Titre : Des raisons de douter

Fandom : Fullmetal Alchemist

Disclaimers : l'univers et les personnages ne m'appartiennent pas.

Mon petit blabla avant de commencer : Après moultes réécritures et aller-retours indécis, voici le premier vrai chapitre ! J'espère qu'il vous plaira ! Merci à Musing-and-Music pour sa fidèle review !


"Qu'est-ce que tu fais ici ?"

La journée avait été longue et difficile. Parsemée d'embuscades tendues par les moines combattants.

Rien qui ne leur inflige de dégâts majeurs : les Ishbals étaient en trop grande infériorité numérique pour cela. Mais ce harcèlement constant obligeait à être sur leurs gardes partout et tout le temps. Les chemins d'approvisionnement, les points d'eau, les zones de stockage. Tout pouvait et était pris pour cible. Il s'agissait d'un petit jeu d'usure bien rodé, en place depuis des années et sous la chaleur impitoyable du désert, les moines avaient clairement l'avantage.

Cela expliquait sans doute le ton tranchant de Mustang et son regard furieux. Du moins c'était ce qu'espérait Riza.

"Les étudiants de dernière année ont été…

- Je sais, la coupa-t-il en secouant la tête."

Passé le choc initial, l'alchimiste l'avait traînée à l'écart du camp pour pouvoir discuter sans être entendus. La jeune femme apercevait de loin des regards intrigués et certains inquiets, de la part de ses camarades. Ils devaient sûrement croire que Mustang lui passait un savon et son propre comportement ne faisaient rien pour arranger les choses.

Son corps était tendu comme arc. Ses mains moites et tremblantes. La fatigue n'était pas la seule explication. Cela faisait deux ans depuis leur dernière rencontre. Deux ans à penser à lui. Deux ans à essayer de l'oublier. Et quelques mois à s'imaginer leurs potentielles retrouvailles.

Et cette réaction n'était pas vraiment ce que Riza avait imaginé.

"Tu étais censée… ton école…

- J'y suis allée. Et ensuite j'ai décidé de partir pour m'enrôler.

- Pourquoi ?

- Pour la même raison que toi, j'imagine. Je voulais aider à faire changer les choses, améliorer la situation."

Mustang laissa éclater un rire sans joie, qui n'était en rien flatteur. Riza se sentir rougir pour une toute autre raison que la gêne.

"Crois-moi il n'y a rien que tu ne puisses améliorer ici. Depuis combien de temps es-tu déployée ? Un mois ?

- Trois semaines.

- Cela fait plus d'un an que je suis ici et rien n'a changé.

- C'est pour cette raison que les étudiants ont été déployés, rétorqua-t-elle d'une voix raide. Pour aider l'effort de guerre."

Intérieurement, elle se traita d'idiote. Visiblement s'il avait hanté ses pensées, l'inverse n'était pas vrai et elle n'était qu'une petite fille stupide d'avoir cru qu'il aurait pu être heureux de la revoir.

"Et tu y crois réellement ? Que ta présence va réellement changer quelque chose ?

- Je ne suis pas arrogante au point de croire qu'individuellement, je vais faire pencher la balancer, corrigea-t-elle d'une voix à présent furieuse. Mais en aidant, en contribuant au maximum de mes capacités, petit à petit…

- Cela ne changera rien non plus, la coupa-t-il avec agacement.

- Pour quelle raison ? Parce que je suis incompétente ? Parce que je suis une femme ?

- Quoi ?"

Mustang avait changé. Ses cheveux avaient poussé, plus que ce que la coupe militaire ne l'autorisait. Sa peau avait bruni malgré toutes les tentatives pour se protéger du soleil impitoyable. Mais surtout, son regard n'était plus le même. Ce n'était pas juste de la fatigue. Berthold avait l'habitude de pousser ses apprentis jusqu'à leurs limites, d'exiger d'eux un rythme intenable, mais les lignes dures de son visage n'étaient pas uniquement dues à l'épuisement et la médiocrité de la cantine de campagne. Il y avait un petit quelque chose qui donnait l'impression à Riza de ne plus avoir en face d'elle l'alchimiste qu'elle avait connu. Et seul son éclat de voix soudain sembla ramener des bribes de l'ancien Roy.

"Je n'ai jamais... Non ! s'exclama-t-il, désarçonné.

- Je suis major de ma promotion. La meilleure tireuse que l'instructeur ait vu depuis un petit moment. Il y a une raison pour laquelle…

- Je sais tout ça mais…

- Mais alors quoi ? demanda-t-elle avec peut-être plus d'agressivité qu'elle n'aurait dû"

Mustang soupira et se pinça l'arête du nez. Il marmonna quelques mots qu'elle ne saisit pas avant de relever les yeux vers elle.

"Ta présence ici ne changera rien à la situation, pas plus que la mienne. Même ton père n'aurait rien changé. Il avait raison, ajouta-t-il avec un petit rire.

- A quel sujet ?"

La mention de Berthold la crispa encore plus, si cela était encore possible, mais Mustang poursuivit sans remarquer.

"Le conflit dure depuis des années et il y a des raisons à cela. Les Ishbal sont forts, fiers et ils refusent de capituler. Et le choix du QG est de tenir les positions. Pas de les faire avancer. De les tenir, quand bien même nous sommes en supériorité numérique et logistique. Alors les moines pensent encore pouvoir gagner contre nous. Ils ne comprennent pas que notre tactique est de les laisser venir à nous et se briser contre nos défenses. Jusqu'à ce qu'il n'en reste plus un. Et tant pis pour les pertes de notre côté"

L'idée était si saugrenue que Riza en resta silencieuse un instant.

Le Quartier Général jouait la montre ? Attendait que le conflit en place depuis dix ans ne s'essouffle ? Cela n'avait aucun sens, mais Mustang était sûr de lui. Son regard s'était adouci. Il la scrutait à présent, guettait sa réaction et Riza ne savait pas ce qu'elle était censée dire.

Pourquoi ? Pourquoi une telle tactique ? Pourquoi ne pas les confronter à leur supériorité numérique et logistique pour leur montrer que toute lutte était inutile et mettre fin à ce conflit ? Ce Mustang avançait était à peine crédible, mais elle le connaissait. Son père avait toujours, dans une certaine mesure, été fier de lui. Son apprenti était un prodige de l'alchimie, un génie tactique. S'il affirmait tout cela alors c'était vrai. Ou au moins, il y avait des raisons d'affirmer tout cela.

"Pourquoi nous déployer alors ?"

Riza nageait toujours en pleine confusion. Elle n'était même pas encore diplômée. Elle n'était pas encore officiellement enrôlée. Et il n'y avait donc pas d'urgence, contrairement à ce que l'école de guerre affirmait.

A nouveau Roy lui adressa un sourire sans joie, teinté d'inquiétude comme s'il avait peur de l'impact de ses mots. Il était un peu tard pour cela.

"Bonne question. Pour remonter le moral des troupes ? Nous faire croire que le conflit touche à sa fin ? Je ne sais pas. N'importe qui ayant vu les moyens déployés et les ordres donnés sait que quelque chose ne va pas."

Riza resta silencieuse.

A nouveau, elle avait l'impression de sentir le sol se dérober sous ses pieds et cette fois, Mustang n'y était pour rien. L'armée l'avait déployée, l'avait envoyée au front sans aucune raison et la jeune femme avait envie de hurler.

"Pars, s'il te plaît." Sa voix désabusée l'interrompit dans ses propres pensées. "Tu es encore étudiante, tu peux encore changer d'avis sans être considérée comme déserteuse.

- Quoi ? balbultia-t-elle

- Tu n'es pas encore diplômée de l'académie. Tu peux toujours partir."

Sa voix n'était plus acerbe, ni dure. Roy ne semblait presque même plus avoir la force de parler à haute voix.

"Non, s'exclama-t-elle d'une voix choquée."

Elle ne savait pas pourquoi son idée semblait aussi déplacée. Riza détestait chaque minute, chaque seconde depuis qu'elle était arrivée, mais c'était la guerre, n'est-ce pas ? Qui à part de ce dégénéré de Kimblee était heureux de se trouver ici ?

"S'il te plaît, ne reste pas ici. Rentre, oublie tout et choisis un autre chemin, mais ne reste pas."

Ses mots n'avaient aucun sens. Elle voyait Mustang, avait les yeux plantés dans son regard inquiet et désespéré et elle l'entendait. Mais son esprit pris dans le brouillard refusait de comprendre.

"S'il te plaît. Fais-le pour moi. Ou fais-le pour ton père. "

Cette fois, Riza laissa échapper un rire nerveux. Il y avait bien longtemps qu'elle avait cessé de mener sa vie pour se conformer aux attentes de son père et voir Mustang l'utiliser comme argument était bien la dernière chose à laquelle elle s'attendait

"Tu restes, articula-t-elle avec difficulté. Tu me demandes de partir mais tu restes.

- Je…

- Pourquoi est-ce que je devrais partir et toi non ?"

Mustang secoua la tête.

"Ce n'est pas la même chose. Je suis ici depuis tellement longtemps…

- Et combien de temps est-ce qu'il t'a fallu pour comprendre ce que tu viens de me dire ?"

Pas longtemps, elle était prête à le parier.

"Il est déjà trop tard pour moi, mais pas pour toi." Il y avait comme une urgence dans sa voix. "Je suis ici depuis déjà tellement longtemps qu'il est trop tard. Mais tu viens d'arriver.

- Je suis arrivée il y a trois semaines, rappella-t-elle. Il est aussi trop tard pour moi.

- Tu peux encore…

- J'ai déjà tué."

Elle avait parlé d'une voix calme et pourtant Riza avait l'impression d'avoir crié.

"J'ai déjà tué, répéta-t-elle à voix basse, plus que je ne peux compter. Et c'est déjà bien trop."

L'alchimiste ferma les yeux.

"Qu'il s'agisse de cent ou mille personnes, est-ce que réellement à ce stade il y a encore une différence ? Il est trop tard pour moi."

Mustang ouvrit et referma la bouche plusieurs fois, sans réussir à rien dire. Dans d'autres circonstances, Riza aurait été amusée de le voir réduit à si peu de mots. Mais pas à ce moment-là.

"J'aurais tellement voulu…"

Un soupir, un regard levé en direction ciel et aucune suite. Un comportement tellement rare pour lui.

"J'aurais voulu pouvoir te le dire avant. Avant tout cela."

Avant qu'elle ne commette son premier meurtre. Avant qu'elle n'abatte son premier Ishbal de sang-froid.

Riza aussi aurait voulu.

Elle secoua la tête.

"Nous devrions rentrer au camp."

La journée avait été longue et difficile. Et leur conversation l'avait épuisée.

Riza avait l'impression d'être vide, comme si elle regardait la scène, sans en faire partie. Mustang lui parlait et elle répondait, mais ce n'était plus elle qui réfléchissait. Elle était là sans être là, incapable de se focaliser sur autre chose que le sentiment d'être une idiote. Une gamine stupide.

Stupide d'avoir cru à la propagande de l'armée. Stupide d'avoir cru que leur présence changerait quoi que ce soit au conflit. Et stupide de réagir ainsi face à Mustang.

Deux ans avaient passé. Deux ans pendant lesquels Riza avait fait de son mieux pour l'oublier. Et pourtant ces deux années auraient pu ne pas exister. Elle sentait toujours son cœur accélérer lorsqu'elle le voyait, elle avait toujours l'impression de sentir au bord d'une falaise, prise de vertige lorsqu'il lui parlait. Elle était incapable de l'oublier et c'en était ridicule. Roy avait été clair. Il n'avait pas de sentiments pour elle, n'en aurait jamais car elle n'était que la fille de son maître et rien de plus.

Elle n'était qu'une idiote, désespérément amoureuse de lui et incapable de l'oublier. Et en même temps, lui ne faisait rien pour l'aider. Il n'avait aucun droit de lui demander de quitter Ishbal. Aucun droit de la regarder d'un air aussi dévasté. Et elle était incapable de ne pas le laisser l'atteindre.


"But now there's no way to hide

Since you pushed my love aside

I'm outta my head

Hopelessly devoted to you"

J'espère que maintenant vous aussi vous avez la chanson dans la tête ;)

Plus sérieusement, mon headcanon, c'est que lorsque Roy a vu Riza débarquer à Ishbal, il l'a suppliée de s'en aller car il ne supportait pas de la voir au front. J'espère que que chapitre traduit pas trop mal l'ambiance que j'avais en tête. N'hésitez pas à me laisser une petite review :)