La commandante soufflait. Évidemment, l'administratif n'était pas son fort et devoir effectuer cette tâche un dimanche, la rendait irritable. Faut dire que son cerveau avait grandement besoin de faire des efforts de concentration… Entre le décès d'Émilie, la résolution de l'enquête, l'accident d'Antoine et leur dernier échange, la blonde était secouée. Pourtant, il fallait être minutieuse… ordre du commissaire Perrin ! Alors Candice s'était enfermée dans son bureau, paquet de guimauve en main et s'entêtait désormais à noircir les pages de ce dossier. Soudain, un bruit sourd résonna contre la porte qui laissa rapidement apparaître son second.
« Salut ! entendit-elle résonner dans son bureau. J'te dérange ?
- Oh Nathan ! s'enthousiasma-t-elle en souriant difficilement. Comme tu vas ?
- Content que toute cette histoire soit enfin derrière nous je… ça me rendait dingue…
- Et t'as fait du super boulot ! sourit-elle alors qu'il s'approchait.
- Hum… Et Antoine ? Comment il va ? osa-t-il demander en s'asseyant face à elle.
- Ça va… Il est sorti de l'hôpital ce matin et il se repose avec sa fille…
- Tant mieux…
- Sinon, je viens d'avoir un entretien avec Perrin… La paperasse ça m'avait pas manqué quand même…
- Et dieu sait qu'il est pointilleux… rajouta-t-il en rigolant doucement.
- TROP même… insista-t-elle en levant les yeux au ciel.
- On le changera pas…
- Non…
- C'est sûr que c'est pas Dumas…
Fataliste, la blonde haussa les épaules avant de baisser la tête.
Pardon je… J'voulais pas remuer le couteau… désolée…
- T'inquiète pas… Je vais bien ! mentit-elle.
- Alors, le prends pas mal mais… je commence à te connaître tu vois et… je vois bien que ça va pas… Entre tes petits yeux, ton absence de motivation et ton air hagard…
- Ouais je… J'suis un peu paumée là tu vois…
- À quel sujet ?
- Antoine… avoua-t-elle tout bas. J'arrive pas à gérer la situation je…
- Je t'écoute…
- Bah tu vois, le problème c'est que j'aimerais à la fois être loin de lui pour continuer d'avancer sur mes soucis et à la fois j'aimerais être près de lui… Je… Fin' je m'étais réhabituée à le voir au quotidien avec cette semaine et je me rends compte que j'suis pas prête pour le retour à la normale… mais en même temps j'ai pas le choix et puis… avec ce qu'il s'est passé hier je… fin' je me dis que je peux le perdre à n'importe quel moment et je…
- Oh ! Oh ! Doucement… D'accord ? Ce qu'il s'est passé hier est un fait mais tout va bien. Il est sain et sauf, tu es restée auprès de lui, t'as fait ce que tu avais à faire d'accord ?
- Oui…
- Maintenant, je comprends que cette semaine était un peu particulière pour toi mais, c'est pas possible de la faire durer davantage. Donc t'es là, avec moi. Alors ok, j'suis pas aussi classe et beau-gosse que lui, mais j'suis là… lança-t-il pour la faire rire.
- Je sais…
- Et le petit rectangle rose posé devant toi, qui sert accessoirement à envoyer des sms voire même parfois à téléphoner, contient son numéro. Donc tu peux le joindre n'importe quand si tu en as envie… Ok ?
- Mais c'est pas si facile…
- Bien sûr ! Sinon, ce serait emmerdant…
Amusée, elle rigola doucement.
- Merci Nathan…
- Toujours là pour rendre service ! Puis lui il a pas plus de chance que toi, il se tape Élodie toute la journée…
- Eh bah tu crois pas si bien dire… Tu sais pas qu'elle a tenté un truc avec lui ?
- Mais nan ?!
- Mais si ! Elle a minaudé devant son bureau pour aller boire un verre et… bah il a accepté… puisque monsieur n'avait toujours pas compris ses intentions…
- Oh la la… répliqua-t-il hilare. Comment tu le sais ?
- C'est lui qui me l'a dit !
- Donc il lui a mis un vent ?
- Et j'espère que ça a bien soufflé… Qu'elle garde ses mains bien loin de mon commissaire ! Non mais !
- Putain, mais j'en reviens pas qu'il ait rien vu ! continua-t-il en rigolant.
- Complètement aveugle… lâcha-t-elle en hochant négativement la tête.
- Hum… Et je me disais, maintenant que l'enquête est bouclée, on pourrait peut-être les remercier et… organiser un pot… Sans eux, je sais pas si on aurait été aussi rapide…
- C'est vrai… C'est une bonne idée oui… acquiesça-t-elle en songeant à Antoine. Je te laisse t'en charger ?
- Ok… accepta-t-il quelque peu surpris. T'es sûre ? Parce que ce sont tes amis…
- Sauf que le pot est un remerciement professionnel, non ?
- Vrai ! »
. . . . .
Appuyée contre le comptoir du bar habituel, Candice jeta à nouveau un œil sur sa montre. 20h30… Alors que tout le monde était là depuis presque une heure. Tout le monde, sauf Antoine, se désespérait-elle. Alors chaque fois que la clochette retentissait, la blonde relevait la tête espérant voir son commissaire débarquer. Et chaque fois, quelqu'un d'autre apparaissait, à son grand damne.
« Ça va ? s'étonna Val face à son soufflement bruyant.
- Ouais ! Ouais ! mentit-elle en souriant faussement.
- Ok… répliqua-t-elle dubitative.
Val s'éloigna, bientôt remplacée par Nathalie qui s'appuya à ses côtés.
- Nath ? l'interrogea-t-elle timidement. Tu sais quand Antoine va arriver ?
- Euh… Je crois qu'il viendra pas…
- Ah bon ? demanda-t-elle déçue.
- Ah, parce que ça t'étonne en plus ?
- Bah…
- Quand je suis allée le voir pour le convaincre, il m'a dit qu'il viendrait pas parce que vous deviez rester à distance. Drôle de décision pour quelqu'un qu'a passé sa journée à l'hôpital samedi…
- Arrête… chuchota-t-elle en baissant la tête.
- Quoi arrête ?! Je te comprends pas sérieux ! T'as fait des pieds et des mains pour le récupérer… Et quand t'y arrives, tu fuis ?
- Mais j'ai pas tout cicatrisé encore…
- Et donc ça justifie de s'isoler de lui comme ça ?
- Écoute je… j'arrive pas à gérer. C'est compliqué et je…
- C'est sûr qu'en s'empêchant de dire ce qu'on a sur le cœur, c'est compliqué de vivre dans le bonheur… lâcha-t-elle d'un ton las.
- Mais je…
- Alors, si vraiment tu tiens à lui, vas-y !
- Où ?
- Lui expliquer…
- Quoi ? Là maintenant ?! Non je…
- Allez ! ordonna-t-elle en s'éloignant. »
Candice observa sa collègue rejoindre un autre groupe d'amis. À nouveau, la commandante se retrouvait seule… Et sans surprise, l'unique personne qu'elle aurait aimé voir à ses côtés avait décidé de l'écouter et prendre ses distances. Elle releva la tête, observant Justine enserrer Mehdi à la taille, face à Val et Marion qui chahutaient Tom en rigolant. Plus loin il y avait le capitaine, qui caressait chaleureusement le dos de son amie. La pièce respirait le bonheur… sauf peut-être, le sien manquait à l'appel. Finalement, Nathalie avait raison, à cause de ses non-dits, elle était en train de s'en priver elle-même. Alors la blonde fit volte-face avant d'intercepter le barman entre deux commandes.
« Vous auriez du vin ?
- Au verre ou au pichet ?
- Alors je pensais plutôt à une bouteille… répliqua-t-elle dans un sourire »
. . . . .
21h. Candice marchait doucement sur l'allée de graviers qui menait à l'appartement des Dumas. En proie aux tergiversations depuis son départ anticipé du bar, Candice paniquait et ancrait ses yeux sur la bouteille qu'elle tenait fermement dans sa main. Ses pas la guidèrent jusqu'à la baie vitrée illuminée qui offrait une vue sur un salon désert. Elle y jeta un rapide coup d'œil et aperçut un jogging gris face à l'évier. Souriante, elle approcha et toqua doucement. Antoine fit volte-face avant d'ouvrir la porte, visiblement surpris de voir une jolie blonde en tenue de soirée plantée devant lui.
« Candice ? Je…
- Je te dérange pas ?
- Non… Mais ?
- Comme tu n'es pas venu au pot de l'amitié… le pot vient à toi… lâcha-t-elle fièrement en tendant la bouteille face à lui.
- Merci… balbutia-t-il en récupérant le vin. Désolé… Je… Fin' j'savais pas si c'était une bonne idée… Vis-à-vis de nous… De cette distance…
- Non mais… T'as bien fait de pas venir finalement…
- Ah ?
- Bah oui… Avant tout ça, je… je t'avais promis qu'on se parlerait, après ma consultation chez Froissart je veux dire et… je crois qu'on en a vraiment besoin… Enfin j'ai des choses à te dire alors… je me suis dis que…
- Ok ! Bah entre ! J'me change et j'arrive…
- Mais non ! Je m'en fous… J'aime bien le jogging, tee-shirt…
- Je fais un peu tâche là quand même…
- Une jolie tâche alors… répliqua-t-elle dans un large sourire.
- Hum… Bon beh installe-toi…
- Merci…
- Ça tombe bien j'ai pas encore mangé… »
Candice s'exécuta et prit place dans le canapé, se contentant d'observer l'homme en jogging sortir deux verres du placard avant de les apporter au salon. Antoine prit le soin d'ajouter quelques biscuits apéritifs, presque comme s'ils s'apprêtaient à passer une soirée à deux, comme avant… Pourtant, le silence régnait, signalant la gêne et le malaise qui grandissait entre eux. Candice attendit qu'il la rejoigne et osa lancer la discussion par des formalités.
« Suzanne est pas là ?
- Non ! Je l'ai déposé chez sa mère avant-hier soir… C'est sa semaine…
- Ah oui… Mais… réalisa-t-elle. Ça veut dire que t'es tout seul depuis deux jours ?!
- Oui ! Mais tout va bien… J'ai toujours des maux de tête mais ça se calme… Et je reprends le travail demain.
- T'as conscience que t'as fait n'importe quoi quand même ?
- Écoute, l'important c'est que tout se termine bien…
- Oui mais tu te rends pas compte des conséquences qu'il y aurait pu avoir, Antoine ! s'emporta-t-elle.
- Donc t'es venue pour m'engueuler là ?!
- Mais non mais…
- Je te dis que tout s'est bien terminé. C'est tout ce qui compte…
- Oui… marmonna-t-elle en baissant la tête. Et avec cet évènement, je me suis rendu compte de certaines choses aussi…
- Lesquelles ?
- Notre histoire… Elle avait aucun sens…
- Ok… maugréa-t-il avec amertume en avalant une gorgée de son vin.
- Non mais, ce que je veux dire c'est que t'avais raison… On était rien l'un pour l'autre… On… Enfin je… J'ai toujours voulu être libre, ne pas m'engager, pas former de famille avec vous mais… finalement… c'était voué à l'échec. Alors que moi ce que je voulais, c'était simplement qu'on soit heureux ensemble…
- Et tu l'étais toi, heureuse ?
- Oui… J'étais heureuse en fermant les yeux sur mes problèmes… Et maintenant que je les ai ouverts… Je me rends compte que ça n'avait pas de sens… Je pouvais plus vivre dans le mensonge comme ça… Je pouvais pas t'imposer cette vie que tu voulais pas je… J'ai été égoïste… C'est pas comme ça que j'envisageais les choses… se désola-t-elle tête baissée.
- Hum… Et qu'est-ce que tu voudrais ? Pour nous je veux dire…
- J'ai besoin de terminer ce que j'ai commencé avec mon psy… Mais pour que j'y arrive, j'ai besoin de te garder à distance. Tu vois, c'est cette distance qui me motive à avancer parce que je sais que quand tout sera terminé, je vais te retrouver… Enfin, si tu veux toujours m'attendre…
- Ça va prendre combien de temps ?
- Je sais pas… balbutia-t-elle les larmes aux yeux. Je… Je sais juste que... que… que je t'aime et que tout ce que je veux, c'est être avec toi… Mais je veux que les choses se fassent bien, je veux pas refaire les mêmes erreurs qu'avant…
Ému, Antoine baissa la tête en acquiesçant doucement.
- C'est déjà une bonne chose… Parce que je me suis posé la question… Plusieurs fois même…
- La question de ?
- Bah… Je me suis souvent demandé si tu m'aimais. Enfin… J'avais l'impression que tu m'aimais pas comme moi je t'aimais et… au fond j'avais peur que ça se termine mal…
- Et c'est ce qui s'est passé… chuchota-t-elle pensive. Pourtant, j'avais l'impression que c'était évident…
- Alors que tu refusais de vivre avec moi ? Que tu refusais qu'on se pacse ou qu'on se marie… ? Tu refusais même qu'on se voit parfois… Puis je devais pédaler pour avoir des déclarations donc je… Oui, je me suis posé la question… »
Candice sentit ses yeux s'embuer, perturbée par cet aveu si frontal et profondément désolée de l'avoir blessé. La commandante ne trouva aucun mot. Alors, elle souffla avant de se jeter dans ses bras en s'excusant maladroitement.
« Pardon… T'as raison sur toute la ligne je… Enfin non, ce que je veux dire c'est que j'ai fait n'importe quoi… alors que c'est faux et que… que je t'aime vraiment…
- Hum…
- Pardon… répéta-t-elle les larmes aux yeux.
- N'empêche je suis gâté ce soir…
- De ?
- Deux je t'aime en l'espace de deux minutes… C'est beau…
- Tu vois… Je fais des efforts… déclara-t-elle fièrement en l'enserrant de plus belle.
- T'as conscience que tu t'appuies sur un tee-shirt plein de tâches là ? ironisa-t-il en souriant.
- Je m'en fous ! Je les aime bien ces tâches en fait… Et elles me manquent… souffla-t-elle avant de fermer les yeux.
- Toi aussi tu me manques… Mais comme tu l'as dit… Faut qu'on reste à distance chaton… répliqua-t-il d'une moue enfantine.
- Ça aussi ça me manque… continua-t-elle fébrile alors qu'Antoine embrassait son front.
- Je sais… acquiesça-t-il en entrelaçant ses doigts dans les siens. Mais on est plus forts que ça tous les deux et on va y arriver. J'ai confiance en nous…
- Oui… confirma-t-elle en se relevant doucement. Et justement… j'ai quelque chose à te demander…
- Dis-moi…
- Le psy m'a proposé quelque chose mais… je sais que tu vas dire non…
- De ?
- Il m'a dit qu'en plus des séances individuelles, on pouvait faire des séances collectives… On irait tous les deux pour discuter de nos problèmes et…
Peu convaincu, Antoine tiqua avant de lâcher sa main.
- Et c'est nécessaire ?
- Je lui fais confiance Antoine... S'il le propose c'est qu'il estime que oui…
- Ça me rappelle pourquoi je déteste les psys… à toujours vouloir s'immiscer un peu partout… pesta-t-il en se redressant.
- Donc c'est non ?
- Ce serait quand ?
- Vendredi… annonça-t-elle d'une moue enfantine.
- Ah oui ! D'accord… s'étonna-t-il avant de souffler bruyamment.
- Alors ?
- Oui bah si vraiment c'est nécessaire, ok… on va le faire…
- Vraiment ? s'étonna-t-elle à son tour.
- Puisque je viens de te le dire !
- Merci… lâcha-t-elle tout bas en souriant.
- Et puisque tu me demandes ça… moi aussi, j'ai quelque chose à te demander…
- Ah bon ?
- J'en ai déjà discuté avec elle et elle est d'accord… Est-ce que tu accepterais de venir boire un café avec Louise ?
- Toi, moi et ton ex ? s'offusqua-t-elle avant d'éclater de rire. Sérieusement ?
- J'en ai marre que t'aies pas confiance en moi et que t'imagines des choses à chaque fois qu'elle apparaisse… J'veux juste te prouver que c'est toi que j'aime et que je m'en fous d'elle…
- Mais un café Antoine… Ça va être hyper gênant ! Qu'est-ce qu'on va se dire ?
- J'en sais rien…
- Puis pourquoi tu voudrais la revoir pour un café déjà ? C'est bon, Dubosque est libéré, elle retourne à Béziers et on en parle plus… s'agaça-t-elle.
- Tu vois ! T'es déjà en train de t'agacer en t'imaginant qu'elle reste exprès pour moi… Alors qu'on bosse juste ensemble !
- Oui bah c'est pareil qu'Élodie hein… vous bossez juste ensemble mais… t'inquiète que si elle pouvait être à ma place, elle y serait !
- Mais elle aurait aucune chance… répondit-il en rigolant doucement.
- Bah excuse-moi mais à l'époque, t'étais moins difficile… rappela-t-elle.
- Ah ok… Donc tu me voyais comme un goujat qui profitait de son taff pour se taper ses collègues… sympa… bouda-t-il.
- Alors excuse-moi mais… Pascale ? Laurence ? Attia ?
- Non ! Alors Attia jamais !
- Vraiment ?!
- Vraiment oui ! Beaucoup trop rigide ! Puis rapport hiérarchique en plus non…
- C'est vrai que ça te dérange beaucoup ça…
- Oui bon… Y a des exceptions ça va…
- Alors admettons… Pascale ? Laurence ? Candice ?
Il rigola doucement.
- Non alors Candice ça compte pas !
- Pourquoi ? S'offusqua-t-elle.
- Bah c'est pas pareil ! Puis de toute façon, ça sert à rien de compter… Depuis que je te connais je suis sage comme une image…
- De ce qu'on sait… mais si ça se trouve en cachette…
- Non ! protesta-t-il. Que toi…
- Même au début ? Quand tu pouvais pas me voir ?
- Candice… Je t'ai dit c'est pas la peine de compter…
- Allez ! Donne-moi juste un chiffre ! Ou une fourchette… Juste une fourchette.
Amusé, Antoine se pencha vers la table basse et s'empara du petit objet métallique avant de le tendre à sa partenaire.
- Bah tu m'as dit une fourchette ! En v'la une !
- Ahahaha très drôle monsieur le commissaire…
- Alors, tu m'as toujours pas dit ? C'est oui ou c'est non pour le café ?
- Ok, alors je te donne ma réponse, uniquement si tu me donnes un chiffre.
- T'es chiante !
- Je sais ! sourit-elle fièrement. Alors combien ?
- 22.
- VINGT-DEUX ?! s'offusqua-t-elle.
- Bon t'as eu ton chiffre… Alors, oui ou non ?
- Ok… finit-elle par accepter sans engouement. Mais un petit expresso alors… Et dès que j'ai fini ma gorgée je m'en vais !
Antoine éclata de rire à sa dernière remarque.
- 22 quand même… répéta-t-elle boudeuse.
- Tu devrais être fière quand même… 22 conquêtes et t'es la seule que j'ai gardée…
- Oui mais 22… Quand même… Et je peux avoir des noms ?
- Oh la la… souffla-t-il désespéré en se levant vers la cuisine. Bon tu restes manger ?
- Change pas de sujet ! ordonna-t-elle en le rejoignant à son tour.
- Je te pose simplement la question. Tu restes ou pas ?
- Ouais… accepta-t-elle en l'enserrant à nouveau pour un câlin. »
Et la douceur inonda le reste de la soirée pendant laquelle les deux amoureux avaient investi le canapé du commissaire. Ils avaient dîné autour d'un plateau-télé et s'étaient laissés prendre par une vague de tendresse devant un téléfilm de comédie. Et aucun n'avait osé de geste entreprenant. Non pas que l'envie manquait mais, le respect demeurait. Alors la distance était de mise, même si la présence de Candice, blottie dans les bras de son partenaire venait tout de même interroger le réel respect de cette nouvelle règle. Et malheureusement pour la blonde, l'écran se teinta de noir, laissant apparaître la distribution du film. L'heure était désormais au départ. Alors elle se releva difficilement et fixa Antoine en souriant avant de l'aider à se relever à son tour. Le commissaire passa un sweat gris sur ses épaules et osa la raccompagner jusqu'à sa voiture.
« Merci… murmura Candice en se plantant devant lui.
- Ouais fin' le repas était miséreux quand même… répondit-il en rigolant.
- C'est pas grave…
- Tu fais attention sur la route ? Et tu me dis quand t'es rentrée… demanda-t-il sérieusement.
- Hum… acquiesça-t-elle avant de se blottir contre lui.
- Eh beh… ironisa-t-il en l'enserrant à son tour.
- Merci de m'accompagner à l'enterrement d'Émilie vendredi…
- C'est normal…
- Ça va être une journée riche en émotions… Entre ça le matin et notre rendez-vous l'après-midi…
- Ouais… Mais il faut y passer…
- Hum…
- Allez ! File ! Sinon tu vas attraper froid avec ta petite veste là ! ordonna-t-il en la voyant se remettre devant lui.
- Ouais ! Alors à vendredi… ?
- À vendredi… confirma-t-il tout sourire. »
Candice lui adressa un large sourire. Ému, il réajuste le col de sa veste avant de déposer un baiser sur sa joue. La blonde s'en contenta, non sans songer à un potentiel dérapage. Mais il ne fallait pas gâcher les avancées de la soirée. Alors elle se chargea de tous ces souvenirs et regagna son véhicule avant de déserter la ruelle à peine éclairée par un réverbère.
Vendredi… songea-t-elle perplexe. Alors qu'ils n'étaient que mardi soir… Candice enclencha le bouton du clignotant, espérant silencieusement que les deux jours prochains soient aussi rapides que la soirée qu'ils venaient de passer.
...
