Je n'arrive pas à croire que j'ai fait ça...
Désolée d'avoir oublié de mettre à jour les deux Sicktember, l'Inkto me fusille mes derniers neurones, je crois !
Incroyable à quel point le titre me parle, actuellement xD (Et aussi à l'époque, mais chuuut)
Bonne lecture !
M. le Héros ne s'arrêtait jamais. Lavio avait pu le constater de première main. Il était pratiquement impossible de le forcer à mettre pied à terre, le mieux était d'attendre qu'il s'évanouisse de fatigue et de le ramasser pour le traîner jusqu'à son lit ou la surface confortable la plus proche.
Il dût le faire à plusieurs reprises pendant la quête, allant même jusqu'à tenter de cacher ses affaires avec la complicité de Shiro pour l'astreindre à plus de repos, mais il était capable d'y retourner, vêtu de ses sous-vêtements seuls, ce qui le convainquit d'abandonner la partie et de se contenter de le dorloter lorsqu'il était inconscient.
Durant leurs vies à deux, il eut la surprise absolument pas surprenante d'apprendre qu'il était en fait ainsi dans la vie de tous les jours. À peine levé, il passait d'une activité à une autre, trouvant toujours quelque chose à faire, jusqu'au coucher du soleil. Et ça, même durant la période hivernale où la plupart des occupations se réduisaient à celles s'effectuant à l'intérieur des foyers, à l'abri du froid.
Lui-même était quelqu'un de nerveux, peu habitué à se reposer, sautant sur chaque opportunité par peur qu'elle ne se représente plus, mais il était aussi capable de savourer de longues heures à ne rien faire, ou si peu, à profiter de l'apaisement du soir, près de la cheminée avec son dernier ouvrage en cours ou son actuelle lecture, laissant l'engourdissement de la somnolence le gagner confortablement, jusqu'à ce qu'il ne puisse plus le repousser et aille glisser sous sa couette, tout réchauffé par le feu.
Mais pas Link.
Il n'était pas nécessairement bruyant mais capter du coin de l'œil ses déambulations lui déclenchaient des migraines comme il en avait eu peu jusque là, le faisant hésiter à lui geler les jambes à l'aide de la Baguette de Glace, au moins une petite demi-heure, le temps pour lui de finir son chapitre, merci bien.
Puis, il le découvrit amorphe à plusieurs occasions, pour diverses raisons, et son cœur lui donna l'impression de dégringoler jusqu'au sol, se rendant compte que son énervant manège était en fait une routine rassurante, comparée à cette vision de lui immobile, sa respiration était son unique mouvement, parfois.
Crise d'arthrose, maladie saisonnière ou récurrente, dépression, conclusion d'un événement de stress post-traumatique… Il avait été témoin de tellement de ces prostrations qu'il savait maintenant plus ou moins le gérer, même s'il restait des zones de flou, principalement car ils évitaient le sujet tous les deux, agissant comme si de rien n'était.
Mais là, très franchement, l'envie de l'assommer le démangeait.
— Link. Assis-toi, répéta Zelda d'un ton las.
Mais il ne l'écouta pas plus que les autres fois et continua ses tentatives de creuser une cavité dans le tapis et le parquet du bureau de la reine, les pans inférieurs de son gambison s'envolant et claquant ses cuisses, soulignant l'agressivité du geste.
Pratiquement affalée dans sa chaise, sa sœur l'observait d'un air épuisé, comme si sa couronne la pesait soudainement. En face d'elle, Lavio ne savait plus où se mettre, ayant fortement envie d'imiter l'un des jumeaux - difficile d'additionner les deux attitudes - et peut-être aussi de se cogner contre l'un des murs de pierre du château. Il doutait que ça servirait à quoi que ce soit, mais ça soulagerait peut-être.
Impa arriva sur ces entre-faits avec une nouvelle cargaison de thé chaud dont elle déposa le plateau sur le bureau encombré, avant de se glisser derrière l'héritier royal pour l'attraper par le col et son fond de culotte puis de le balancer dans le siège qu'il avait précédemment quitté, l'assommant presque au passage.
— Maintenant que nous sommes de nouveau entre adultes, on va pouvoir reprendre, soupira la reine. Merci Impa.
L'intéressée se contenta d'incliner la tête en réponse, remplissant les tasses vides, pendant que les papiers étaient frappés pour les remettre en une belle pile propre.
— Hilda m'ayant fait parvenir une procuration, je vais m'assurer de faire au mieux, je peux vous faire cette promesse.
Lavio sentit son cœur se serrer à cette déclaration, se rendant compte à quel point sa souveraine - et seule amie, à bien des égards - avait si peu occupée ses pensées ces derniers temps, tout entier à la fidélisation de sa clientèle et à découvrir les félicités de l'amour aux côtés de son fiancé.
Il n'en fallut pas plus pour qu'il pique un fard qu'il tenta de camoufler en enfouissant son visage au creux de ses mains, mais peine perdue. Non seulement ses oreilles arboraient la même teinte, mais en plus les trois autres personnes dans la pièce avaient reporté leurs attentions sur lui et avaient donc été témoin de sa prise de couleur.
Link se pencha sur lui, glissant un bras autour de ses épaules pour l'attirer vers lui, et embrassa ses cheveux. En réaction, le marchand écarta les doigts pour le regarder, curieux, puis les retira tout à fait pour mieux maltraiter un pli de sa tenue, incapable de s'en empêcher.
Zelda se racla la gorge pour attirer leur attention, mais son frère ne changea pas de position, rapprochant même leurs sièges.
— Comme je tente de l'expliquer depuis deux heures, maintenant, si vous êtes sérieux pour cette histoire de mariage, l'administratif qui en découle est assez conséquent. Heureusement, nous pouvons tout faire ensemble, sans avoir besoin d'impliquer qui que ce soit d'extérieur, vu que la reine de Lorule m'a transmis son pouvoir de décision. Il n'y aura qu'à lui envoyer les formulaires réglementaires afin qu'elle les signe à son tour, et ce sera parfait. On s'y met ?
Un soupir de fin du monde vida leurs poumons à tous les trois, renforcé à la vision des formulaires en question.
Il allait peut-être falloir troquer le thé pour du café, finalement.
— JE REFUSE FORMELLEMENT !
— Alors tu ne peux pas te marier.
Les premiers temps avaient été simples, finalement. Zelda et Lavio n'avaient aucune difficulté à saisir les paragraphes obscurs de la bureaucratie au point qu'ils découvrirent avec stupeur et retard que Link, lui, avait l'air encore plus perdu qu'un Zora en plein désert. Et, par extension, apprendre qu'il avait eu l'éducation de base, malgré sa faim de connaissance et qu'il soit polyglotte. Il pouvait déchiffrer les annonces destinées au peuple, écrire son nom et signer, mais il était incapable de saisir le vieil hyruléen comme celui utilisé pour les papiers officiels ou dans les cérémonies royales.
Si sa sœur avait eu l'air de prendre dix ans à cette nouvelle, son fiancé se contenta de lui prendre la main en souriant et de reprendre les explications au début, lisant le contenu de chaque page avec soin, prenant le temps nécessaire à sa compréhension.
Leur rythme se ralentit ainsi, mais il s'arrêta tout à fait quand ils abordèrent un sujet sensible : l'investiture de Link en tant que prince héritier.
— Réfléchis. Actuellement, tu es le seul à pouvoir hériter du trône. Je t'ai peut-être présenté comme prince, mais officiellement, ce n'est pas le cas. Nous pouvons additionner la proclamation avec la cérémonie du mariage, mais c'est la seule fleur que je peux vous faire.
— Mais je ne veux pas de ce titre ! En plus, ça n'a aucun intérêt, Lavio n'est pas de sang royal, alors pourquoi s'en soucier ?!
— Parce que j'en ai marre de me noyer sous les propositions d'alliances pendant que toi, tu as droit de te marier par amour ! explosa sa sœur.
Quand elle reprit ses esprits, elle rougit violemment, mortifiée d'avoir sortit au grand jour sa jalousie, et plus encore face à Lavio et Link qui la contemplaient avec la même expression adorable de pitié craintive, leurs mains serrées comme si elle avait l'intention de les séparer.
— Oubliez ça, je suis fatiguée, les supplia-t-elle.
Appuyant ses coudes sur le bureau, elle apposa son front contre ses mains, appréciant leur fraicheur.
— Si tu réintègres officiellement la lignée, Link, ça n'aura aucune incidence sur toi. Tu es mon frère aîné, certes, mais je suis déjà couronnée. Dans le cas éventuel où vous aurez des enfants, ils auront une place dans la succession, après les miens, comme il en est coutume. Ni plus, ni moins.
La mention de descendance les sépara alors qu'ils s'écartèrent, s'assurant de ne croiser le regard de personne, rougissant à leur tour, mais par gène, cette fois.
— Mais aussi, égoïstement, pour renforcer le pouvoir royal. Je suis une jeune reine inexpérimentée, orpheline et célibataire de surcroit. C'est la meilleure des invitations pour les intrigues et les tentatives d'assassinat en tout genre, crois-moi sur parole. Alors que si l'ombre d'un prince potentiel plane, telle une menace, sur la transmission de la couronne, ils y réfléchiront à deux fois. D'autant plus si c'est le vainqueur de Ganon.
Le rappel de ses faits d'arme couplé au raisonnement de sa jumelle eurent raison de sa réticence et il hocha enfin la tête, acceptant sa défaite.
— Parfait ! Mais ne croyez surtout pas que c'est fini, la partie ne fait que commencer !
L'air purement démoniaque de la jeune hylienne les firent frissonner de concert et envisager de fuir vers un royaume voisin pour s'y marier discrètement. Et peut-être même s'y établir ?
Les deux amoureux s'étaient allongés sur l'herbe grasse, une fois de retour chez eux, l'un sur le ventre, l'autre sur le dos, clairement épuisés par les heures passées à relever chaque virgule des documents officiels et obligatoires pour leur union.
— Donc, on a remis à jour mon titre de séjour, compta Lavio sur ses doigts, puis tu as dû ratifier plusieurs formulaires afin d'être reconnu en tant que dauphin et en prévision de ton investiture, nous avons dû rédiger un contrat de mariage, modifier celui de la fermette en prévision de la cérémonie, créer nos testaments… C'est ce qu'on appelle une journée bien chargée !
Il se tourna vers son futur mari, mais celui-ci garda le visage ostensiblement enfoncé dans la terre meuble, comme s'il espérait que celle-ci l'aspirerait une bonne fois pour toute, lui épargnant la suite des événements.
Sans pitié, le marchand lui donna un léger coup de pied dans le tibia.
— Tu peux râler autant que tu veux, c'est une chance que ta sœur prenne en charge la plus grande partie de l'organisation. Je suis bien placé pour savoir ô combien tu peux détester tout ça.
Link releva péniblement la tête, grincheux.
— J'arrive pas à croire qu'elle soit parvenue à me faire accepter de porter une couronnet le jour de mon mariage, ragea-t-il.
— Ah bon ? Je n'en ai pas douté une seconde, personnellement. Vous êtes aussi obstinés l'un que l'autre. Je parie qu'elle serait capable d'obtenir un traité de paix avec Ganon lui-même, si on lui en avait laissé la possibilité.
Il lui tourna le dos quand l'aventurier commença à lâcher des piaillements aigues à l'idée de sa sœur se retrouvant une fois de plus à proximité de son ennemi juré. Pourquoi pas s'essayer à une petite sieste ? L'air était encore doux…
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