Chapitre 17

Peu après le départ de Sabo, Navy reçut deux messages par deux oiseaux distincts, à exactement cinq minutes d'intervalle. Une fois décryptée, la jeune femme put constater que les deux messages étaient tous deux des ordres mais se contredisaient :

« Riz : Mission écourtée. Retour à la base. »

« Éliminer Dragon. Prochaine directive au point suivant »

La suite du deuxième message n'était que des coordonnées géographiques, certainement pour l'envoyer ailleurs.

Navy déchira et jeta le deuxième papier, sachant déjà à quelle directive elle allait obéir. ''Riz'' était le nom de code de Sengoku et les ordres de Sengoku primaient. Point.

La contre-amirale récupéra une lime soigneusement cachée par ses soins sous un pied du lit. Elle l'utilisa pour limer habilement les barreaux de la fenêtre, étendant son Haki de l'observation dans le cas où une visite surprise arriverait. Une fois fait, elle attrapa précautionneusement les barreaux et les posa sur le lit afin d'éviter tout bruit suspect de sa part. Elle regarda ensuite un instant à l'extérieur : la hauteur correspondait à quatre étages. Bien que se sachant solide, sauter semblait risqué. Elle se décida donc à renforcer ses mains avec son Haki, sortit le haut de son corps par la fenêtre et enfonça ses mains dans le mur extérieur. Ces dernières y entrèrent comme dans du beurre et Navy put s'extirper de la chambre lui ayant servi de prison. Mieux valait toutefois ne pas rester trop longtemps à découvert. Patiemment, à la force de ses mains et de ses bras, elle entreprit de descendre pour atteindre l'étage du dessous.

Une fois à destination, elle s'assura que personne ne se trouvait dans la salle qu'elle souhaitait atteindre. Elle utilisa ensuite son Haki de l'armement sous forme de lame pour couper le verre de la vitre. Elle manqua toutefois de prudence car la vitre coupée tomba à l'intérieur et se brisa. Navy pesta mais ouvrit rapidement la fenêtre pour entrer et se glisser derrière la porte. Cette dernière s'ouvrit juste après sur deux Révolutionnaires que la jeune femme assomma à l'aide de sa faux en Haki. Elle vérifia ensuite que personne d'autre n'arrivait et sortit avant de fermer la porte derrière elle. Navy se dirigea vers la sortie mais s'arrêta en se rendant compte qu'elle se trouvait non loin de la salle des archives qu'elle avait tant fréquentée. Elle avait regroupé dans un tiroir les dossiers qui lui avaient semblé les plus utiles et, bien qu'ayant en tête les informations qui lui semblaient les plus importantes, il était toujours plus prudent d'avoir des documents écrits. Le bâtiment était quasiment vide, du fait de la situation actuelle, si bien qu'elle put aisément arriver jusqu'à la salle qui l'intéressait. Sans hésiter, elle ouvrit un tiroir mais à peine eut-elle mis la main sur les dossiers qu'elle sentit une immense pression dans la salle. Prudemment, elle tourna la tête pour y découvrir Dragon, assis sur une chaise non loin. Au premier abord, il semblait juste posé mais l'aura que Navy ressentait ne laissait rien présager de bon.

« … Tu m'attends depuis longtemps ?
- Depuis que tu as commencé à bouger. Tu sais bien cacher ta présence mais pas suffisamment pour une personne avisée.
- Je vois. Je peux peut-être revenir avec un peu mieux que des papiers poussiéreux alors. »

Navy s'élança vers Dragon, ses poings armés de Haki. Pris au dépourvu, Dragon se retrouva au sol, attrapé par la brune. Toutefois, passé la surprise, il n'eut aucun mal à bloquer le coup de la contre-amirale. La jeune femme, s'y attendant, forma une lame à l'aide de son Haki que Dragon para avec son autre main. La lame de Haki transperça ladite main, laissant s'écouler quelques gouttes de sang. Il ne broncha cependant pas, se contentant de raffermir sa prise et d'empêcher Navy de tenter toute autre attaque, faisant grogner la contre-amirale de frustration. Si Sengoku voyait ça, il serait très déçu de savoir qu'elle avait enchainé les mauvaises décisions.

« … Nous nous bloquons mutuellement. Nous pouvons rester comme ça jusqu'à ce que quelqu'un nous trouve ou bien je te lâche et tu te relèves.
- Ou alors, j'élimine une bonne fois pour toute la plus grande menace pour le Gouvernement. »

Navy força un peu plus, si bien que même Dragon eut de mal à la bloquer. La jeune femme le sentait : elle pouvait prendre le dessus. Elle avait naturellement beaucoup de force et d'endurance, était plus jeune que son adversaire et la gravité jouait en sa faveur. De plus, bien qu'elle souhaitât la mort de Dragon, ce dernier hésitait à réellement riposter et elle pouvait en profiter. Elle le devait.

Toutefois, Navy s'arrêta tout aussi brusquement et relâcha sa prise. Dragon en profita pour l'envoyer plus loin. La brune se releva sans mal et pesta bruyamment, sachant pertinemment qu'elle avait perdu une occasion. L'homme qu'elle détestait le plus, l'ennemi numéro un à abattre avait été à portée et elle s'était sentie avoir de plus en plus de force mais une seule pensée l'avait arrêtée :

« … Je ne peux pas faire ça à Sabo… »

Et désormais, il était trop tard. Elle ne pouvait plus espérer l'effet de surprise et était, de toute façon, tiraillée entre son devoir et sa morale. Pour ne rien arranger, Dragon, une fois relevé, ne trouva rien de plus utile à dire que :

« … Tu ressembles à ta mère. »

Navy ne put empêcher un rire nerveux de sortir.

« J'aurais tout entendu… A choisir, ressembler à une parfaite inconnue me va beaucoup plus que te ressembler, papa. »

Après sa phrase, elle ne comprit pas immédiatement la réaction étonnée de Dragon. Ce dernier semblait chercher ses mots avant d'abandonner et de simplement répondre :

« Arm… Navy… Je ne suis pas ton père. »

La brune se figea à la suite de cette phrase.

« Quoi ?...
- … On ne t'a jamais dit ce que tu étais ?
- Bien sûr que si. Ronan…
- Navy… quel âge as-tu ? »

Cette phrase lui fit froncer les sourcils d'incompréhension.

« Vingt ans cette année. »

Dragon hocha la tête.

« Il y a vingt ans, la situation était très instable, encore plus qu'actuellement… mais je ne t'apprends rien de nouveau, tu as toujours aimé te renseigner. »

Navy tiqua à cette phrase. Dragon savait comment elle était. Jusqu'à quel point s'était-il renseigné ?

Elle n'eut toutefois pas l'occasion d'y réfléchir davantage.

« Durant ce temps, il m'a été impossible d'engendrer une descendance. C'était un tournant important pour les Révolutionnaires et je ne pouvais pas faire risquer quoi que ce soit à un possible enfant.
- Mais alors…
- Non, tu n'es pas une étrangère pour autant. Ton physique ne trompe pas, tu es bien une Monkey D. »

Dragon s'arrêta, laissant à Navy le temps d'analyser la situation. Si son géniteur n'était pas Monkey D Dragon… une seule personne en âge de procréer à cette époque existait. Et était enceinte.

« … Monkey D Army ? »

Pour toute réponse, Dragon se contenta de hocher la tête. A cette révélation, Navy eut un haut le cœur et dut se tenir à un meuble. Le plus choquant n'était pas le fait d'être la fille d'Army mais plutôt ce qu'impliquait cette révélation quant à l'identité de son père.

C'était tout bonnement impossible.

« C'est impossible… Le rapport est clair : personne n'a survécu. Ni la femme, ni l'enfant.
- Le Gouvernement ment. Il en a fait sa spécialité.
- Pourquoi croirais-je un criminel ? Tenta Navy
- Tu n'as pas besoin de me croire. »

Dragon prit un papier qui trainait et écrivit dessus avant de le tendre à la jeune femme. Méfiante, cette dernière le prit tout de même et regarda.

« … De quoi s'agit-il ?
- D'un numéro de dossier archivé à Marijoa. Avec ton grade actuel, tu devrais y avoir accès, à condition d'avoir une bonne raison de t'y trouver. Des archives concrètes sauront mieux te convaincre.
- Admettons que ce soit vrai… Comment puis-je être en vie ?
- Une expérience sur les êtres humains. Le Gouvernement ne pouvait pas laisser périr un être avec un patrimoine génétique aussi prometteur.
- Ce genre d'expérience n'est pas éthique et n'est pas autorisé.
- En es-tu sûre ? Tu as dû avoir vent de ce qu'il s'est passé lors de la récente guerre. Les Pacifistas : des robots créés à partir du corsaire Bartholomew Kuma. »

Le Révolutionnaire avait presque craché cette dernière phrase. Visiblement, il y avait encore beaucoup de choses qu'elle ignorait.

Traiter toutes ces informations telles quelles étaient une tâche ardue, surtout que, malgré tout ça, il lui manquait encore beaucoup d'informations.

« Soit… Disons donc que tout est vrai. C'est donc le Gouvernement qui m'aurait récupéré. »

Hochement de tête de la part du Monkey D.

« Dans ce cas… que s'est-il passé après ? »

Dragon pinça les lèvres, peu certain de ce qu'il devait révéler. Il finit toutefois par arriver à une décision car il ouvrit la bouche pour commencer à s'exprimer. Cependant, à ce moment, une alarme retentit, mettant fin à cet improbable échange. Elle ne savait pas ce qu'il se passait mais elle était sûre d'une chose : si elle ne partait pas immédiatement, elle se retrouverait coincée. Résignée, Navy courut vers la sortie mais elle fut aussitôt arrêtée par Dragon qui l'attrapa par le bras. Son poing partit alors en direction du visage de l'homme mais son coup fut une nouvelle fois bloqué. Ça allait devenir une manie de Dragon de parer ses coups comme si de rien n'était sans riposter. Ce dernier empêcha tout mouvement avant de s'exprimer :

« Il y a un passage souterrain dans cette salle menant jusqu'à l'extrémité de l'île. Si tu l'empruntes, tu pourras sortir sans te faire repérer. Je ne doute pas que tu sauras te débrouiller à partir de là.
- Pourquoi m'aiderais-tu ?
- … Pour expier mes fautes. »

Et, sans une explication de plus, Dragon mit un coquillage dans les mains de Navy avant d'ouvrir un passage et de l'y lâcher. Le passage se referma ensuite derrière elle et elle se retrouva dans le noir, confuse. N'ayant pas d'autres choix, elle enfonça le nouvel objet dans sa poche, suivit le passage et marcha à tâtons pendant ce qui lui sembla être une éternité avant de finalement atteindre une échelle qu'elle grimpa. Une fois à l'extérieur, le soleil l'éblouit un instant et elle dut plisser les yeux pour observer les alentours. Dragon n'avait pas menti : elle se trouvait non loin d'une plage et des petites embarcations étaient présentes, certainement pour permettre une fuite rapide en cas d'attaque. Sans perdre un instant, la jeune femme poussa une barque jusqu'à l'eau, monta dedans, attrapa les rames et pagaya pour s'éloigner le plus rapidement possible. Sa priorité était de rentrer à la base, tels étaient les ordres donnés. Elle ne s'autorisa aucune pause, aussi bien pour s'éloigner le plus rapidement possible du danger que pour ne pas laisser le temps à son cerveau de sombrer. Navy ne voulait pas réfléchir à ce qu'impliquaient toutes ces révélations, pas dans l'immédiat en tout cas et encore moins dans son état.

La contre-amirale continua donc de ramer, encore et encore, pendant trois jours et deux nuits. Elle toucha terre en plein milieu de la troisième nuit, assoiffée et épuisée. Elle ne prit toutefois pas le temps de se poser et abandonna son embarcation avant de se diriger vers la base marine de l'île. Elle ne savait pas où elle se trouvait mais nul doute que ce serait bien plus simple de s'y retrouver de cette façon.

Arrivée devant la base, deux gardes la mirent en joue et l'un d'eux s'adressa à la brune :

« Halte ! Qui va là ?! »

Sans se presser, Navy leva les mains, montrant qu'elle n'était pas armée et s'exprima :

« Contre-amirale Monkey D Navy. Je reviens de mission. »