Des Centaures.
Par Milliers.
Telle fut la seule chose qu'Hermione parvînt à voir dans l'obscurité.
Des Centaures.
Par Milliers…
Semblable à une véritable vague d'ombres mouvantes… à un déluge de bustes et de figures sanglantes… à un torrent de sabots et de flancs frémissants… et une nuée de démons aux hennissements harassants… ils jaillirent tous dans la frénésie d'un même élan, leurs épées et armures s'entrechoquant douloureusement au rythme de leurs foulées galopantes. Unis sous l'égide d'un seul et même front, ils fondirent de tous côtés, accoururent de tous chemins, sortirent de toutes fourrées et galopèrent armes aux poings, encerclant alors les contours du château telle la procession macabre d'un véritable essaim. Un essaim seulement guidé par l'adrénaline de leurs sangs équins, par l'ignominie de leurs dessins et la perversité de leurs sourires malins… mais un essaim dont les chants assassins et promesses de festins, semblèrent capable de conquérir n'importe quel lendemain.
- Par tous les Dieux…
Frappée par la violence avec laquelle son silence fut brisé, la jeune femme sentit son corps se pétrifier dans un spasme incontrôlé. Seigneur… elle avait imaginé quel genre d'armée s'apprêtait à les affronter. Elle avait espéré qu'ils soient nombreux et enragés. Elle avait prié pour que la folie les pousse à les rejoindre sur les berges acculées ! Et même parié sur les odieuses tactiques qu'ils tenteraient d'orchestrer ! Mais jamais ô grand jamais… elle n'aurait envisagé ce à quoi elle assistait. Et pour cause ! Il y en avait partout ! A l'Est, au Nord, à l'Ouest et sur chaque centimètre de berges ! Sur les chemins, pavés, bosquets et allées en pierre ! Par-delà les murets, pontons, fossés et arbres centenaires ! Partout où elle regardait ! Et bien que le terrain soit presque intégralement retourné, jonché de cadavres et couvert d'une mélasse ensanglantée, rien ne semblait capable de les arrêter… De les effrayer ou de seulement les raisonner ! Non… rien. Fous, aliénés et corrompus par une rage délétère, ils encerclaient le lac de leurs hennissements acerbes, barraient les routes de leurs corps de chimères et fondaient sur eux tels des lions dans une arène ! Qu'ils soient hommes, femmes, enfants, blessés ou trop frêles pour porter un glaive ! Qu'ils soient sauvages, civilisés, barbares ou porteurs de selles ! Ils… ils étaient tous déterminés à les frapper d'un nouveau calvaire. Tous déterminés à leur prendre ce qu'ils avaient de plus cher. Tous déterminés à leur faire vivre un nouvel enfer… Et ce n'était presque pas le pire ! Non… car aux yeux de la sorcière ce n'est pas la puissance de leur assemblée qui lui fit maudire le ciel ; mais la diversité de leur espèce…
Des milliers de Centaures, là sur leurs terres.
Des milliers de Centaures, en un seul jour de guerre.
Des milliers de Centaures, réunis sous les mêmes bannières.
Seigneur… c'était historique. Unique. Utopique ! Et presque biblique ! Mais c'était réel… et tels les témoins des plus grands instants de l'Humanité Sorcière, ils assistaient aujourd'hui à l'apogée de la plus incroyables des réunions inter-espèces du millénaire. De toutes nationalités, de toutes tribus, de tout âge et contrés, ils se dressaient côte à côte sans faire fit de leurs guerres passées. De toutes tailles, de toutes couleurs, de toutes cultures et ethnicités, ils s'élançaient dans l'adrénaline d'un seul et même souhait ! Un spectacle qui forçait au respect… mais dont le macabre, l'horreur et l'avidité suffirent à souiller toute la magnificence qu'un tel rassemblement aurait pu représenter. Car ce n'était pas en Protecteurs de paix que ces Centaures attaquaient ; pas plus qu'en dignes émissaires ou représentants de leurs espèces ! Non… mais en tant que soldats, tout juste bon à mourir au combat. En tant que futurs cadavres condamnés à pourrir sous la langue de charognards… En tant qu'instruments destinés à servir les dessins d'une Résistance trop lâche pour mener ses propres batailles. Aussi, il ne fallut pas plus d'un regard à la jeune femme pour le savoir ; ce qu'ils s'apprêtaient à vivre était sans égale…
- Par tous les Dieux… répéta-t-elle sans respirer.
Oui…
Jamais une telle armée n'avait un jour été rassemblée.
Jamais une telle rage ne les avait un jour assiégée.
Jamais un tel danger n'avait semblé sur le point de les renverser.
- Ils… ils…
Ils y étaient.
Ils arrivaient.
Ils se rapprochaient !
Mais l'obscurité les protégeait… Trop nombreux pour distinguer le moindre visage, elle ne voyait de leurs traits que fronts difformes et mentons trop larges. Trop enragés pour distinguer la moindre arme, elle ne percevait de leurs poings levés que scintillements carmin et tranchant létal. Trop rapides pour analyser la moindre tactique d'attaque, elle ne discernait de leurs courses que leurs muscles en sueurs et cris épars… Des indices relativement maigres à une heure aussi cruciale, mais qui ne tardèrent pas à s'étoffer des pires détails ; ceux-là même qu'Hermione aurait prié ne jamais voir, mais qui plus ils approchaient, plus lui sautait au visage. Oh bien sûr, elle ne voulut pas y croire… d'ailleurs, qui le voudrait ? Mais elle ne rêvait pas… Et la nuit n'ôtait rien à leur nature barbare ; pas plus que l'obscurité ne cachait leurs crimes infâmes. Ainsi, il ne lui fallut pas moins de plusieurs secondes avant de parvenir à faire taire son déni… mais également plusieurs autres avant de trouver le courage de ne pas vomir.
- Oh Seigneur…
Des peaux humaines. Ils… ils étaient vêtus de peaux humaines. Tannées, pâles et ensanglantées, elles couvraient leurs dos de leurs rebords rosés et coutures effilochées, habillaient leurs tailles, poitrails et bras enflés, et volaient négligemment dans le vent de leur galopée, semblables à de vulgaires tapis de selle que l'on aurait retournés. Tantôt larges, tâchées, fines ou trouées, elles affichaient à elles seules tous les crimes qu'ils revendiquaient… toute la rage qui les habitaient… mais également tout ce que la Fleur de Rabia leur avait coûté : leur dignité. Oui… il ne restait plus rien de la grandeur d'âme qui les caractérisait ; de leur bonté légendaire, de leurs serments envers la terre ou de la pitié qui les glorifiaient. Rien… si ce n'est l'atrocité qui coulait dans leurs veines. Et encore, Hermione n'était qu'au début de ses peines ; car plus ils approchaient, plus elle pouvait compter les vestiges de leur haine… Dissimulés entre leurs imposants ceinturons et armures équestres, s'entrechoquaient d'étranges colliers de viscères. Epinglées entre deux tresses, gisaient de véritables couronnes d'os, de dents et d'oreilles. Perdus sous le scintillement de leurs pellages d'hivers, pendaient d'immondes morceaux de chaires. Plantés sur les pics de leurs bannières, reposaient les têtes de leurs frères tombés à la guerre… une, puis deux, puis trois, puis une dizaine, dont les yeux crevés et crânes défoncés ne cessaient de galvaniser leur frénésie meurtrière ! Une frénésie qu'elle n'eut aucun mal à lire à la tenue de leurs glaives, à la sueurs rampant jusque entre leurs lèvres et aux gonflements enfiévrés de leurs veines ; mais également aux tressaillement impatients de leurs étranges paupières… Exorbités, ensanglantés et profondément enfoncés sous leurs arcades disproportionnées, leurs petits yeux ne ressemblaient qu'à des fruits trop mûrs prêts à exploser, leurs pupilles dilatées frétillant un peu plus à chaque rugissement qu'ils poussaient. Agrémentés de pommettes réhaussées, de joues creuses, nasaux déformés et mâchoires anguleuses, leurs visages de chimères n'offraient alors que cruauté monstrueuse, perversité hasardeuse et vésanie tortueuse… pourtant, les Centaures n'avaient jamais été des créatures hideuses. Au contraire même ! Leurs charmes avaient toujours été légendaires ! Prodigieux ! Et presque irréels ! Qu'ils s'agissent de leurs robes soyeuses, de leurs peaux ambrées, de leurs tresses somptueuses, de leurs musculatures ciselées ou même de leurs cornes étonnement noueuses, leurs corps et visages avaient toujours fait rêver ! Mais il semblait que leur cruauté avait pris le pas sur leur beauté… à tel point qu'un seul regard sur eux suffise à donner la nausée. Aussi, c'est profondément troublée qu'Hermione se sentit frissonner. Bon Dieu… elle n'avait jamais vu ça. Jamais ! Des peaux humaines en guise de selles ? Des couronnes d'oreilles ? Des colliers de viscères ? Mais… mais qui faisait une chose pareille ?! Qui partait à la guerre, couverts de lambeau de chaires ? Qui ? Qui ?! De toute évidence, ceux déterminés à terrifier leurs ennemis… mais également à recycler leurs peaux pour s'en servir d'habits.
- Ne te laisse pas impressionner… Souffla son Maître dans un murmure étouffé.
Pas impressionner ?! A ces mots, Hermione sentit le dos du Mage se contracter. Seigneur… elle aurait aimé le lui assurer ; rester fière, forte et indifférente à leurs forces armées ! Ne faire fit d'aucune de leurs tactiques et allures de forcené ! Se contenter de les toiser avec le mépris et le dédain qu'ils méritaient ! Et ne leur accorder pas plus d'attention que l'Avada Kedavra dont elle s'apprêtait à les frapper ! Mais que Dieu lui en soit témoin… ce qu'elle voyait-là n'avait rien d'humain. Rien ! Ni leur détermination ! Leur charge ! Leur conviction ! Ou regard ! Rien chez eux ne semblait posséder la moindre âme… la moindre lucidité ou once d'humanité un tant soit peu exploitable ! Non… ne restait alors que cet avilissant courage. Que cette inconscience mêlée à cette indomptable rage. Que cette folie, qui sans foi ni loi, avait déjà accompli l'exploit d'incendier Poudlard.
- Reste calme. Lui souffla le Mage.
Rester calme. Statique. Impassible…
- Ne bouge pas…
Ne pas bouger. Ne pas frémir. Ne rien dire…
- Mais ils… ils…
Ils accouraient… Que dire ! Ils volaient ! Se précitaient ! Chargeaient ! Approchaient ! Insensibles au froid, à la fatigue, aux blessures ou à la ténacité de leurs ennemis, ils dévalaient les berges dans une clameur effrénée, s'alignaient instinctivement en rangs serrés et piétinaient les allées de leurs courses enragées ! Heureux et fiers d'éventrer la terre de leurs sabots mal ferrés, ils souillaient les sentiers de leurs crachats ensanglantés, profanaient les derniers jardins de leurs obscénités, et entachaient l'existence même de tout ce qu'ils touchaient ! Un élan de destruction tout aussi puérile que profondément écœurant, qui alors même qu'ils se rapprochaient dangereusement, ne réussit qu'à aliéner leurs consciences…
- Maître… gronda-t-elle haletante.
- On attend.
Acculée contre lui, la jeune femme sentit son poing se resserrer douloureusement autour de sa baguette. Mélange d'instincts et d'anciens réflexes, elle s'entendit souffler sans respirer, vaciller sans bouger et se liquéfier sans trembler, ne laissant alors d'elle qu'un écrin de hurlements muet aux yeux exorbités... qu'un réceptacle de haine aux joues délavées… qu'une sorcière horripilée, prête à tout pour se venger. Car elle n'était pas aveugle à ce qui se préparait ; pas plus que Voldemort, qui bien qu'il attende leur approche, devait user de toutes ses forces pour ne pas céder à ses prières de mort…
- On attend. Ragea-t-il entre ses dents.
Attendre…
Attendre…
Attendre…
Mais jusqu'à quand ?! Jusqu'à ce que leurs poings ne brisent leurs dents ? Que leurs épées ne transpercent leurs ventres ? Et que leurs selles ne se nappent de leurs sangs ?!
- On attend !
Attendre…
Attendre…
Attendre…
Non… elle ne voulait pas attendre. Elle voulait attaquer ! Là ! Maintenant ! Leur faire payer leur indécence ! Leur faire regretter leurs naissances ! Les frapper de milles tourments ! Et se baigner dans leurs sangs !
- Hermione…
Oui… elle voulait les tuer. Les exterminer. Les accabler ! Afin que jamais aucun Centaure ne se risque à oublier le prix de leur cruauté.
- Calme-toi. Gronda-t-il à voix basse.
Qu'elle se calme ? Non… elle ne le pouvait pas. Pas quand elle voyait les tours en feu de Poudlard, les toits dévorer par les flammes, la nuit assiégée par leur vacarme et leurs sabots les défier de leur charge ! Mais encore moins face à ce qu'elle commençait à pressentir dans le noir… Une impression étrange, invisible et presque inaudible ; un sentiment léger, subtile et pourtant irascible… mais une certitude dont les premières prémices manquèrent de la faire défaillir.
- Maître…
Car il aurait été idiot de croire que cette charge endiablée était le seul plan de cette grotesque armée ! Au contraire… les cartes du jeu venaient à peine d'être distribuées ; et se faisant, leurs ennemis commençaient déjà à bluffer. Ainsi, c'est dissimulés entre les brèches de leurs glorieuses galopées, allongés sur les garrots et selles harnachées, et protégés par la puissance des poitrails et épaules surdimensionnés, que se cachaient l'ombre des véritables leaders de cette armée... Que dire ! Des véritables maîtres-chanteurs de cette bande de pantins écervelés ! Les seuls véritables ennemis qu'Hermione et Voldemort se languissaient d'affronter, mais qui – bien trop lâches pour briser les rangs de cet assaut insensé – avaient choisi de se cacher derrière un troupeau de créatures ensorcelé…
La Résistance et ses sorciers.
- Maître !
- Je sais… Siffla-t-il acerbe.
Et oui… croire que les Centaures attaquaient seuls aurait été une grossière erreur. Ils n'étaient pas seuls. Ils n'avaient jamais seuls. Et comme un chien avait besoin des ordres de son Maître, les Centaures avaient besoin des éperons de leur Chef. Un Chef dont Voldemort n'eut aucun mal à reconnaître l'aura vengeresse et dont la bassesse manqua de lui faire cracher sa bile à terre.
- Ils sont là. L'entendit-elle souffler à demie-voix.
Là.
Un seul mot.
Une seule phrase.
Et Hermione sentit son serpent hurler dans le noir.
- Garde ton sang-froid…
Bouleversée, la jeune femme sentit son cœur se murer dans la douleur de son apnée… incapable de respirer sans s'étouffer, elle sentit son esprit se déliter sous la terreur de ses pensées, son dos se contracter sous le souvenir de leurs fouets et ses membres se tétaniser sous la violence de sa magie débridée. Un instant pendant lequel elle entendit son âme hurler, son sang s'arrêter et ses entrailles se nouer… mais qui ne réussit qu'à concrétiser la folie qui s'était mise à la posséder. Une folie qui n'eut besoin que de les repérer pour prendre vie sous ses pieds.
- Maître ! Tonna-t-elle enragée.
Incapable de se contrôler, Hermione sentit sa voix se faner sous la violence de sa nausée. Par tous les Dieux… elle ne résisterait pas longtemps.
- Pas maintenant !
Non… elle ne voulait pas attendre. Elle ne voulait pas attendre ! Elle ne voulait pas attendre ! Pour la simple et bonne raison que son regard cherchait déjà ceux dont elle souhaitait voir couler le sang…
Harry.
Ron.
Neville.
Dean.
Victor.
Ils étaient tous là. Elle pouvait le sentir ! Ils étaient tous là ! Tous les Weasley, les résistants, les fugitifs, les traîtres à leurs sangs et autres fous bon pour l'asile… tous étaient là quelque part, prêts à surgir dans la nuit… prêts à les frapper de leurs infamies ! Furtifs, légers et invisibles dans cette avalanche de cris et de fureur équine, certains chevauchaient les Centaures au rythme de leur propre adrénaline, l'aura de leurs magies perçant maladroitement l'obscurité salvatrice de la nuit. Accroché à tout ce que leurs mains parvenaient à saisir, on voyait leurs corps osciller entre deux sauts, leurs membres vaciller sous l'allure du galop et leurs grimaces se renforcer sous les tremblements nerveux des muscles dorsaux. Une tactique aux procédés pour le moins originaux, qui bien qu'ils puissent faire grande impression chez les voltigeurs et autres dresseurs de cheveux, ne réussit cependant qu'à n'inspirer qu'un profond dégoût dans le cœur de leurs bourreaux…
- Ils approchent… S'étouffa-t-elle.
Oui… mais ce n'était pas assez. Et bien qu'elle meure à petit feu dans son immobilité, Hermione le savait.
- On attend !
Trois cent cinquante mètres…
- Mais…
Trois cent mètres…
- On attend !
Deux cent cinquante mètres…
- Maître !
Deux cent cinquante mètres… et Voldemort leva sa baguette. Aux prémices de ce simple geste, on entendit une nouvelle frénésie saisir les Centaures dans la plaine. Sûrement s'étaient-ils préparés à subir une attaque directe ? A frire sous la violence d'une incantation incendiaire ? Ou à essuyer un assaut de sorts mortels ? Pourtant et contrairement à ce que tous envisagèrent, la baguette du Seigneur des Ténèbres n'était aucunement tournée vers leur haine… mais vers le ciel.
- Encore un peu… souffla-t-il pour lui-même.
Deux cent mètres…
- Encore un peu !
Jusqu'à ce qu'ils franchissent la barre des cent cinquante mètres…
- Connor ! Hurla-t-il.
A cet instant même, sa baguette cracha une puissante gerbe de lumière.
- Maintenant !
Avant que le ciel ne s'assombrisse soudainement d'une centaine de flèches.
- Tirer !
Oui… des flèches.
Des flèches tirées depuis l'obscurité mensongère d'un lac habités par pas moins de trois navires de guerre.
Des flèches tirées depuis les arcs de pirates alors savamment dissimulés d'un sortilège.
Des flèches tirées depuis les ordres d'un seul et unique Capitaine…
Embrasées de flammes, acérées d'un tranchant létal et mortellement multipliées par la magie de Luna, elles transpercèrent la nuit de leur sifflement macabre, illuminèrent les cieux de leur appétit insatiable et domptèrent le vent de leur dessin fatal ! Mais elles n'étaient pas seules… car dissimulés dans l'ombre du silence, ne tardèrent pas à résonner l'ultime arme de cet escadron : les canons.
- Feu !
Ainsi, c'est dans une cacophonie de sifflements, de fumée, de détonations et de cris, que les canons se joignirent aux flèches pour déchirer la nuit. Unis sous les mêmes auspices, ils se muèrent en un véritable mur de feu et de destruction, de poudres et de tranchants, de boulets et de scintillements, de force brute et de malice éclatante… un combo à la mortalité harassante, qui avant même que les Centaures n'aient le temps d'en prendre conscience, déferla sur leurs troupes dans l'écho de nouveaux hurlements. Frappés de plein fouet, les flèches perforèrent leurs torses, les boulets déchiquetèrent leurs corps, la surprise se mit à déstabiliser leurs hommes et leurs rangs parfaitement alignés devinrent rapidement informes. Dispersés, ils tentèrent de se protéger, levèrent leurs boucliers et cabrèrent dans l'espoir d'éviter les flèches et leurs pointes acérées ; mais quand l'une d'elle ne les transperçaient pas, un boulet se chargeait de les éventrer… jusqu'à ce que les prochaines ne s'attèlent à les achever.
- Reformer les rangs ! Reformer les rangs !
- Protégez-vous !
- Le ciel ! Regardez le ciel !
Qui avait crié ? Harry ? Ron ? Aucun d'eux n'aurait su le deviner… mais à la vue des Résistants rampant au sol, de la confusion de leurs paroles et de la terreur qu'inspirait la nouvelle panique des Centaures, un profond sourire anima Voldemort. Par Salazar… qu'il était bon de donner la mort.
- Tirer !
Un deuxième assaut... et les derniers rangs des Centaures sombrèrent dans le chaos.
- Feu !
Un troisième… et plus d'une centaine de Centaures s'écroulèrent à terre.
- Tirer !
Un quatrième… et une nouvelle odeur de sang infesta l'air.
- Feu !
C'était une hécatombe.
Un carnage.
Un véritable bain de sang !
Soit tout ce qu'ils avaient espéré si passionnément. Tout ce qu'ils avaient attendu si ardemment ! Et tout ce qu'ils avaient prié si avidement ! Mais ils ne pourraient gagner cette guerre à coup de flèches et de canons… et cela, Voldemort et Hermione le savaient pertinemment. Aussi, c'est tout en se délectant de la nouvelle confusion de leurs rangs et de la centaine de morts déjà pourrissant, que le Mage Noir se grandit dans un grondement. Oui… il n'était plus question d'attendre. Il n'était plus question de pitié ou de négociation. Quoi que cela lui en coûte, les Centaures allaient payer leurs affronts.
- Initiée…
N'ayant besoin d'aucun autre mot pour réagir, Hermione s'empressa de lever sa baguette contre ceux que les flèches et boulets n'avaient pas encore refroidis. Insensible à la furie des milliers de créatures face à laquelle son frêle petit corps se grandit, elle s'avança dans l'élan d'une nouvelle adrénaline, ses lèvres s'ourlant alors en un étrange sourire. Car il aurait été naïf d'espérer la voir faillir… trembler ou seulement frémir. Non… elle avait attendu cet instant. Elle avait prié d'assister à son avènement. Elle avait supplié qu'on mette un terme à son attente ! Ainsi, nul ne vit la moindre peur rayonner dans ses pupilles ardentes ; mais seulement la plus glorieuse des délivrances…
- Maintenant !
Le cœur battant sous un commandement aussi frappant, Hermione se concentra un court instant, frissonna sous l'afflux de sa magie brûlante et prit une grande inspiration… avant de déchaîner le plus effroyable de tous les Feudeymon. Non pas pour tous les exterminer d'une seule incantation – bien que cette idée soit particulièrement alléchante – mais pour les tenir en retrait jusqu'à ce que leurs propres troupes ne forment les rangs… Ainsi, c'est sans surprise que l'on vit quelques Protego s'élever avec empressement ; quelques sorciers parer les flammes de leurs Aguamenti branlant et quelques boucliers fondre sous la chaleur de son brasier incandescent. Mais le plus beau était qu'aucune de ces vaines tentatives ne parvînt à tarir les hurlements… ceux de centaines de Centaures en train de brûler vivant. Cachés derrière leurs maigres défenses ou le faible scintillement de quelques baguettes tremblantes, le front de leur armée ne tarda pas à s'écrouler entre deux jappements, l'odeur de leurs chaires carbonisées emplissant copieusement l'air de leurs effluves sanglants. Mélange de pelages brûlés, de peaux calcinées, de visages défigurés et de membres incendiés, il ne resta plus rien de leur première rangée de soldats enragés… plus rien de leurs fureurs et témérités… plus rien de leurs promesses de morts et de vengeance effrénée. Oh bien sûr, il ne fallut pas longtemps avant de ne voir les sorciers de la Résistance se rassembler ; unir leurs pouvoirs dans un souffle désespéré et élever un rempart d'eau entre son Feudeymon et le reste de leur armée ! Mais entendre leurs cris d'agonie… sentir l'odeur de leurs chaires rôties… et voir leurs corps céder face à la puissance de sa furie… suffit à la combler du plus exquis des soupirs. Malheureusement, il n'était pas l'heure de se suffire de ces quelques pertes insipides. Et pour cause… il ne s'agissait que des prémices.
- Drago ! Hurla à nouveau Voldemort.
Le ton était donné… le véritable combat allait commencer.
- A mon commandement !
Déchaînant d'avantage sa magie aux cris de son Maître, Hermione s'empressa d'élancer son Feudeymon contre leur muraille d'eau et autres sortilèges, cherchant alors plus que jamais à détourner leurs baguettes des intentions de son frère. Des intentions qu'aucun des résistants ne perçut, avant qu'un nouvel écho ne résonne dans l'air…
- Maintenant !
Et qu'une nouvelle vague de magie ne déferle du ciel.
- Avada Kedavra !
Jaillissant de plus d'une trentaine de baguettes, les Avada surgirent brusquement depuis les ombres de la nuit. Puissants, mortels et pourtant invisibles, ils déchirèrent l'obscurité de leurs magies, provoquèrent un mouvement de panique, frappèrent le sol entre deux cris et terrassèrent à eux seuls plus d'une centaine d'ennemis. D'où venaient-ils ? Que se passaient-ils ? Comment faisaient-ils ? La question semblait légitime… mais n'eut plus beaucoup de sens quand l'écho d'un nouveau troupeau retenti.
- Là-haut ! Hurlèrent les Centaures horrifiés.
Oui… là-haut.
- Confringo !
- Endoloris !
Là-haut, volaient plus d'une trentaine de Sombrals.
- Diffindo !
- Sectum Sempra !
Là-haut, attaquaient plus d'une trentaine de mangemorts.
- Expeliarmus !
- Bombarda Maxima !
Là-haut, résonnaient les cris enragés de Drago.
- Avada Kedavra !
- Reducto !
Rassemblés à la dernière minute sur les berges du Lac, le Malfoy avait réussi l'exploit de rameuter plus d'une centaine de ses soldats. Qu'ils soient blessés, acculés, terrifiés ou profondément désespérés, tous avaient accouru à l'appel de la Marque des ténèbres… tous avaient uni leurs forces en cette ultime prière… et tous avaient retrouvé la foi à la vue de leur Maître. Ainsi et bien que leur nouvelle stratégie défie tout sens logique, aucun n'avait frémit à la nouvelle de charge de l'ennemi… et tous s'étaient réjouis à l'envolée qui déterminerait leur survie.
- Endoloris !
- Incendia !
Déversant plus de haine qu'il n'en était possible, les mangemorts prirent la Résistance pour cible, déversèrent rage, fureur et crimes, et poussèrent même certain à fuir dans l'élan d'un ultime instinct de survie… une tactique qui ne tarda pas à amoindrir leur Aguamenti et à laisser une nouvelle rangée de Centaures brûler vifs sous les assauts du Feudeymon et de ses flammes dévastatrices.
- Encore ! S'époumona Drago.
Acculé sous la soudaineté de leurs attaques coordonnées, on vit la majorité des Résistants tenter de se protéger, de reformer les rangs et même de riposter… mais face à un tel étau, même leurs propres forces les desservaient. Et pour cause ! Ils étaient trop nombreux pour rester synchronisés ; trop bruyants pour que le moindre ordre puisse résonner et trop déchaînés pour que la moindre logique ne vienne les frapper ! Incapable de correctement se mouvoir dans la mélasse de corps et de boue rougeâtre, certains Centaures trébuchaient au sol, se piétinaient entre eux ou s'écrasaient bêtement contre le mur de feu. Piégés par l'élan de leur propre charge, ceux restés à l'arrière s'amassaient sur eux-mêmes, provoquaient chutes, blessures et repoussaient malgré eux leurs frères tentant alors de battre en retraite. Une scène tout aussi tragique que profondément grotesque, dont le potentiel ne parvînt qu'à ravir leur adversaire.
- Extermina Maxima !
Pris à revers, plusieurs attroupements se virent exterminer d'un seul coup de baguette.
- Incendia !
Démunis, beaucoup ne purent éviter les flammes dont les mangemorts s'empressèrent de les assaillir.
- Endoloris !
Frappés de plein fouet, un tiers de leurs armées ne tarda pas à se faire décimer…
- Avada Kedavra !
Mais bien que cette première attaque leur redonne tous espoir, ni Hermione, ni Voldemort, ni Connor ni aucun des mangemorts ne parvînt à crier victoire… au contraire, cela ne réussit qu'à attiser leur rage. Car bien qu'ils aient perdu de nombreux de soldats, que les flèches des pirates ne cessent de les transpercer de leurs tranchant létal et que la Résistance soit prise en étau entre les Sombrals et un mur de flammes, ils étaient toujours plusieurs milliers déterminés à se battre… un constat dont la dangerosité n'était pas négligeable, et dont le trop grand risque acta leur ultime marche.
- Connor ! S'écria soudainement Voldemort.
Sursautant à l'écho de son râle, le petit garçon senti un frisson le parcourir jusqu'à la moelle. Seigneur… c'était le signal.
- Tout le monde à terre ! Hurla-t-il sans respirer.
Oui… l'heure était venue de se battre.
- Allez ! On se dépêche ! A terre ! A terre ! A terre !
Naissant depuis la brume des berges ensommeillés, en entendit sa voix transcender l'obscurité, les bottes de ses hommes frapper leurs ponts avec avidité et les sorts de Luna résonner à mesure qu'elle dévoilait soudainement les troupes de leur nouvelle armée…
Une armée que nul n'aurait osé imaginer fouler les berges du lac.
Une armée qui ne tarda pas à prendre place aux côtés du Mage Noir.
Une armée de mangemorts et de pirates…
Seigneur…
Une armée de mangemorts et de pirates.
Une armée de mangemorts et de pirates.
Une armée de mangemorts et de pirates !
Etait-ce seulement possible ? Ou concevable ? Nul n'aurait pu y croire. Nul n'aurait pu même le concevoir ! Et pour cause… cela semblait sortir tout droit d'une fable ! D'une illusion ! Que dire… d'un cauchemar dénué de toute raison ! Et pourtant, tel était ce que Voldemort avait fait apparaître dans le noir… tel était ce que Voldemort avait fait émerger des berges du lac ; tel était ce que Voldemort avait juré de déverser sur l'armée qui œuvrait à le faire choir ! Oui… telle était sa promesse : celle d'une armée toute aussi inimaginable qu'inconcevable, qui guidée par la plus puissante de toutes les quêtes vengeresses, ne tarderait pas à lui rendre la gloire de son règne.
- Soldats ! Tonna-t-il brusquement.
C'était unique.
C'était historique.
C'était impossible !
A tel point que même Ron et Harry commencèrent à blêmir ! Mais rien n'aurait pu amoindrir la puissance qui se dégageait de ce front mythique… un front comme aucun homme n'en avait jamais vu de sa vie.
- Sorciers !
Unis sous les auspices de son seul cri, on vit les robes des sorciers effleurer des haillons rapiécés, les baguettes scintiller aux côtés d'épées, les magies s'agiter au milieu des claquements de lames aiguisées et les sourires s'élargir face aux corps calcinés. Une assemblée à l'évidente cruauté, dont les coulisses étaient tout aussi déconcertant que profondément insensés. Oui… insensé. Tel était le seul mot capable de décrire les troupes qui se rassemblaient ! Tel était le seul mot capable de décrire le carnage qui se préparait…
- Pirates !
Comme s'ils les troupes de Lucifer s'étaient alliés aux démons de Satan, que la Mort avait béni les rangs et que tous les Dieux s'étaient faits artisans des pires abominations, on vit Bellatrix s'esclaffer aux côtés des Triplés, Nott et McNaire sourire non loin du Bourreau, Nott frissonner face à la carrure d'Aulus, Greyback gronder en chœurs avec la fratrie de Primus, Yaxley gonfler le torse non loin de Spica et Mulciber approuver le tranchant des lames de Cae. Une réunion portée sous l'égide de la folie, du vice, de l'infame et de l'ignominie, mais dont les promesses vermillon et clameurs battantes, ne tardèrent pas à assiéger la nuit des frissons les plus exquis…
Car ils étaient tous là…
Qu'ils soient hommes, femmes, sorciers ou pirates. Qu'ils soient armés de baguettes, d'arcs ou de coutelas. Qu'ils soient déterminés à tuer par vengeance, honneur ou frénésie barbares… Tous se tenaient là, fiers et droits. Tous se tenaient là, impatients et braves. Tous se tenaient là, transcendés et implacables ! Un rassemblement comme on n'en avait encore jamais vu au cours de l'Histoire, et comme il n'en existerait très certainement plus aucun autre après cela… Aussi, il ne fallut pas longtemps avant de ne voir les Centaures hésiter, les résistants balbutier et l'intégralité de leurs troupes murmurer dans l'écho d'une crainte inavouée… tout comme il ne fallut pas longtemps avant de ne sentir les ténèbres s'enorgueillir devant l'avènement d'une telle armée. Une armée de tueurs, de voleurs, de vengeurs, et de dégénérés. Une armée sans cœur, sans peur, sans pudeur ni la moindre humanité. Une armée comme il ne devrait jamais en exister, mais qui derrière un seul homme s'était rassemblée…
Le seul homme capable de faire amarrer les pires prédateurs que cette Terre est portée.
Le seul homme capable d'unir les pires soldats des mondes connus et cachés.
Le seul homme capable de redéfinir les limites du réel à la seule force de sa volonté.
Un homme face auquel même les Dieux se mirent à frissonner…
- En position ! S'écria violemment le Mage.
Horrifiés devant la centaine de nouvelles pair d'yeux qui se mirent à les toiser, les Centaures les détaillèrent sans respirer, laissant alors un étrange silence les agiter. Par tous les Dieux… ils se croyaient rêver. Non pas qu'on puisse véritablement les blâmer ! Ce à quoi ils assistaient semblait défier toute réalité. Tout bon sens. Toute lucidité ! Aussi et bien qu'ils soient plusieurs milliers, qu'ils soient armés, enragés et profondément désœuvrés, il ne leur suffit que d'un regard sur cette étrange assemblée pour qu'ils ne se sentent violemment trembler… Sûrement avaient-ils pensé que leur nombre suffirait à les terrifier ? Que leur assaut parviendrait à les faire capituler ? Et que le déploiement de toutes leurs forces n'aurait aucun mal à les exterminer ? Mais de telles pensées n'étaient que la preuve de leur stupidité ; en particulier quand leur ennemi n'était autre que le plus Puissant Sorcier ayant jamais existé… ainsi que son Initiée.
- Hermione !
Enfiévrée par les ombres et grondements qui se mirent à l'entourer, la jeune femme sentit son cœur se gonfler, son souffle s'accélérer et son front s'enfiévrer. Grand Dieu… l'heure du combat rapproché arrivait. L'heure de la mort sonnait. Et l'heure du vainqueur approchait. Ainsi, c'est sans sourciller que la jeune femme abaissa son Feudeymon et admira les dernières victimes de ses flammes se tordre entre deux hurlements… avant de lentement sourire aux soldats du nouveaux front et de brusquement tourner les talons. Sûrement que sa satisfaction choquerait ses anciens amis Résistants… mais qu'importe. Ce soir, elle avait soif de sang. Ce soir, elle avait soif de vengeance…
- A mon commandement !
Etait-ce folie ? Hérésie ? Inconscience ? Ou vésanie ? Chacun aurait été légitime d'établir sa théorie… mais l'heure n'était pas aux doutes ou l'apanage de la moindre fantaisie. Ainsi et bien que cela défie toute logique, c'est uni dans un même regard, une seule quête et un seul espoir, que chacun des soldats se redressa face aux rangées de sauvages…
- Pas de pitié ! Scanda-t-il.
Il hurlait… fou, déraisonné et presque aliéné par l'adrénaline qui le possédait, Voldemort hurlait à s'en étouffer.
- Pas de prisonniers !
Oui… il se sentait transporté. Transcendé ! Glorifié ! Car il n'était plus question de tours, de pièges, de fumisteries ou de tactiques mensongères. Ce temps était passé ; et avec lui, les derniers espoirs de ses ennemis de triompher…
- Pas de quartiers !
Galvanisés par ses cris endiablés, on entendit les Mangemorts hurler avec hargne, les Pirates frapper le sol de leurs sabres, le Serpent d'Hermione siffler sa rage, les Sombrals hennir violemment au-dessus du lac et Voldemort vrombir d'une magie sans égale…
- Soldats !
... avant que les Centaures ne se mettent eux aussi à rugir dans le noir…
- Chargez !
... et que tous ne donnent la charge…
Hello !
Et voilà le premier aperçu du combat enragé qui les attends ! Un combat dans lequel pirates, sorciers, centaures, résistants, Initiée et Mage Noir vont s'affronter sans pitié... et qui ne va pas les laisser sans surprise ;) Des théories ? J'attends vos avis impatience !
En tout cas, merci encore pour vos retours ! J'espère que la suite vous plaira autant qu'à moi !
A très vite ;) BIZZEEEE
