Pfiouuuuuu... ça fait quoi ? Quelques semaines que j'ai rien sorti ? Hein ? Trois mois ? Bon...
Okay, j'ai légèrement abusé sur l'attente pour cette sortie... Quoique, dans la fic de l'anniversaire d'Aomine j'ai dit que je sortirai ce chapitre courant octobre, alors ! Je pourrais bien vous sortir des excuses mais je pense pas que ça soit très intéressant XD Le chapitre 13 est là et c'est tout ce qui compte !
Mais bon, je conçois que le précédent date un peu, donc je suis d'accord pour vous faire un petit résumé pour pas que vous vous engagiez dans ce chapitre sans repère ;)
Résumé chap 12 : Le matin il y a une petite embrouille, Kagami fait comprendre implicitement à Aomine qu'il a fait un cauchemar assez angoissant et ce dernier ne cherche pas à le rassurer. Sous l'impulsion, Kagami décide de retourner dans sa maison rue de la Tour mais il fait une crise de panique et Aomine vient le chercher et le ramène chez eux. Kagami rejoint Kise et les autres pour les aider à la rénovation de la discothèque et Aomine les rejoint. Ils rentrent, ils tentent de cuisiner ensemble, ils se disputent rapidement sur le mutisme d'Aomine le matin mais ne parviennent pas à une conclusion. Kagami fait un cauchemar et Aomine propose qu'ils dorment ensemble.
Sur ce, bonne lecture ;D
Shadow : Problème entre nos deux fauves, ils souffrent tous les deux mais ne savent pas comment l'expliquer à l'autre... Vont-ils trouver une solution ? Je suis contente de voir que Kuroko te plaît autant, tu vas pouvoir le voir à nouveau dans ce chapitre ;) Merci pour ta review ici et sur "Envie d'un dessert" :D Je te souhaite une bonne lecture, bises ;D
Aomine
Nous fûmes réveillés par l'alarme stridente de mon réveil. Je sursautai et fronçai les sourcils d'agacement. Qui avait choisi un son aussi horrible pour tirer quelqu'un du sommeil ? Je sortis mon bras du lit avec rage et étalai ma main sur le premier objet qui venait. Heureusement, je parvins à arrêter ce bruit et je pus me détendre.
Je n'avais toujours pas la force pour ouvrir mes paupières et j'avais une puissante envie de me rendormir. Mais il ne le fallait pas, je me mis donc sur le dos en espérant que le mouvement me réveillerait.
C'est à ce moment que je sentis une présence à mes côtés. Ah, oui, Kagami était là. Il avait initialement sa tête dans mon dos mais elle se retrouva sur mon épaule quand je me tournai. Je me forçai à entrouvrir mes yeux pour apercevoir une touffe de cheveux rouges. Ma vue était brouillée, mais petit à petit, je pus affiner ses traits. Sourcils légèrement froncés, yeux gonflés, tignasse en pagaille, aucun doute, il était en train de dormir. Ses cheveux chatouillaient ma joue et je m'appuyai sur mes coudes pour me redresser. Sa tête tomba dans le processus et je l'entendis grogner.
Il avait l'air tellement bien dans son sommeil, j'étais jaloux. J'avais une forte envie de passer ma main dans ses cheveux, ça avait l'air agréable. Mais ça le réveillerait et il se fâcherait contre moi, ça n'en valait pas la peine.
Après un bâillement, je me levai enfin. Kagami poussa un nouveau grognement en sentant le lit bouger. Je tournai la tête vers lui pour savoir s'il allait se réveiller mais il ne fit que tendre le bras. Il attrapa l'oreiller sur lequel j'avais dormi et le colla contre lui, et en particulier contre son nez.
J'esquissai un petit sourire amusé. La veille aussi il avait pris mes affaires sur le canapé pour les sentir. C'était sûrement l'effet de l'alcool ou de la fatigue, il n'empêche que c'était amusant de le voir renifler mon odeur comme ça.
Je me mis sur mes pieds et une tonne de points multicolores me boucha la vue. Je tanguai un petit peu puis commençai à avancer. Je pris des habits dans mon armoire et rejoignis la salle de bain en m'étirant longuement. Je débloquai une à une toutes mes articulations et tous mes muscles. J'étais sûr que si je m'allongeais sur le sol tout de suite, j'étais capable de me rendormir.
Je m'habillai avec une lenteur affligeante. Bien qu'on ne soit pas le week-end, je m'étais couché tard hier et je le ressentais ce matin. Il fallait que je fasse attention parce que je ne voulais pas atteindre ma limite et me retrouver à dormir au boulot. Je bâillai à m'en décrocher la mâchoire et rejoignis la cuisine pour me préparer un petit déjeuner.
Les flash-backs de la préparation du dîner d'hier me revinrent en tête. Je reconnaissais ne pas être le meilleur en cuisine, mais Kagami avait tendance à exagérer. « C'est pas le bon aliment » par-ci, « c'est pas le bon aliment » par-là, « tu coupes n'importe comment »… Il était vraiment maniaque. Si j'ai réussi à m'en sortir pendant si longtemps, c'est que je me débrouille bien. Bon, j'ai peut-être foiré la plupart de mes repas et j'ai dû me rabattre sur de la nourriture toute faite… Mais je n'ai jamais rien brûlé ! Enfin, peut-être cette fois avec du poulet, mais j'étais concentré sur autre chose et j'ai pas vu le temps passé. Dans tous les cas, Kagami était bien trop perfectionniste.
Je mangeai mon petit-déjeuner assez rapidement parce que je voyais l'heure tourner à vive allure et ma lenteur matinale n'avait rien arrangé. Je mis la vaisselle dans l'évier, Kagami allait se débrouiller pour la laver. De toute manière tout ce que je fais dans une cuisine, c'est raté, comme dirait un homme aux cheveux rouge dormant dans mon lit.
Je levai les yeux aux ciels à cette réflexion et entrai dans la salle de bain pour me brosser les dents en quatrième vitesse. Je mis du déodorant puis retournai dans la pièce principale, pris un stylo, écrivis un mot à Kagami sur un post-it, mis mes chaussures, attrapai ma veste et sortis, pile à l'heure.
Yo
T'as l'air de vraiment kiffer mon odeur, t'étais encore en train de la renifler ce matin.
Sinon, pense à appeler ton avocat aujourd'hui. Je sais pas si tu as déjà regardé tes lettres mais si c'est pas le cas pense à le faire. Je sais que t'es pas pressé d'y être mais la justice ne t'attendra pas.
Bonne journée.
J'arrivai au commissariat et partis immédiatement dans les vestiaires pour me revêtir de mon uniforme. J'entrai et aperçus Susa et Imayoshi en train de discuter. Les vestiaires étaient rangés par équipe donc je les rejoignis pour m'habiller.
- Ah ben, Aomine, m'interpella Susa. On parlait de ta prise de la dernière fois.
- Ma prise ?
- T'sais l'américain drogué. Gold Jr.
Ce nom me fit imperceptiblement serrer les poings et tendre l'oreille. Je revis le visage de Kagami dans son entrée sombre la veille et mon cœur se serra. Ce connard.
- Vous disiez quoi ?
- Je vais être chargé de son interrogatoire, répondit Imayoshi.
Je mis mes boutons de chemise en relevant la tête vers lui, rassuré. Je connaissais les talents de description d'Imayoshi, j'en avais fait les frais, et je savais qu'il allait repérer chaque petit mensonge que cette crapule allait dire. Il était imbattable pour lire le visage des gens et les embobiner à sa guise.
- Il va passer un sale quart d'heure, me délectai-je.
- Aomine, presse-toi, faut pas qu'on arrive en retard, intervint Susa.
Je fronçai les sourcils et le questionnai du regard. Je mis ma ceinture et lançai un coup d'œil à l'horloge au-dessus de la tête de Susa, même si je ne savais pas très bien lire l'heure mais je n'avais pas l'impression qu'on était en retard pour commencer la journée.
- La perquisition de ce matin, t'as pas oublié quand même ?
J'arquai un sourcil pour lui faire comprendre que si, j'avais oublié. Je m'assis sur le banc derrière moi pour faire mes lacets.
- On a une perquisition de prévue ?
- Aomine, parfois je me demande comment tu fais pour être si peu organisé, s'exaspéra notre capitaine en s'en allant.
Je terminai de me chausser et me relevai.
- Allez, pas de temps à perdre. C'est rue XX, on rejoint des collègues pour essayer de trouver de la drogue chez un dealeur.
- On va pas essayer, on va en trouver. Il y aura un chien avec nous ?
- Nan, pas cette fois.
Je fis la moue : je m'entendais bien avec les animaux quand je devais travailler avec eux, parfois plus qu'avec les humains. Au moins, eux, ils ne me rabâchaient pas mes manques d'organisation ou que sais-je. Ils écoutent ce que je leur dis et ils sont bienveillants. Ça me change de certains collègues.
On arriva sur les lieux avec un peu de retard. Les autres collègues et le commissaire nous attendaient devant la porte du suspect et toquèrent dès qu'on les rejoignit. Au début, le silence nous répondit. On s'apprêtait déjà à enfoncer la porte, ça n'était pas inhabituel. C'était même plutôt surprenant de remarquer qu'une grande partie des gens prévenus d'une perquisition s'enfuyait de leur domicile en pensant que ça allait nous arrêter. Dans la loi, il était parfaitement autorisé de fouiller une maison sans l'occupant.
Mais cette fois-ci, après un moment, la porte s'ouvrit sur un homme de grande taille avec des tatouages apparents jusqu'au cou. Bien cliché de nos dealeurs de base. Je sais qu'on dit de ne pas se fier au physique mais c'était dur de ne pas faire de lien. Susa m'avait fait un brief du dossier. L'homme était suspecté d'avoir dealer de la drogue dans un bar. Évidemment, il prétendait être innocent, alors que trois personnes l'avaient dénoncé.
Il me dévisagea quand j'entrai, ma taille fit son petit effet, il n'était apparemment pas habitué à côtoyer des gens plus imposants que lui. Nous entrâmes dans la maison. À notre gauche, une porte menant à la cuisine, à notre droite la salle de bain, et en face de nous la salle de séjour. Nous commençâmes par la plus grande salle, la plus longue à chercher. Il nous suffisait d'une arme ou d'un peu de drogue pour l'envoyer en prison.
Susa vint à mes côtés pour fouiller le canapé tandis que les autres inspectaient la table en lui posant des questions.
- Ne te fie pas à sa tête détendue, me prévint-il. Il a déjà eu une perquisition il y a quelques années mais ça n'a pas été probant, avec de l'expérience il est plus serein.
- T'en fais pas, les gens sereins pendant une fouille ce sont souvent les gens qui ont quelque chose à cacher. Tout le monde est inquiet quand il voit cinq policiers en train de retourner sa baraque. Mais ça veut dire qu'il l'a bien caché.
- T'as une idée en tête ?
Je reposai les coussins en soupirant. Je lançai un regard circulaire à la maison mais rien ne retint mon attention.
- Rien du tout.
Il fallait tout regarder, chaque recoin, chaque fissure, chaque planche du parquet qui ressortait ou au contraire qui paraissait trop enfoncé. Tout devait être passé au peigne fin. Les réponses du suspect ne nous aidaient pas et nous n'étions pas plus avancés.
Au bout d'une trentaine de minutes, nous commencions déjà à tirer une croix sur sa condamnation. Nous ne trouvions rien et nous n'avions même une piste. Nous continuâmes à chercher pour la forme mais on savait que la motivation n'était plus là. J'étais tout seul dans la cuisine, un collègue dans la salle de bain et les autres toujours dans la salle de séjour.
En regardant en dessous d'un paquet de mouchoirs, je donnai malencontreusement un coup de coude dans un verre d'eau posé à mes côtés.
- Merde ! jurai-je entre mes dents
Je le redressai en vitesse et vérifiai que personne n'avait entendu. Je pris une éponge pour essuyer l'eau sur la table, et actionnai la vis du lavabo pour faire sortir l'eau du robinet. Mais la vis ne s'ouvrit pas normalement et à la place elle s'enleva. Mon premier réflexe fut de croire que je l'avais cassé et j'allais la reposer comme si rien ne s'était passé. Mais je me rendis soudainement compte qu'un sachet blanc s'y trouvait. Je pris le sachet pour vérifier le contenu et sans grande surprise j'y reconnus de la drogue. Jackpot. C'est la première fois que je pouvais remercier ma maladresse.
Je retournai dans la salle de séjour où mes collègues s'activaient tandis que le suspect les regardait. Je pris les menottes attachées à ma ceinture, et sous le regard choqué du trafiquant, je les lui passais aux poignets.
- Monsieur, au nom de la loi je vous arrête pour possession de drogue, récitai-je. Vous avez le droit de garder le silence. Si vous renoncez à ce droit, tout ce que vous direz pourra être et sera utilisé contre vous devant une cour de justice.
Je le fis tourner vers le couloir pour le faire sortir. Le collègue dans la salle de bain ainsi que les autres se redressèrent à cette information.
- Vous n'avez pas le droit ! Je n'ai pas de drogue chez moi ! se débattit le hors-la-loi.
- Ah oui, et c'est de la farine qui était dans la vis de votre évier ? révélai-je en mettant le sachet devant son nez.
Il se tendit et ne prononça plus un mot. Je l'embarquai dans la voiture, suivis par Susa et les autres. Ils prirent quelques photos et le commissaire avec nous nota quelque chose sur son bloc-notes. Certains me félicitèrent mais je ne leur prêtai que peu d'attention. J'avais juste renversé un verre, rien de fantastique. Et je serai satisfait que quand il sera derrière les barreaux. Ce n'était pas de la modestie, juste de l'habitude.
Nous prîmes le chemin du retour en silence. J'étais celui qui avait trouvé le sachet donc j'allais devoir faire le compte-rendu. Je n'étais pas réjoui et je me demandai si je devais raconter que j'avais activé l'eau pour humidifier une éponge ou si je devais prétendre l'avoir fait exprès. Au fond, l'important n'était pas la façon mais le résultat, donc autant ne pas passer pour un con et dire que grâce à mon sixième sens, j'avais compris que la drogue était là.
Je commençai par prendre un café et fumai une clope, puis je me mis à la rédaction. Un domaine où j'étais bien loin d'exceller, heureusement nous avions des correcteurs orthographiques à notre disposition. Je ne comptai pas le nombre de fautes qu'ils me trouvaient, mais même comme ça mes tournures de phrases étaient parfois tellement fausses que le correcteur ne savait même pas quoi faire. Dans ce cas-là, Imayoshi venait m'aider avec son sourire amusé. Et sous le regard exaspéré de Wakamatsu parce que je n'arrivais pas à « faire une tâche aussi facile que celle-là ». Nous avions déjà des disputes virulentes à ce sujet. J'étais bien conscient de mes lacunes mais mes absences de cours pendant ma jeunesse en étaient la raison. Et je savais que je n'étais pas celui à blâmer pour ça. Mais plutôt mon géniteur…
… J'inspirai un grand coup et relâchai doucement. Il ne fallait pas s'aventurer vers cette pente glissante. La journée commençait bien, il ne fallait pas tout gâcher.
Je fus embarqué dans une nouvelle intervention et ainsi de suite jusqu'à la pause de midi. Je partis au magasin du coin pour me prendre de quoi combler mon appétit. Je pris un sandwich bien garni, une bouteille d'eau pétillante, et une salade à emporter avec des œufs brouillés. Je m'installai sur un banc non loin de là pour manger mon repas et j'eus à peine le temps de mettre mes baguettes dans la bouche qu'une voix m'interpella.
- Aomine-kun ?
Mon cœur s'arrêta dès que mes yeux se posèrent sur le corps chétif à côté de moi. Tetsu m'observait de ses yeux bleus impassibles qui semblaient me détailler. Je manquai de m'étouffer et avalai prestement ma bouchée.
- Depuis quand tu es là ?!
- J'étais ici avant toi.
J'hallucinai, il ne cessait de me surprendre. À chaque fois je frôlai la crise cardiaque, c'est quand même fou d'avoir aussi peu de présence. Je repris contenance, me rassis correctement et pris une nouvelle bouchée de mon repas.
- Qu'est-ce que tu fais ici ? C'est pas ton quartier…
- Je ne suis pas chez moi en ce moment, je passe quelques jours chez ma petite-amie.
- Oh, une petite-amie ? Félicitations.
- Merci. Ça me fait penser… J'ai cru que ton colocataire et toi étiez en couple la dernière fois, désolé pour ça.
- Mon colocataire ? Kagami ?
En couple ? C'est vrai que quand on prend du recul et qu'on voit deux hommes avec de l'attirance pour les mecs qui vivent ensemble, et qui de surcroit dorment ensemble… ça peut faire penser à un couple. Apparemment, Tetsu n'avait pas de mal à imaginer deux hommes avoir une relation, donc je devinais déjà qu'il n'était pas homophobe, l'inverse m'aurait étonné.
- Oui, je crois que c'est ça. Il a les cheveux rouges et la même carrure que toi.
- Oui, oui, c'est bien lui alors. Je savais pas que tu l'avais rencontré, il ne m'en a pas parlé.
- On s'est vu en coup de vent, au konbini comme avec toi. Je lui ai raconté que tu avais sauvé mon père et que j'étais venu te remercier, parce qu'il ne savait pas d'où nous nous connaissions, j'espère que ça ne te dérange pas.
- Pas du tout. Au contraire, ça me met en valeur, ris-je.
- Alors tout va bien, sourit-il.
Poli et gentil, il changeait de mes fréquentations habituelles. Mais ce n'était pas plus mal, c'était même bien. Je n'attire pas vraiment ce genre de personne normalement mais avec Tetsu c'est simple, je n'ai pas besoin de moment d'adaptation, je lui parle comme si on s'était toujours connu. Cela dit, je ne fais jamais vraiment attention à ce que je dis et je n'en ai pas vraiment quelque chose à faire que l'on m'apprécie ou non. Mais Tetsu ne s'en formalisait pas et ça me plaisait.
Je mangeai en silence tandis que Kuroko sirotait une boisson. Je n'avais même pas remarqué qu'il en avait une. Je lançai un coup d'œil pour voir ce que c'était, et le logo d'un endroit que je connaissais très bien m'apparut :
- Ça vient du Maji Burger ? demandai-je avec un mouvement du menton vers le gobelet.
- Oui, j'adore leur milkshake à la vanille, répondit-il en reprenant une gorgée.
Il me faisait rire à regarder dans le vide en sirotant son milkshake dans un parc.
- J'aime bien ce fast-food aussi, mais je suis plus soda que milkshake.
- Vraiment ? Peut-être qu'on se croisera là-bas un jour alors.
- Tu me croiseras peut-être là-bas un jour, moi je te remarque jamais.
- C'est vrai, je viendrai te saluer pour que tu me remarques alors. Peut-être qu'il y aura Kagami-kun avec toi.
- Peut-être, il aime bien le Maji aussi si je me souviens bien.
- Ça serait bien, nous pourrons manger et discuter ensemble. Tu as l'air d'être une personne pleine d'histoire.
Ah… S'il savait. Des histoires ce n'est ce qui manque, mais elles ne sont pas au goût de tout le monde. Et c'est pas vraiment quelque chose qu'on échange autour de burgers.
- On verra, mes histoires ne plaisent pas à tout le monde, hésitai-je en me grattant l'arrière de la tête.
- Je vois, tu n'es pas obligé d'en parler, tu le feras quand tu le voudras. Je raconterai les miennes en attendant, proposa-t-il avec un doux sourire.
Gentil, poli, et arrangeant. Ce type sorti de nulle part était-il un ange tombé du ciel ? Il en avait tout l'air. Heureusement que j'avais sauvé son père ce jour-là ou nous ne nous serions peut-être jamais rencontrés. Je soupirai avec gratitude, je pensais que j'allais rendre cette discussion gênante avec mon refus mais Tetsu avait arrangé le cap.
- D'acc, on fera ça alors.
Il me sourit doucement et reprit sa paille entre ses lèvres. Je terminai ma salade en vitesse, mon sandwich me faisait beaucoup plus de l'œil. Quelques instants plus tard, j'entendis le raclement de la paille contre le peu de milkshake restant, Tetsu avait terminé de boire. Il jeta le gobelet dans la poubelle à nos côtés et se leva, je le suivais des yeux sans savoir quoi dire.
- Je vais devoir y retourner, merci pour ce moment, Aomine-kun.
- Tu vas où ?
- Je vais retourner chez ma petite-amie.
- Elle habite où ? demandai-je.
Je me rendis compte que cette question était peut-être un peu déplacée et je me repris :
- Je veux dire… Je peux faire un bout de chemin avec toi, si ça te va ?
- Bien sûr. Elle habite dans le coin, ça ne devrait pas être trop long. Sinon tu peux me laisser sur le chemin.
- Oh, t'inquiètes pas, mes collègues sont habitués à ce que je revienne en retard.
Je me levai et suivis Kuroko en dehors du parc en croquant dans le pain.
- Ce n'est pas professionnel, remarqua-t-il.
Je fus surpris par l'honnêteté de ses paroles. Normalement on ne dit pas ça à quelqu'un qu'on ne connait pas bien, surtout avec cette intonation de reproche. Mais il l'avait dit sans sourciller. Je ne m'en formalisai pas et au contraire je fus heureux de voir que Kuroko était quelqu'un d'honnête. Ça nous faisait un point en commun.
- C'est vrai.
Je le suivis dans une rue commerçante toujours en mâchonnant mon en-cas. J'avais vraiment l'impression de pouvoir le perdre dès que je le lâchai du regard. Je ne le sentais pas du tout à mes côtés, c'était étrange.
- Quel âge as-tu ? me demanda-t-il.
- Devine, répondis-je comme d'habitude.
Et pour le coup j'étais vraiment intrigué de l'âge qu'il allait me donner. Il était très observateur et j'avais l'impression qu'il me comprenait mieux que la plupart des personnes.
- Vingt-quatre ans ? Quelque chose comme ça ?
Qu'est-ce que j'avais dit.
- Ouah ! Pile-poil ! C'est ça, vingt-quatre ans, comment t'as deviné ?
- Je ne sais pas, je ne te voyais pas être beaucoup plus vieux que moi.
- Eh ben, dis donc, on s'est trompé sur mon âge toute ma vie en me donnant presque dix ans de plus et là en deux semaines t'es déjà la deuxième personne à avoir juste. Kagami étant le premier. Comment t'as fait ?
- Je trouvais juste que physiquement tu paraissais plus vieux et mentalement plus jeune donc j'ai fait un entre-deux. Comment Kagami-kun a deviné ?
- J'sais pas, il a dit, comme toi, que je devais pas être beaucoup plus vieux que lui. J'sais pas trop ce qui vous fait penser ça mais en tout cas c'est correct. T'as quel âge toi ?
- Bientôt vingt-quatre aussi, je vais les avoir le 31 janvier.
- Oh, il y a encore un petit bout de temps alors. C'est bien, profite de ta jeunesse, le conseillai-je en bombant le torse.
- Nous sommes de la même année, je ne suis pas beaucoup plus jeune que toi.
- Je suis né le 31 août, ça fait…
Je comptai avec mes doigts pour connaître le résultat, Kuroko m'observa et écouta l'énumération des mois.
- Cinq mois ! On a cinq mois de différence.
- En effet, mais tu as oublié de compter décembre.
- Hein ? Six mois alors.
- Non, parce que tu as compté août.
- Et on le compte pas ?
- Non, parce que le premier mois est septembre.
- Ouah, l'embrouille de fou… J'comprends rien…
- Tu es juste pas très malin, répondit-il avec un doux sourire moqueur.
- Comment ça ? demandai-je, piqué au vif.
Je me reculai d'un pas, outré mais amusé. Il soupira du nez dans un rire délicat et je fis un peu la moue pour la forme avant de le rejoindre dans son sourire. Je savais qu'il ne me jugeait pas réellement et qu'il ne me rabaissait pas seulement à quelqu'un con. En tout cas j'espérai.
On tourna dans une ruelle résidentielle et je compris que Tetsu habitait là. Il sortit ses clés devant une petite maison avec des volets, un toit, et une boîte aux lettres bleus. Je remarquai par ailleurs que la peinture de la boîte aux lettres et de la porte commençait un peu à craqueler et que ça n'était plus tout jeune. Il y avait également une petite cour. Il n'y avait pas de plante à part un petit arbuste dans un coin, mais la terre paraissait retournée donc peut-être qu'ils avaient prévu de faire pousser quelque chose ici.
- C'est ici qu'elle habite, précisa Tetsu au cas où l'on s'était arrêté devant la maison d'un inconnu.
- D'acc, je te laisse alors, à la revoyure.
- Oui, répondit-il avec un signe de la main.
Je n'étais pas très loin du commissariat mais je me pressais tout de même. J'avais terminé mon sandwich donc je pris mon téléphone pour envoyer un message à Kagami, en espérant qu'il n'ait pas décidé de s'enfuir chez son ancienne maison encore une fois.
[Aomine 12 :36]
Yo. J'ai appris que tu avais fait la rencontre de Tetsu la dernière fois, il te passe le bonjour. Sinon, ça va ? Bien mangé ? Bien dormi ? Mon oreiller sent bon à ce que je vois. Je devrais peut-être faire un parfum à son effigie, ça pourrait faire un petit business. Et ta jambe ?
[Kagami 12 :38]
C'est quoi ce harcèlement ? J'ai jamais reçu autant de questions d'un coup.
Je secouai la tête face à son exagération. Quelques petites interrogations et son cerveau surchauffait. Il répondit tout de même :
C'est qui Tetsu ?
Je vais bien et toi ?
Je suis en train de manger des sushis, c'est bon.
J'aurais mieux dormi sans ton réveil de malheur.
C'est juste parce que j'étais ensommeillé que j'ai senti ton oreiller, ne va pas t'imaginer que tu sens bon.
Ma jambe va bien.
[Aomine 12 :39]
Kuroko Tetsuya, le gars aux cheveux bleus sans présence.
Je suis crevé.
C'est possible de manger des jiaozi ce soir ?
C'est toi qui m'as demandé de dormir avec toi donc ne critique pas mon réveil.
Ensommeillé ou pas, tu avais l'air de bien aimer renifler mon odeur et je te rappelle que tu l'avais déjà fait quand on est rentré du bar hier.
[Kagami 12 :40]
Ahhhhh, lui ! Passe-lui le bonjour de ma part.
Les jiaozi c'est normalement possible, il y a pas besoin de trop d'ingrédients.
Je critique ton réveil si je le veux.
Ensommeillé et bourré, deux moments où j'ai pas toute ma tête, tes preuves sont douteuses.
[Aomine 12 :40]
Tetsu est déjà parti.
Deux moments où l'on est vulnérable et plus honnête, tu veux dire ? Je sens bon, avoue-le. (Et tu avoues que tu étais bourré hier)
[Kagami 12 :41]
Tu sens pas bon. Et j'étais juste un tout petit peu bourré, pas la peine d'en faire tout un plat.
Je secouai la tête avec un petit sourire d'amusement devant sa mauvaise foi. Je rangeai mon téléphone dans ma poche, arrivé à destination. Je retournai dans mon bureau et repris la rédaction d'une intervention.
Une fois fini, je sortis une clope et profitai qu'il n'y ait personne dans la salle pour fumer. Je devais sûrement regarder mes mails pour ne pas prendre de retard mais j'étais bien trop fatigué pour le faire. À la place je m'adossai à mon siège et mis mes mains derrière la tête.
C'est ce moment-là que choisit Wakamatsu pour entrer. Toujours le pire timing.
- Vu que t'es en train de glander, viens avec moi à la gare, m'invita-t-il.
- J'ai connu des demandes de rencards beaucoup plus mignonnes que ça, répondis-je sarcastiquement.
- C'est déjà un miracle que tu en aies connu. Ramène ta fraise, on est pressé !
- Oui, c'est bon, j'arrive…
Je me relevai avec ennui et tirai une taffe. Je jetai ma cigarette avant d'entrer dans la voiture de police. Wakamatsu démarra en trombe et une fois dans le centre, il me demanda d'allumer les gyrophares.
- Tu vas m'expliquer ce qu'il se passe ou c'est vraiment un rendez-vous surprise ? demandai-je au bout d'un moment.
- On a repéré un pickpocket dans le métro d'Iidabashi. C'est l'heure de pointe donc il n'y a pas mal de personnes. Ça va être chaud de le repérer, on doit rester vigilant.
- On l'a vu sur les caméras de surveillance en train de voler ? demandai-je pour vérifier que ça ne soit pas juste un suspect mais bien un délinquant.
- Ouais, une femme dans un métro, il a pris son portefeuille. Il a une grosse écharpe qui descend bas et ça lui permet de camoufler ses gestes. Il a un chapeau et un pantalon noir avec une chemise blanche et un manteau gris.
- Il se fond parfaitement dans la masse, en gros.
- C'est ça. Il y a des policiers habillés en civil à l'entrée, pour pas qu'il puisse s'échapper, mais le mieux ça serait qu'on l'attrape avant qu'il ne prenne un autre métro.
- Logique.
On s'approcha du lieu et nous retirâmes les gyrophares pour pas nous faire remarquer. Nous sortîmes du véhicule et pénétrâmes dans la bouche du métro. Les gens s'écartaient sur notre passage avec une certaine inquiétude et un peu d'admiration. En même temps, deux policiers de plus de 1,90 m, on ne voyait pas ça tous les jours.
Wakamatsu prévint qu'on était sur place à l'aide du talkie-walkie. On lui répondit que le voleur s'apprêtait à changer de quai. J'écoutai attentivement les informations de la voix grésillée. Le délinquant déambulait dans les couloirs et les personnes de l'autre côté du talkie-walkie avaient de plus en plus de mal à le repérer. Puis, enfin, une information précise de son lieu nous parvint.
Dès que l'indication parvint à nos oreilles, nous sprintâmes le plus rapidement possible vers lui. Wakamatsu était plus explosif et il prit l'avant de la course, mais j'étais quand même plus rapide et je lui repassai devant quelques secondes plus tard. Notre course ne valait pas grand-chose, il fallait juste que l'un d'entre nous le chope. Mais quoi qu'on fasse, il fallait être meilleur que l'autre.
Dans ma course effrénée, je bousculai de nombreuses personnes sans m'excuser, tant pis pour l'attitude japonaise, ils allaient me remercier quand je leur rendrai leur argent. Je fis rapidement face à un escalator. Comprenant qu'il était aussi lent qu'une tortue en fin de vie et aussi bondé que les autoroutes pendant les vacances scolaires, je choisis de descendre sur la rampe de côté. Ma glissade fit son effet et tout le monde me regardait avec des yeux choqués ou outrés. Je ne m'en préoccupai pas, le voleur était dans les parages et il fallait que je sois vigilant. Je choisis de partir à droite après l'escalator, poussé par une force inconnue que j'appelais mon sixième sens. Je ralentis ma course quand j'arrivai dans une grande allée non blindée. Je laissai traîner mon regard sur les voyageurs et, soudainement, je vis un homme avec une veste grise et un chapeau noir.
Il se tourna discrètement et nos yeux se croisèrent. Il suffit d'un contact visuel d'une demi-seconde pour qu'il prenne ses jambes à son coup. Je fis un dernier sprint et, après une dizaine de personnes bousculées, l'homme se retrouva plaqué au sol, menottes aux mains. J'informai Wakamatsu de ma capture car je ne le voyais pas me rejoindre. Il me répondit qu'il avait attrapé quelqu'un d'autre un peu plus loin et qu'on pouvait se rejoindre devant la voiture. Je le rejoins et le vis baisser la tête de quelqu'un pour le faire rentrer dans le véhicule.
- C'est qui lui ? demandai-je en montrant l'inconnu embarqué.
- Un type qui a fait des attouchements sexuels à une fille dans le métro. On me l'a dit dans le talkie quand t'as fait ton intéressant à glisser sur la rampe des escalators.
- J'ai pas fait mon intéressant, abruti, répondis-je avec une grimace d'énervement. J'allais pas rester sans rien faire à attendre dans un truc qui avance pas.
- Eh ben moi j'ai pas fait ta technique de clown et j'ai réussi à arrêter ce gars !
- Sans mon idée on n'aurait jamais arrêté le délinquant de base, donc montre-moi plus de respect !
Le ton commençait à monter tandis qu'on entrait dans la voiture.
- C'est à toi de me montrer plus de respect, je suis ton senpai je te rappelle !
- Je te montrerai mon respect quand tu l'auras gagné ! Pour l'instant tout ce que tu sais faire c'est me crier dessus, sifflai-je en mettant ma ceinture.
- Je te crierais pas dessus si tu étais plus sérieux au travail ! Imayoshi te materne trop, heureusement que je suis là pour te secouer.
- Le pire c'est que tu crois à tes conneries.
Nous prîmes la route et restâmes silencieux dans une ambiance électrique. Ça finissait presque toujours comme ça avec lui. Nos discussions tournaient en boucle, toujours les mêmes embrouilles, les mêmes reproches et les mêmes conclusions. La partie la plus fatigante de mon métier était sans aucun doute Wakamatsu.
Je retournai dans le bureau après avoir mis le voleur en garde à vue. Je devais faire le rapport vu que j'étais celui qui l'avais attrapé et que Wakamatsu n'était même pas avec moi. Je soupirai et pris rapidement mon téléphone quand personne ne me regardait. Nous n'avions pas besoin de nos téléphones au travail parce que toutes les informations passaient par le talkie-walkie ou la radio de la salle. Son utilisation était donc interdite mais je cherchai juste à reculer le plus possible la réalisation de ma rédaction.
Et en effet, il y avait un message en réception.
[Kagami 14 :05]
Je vais travailler à la discothèque, on se retrouve là-bas ce soir ?
C'était l'une des premières fois que je recevais un message pendant mes heures de travail – Kise essayait un maximum de m'écrire pendant mes heures de pause – et bizarrement je fus presque content de voir que Kagami pensait à moi et voulait que l'on se retrouve ce soir.
Depuis quand je faisais attention à ces petites choses ? Il me prévenait juste qu'il n'allait pas être à la maison ce soir, pas la peine de s'émoustiller.
[Aomine 14 :48]
Ouais, à ce soir.
Imayoshi entra à ce moment-là et je mis mon téléphone en dessous de ma cuisse pour qu'il ne le voie pas. Je retournai à ma rédaction sans avoir réussi à faire passer le temps.
Quelques heures plus tard, je me retrouvai devant la discothèque. Comme hier, j'entendais quelques paroles dans la salle, surtout la voix énergique de Kise. Je toquai en sachant qu'ils n'allaient pas m'entendre puis entrai dans la salle. La même odeur de peinture imprégnait les murs.
- Aominecchi ! Comment ça va ? me demanda Kise en faisant de grandes enjambées pour me rejoindre.
- Ça va, journée efficace. Et toi ?
- Pareil, on a bien avancé, c'est cool.
Je lançai un regard circulaire à la salle en hochant la tête. Je vis Kagami aux côtés de Kiyoshi avec la même tenue qu'hier et un seau de peinture à la main. Je me penchai vers Kise pour lui demander :
- Je peux t'emprunter Kagami quelques secondes ? Je dois lui parler en vitesse.
- Bien sûr.
Il fit signe à Kagami de nous rejoindre et partit. Je l'invitai à me suivre un peu plus loin.
- T'as appelé ton avocat ? questionnai-je en croisant les bras.
- Ouais, je lui ai raconté et il m'a dit qu'on prendrait sûrement rendez-vous bientôt, il doit encore prendre contact avec les policiers, les juges, tout ça…
- Ton père paiera les séances ?
- J'imagine. Je ne pense pas être financièrement capable de me l'offrir, soupira-t-il en haussant les épaules.
- D'acc. Ce matin j'ai appris qu'un de mes collègues allait faire l'interrogatoire de Gold Jr. Ce gars c'est vraiment le meilleur que je connaisse pour ça, tu peux être sûr que ton ex va tout avouer.
- Je vais avoir un interrogatoire moi aussi ?
- Sûrement, tiens-toi au courant.
- Je vais faire ça.
- Allez, va travailler maintenant, je vais vous rejoindre, ponctuai-je d'un petit coup dans l'épaule.
J'entrai dans l'ancien vestiaire qui était maintenant plutôt devenu un bric-à-brac de tous les matériaux utiles pour la rénovation. Je mis ma tenue noire en vitesse et rejoignis le groupe. Kagami et Kise s'étaient réunis pour travailler et discuter ensemble, ainsi que Kiyoshi et Hayama. Takao était tout seul et je le rejoignis. On se mit à mettre de la peinture pour une seconde couche.
- Salut ! m'accueillit-il avec un grand sourire habituel et un pétillement dans les yeux moins habituel. Comment ça va ?
- Bien et toi ? Qu'est-ce qui te rend aussi heureux ?
- À ton avis ? me laissa-t-il deviner avec un regard complice.
- Midorima ?
- Touché.
Je lui souris en retour. Je ne parlais pas souvent avec Takao. En fait, les trois quarts des discussions que j'avais ici étaient avec Kise. Le blond et moi avions vraiment un lien fort, il en savait beaucoup sur moi et il était impressionné par mon parcours. Quand on a vécu une grande partie de sa vie avec quelqu'un qui nous déteste, découvrir quelqu'un qui a de l'estime pour nous fait du bien. Takao, Hayama et Kiyoshi sont tout aussi sympas mais je les connais moins bien. Même si je sais que Takao est intéressé par le docteur.
- Vous vous êtes vu aujourd'hui ?
- Ouais, quand on est allé chercher nos sœurs.
- Ta sœur va bien, d'ailleurs ? Kise m'a dit qu'elle s'était cassé le nez.
- Oui, elle va bien ! Elle n'a pas très mal et toutes ses amies s'occupent d'elle. Elle est juste triste de pas pouvoir faire piscine avec sa classe.
- Bon bah si elle va bien, c'est une bonne chose. Et Midorima, comment ça s'est passé ?
- Oh ben tu sais… Comme d'habitude, il faisait la tronche. On a parlé du boulot, il m'a dit que tu t'étais blessé dans un braquage récemment mais plus de peur que de mal, il m'a parlé de ses patients, de ses collègues, tout ça…
- Ça a l'air ennuyant, répondis-je honnêtement.
- Oui, c'est vrai, rit-il. Mais j'aime bien l'écouter. Puis il avait l'air moins énervé par ma présence que d'habitude.
- Y'a du progrès alors, souris-je.
Je connaissais bien Midorima et je savais qu'il avait une patience très limitée dans le temps, donc discuter avec Takao qui était capable de blablater pendant des heures sur un sujet, ça devait parfois lui faire un trou dans le cerveau. Mais Takao était une personne joyeuse et amusante, comme toutes les personnes qui travaillaient ici– excepté Kagami –, et ça devait amener un peu de lumière dans les journées ternes du docteur. Je ne pouvais qu'encourager Takao à continuer de lui parler, c'est le plus à même de faire sourire le vert.
Je continuai de peindre en m'éloignant du plus petit, nous n'avions pas grand-chose à nous dire et il fallait qu'on se concentre pour la deuxième couche de peinture. Je me retrouvai dans l'angle entre deux murs, et Kagami était à mes côtés.
- Ta jambe va bien ? demandai-je en m'appliquant dans mes mouvements.
- Ouais, j'ai pas trop mal. Et toi, ta blessure ne te fait toujours rien ?
Je secouai négativement la tête. Je repris un peu de peinture dans mon seau et Kagami me donna un coup dans les côtes pour attirer mon attention.
- Wall, prononça-t-il en désignant le mur.
Je regardai le mur. Puis Kagami. Puis le mur. Puis Kagami. Je clignai deux fois des yeux et fronçai les sourcils.
- Qu'est-ce que tu me baragouines, là ?
- Mur en anglais c'est wall, m'expliqua-t-il.
- Ahh… Mais préviens aussi, comment tu veux que je devine !
- C'était fait exprès, t'as vraiment une tête de con quand tu réfléchis, se moqua-t-il.
- Ta tête va vite atterrir dans le wall si tu continues de te moquer de moi, le menaçai-je.
- Try me.
Je soupirai, je ne comprenais rien et ça l'amusait. Il fallait que je m'entraine, un jour ce serai moi qui l'insulterai en anglais, on verra bien qui rigolera.
- Arrête de parler anglais et travaille.
- Travailler en anglais c'est work.
- Si tu le dis, soupirai-je.
- Oh ! Comme la musique de Rihanna « Work » ! s'exclama Kise qui nous avait rejoints.
Et pour prouver son point, il nous fit une petite démo de ses talents de chanteur et entama le refrain. Je levai les yeux au ciel et Kagami me lança un coup d'œil dubitatif, évidemment le blond ne savait pas parler anglais et il massacrait les paroles.
- Vous parlez de quoi ? s'exclama Hayama qui voyait son patron s'amuser sans nous.
- Hayamacchi, tu peux nous prêter ton enceinte comme hier, j'ai envie de mettre de la musique ! s'enjoua Kise.
J'étais fatigué d'avance, je savais déjà que Kise allait passer la soirée à chanter en yaourt sur les musiques pop américaines et il allait tous nous motiver à faire de même.
- Kise, ose me chanter dans les oreilles et je te jure que ce sera ta tête que je vais peindre.
- Ah non, hein ! Interdiction de salir mes cheveux, je me suis fait un brushing ce matin !
- Ça tient qu'à toi, conclus-je en haussant les épaules.
La chanson qu'il venait d'interpréter se fit entendre dans la salle, bien plus agréable quand c'était une pro qui la chantait. On reprit la peinture avec des tentatives de paroles du blond, mais même pour moi qui étais nul en anglais, je savais qu'il racontait n'importe quoi.
Rapidement, le refrain se fit entendre, et en glissant mon regard vers le rouge, je vis qu'il bougeait discrètement les hanches en rythme avec la musique. Il semblait le faire presque inconsciemment et ça me fit sourire. Ce grand garçon en train de s'amuser sur une chanson comme celle-ci, c'en était presque mignon.
- T'aimes ce genre de musique toi ? demandai-je.
Il se tourna vers moi et sembla se rendre compte de ses gestes. Il arrêta ses mouvements et se mit face au mur pour éviter mon regard. Mais je vis tout de même les rougeurs sur ses joues, il était définitivement mignon. Ça me fit doucement rire.
- Ça passait partout quand j'étais aux US donc à force de l'entendre, ça a commencé à me plaire, se justifia-t-il.
- Je vois, je vois, répondis-je, dubitatif. Et t'écoutes quoi habituellement ?
- Du rock.
- Hah ! J'en étais sûr !
- Ah ? Et comment t'as deviné ?
- J'sais pas… Ça se voit sur ta tête. C'est peut-être tes sourcils, ça te donne un côté rock'n'roll.
- Mais arrête avec mes sourcils à la fin ! Ils t'ont rien fait !
Il faisait référence à cette fois à l'hôpital où je m'étais moqué de sa pilosité sourcilière. J'avais l'impression que ça faisait déjà un mois que c'était arrivé, alors que ça ne faisait qu'un peu plus d'une semaine. Le temps passait beaucoup trop rapidement.
- C'est vrai ! répliquai-je. T'as pas les sourcils à écouter de la musique classique.
- En même temps, qui écoute de la musique classique de nos jours à part les vieux à la campagne ?
- Midorima.
Il se tourna vers moi, choqué. Puis il se reprit et secoua la tête :
- Nan, abuse pas.
- J'te jure que c'est vrai ! Demande à Takao si tu me crois pas !
Il reposa ses yeux grands ouverts sur moi. Apparemment c'était inimaginable pour lui que l'on écoute encore de la musique classique à cet âge. Et même si j'avais un sourire amusé sur mes lèvres, je devais avouer que j'avais réagi de la même manière quand je l'avais appris.
- En vrai, Midorima c'est un peu un vieux à la campagne, déclara-t-il en haussant les épaules.
J'explosai de rire à cet aveu. Je ne pouvais que confirmer. Je savais qu'il était un jeune homme de la ville très travailleur, mais il donnait cet aspect de je-sais-tout et tous-les-jeunes-sont-des-démons, très habituel chez les personnes âgées. Je pouvais très bien le voir à la campagne en train de s'occuper de son jardin et de ses voisins en parlant de leur état de santé inquiétant.
- Eh les gars, faut travailler, vous rigolerez chez vous ! s'interposa Kise.
- Eh, j'fais du bénévolat moi ! Un peu de respect s'il te plait ! m'exclamai-je.
- « Bénévolat » mais tu as fini mon pack de bière hier !
- Justement, je t'aide, t'aurais jamais bu toutes ces bières tout seul, je suis sûr.
- Bien sûr que si !
- N'importe quoi, Kise, tu détestes la bière ! s'interposa Hayama.
Le blond se tourna vers lui en le réprimant du regard mais le guépard n'en avait rien à faire et il fit un grand sourire dans sa direction. Kise n'était pas le genre de patron à instaurer le respect dans chaque situation, tout le groupe se retrouvait de temps en temps à le critiquer ou à se moquer de lui gentiment. Puis ils avaient tous à peu près le même âge, ils se sentaient proches instinctivement.
- Pfff, je peux même plus vous faire confiance pour me soutenir maintenant, soupira Kise.
Une nouvelle petite dispute démarra. Kagami était nouveau donc il ne prenait pas vraiment part aux débats, mais il semblait beaucoup s'amuser. Et il m'amusait aussi beaucoup : il prenait constamment tout au premier degré. Kiyoshi était comme ça aussi, mais les réactions du rouge étaient plus authentiques. J'en jouai, je sous-entendais des choses qu'il ne comprenait pas, et à chaque fois il était choqué comme si je venais de raconter la révélation du siècle. Évidemment il s'énervait quand il comprenait que je me moquais de lui, mais le voir contrarié était encore plus drôle que le voir perdu.
- Kagamicchi, je sais pas ce que je vais faire de toi…
- C'est bon, j'ai juste douté pendant quelques secondes ! s'emporta Kagami.
- Tu as cru que j'étais une femme ! exaspéra Kise.
- C'était sur le moment ! J'ai compris direct après !
- Ben j'espère bien ! Ça se voit que je suis un mec quand même ! Comment tu peux croire Aominecchi ? Ça se voit à des kilomètres quand il ment !
- Pas du tout, mentis-je en détournant les yeux.
Kagami n'était pas un fin observateur et heureusement pour moi, sinon il n'allait pas croire tous les mensonges que je racontais. Kise, lui qui avait appris à me connaître, leva les yeux au ciel. J'avais misé gros en disant que Kise était une femme et pourtant il était tombé à pieds joints dans mon mensonge. Il se moquait de moi en anglais, je me devais bien de le cuisiner un peu aussi.
- Faudrait que tu prennes des cours de théâtre, intervint Kiyoshi avec son sérieux décalé.
- Moi j'en ai pris ! s'exclama Hayama en tenant en équilibre sur un tabouret comme un enfant avec trop d'énergie.
- Est-ce qu'il y a quelque chose que tu n'as pas fait, en même temps ? exaspérai-je.
- Du surf ! J'aimerais trop essayer mais à Tokyo c'est pas possible d'en faire.
- Sérieux ?! s'enthousiasma Kagami. J'en ai fait aux US ! J'ai trop envie d'en refaire, ça fait longtemps…
C'était bizarre de l'entendre parler de l'Amérique ainsi. Habituellement on en parlait en négatif, je l'imaginais comme un pays où y étaient enfermés de mauvais souvenirs, et que c'était pour ça qu'il l'avait fui. Mais entre son père avec qui il garde des liens proches, et maintenant le surf qui a l'air de le rendre heureux, je réalise que la vision de Kagami sur son passé est bien plus nuancée que ce que je croyais. Il y avait encore des choses que je devais apprendre sur lui et, bizarrement, rester à ses côtés pour en savoir plus me plaisait. Apprendre à connaître quelqu'un, ça fait combien d'années que je n'ai plus fait ça ?
- Ah ouais ? Faudrait qu'on se prépare une sortie près de l'océan alors, tu pourras m'apprendre !
- Il faudrait que ma blessure guérisse d'abord… Puis après ce sera l'hiver, j'ai pas très envie de nager dans un océan glacé.
- C'est vrai…
Hayama fit une moue de désolation, il était excité à l'idée de cette sortie. Kagami ne fit que hausser les épaules mais ça se voyait sur sa tête qu'il était déçu aussi. Le surf était une activité qu'il aimait bien, apparemment. Kise le remarqua aussi et s'empressa de ramener de la bonne humeur dans le groupe :
- On n'a qu'à faire ça en été ! On prendra une semaine de vacances, on ira aux côtes du Japon et on profitera du soleil tous ensemble.
- Qu'est-ce qui te dit que tout le monde travaillera encore ici, en été ? demandai-je.
- J'en sais rien. Mais c'est pas grave, on peut rester amis même si on travaille pas ensemble.
- T'en sais rien, peut-être que vous serez plus potes parce que vous vous serez disputer.
- Oh, mais qu'est-ce que t'es négatif !
J'haussai les épaules en signe d'indifférence. Pourtant, la remarque me fit la sensation d'une pique dans le cœur. « Négatif », je l'entendais souvent ce mot.
- Maintenant on sait qu'on ne doit pas se disputer vu qu'il y a une semaine de vacances à gagner, positiva Takao.
- Mh, agréai-je avec mauvaise foi.
Kise remercia Takao des yeux pour ne pas avoir laissé ma mauvaise humeur plomber l'ambiance.
J'étais négatif, et entendre les gens prononcer ça comme une critique me faisait bourdonner les tympans de rage. Je n'avais pas décidé d'être négatif. Je n'avais aucune force contre cette voix qui me sifflait inlassablement tous les pires scénarios dans le creux de mon oreille. Pire qu'un acouphène. Si je le pouvais je me débarrasserais de cette malédiction, mais elle était bien accrochée à moi depuis de longues années.
- T'as des bières ? demandai-je à Kise pour changer de sujet.
Il soupira et hocha la tête.
- J'en ai racheté.
La fin de soirée se passa calmement. Tout le monde s'amusait et rigolait en oubliant petit à petit leur travail. Kagami s'était plus lâché sur l'alcool que d'habitude et il déraillait un peu. Il avait encore essayé de suivre mon rythme mais j'avais plus d'expérience. Quoiqu'en remarquant sa descente inhabituelle, j'avais calmé la mienne. J'étais quand même un peu dans le flou, mais c'était passable.
Je sortis du vestiaire avec mes habits de la journée et rejoignis le petit groupe qui papotait. Je passais le bras de Kagami sur mes épaules pour le stabiliser.
- J'pense qu'il faudrait qu'on rentre, annonçai-je.
- Ouais, il est temps de rentrer pour tout le monde, compléta Kise. On se revoit demain ?
Le blond lança un regard à Kagami en posant la question et je posai mes yeux sur lui aussi. Je tombai sur deux pupilles qui détaillaient mon visage avec une sorte d'admiration. Je fronçais les sourcils quand le rouge se tourna pour demander à Kise de répéter sa question avec une certaine gêne. Ce n'était pas la première fois que je le surprenais à me regarder comme ça. Qu'est-ce que ça signifiait ?
- Je sais pas si je viendrais demain, je vous tiendrai au courant.
- D'acco d'acc ! Allons-y.
Je voulais demander à Kise s'il avait vu la même chose que moi mais j'avais toujours Kagami accroché à mon cou, ce n'était pas du tout discret.
On rejoignit la rue et Kagami secoua sa main pour dire au revoir à tout le monde pendant que j'appelais le taxi.
- Il vient dans une dizaine de minutes.
- On peut s'asseoir en attendant ?
- Ouais…
Je cherchai aux alentours s'il y avait un banc ou un muret sur lequel on pouvait s'installer mais Kagami se détacha de moi pour s'asseoir sur le sol. Je l'y rejoins.
- T'as mal à la jambe ?
- Un peu, ouais.
- Fais gaffe, hein. Je vais pas passer ma vie à attendre que tu guérisses pour qu'on fasse notre match.
- 'Tain c'est vrai y a ça aussi ! se rappela-t-il. J'avais déjà oublié.
- Tu m'étonnes, dans un petit cerveau comme le tien, il y a pas assez de place pour que tu t'en souviennes.
- Va te faire voir. Mon cerveau fait la même taille que le tien.
- C'est méchant ça. Et je parle pas du « va te faire voir ».
Il me donna un coup de poing dans l'épaule. Avec assez de force pour qu'il me fasse bouger mais pas trop pour ne pas me blesser. Je lui répondis de la même manière. Il renchérit. Je fis pareil. Et ainsi de suite jusqu'à ce qu'on se retrouve à se donner des petits coups de nos deux mains qui arrivaient une fois sur deux dans le vide. J'esquivai un de ses coups et lui donnai une tape à l'arrière de la tête et il répondit par un coup de pied.
- Oï ! Je croyais que t'avais mal à la jambe, le sommai-je en me tenant le tibia.
- T'avais qu'à pas me frapper !
- C'est toi qui as commencé !
- C'est toi qui as continué !
- Toi aussi !
- J'aurais pas continué si tu l'avais pas fait en premier !
- T'avais qu'à pas commencer !
- Oh, tu me soules !
- Eh ben, toi aussi tiens !
On souffla de concert et le silence s'installa entre nous, seulement dérangé par le bruit des voitures qui passaient. Je sentis Kagami frissonner à mes côtés et je remarquai qu'il avait encore oublié de prendre un manteau. Il me lança un regard, sentant sûrement mes yeux sur lui.
- Compte pas sur moi pour te prêter mon pull, annonçai-je.
- Est-ce que j'ai dit que je le voulais ?
- Tu l'as pensé assez fort pour que je l'entende.
- Ouais c'est ça, et tu vas me faire croire que tu es mentaliste ou quelque chose comme ça ? Tu sais lire dans l'esprit des gens ?
- Crois-moi, c'est pas difficile de lire sur ta tête de débile.
- Tu sais ce qu'il te dit le « débile » ? s'énerva-t-il.
- Oh attends, oui, je sais ! Il me dit que je suis incroyable et super fort.
- Tu vois que t'es pas mentaliste, t'as même pas deviné un mot aussi simple que « crève ».
- En effet, je t'ai surestimé, j'avais oublié que tu ne pouvais penser qu'à un mot à la fois.
- Ta gueule.
- Oh, miracle ! Deux mots !
Sa mâchoire se serra et je sentais qu'il était à deux doigts de se lever pour m'en mettre une. Quel plaisir de le voir perdre son sang-froid comme ça. Mais bon, il fallait que je temporise, je devais l'embêter, pas lui donner envie de me jeter sur la route à chaque voiture qui passait.
- Calme-toi tigrou, je rigole, ris-je pour calmer le jeu.
- Pas moi.
- En même temps tu fais rien pour arranger ton cas, tu me sors que des répliques en deux mots. Si tu me tends des perches comme ça, c'est évident que je vais les prendre !
- Ferme ta grande bouche d'abruti et arrête de m'insulter ! C'est mieux ?!
- Très bien, souris-je. Bon toutou.
Il se releva brusquement, cette fois avec l'envie claire de mettre un coup dans mon sourire moqueur, mais pas de chance pour lui, une voiture vint s'arrêter à notre hauteur.
- Vous avez commandé un taxi ?
- Ouais, c'est nous.
Je m'échappai des griffes du tigre avec empressement. J'avais dépassé la limite d'énervement, je le sentis quand il s'assit à mes côtés, il était tendu. J'aimais bien embêter les gens, me moquer, les provoquer et connaître leurs limites, mais le but n'était pas qu'il se sente mal. Cette fois, j'allais vraiment calmer le jeu.
- Ta journée s'est bien passée ?
- Mh.
- Moi aussi. J'ai même eu une course-poursuite avec un gars dans le métro.
- Ok.
Nouvel objectif, l'obliger à former une phrase.
- Tu sais que Takao aime Midorima ?
- Je sais.
- Comment tu sais ?
- Il me l'a dit.
On progresse.
- T'en penses quoi ?
- J'comprends pas comment un gars aussi enthousiaste peut aimer un gars aussi renfermé.
Réussi ! C'était pas très dur de lui faire sortir une phrase. Il est simplet et naïf, c'est mignon.
- Les contraires s'attirent, à ce qui paraît, commentai-je.
- Et qui se ressemblent, s'assemblent.
- On est pas aider pour savoir qui on doit aimer.
- L'amour ça se choisit pas, tu tombes amoureux sans faire exprès.
Si j'avais continué à chercher à l'énerver, je lui aurais sorti « C'est vrai que tu dois t'y connaître, toi » mais ce n'était pas quelque chose à dire en ce moment. Je n'étais pas un connard à ce point.
- Kagami, coach en séduction, le présentai-je avec une voix de journaliste.
- N'importe quoi.
Le silence s'installa de nouveau, Kagami semblait plus détendu, c'était déjà ça de gagner. Du coin de l'œil, je le vis se caresser la cuisse là où il y avait sa blessure. Je sentais qu'il avait envie de bouger mais il surestimait un peu trop sa guérison, mieux valait qu'il n'aille pas travailler demain.
- Tu sais que Midorima ne sera pas content si tu reviens avec ta blessure qui s'est rouverte ?
- Je sais, je vais faire attention, grogna-t-il. Tu le connais bien le docteur Midorima ?
- Un peu, ouais. C'est la première personne que j'ai vue quand je me suis réveillé de mon coma.
- Sérieux ?!
J'haussai les sourcils et hochai la tête pour confirmer.
- Mais tu m'as dit que tu t'es réveillé à 18 ans, non ? Il était déjà médecin à 18 ans ?
- Nan, faut pas abuser. Il était en stage dans ses études. Ils avaient chargé les stagiaires de s'occuper des patients dans le coma et Midorima est tombé sur moi. Je peux te dire que ça lui a fait bizarre de voir le gars à qui il étirait les quadriceps se réveiller.
- Tu m'étonnes, ça doit faire peur ! Deux ans que t'es presque mort et là boum, tu te réveilles.
Il regarda dans le vide devant lui, essayant sûrement de s'imaginer la scène. J'étais heureux qu'il ne pose pas plus de questions que ça, je n'avais pas envie de lui parler de cette partie de ma vie.
En tout cas pas pour l'instant. Notre relation avançait vite et dans des sens que je n'avais aucunement prévu, donc je ne pouvais pas dire si mon mutisme allait se libérer ou non à un certain moment.
Le bruit de son bâillement me sortit de mes pensées. Je le rejoignis dans cette expression de la fatigue en me frottant les yeux.
- On va essayer de pas se coucher trop tard aujourd'hui, annonçai-je.
- Mouais, heureusement que j'ai déjà commencé à cuisiner les jiaozi.
- Oh, non, je vais pas avoir mon super cours de cuisine personnalisé avec Kagami-sensei, ironisai-je.
J'eus l'impression de le voir rapidement rougir. Je me demandais ce qui avait pu provoquer cette réaction dans ma phrase avant qu'il ne reprenne la parole :
- Cours de cuisine ? J'appelle plutôt ça un cours de survie, ouais.
- Arrête, je m'en suis pas si mal sorti…
- Tu rigoles ?! s'exclama-t-il, honnêtement choqué. Alors, c'est simple : je n'ai jamais vu quelqu'un être autant une merde en cuisine.
- Tu vois, c'est ça ton problème. T'exagères toujours tout !
- J'exagère rien du tout ! Ta cuisine est abominable, tu ne connais aucune règle d'hygiène et tu ne fais qu'écouter ton instinct pour le temps de cuisson de ta viande ! Sans parler que tu confonds le sel et le poivre, le persil et la menthe…
- Ok, c'est bon, j'ai compris pas la peine de tou-
- Hum, hum, messieurs ? Nous sommes arrivés, nous coupa le chauffeur.
On s'arrêta et on regarda autour de nous, reconnaissant petit à petit la rue.
- Effectivement, agréa Kagami avec un regard un peu perdu de réalisation.
Je retirai ma ceinture de sécurité et plongeai mes mains dans mes poches pour en sortir mon portefeuille, mais Kagami m'arrêta avant que j'aie eu le temps de faire quoi que ce soit.
- Attends, c'est à moi de payer !
Comme j'avais payé la veille, je ne m'opposai pas à sa décision. Il sortit sa carte bleue et utilisa le sans-contact pour donner la somme voulue. On sortit enfin de la voiture en saluant et remerciant le chauffeur.
Kagami fut pris d'un brusque frisson et se secoua avec un souffle grelotant. Je me dépêchai d'entrer car le vent commençait à me mordre aussi. On se déchaussa et on entra dans le salon. Ni une ni deux, je m'affalai sur ce canapé accueillant où trainait l'odeur de Kagami. Il commençait déjà à laisser des traces de sa présence, autre que le rangement et le ménage.
- Je te laisse faire, Monsieur le chef cuisto, prévins-je en tendant la main pour attraper la télécommande.
J'allumai la télé et tombai sur un match de NBA qui semblait dater de la veille. J'étais content de voir que Kagami était aussi passionné que moi. Je changeai malgré tout de chaine pour mettre les infos.
Derrière moi, j'entendais le bruit des ustensiles de cuisine qu'on sortait de leur tiroir. Dehors, la nuit était tombée et on entendait le sifflement du vent quand on tendait l'oreille. Devant moi, la télé diffusait un quelconque événement politique qui avait eu lieu cette après-midi.
C'était étrange. Cette scène ne m'était jamais arrivée auparavant, pourtant je ressentais une sensation de déjà-vu. J'avais l'impression d'avoir grandi toute ma vie de cette manière et je me sentais en sécurité. Je ne savais pas d'où ça venait, mais c'était loin d'être déplaisant. C'était chaleureux.
- Aomine, mets la table.
- Pff… J'dois toujours tout faire dans cette maison, me plaignis-je pour l'énerver.
Et encore une fois, Kagami plongea à pieds joints dans mon piège. Il se contraria et me cita toutes les choses qu'il faisait dans la maison que je ne faisais pas.
« Encore une fois ». Plus le temps passait plus je me rendais compte des habitudes que j'avais avec lui. Un post-it tous les matins, un message pendant la pause, une petite dispute sur un sujet aléatoire, des nouvelles sur sa jambe, apprendre des mots anglais, attendre qu'il fasse à manger, une bière pour moi, un verre d'eau avec ses médicaments pour lui, un qui se brosse les dents et l'autre qui lave la vaisselle… C'était peut-être ça qui m'apportait ce sentiment de sécurité.
J'avais aussi commencé à remarquer quelques détails sur lui alors que je n'y faisais pas plus attention que ça. Il détourne le regard quand il est gêné, il est crédule, il s'énerve vite, il n'aime pas montrer ses émotions, il dit ce qu'il pense même si ça blesse la personne en face, il aime la cuisine et la propreté, il est fan de basket… Je ne sais pas comment j'ai retenu tout ça. Peut-être que je m'intéresse à lui plus que ce que j'imagine.
Est-ce que lui aussi se sent en sécurité dans ces instants-là ? Est-ce qu'il remarque des détails à propos de moi ? Comment se sent-il par rapport à moi ?
- Aomine ? Tu vas rester longtemps planté au milieu du chemin avec des verres dans les mains ?
- Uh ?
Je me tournai vers lui et remarquai que j'avais cessé d'avancer, trop plongé dans mes réflexions.
- Ah ! Euh, non, je réfléchissais.
- Ça t'arrive de réfléchir ?
Je déposai les verres, une bonne odeur de jiaozi s'infiltrant dans mon nez, me faisant presque oublier sa petite pique.
- Ouais, les humains ont la capacité de réfléchir comparés aux insectes comme toi.
- Tu devrais pas insulter la personne qui détient ton repas.
- Sinon quoi ? demandai-je en m'installant à table tandis que Kagami apportait le plat.
- Sinon je te le balance sur le crâne.
- Ouhhh ! J'ai peuuur ! singeai-je. Et tu penses pas que je vais l'éviter ?
- Je le ferai discrètement.
- Mouais, quand t'arriveras à lancer un plat sur la tête de quelqu'un discrètement, tu me feras signe.
- Ferme-la et mange.
- Itadakimasu, ricanai-je.
Je pris mes baguettes et goûtai un jiaozi. Comme prévu, c'était délicieux. J'étais persuadé que Kagami savait tout cuisiner, et ça suffisait pour le faire monter dans mon estime malgré qu'il soit chiant. J'en pris un deuxième, puis un troisième, puis un quatrième, jusqu'à ce que Kagami me frappe la main.
- Ahête de 'ou pendhe ! se plaignit-il la bouche pleine.
- Arrête de parler la bouche pleine, je comprends rien.
Il avala d'un coup, je vis presque sa bouchée descendre le long de sa gorge.
- Arrête de tout prendre ! répéta-t-il.
- Si c'était pour me dire ça, tu pouvais aussi bien te taire.
J'ignorai son agacement et en repris un. Mais Kagami ne voulut pas se laisser faire et plongea pour que je ne lui prenne pas un nouveau jiaozi. Mais il renversa son verre dans son geste.
- Espèce de nul, m'insulta-t-il.
- Eh ! Pourquoi tu m'insultes, c'est toi qui l'as renversé !
Il leva les yeux au ciel et s'apprêta à se lever. Il appuya sa main sur sa cuisse pour se donner la force de se relever, et j'eus soudainement un flash-back de tout à l'heure dans le taxi, où il se frottait la jambe parce qu'il avait mal.
- Attends, Kagami. Je vais le faire.
Il me regarda rejoindre la cuisine pour prendre une éponge avec incrédulité. J'avais vraiment tendance à oublier qu'il était blessé, en même temps il agissait comme s'il n'avait rien. Il allait travailler, il s'occupait de la maison, de la cuisine, il faisait les courses. Il aurait très bien pu me dire qu'il allait faire un jogging et ça ne m'aurais même pas étonné.
J'avais un jour dit à Kise que je n'étais pas infirmière et que je pouvais laisser Kagami se débrouiller tout seul, mais force était de constater que c'était faux. Il fallait que je prenne mes responsabilités d'hébergeur et que je m'occupe un peu plus de lui, sinon il allait retourner à l'hôpital. Et je pouvais affirmer que l'hôpital était l'un des pires lieux où rester. Pas parce que les infirmiers sont mauvais ou que la nourriture est répugnante, c'est toute l'ambiance morose qu'il y a là-bas. Le temps passe lentement, il n'y a rien à faire, des gens crient, pleurent, les médecins sont stressés… Être enfermé entre quatre murs blancs, c'est quelque chose que je ne souhaite à personne.
Donc, en tant que colocataire de Kagami, je devais l'empêcher de retourner à l'hôpital. Puis de toute façon, Midorima allait s'énerver si je lui ramenais un Kagami blessé.
- Qu'est-ce qui t'arrive pour que tu te mettes à réfléchir autant tout d'un coup ? me questionna le rouge.
Je sortis de mes pensées et remarquai à nouveau que je m'étais arrêté au milieu du chemin pour réfléchir, toujours l'éponge en main. Je me repris et je décidai de m'expliquer avec Kagami au lieu de cogiter tout seul.
- Pourquoi tu te retrouves toujours à faire plein de choses où t'es debout alors que Midorima t'as dit de rester assis ou allongé un maximum ?
- T'es qui pour me faire la morale ? s'offusqua Kagami devant ce reproche sorti de nulle part.
- Je suis celui qui t'héberge, c'est ma responsabilité de prendre soin de toi.
- C'est pas ce que tu disais ces derniers temps. Tu m'as dit que tu t'étais senti forcé de m'accueillir et que je pouvais bien prendre soin de moi tout seul.
- Oui, eh ben j'ai changé d'avis. Je vois bien que tu sous-estimes ta blessure et je dois être là pour pas que tu fasses n'importe quoi.
- Je pense plutôt que c'est toi qui la surestimes. Au départ j'ai eu mal, c'est vrai. Mais maintenant ça va mieux, je vais me poser dès que j'ai mal.
- Le truc, c'est que t'es pas censé avoir mal.
- Oh eh, tu me soules, tu peux bien parler toi avec ta blessure à la hanche, t'y fais pas très attention non plus !
Le ton montait et je me sentais de plus en plus en colère pour une raison qui m'échappait.
- Je sais faire la différence entre blessure grave ou non !
- Moi aussi, figure-toi !
- Alors tu devrais savoir qu'un couteau enfoncé dans le corps c'est pas la même chose qu'une petite coupure.
- Oh pardon, je parle à Monsieur Aomine spécialiste en blessure grave ! énonça Kagami, ironique.
Je répondis par le silence, lui laissant le temps de réfléchir à ce qu'il venait de dire. Je pris un jiaozi, mais le plaisir de manger n'était plus là. Il ne reprit pas la parole, laissant un lourd silence entre nous. J'entendais sa mastication violente, il semblait ressasser quelque chose, je bus quelques gorgées de ma bière en attendant de connaître le fond de sa pensée.
- Je veux pas qu'on me dise ce que je dois faire, déclara-t-il finalement.
- Je suis pas ton ex.
Je reposai mes baguettes et le regardai, prêt à avoir une discussion sérieuse. Je repris la parole :
- Je ne t'oblige pas à faire quoique ce soit. Je remarque juste que tu ne fais pas ce que l'on t'a conseillé.
- Tu me critiques.
- C'est faux, répondis-je du tac au tac.
- C'est vrai.
Il plongea son regard dans le mien, sûr de ce qu'il avançait. Je voulus le contredire à nouveau mais son assurance me fit changer d'avis. Je réfléchis à des moments où je l'avais critiqué, mais à part pour me moquer de lui, rien ne m'apparut. Mais peut-être qu'il ne voyait pas mes moqueries du même œil que moi.
- Peut-être. Ça te blesse ? demandai-je de but en blanc.
- Non. Enfin… Je suis pas blessé à proprement parler, j'ai plus dix ans, je ne me vexe plus pour toutes les réflexions que l'on me fait. Mais j'ai parfois l'impression que tu es toxique pour moi.
Ça me fit l'effet d'une douche froide. J'en perdis mes mots pendant quelques secondes.
Toxique ? C'est comme ça qu'il me perçoit ? Je me dis qu'il me fait me sentir en sécurité pendant que lui me trouve toxique ? Je fronçais les sourcils d'incompréhension.
- Qu'est-ce que tu veux dire par « toxique » ?
- Eh ben… Parfois tu peux être presque attentionné et tu t'inquiètes pour moi, pour ma jambe, tu viens me récupérer chez moi parce que je panique, tu vas chercher l'éponge pour pas que j'aie à me lever. Et parfois c'est complètement l'inverse : t'es froid, distant. On se dispute pour un rien, tu me réponds pas quand je te raconte un cauchemar, tu me fais la morale… Tu souffles le chaud et le froid et parfois je me dis que t'as pas envie que je sois là. Et si c'est le cas, tu peux me dégager.
Ça me fit peur de me reconnaître parfaitement dans cette description. Je n'avais pas remarqué que j'étais à ce point en contradiction. Ça me fit surtout mal de savoir qu'il percevait ces signes comme si je le voulais dehors. Je n'en avais pas conscience. J'étais moi-même surpris de savoir que j'agissais ainsi.
Il me faisait vivre des choses qui m'étaient inconnues et je ne savais pas comment réagir, il me faisait ressentir des choses que je n'avais jamais senties de ma vie et je ne savais pas comment les interpréter. Moi aussi j'étais perdu.
- Tout d'abord, je reconnais qu'au début je voulais que tu partes. Mais j'ai changé d'avis, ça ne me dérange pas de vivre, ou même de dormir avec toi. Ensuite, si je suis autant en contradiction que tu le dis, c'est parce que je ne sais pas toujours comment agir avec toi. Parfois tu me prends de haut avec ton anglais ou ta cuisine et j'ai juste envie de te faire descendre de ton piédestal. Et parfois tu as l'air plus vulnérable et je me dis instinctivement que je dois prendre soin de toi. Parfois je suis de bonne humeur et j'ai envie de te raconter des histoires sur mon travail et parfois je suis de mauvaise humeur et je n'ai pas envie de te parler.
- Sauf que ça je peux pas le comprendre, moi. Je ne sais pas lire sur le visage des gens, et de toute façon t'as presque toujours l'air de mauvais poil. Donc si tu ne me dis pas comment tu te sens, je vais essayer d'interpréter tes actions, et ça finira toujours mal.
- Tu me demandes de te dire quand je vais bien ou pas ?
- Je te demande de t'expliquer sur tes actions. Donc oui, si ça ne va pas, tu me le dis, et j'éviterai de te raconter des cauchemars qui ne te feront pas réagir. Et si tu es de bonne humeur, que je sache si tu te moques de moi ou si tu me critiques.
- Mh... Il va falloir qu'on communique, c'est ça ?
J'avais du mal à m'imaginer en train de dire à Kagami que je n'allais pas bien, ce sont des choses que je garde normalement pour moi, pour ne pas provoquer de la pitié.
- Si on veut cohabiter, il va bien falloir qu'on fournisse des efforts. La communication est un élément clé.
- Mouais, je vais essayer.
- On ne va pas essayer, on va le faire. Et si ça ne fonctionne pas, je partirai.
Je me tus quelques secondes, pesant le pour et le contre.
- Ça marche.
Je levai mon verre pour conclure notre échange. Il vint y accoler le sien et on se jugea du regard un moment pour voir si on pouvait se faire confiance, puis on but une gorgée. Me confier. Kagami me demande vraiment de faire des choses complètement folles.
Je partis dans la salle de bain pendant que Kagami lavait la vaisselle. J'avais entrepris de m'en occuper parce que Kagami devait reposer sa jambe mais il m'avait répondu qu'il avait envie de la faire et que de toute façon je n'allais pas réussir à bien laver. Il avait raison. Je suis parti.
Je mis mon dentifrice sur ma brosse à dents et démarrai mon nettoyage buccal.
C'était bizarre d'avoir été aussi sérieux avec lui, je pensais qu'on allait passer notre vie à juste nous disputer sur des sujets plus futiles les uns que les autres. C'était rare que je sois aussi sérieux avec quelqu'un, mais ça m'avait fait du bien. J'avais l'impression que Kagami et moi étions enfin sur la même longueur d'onde.
Habituellement, je n'en avais rien à faire que les gens m'aiment ou non, mais son jugement m'avait touché. Je pense qu'il est important pour moi, d'une certaine manière. Il est différent de toutes les personnes que j'ai connues jusqu'à présent et malgré ce que j'en dis, il me plaît bien sur certains aspects. Déjà, il n'hésite pas à me dire quand je l'énerve, mais il n'essaie pas non plus de me rabaisser comme le fait Wakamatsu. Il s'impose au lieu de me craindre, il est compétitif, plutôt amusant selon le contexte, il est pas moche, et il cuisine bien.
Je me plains souvent de lui, mais sa présence ne me gêne pas. Ce n'est pas comme si nous n'avions aucun point commun et rien à nous raconter. Je pense même que nous pourrions mieux nous entendre si nous parvenions à communiquer, mais encore faut-il y arriver.
Je crachai mon dentifrice et me rinçai la bouche. Sur ces belles paroles, je rejoignis ma chambre pour me mettre en pyjama. Je partis du principe que j'allais de nouveau dormir avec Kagami. Comme tout s'est bien passé la dernière fois et que mon lit est quand même bien plus confortable que mon canapé, il n'y a pas de raison. Encore plus si ça peut lui empêcher de faire des cauchemars.
Je retournai dans le salon pour voir si Kagami s'occupait encore de la vaisselle, et en effet il était en train d'essuyer une casserole en silence. Malgré le bruit que firent mes pas sur le parquet, il ne sembla pas remarquer ma présence. Je m'installai sur le canapé face au dossier, et sans en prendre vraiment conscience, je me mis à observer les gestes de Kagami, comme hypnotisé.
Je me mis à détailler ses longs doigts faire des gestes habitués mais précis en essuyant les récipients. Puis doucement, mon regard vira sur son dos, son large dos que je devinai musclé. J'essayai d'imaginer les muscles qui pouvaient apparaître, parfois je pouvais voir quelques formes de bosses quand il tirait sur son pull. Je relevai un peu les yeux vers sa nuque où ses cheveux démarraient cette forme rebelle. Je fis plus attention à leurs couleurs, démarrant du grenat jusqu'au rouge presque cerise. Il avait, comme moi, les mèches plus foncées au bout.
Il se tourna pour ranger quelques plats et je pus observer son visage. Une mâchoire carrée, un nez droit, des yeux brûlants et des sourcils uniques sur lesquels retombaient quelques mèches de cheveux. Il avait une tête masculine qui lui correspondait bien. C'était un bel homme, il prenait soin de lui ça se voyait.
Il finit sa corvée et me remarqua enfin en se tournant. Il eut un sursaut de surprise qui m'amusa. Il fit la moue en voyant mon sourire, sa moue était mignonne.
- Tu dors sur le canapé ? me demanda-t-il en avisant ma place.
- Nan, je voulais juste vérifier que tu ne faisais pas n'importe quoi avec la vaisselle, mentis-je.
- J'espère que t'as pris des notes, la prochaine fois c'est toi qui le feras.
- Pas sûr que je sois prêt pour ça, il me faut encore quelques cours, refusai-je en entrant dans son jeu.
Je descendis du canapé et suivis Kagami dans le couloir. Il avait une démarche sûre de lui, regard droit et épaules qui roulent. Il en imposait. Ça me fit sourire.
- Tu dors avec moi, alors ? demanda-t-il en essayant de garder une façade calme mais je sentais son agitation.
- Ouais. À part si ça te dérange ?
- Pas de problème. C'est ton lit, t'as le droit de dormir dessus quand tu veux.
- C'est bon à savoir, conclus-je en me lançant sur le matelas.
Je soupirai de confort quand je m'enfonçai dans la douce couette. Kagami sortit de la pièce avec son pyjama quand je pris ma place dans le lit, probablement pour se changer dans la salle de bain. Je m'installai dans mon côté et m'enroulai dans mes draps. Je retrouvai enfin le confort de mon lit après une longue et dure journée, quel plaisir.
Je me sentais déjà un peu partir dans les vapes du sommeil quand Kagami revint dans la pièce. Il prit quelque chose sur mon bureau et vint rejoindre sa place.
- Prends pas toute la couette ! se fâcha-t-il en tirant dessus.
Je sentis mon cocon m'échapper et je le retins contre moi du mieux que je pus, contrant l'attaque de Kagami. Il s'énerva encore plus et me donna un coup sur la tête avec ce qu'il tenait dans les mains, apparemment un magazine de basket. Je ne me laissai pas faire et pris son oreiller pour lui jeter dessus. Mais il profita que j'ai un bras dans le vide pour tirer la couverture à nouveau et cette fois je dus céder. Il s'installa dans le lit avant que je puisse reprendre sa partie mais il oublia qu'il n'avait plus d'oreiller.
Je me moquai par un sourire goguenard et il répondit par un froncement de sourcils et un regard noir. Il se pencha par-dessus le lit pour récupérer son bien et j'en profitai pour prendre à nouveau la couette.
- Oh mais tu me soules ! s'écria-t-il en me donnant un coup de pied dans le tibia.
L'impact me déstabilisa mais ne me fit pas mal. Il récupéra finalement son oreiller, me l'écrasa sur la tête et reprit sa partie de la couverture. Je ris sous ses coups, très fier de l'énerver comme ça. Il se mit dos à moi, toujours remonté.
Ah, oui, la communication on avait dit… Il ne fallait pas qu'il s'endorme de mauvaise humeur. Ou au moins qu'il sache pourquoi je l'avais mis de mauvaise humeur.
- T'es mignon quand tu t'énerves, commentai-je.
Il se tendit à mes côtés et j'étais presque sûr d'avoir vu ses oreilles devenir rouges. Il grogna pour lui-même et se réinstalla confortablement.
- Arrête de raconter n'importe quoi et dors.
Je ris une dernière fois et me tournai également. Les émotions de la journée eurent raison de moi et je partis facilement retrouver les bras de Morphée, dans un sommeil profond et sans rêve.
Tadaaaa vous êtes parvenus à la fin, félicitations !
Au cas où vous vous demanderiez, il y a vraiment un moment qui existe dans le manga où Kagami croit sincèrement que Kise est une femme (d'après les dires de Kuroko qui se fiche évidemment de lui XD)
Ahhh la communication... Est-ce une lubie ou vont-ils vraiment réussir à exprimer leurs émotions l'un à l'autre ? Telle est la question ;D Réponse au prochain chapitre ! (j'ai toujours rêvé de dire ça XD)
J'espère que la lecture a été plaisante, merci de m'avoir lue, bises ;D
