
Il tendit une main vers elle, l'attirant d'un geste des doigts. Elle poussa contre l'épaule de Remus et s'assit sur le torse de Sirius avant de se projeter en avant. Elle ignora le ricanement amusé du premier et le grognement étouffé du second et se précipita aussi vite que ses jambes le lui permettaient. Elle grimpa les escaliers et s'empara de la main fraîche de James. Leurs doigts s'entrelacèrent avec la force de l'inévitable. Comme deux astres sur la même orbite, ils avaient si longtemps tourné l'un autour de l'autre avant qu'enfin la collision ne se fasse.
La pièce disparut autour d'eux tandis qu'elle perdait son regard dans celui qui lui faisait face. Il y avait tant de couleurs dans les yeux de James, du vert, de l'or, quelques touches de bleu, du brun. Un kaléidoscope de couleur qu'elle n'avait jamais vu ailleurs.
— And all I've seen since ten years ago is green eyes and freckles and your smile, in the back of my mind making me feel like I just wanna know you better, know you better, know you better now…
Le clin d'œil de James au changement de paroles tira un petit rire à la rousse qui secoua la tête et elle pressa sa main dans la sienne. Elle frissonna quand il s'approcha davantage et lâcha sa main pour enrouler son bras autour de sa taille. Son pouce trouva naturellement l'ourlet du t-shirt qu'elle portait et elle le laissa faire quand il le glissa sous le tissu. Il effleura, avec une tendresse désarmante, la peau soyeuse de sa hanche tandis qu'il chantait le refrain. Aussi surprenant que ce soit, James savait chanter. Il n'aurait jamais une grande carrière, mais sa voix était agréable et elle s'appuya contre lui en se laissant bercer par le rythme de la musique.
— 'Cause all I know is we said, "Hello" and your eyes look like comin' home. All I know is a simple name and everything has changed. All I know is you held the door you'll be mine and I'll be yours. All I know since yesterday is everything has changed…
Elle nicha son visage contre son torse et ferma les yeux pour l'écouter chanter.
— And all your walls stood tall painted blue but you'd take 'em down, take 'em down and open up the door for me…
Un nouveau sourire face au changement de paroles et elle pressa un baiser contre la peau douce de la gorge de son petit ami.
Il y avait une telle tendresse dans la voix de James, une telle assurance qu'elle se sentit tomber à nouveau sous le charme, comme lorsqu'il s'était enfin autorisé à lui dire qu'il l'aimait. Oh, il l'avait hurlé sur tous les toits pendant des années, l'avait pourchassée au travers des couloirs de Poudlard en lui déclamant ses poèmes les plus romantiques. Il avait essayé de la demander en mariage au moins une fois par an depuis l'âge de douze ans. Mais la première fois qu'il lui avait dit qu'il l'aimait de façon sérieuse restera gravée à jamais dans sa mémoire.
La Saint Valentin aurait toujours une saveur particulière pour eux. James, dans un dernier espoir, après presque un an à se comporter en parfait gentleman avec elle, avait fini par craquer. Il s'était mis à genoux devant elle, dans l'une des nombreuses salles de classe vide du château et lui avait demandé, la bouche sèche et les mains moites.
—Evans ?
Elle s'était retournée pour le découvrir un genou à terre et n'avait même pas cherché à retenir le grognement désappointé qui s'était frayé un chemin entre ses lèvres.
— Non, non, c'est pas ce que tu crois, s'était-il empressé de dire en levant les mains en signe d'apaisement.
Elle avait soupiré et s'était appuyé contre le mur en lui faisant signe de continuer. Elle était déçue. Elle avait cru qu'il avait grandi, qu'il avait changé, qu'il n'était plus l'idiot capable de demander en mariage une fille dont il ne savait rien. Ils avaient enfin pu discuter, avoir de vraies conversations. Elle avait découvert qu'il était intelligent, drôle, qu'il plaçait le bien être de ses proches largement au-dessus du sien et qu'il avait, lui aussi, des failles et des blessures qu'il ne savait pas toujours comment gérer. Le voir à nouveau à genoux devant elle après l'évolution de leur relation, c'était… décevant.
— Me regarde pas comme ça, par pitié, avait-il lâché dans un souffle, les yeux brillants.
— Accouche Potter, j'ai pas la nuit.
And all I feel
In my stomach is butterflies
The beautiful kind, makin' up for lost time
Takin' flight, makin' me feel like
Il avait pris une profonde inspiration, passé une main dans ses cheveux, déjà particulièrement ébouriffés, et s'était lancé.
— Je… Je sais que tu ne me dois rien. Je sais que j'ai été, littéralement, la plaie de ton existence pendant des années et que je devrais me considérer chanceux que tu acceptes de m'adresser la parole, avait-il dit dans un rire sans joie.
Il avait secoué la tête et s'était mordillé la lèvre inférieure avant de se lancer à nouveau.
— Mais voilà, je suis égoïste et cupide, Evans. Je suis cupide et égoïste parce que je ne veux pas que ça. Je veux plus. Je veux savoir ce que tu penses, tout le temps. Je veux plonger dans ton crâne et comprendre toutes les mécaniques de réflexions qui ont créé l'esprit le plus affuté que je connaisse. Je veux passer des heures à te regarderlire, parce que tu fronces le nez quand un passage te plait particulièrement et que c'est la chose la plus adorable que j'ai jamais vu. Est-ce que tu sais que ton parfumest la meilleure odeur de l'univers ? Tu sens la pomme, Evans. Tu sens exactement comme la première bouchée d'une Pink Lady parfaitement mûre et tu sais à quel point j'aime les pommes.
Une nouvelle inspiration avant qu'un sourire attendri n'étire ses lèvres. Il avait fermé les yeux, une expression paisible sur le visage.
— Je veux pouvoir repousser les mèches qui s'échappent toujours de ta queue de cheval. Je veux que tu puisses te tourner vers moi quand t'as un problème. Que tu puisses me faire confiance au même titre qu'à Remus. Je veux pouvoir effacer les rides de frustration sur ton front après une séance de tutorat désagréable. Je veux que tu m'expliques mille fois pourquoi ma technique en Potions est déplorable. Je veux… Evans…
Il avait pris une profonde inspiration, les yeux fixés quelque part au niveau du nombril d'une Lily dont la bouche s'était entrouverte sous le choc. Avant qu'elle ne puisse répondre, il avait repris d'une voix un peu plus assurée.
— Tu peux dire non, tu peux m'envoyer chier et promis ce sera la dernière fois de ta vie que t'auras à le faire, mais je pouvais juste pas ne pas tenter ma chance une dernière fois. Dans ma vie je n'ai eu que quelques certitudes : mes parents m'aimeront peu importe ce que je fais. Sirius Black est mon frère. Lily Evans est trop bien pour moi mais c'est la femme de ma vie. Tu peux dire non, Lily, et rien ne changera entre nous, je te le promets. Mais… Laisse moi une chance, s'il te plait ?
Le silence était retombé sur la pièce, seulement troublé par la respiration précipitée de James. Incapable de parler, elle l'avait regardé se redresser, épousseter ses genoux et quitter la salle de classe quand rien n'était venu. Le cliquetis de la porte se refermant l'avait sorti de sa torpeur mais il lui avait fallu une semaine complète pour se reprendre. Une semaine complète et la rumeur qu'une certaine Emmeline comptait inviter Potter à sortir avec elle pour la prochaine journée à Pré-au-Lard.
Trois jours plus tard, pour la Saint Valentin, elle se promenait main dans la main avec James Potter dans les rues paisibles du village. Il vibrait presque d'excitation près d'elle, mais il l'avait accompagné à la librairie, avait porté tous les livres qu'elle avait voulu acheter, lui avait offert un kit pour annoter ses ouvrages et l'avait raccompagnée jusqu'à la porte du dortoir des filles avant de déposer un baiser chaste au coin de ses lèvres. Ils ne s'étaient plus quittés depuis. James avait été suffisamment sûr d'eux pour que les doutes de Lily en soient balayés.
Come back and tell me why
I'm feelin' like I've missed you all this time
And meet me there tonight
And let me know that it's not all in my mind
Il avait fallu attendre un an pour, qu'enfin, il ose à nouveau prononcer les mots qu'il avait l'habitude de laisser voler dans le vent sans y prêter attention. La pièce était baignée de la lumière des petites bougies qu'il avait passé des heures à installer et à allumer. Ils étaient nichés au chaudsous les couvertures, leurs jambes nues entrelacées, la tête de James reposant sur le sein de Lily, son souffle caressant la peau d'albâtre de sa petite amie.
— James.
—Hmm ?
— Je vérifiais que tu dormais pas.
Elle avait senti le mouvement de sa pomme d'Adam quand il avait dégluti et ses sourcils s'étaient froncés. James avait relevé le menton, et la lumière vacillante des flammes s'était reflétée dans ses yeux brillants, avait éclairé ses joues rougies et allumé des reflets de feu dans ses cheveux bruns.
— Je t'aime.
Pas de grands discours, pas de déclaration enflammée, pas de paillettes. Il l'avait dit d'une voix assurée, d'un ton presque péremptoire. C'était un simple fait. James Potter aimait Lily Evans. On aurait presque dit qu'il la défiait de lui dire le contraire, d'essayer une fois de plus de le convaincre qu'il se trompait. Un sourire avait étiré les lèvres roses de la jeune femme et ses doigts s'étaient enfoncées dans les mèches ébouriffées de son amant.
— Je sais… avait-elle dit d'une voix douce.
— Bien.
Il n'avait pas demandé à ce qu'elle réciproque ses sentiments. Le simple fait d'avoir le droit d'exprimer les siens avait semblé lui suffire et Lily avait senti son cœur fondreen regardant ce grand bêta qui n'avait toujours pas compris.
— Moi aussi, je t'aime, tu sais ?
Le sourire qui avait fendu en deux le visage de James avait été si lumineux qu'il aurait pu rivaliser avec un soleil.
Les doigts de James qui caressaient sa joue, la sortirent de ses souvenirs et elle réalisa que la chanson était terminée quand ses lèvres s'emparèrent des siennes. Les applaudissements, sifflements et autres cris d'encouragement résonnèrent autour d'eux et Lily se contenta de dresser son majeur en direction de leur public. L'éclat de rire de Sirius, semblable à un aboiement, fut vite étouffé par la voix de Marlène qui essayait, vainement, de s'extirper de la pile de membres dans laquelle elle était coincée.
— Tu peux pas voler la vedette comme ça, Potter ! Moi aussi, faut que je déclare mon amour à la femme de ma vie !
— Bah ramène ton p'tit cul sur la scène alors, Marls ! répondit James en détachant à regret ses lèvres de celles de Lily.
Main dans la main, ils rejoignirent le canapé. Lily appliqua une claque retentissante contre le fessier de sa meilleure amie qui poussa un glapissement de surprise avant de s'emparer de son verre qu'elle vida d'un trait. D'une démarche bien plus stable que ce que la quantité d'alcool qu'elle avait ingéré aurait dû permettre, Marlène grimpa sur la scène et envoya un baiser en direction du couple.
— On sait tous qu'on est là pour fêter le mariage prochain de ces deux-là…
Lily agita les doigts et laissa la lumière se réfléchir sur la pierre qui ornait la bague que James lui avait offert un an plus tôt. Cette soirée tenait lieu d'enterrement de vie de jeune fille et de garçon pour le couple qui avait choisi, malgré les propositions toutes plus indécentes les unes que les autres de Sirius, de se contenter d'une soirée avec leurs amis. Ils avaient voulu dire adieu au célibat entouré de ceux qu'ils aimaient, d'une quantité d'alcool indécente et d'une playlist plus que douteuse.
— Mais je tiens à redéclarer, devant témoins…
Elle pointa du doigt chacune des personnes entassées sur le canapé.
— … que malgré toute la niaiserie d'Evans et Potter, le couple lesbien de cet attroupement reste le plus sexy ET le plus mignon ! cria Marlène dans son micro avant d'envoyer une série de baisers vers Dorcas qui fit mine de les attraper et de tomber à la renverse contre Remus.
Lily s'installa confortablement, ses jambes par-dessus celle de Sirius, James à moitié affalé sur elle et sur son meilleur ami. Les deux garçons se lancèrent dans un débat afin de savoir quelle chanson d'amour était la plus appropriée pour une sérénade et elle secoua la tête en glissant une main dans les cheveux de Sirius et l'autre toujours enlacé avec celle de James. Le souffle tiède et la voix de Remus près de son oreille la firent rire légèrement.
— Heureuse ? demanda-t-il d'une voix pleine de tendresse.
— Parfaitement.
