Kali laissa échapper un faible gémissement, les yeux emplis de larmes, enserrant désespérément le tissu du coussin contre lequel elle cachait en partie son visage. C'était bien plus qu'elle ne pouvait en supporter... Elle avait largement atteint sa limite...

"Yuji, je t'en supplie, arrête ça …" souffla-t-elle d'une voix étranglée par un sanglot mal contenu, son cœur au bord de l'explosion.

"Non, il faut tenir encore un peu, sempai... c'est presque fini..." Lui répondit l'adolescent d'une voix rendue un peu plus roque par l'émotion, amplifiant encore son trouble.

"Mais ça fait si mal..." se plaignit l'hybride faiblement, enfouissant encore un peu plus son minois dans l'oreiller qu'elle tenait fermement, cherchant à fuir cette douleur ineffable qui la traversait de part en part, lui coupant presque le souffle.

"Je sais, Kali-sempai... je sais..." compatit, Itadori, culpabilisant malgré lui d'imposer un tel supplice à l'européenne, inhabituellement implacable. Hélas, ils ne pouvaient plus revenir en arrière à présent, ils étaient déjà allés si loin...

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"Tient, Seita, ça c'est pour toi, mange-le... c'est... une boulette de riz."

L'enfant famélique aux portes de la mort poussa lentement vers son frère désespéré un caillou, faisant naitre des larmes dans ses yeux sombres.

"Setsuko..." murmura-t-il, la voix chevrotante à cause de l'émotion.

"Je t'ai aussi fait des légumes pour aller avec..." parvint difficilement à articuler la petite fille, venant péniblement pousser une autre pierre à côté de la première, comme usant de ses dernières forces. "Vas-y, sert toi... tu vas voir, c'est bon..."

"Stesuko..." Murmura, effaré, l'intéressé avant de se ressaisir, tentant de chasser de son esprit la peur viscérale que lui inspirait en cet instant l'état de sa cadette. "Setsuko, regarde, je t'ai apporté de la pastèque... et celle-ci je l'ai acheté, je ne l'ai pas volée !"

Il vint lui découper une part du fruit, mettant tant bien que mal un petit bout entre les lèvres décharnée de sa sœur cadette. Elle le macha avec une lenteur terrible, rassurant pourtant l'adolescent qui voulait absolument y voir un espoir. Ils allaient s'en sortir...

"Je vais aller te faire de la soupe aux œufs... Je reviens tout de suite, Setsuko. Tu vas voir, tout va s'arranger !" Il se releva alors pour venir se saisir de son sac alourdit de nombreuses victuailles, lui redonnant du baume à l'âme. Ils avaient traversé tant d'épreuves... Mais, à présent, ils allaient pouvoir se reconstruire, il en était certain !

"Grand-frère..." murmura-t-elle dans un souffle, l'arrêtant un bref instant dans son mouvement, le faisant légèrement se retourner. "Merci pour tout..."

Il lui adressa un sourire confiant, avant de sortir de leur refuge délabré, le cœur emplis d'optimisme...

Quelques secondes s'écoulèrent alors que seul le petit corps immobile de l'enfant demeurait visible, étendu sur le matelas de fortune, la précieuse tranche de pastèque offerte par son frère bien aimé reposant contre son estomac bien trop longtemps affamé...

"Setsuko n'a plus jamais ouvert les yeux..." laissa finalement tomber la voix monocorde et anéantie de Seita qui se tut ensuite, comme terrassé...

Un puissant sanglot échappa instantanément à Kali alors que Yuji faisait de son mieux pour garder un minimum de contenance, se contentant de renifler contre l'ours-boxeur assoupi qu'il plaquait contre son torse.

Quelle idée il avait eu de choisir "le tombeau des lucioles" comme film à visionner cet après-midi !

Voilà plus d'une heure à présent qu'ils assistaient tous deux impuissants à la descente inéluctable aux enfers de Setsuko et Seita, deux pauvres orphelins broyés par le chaos ayant régner au Japon durant la terrible époque qu'avait été la fin de la seconde guerre mondiale...

"Elle est... morte ?" gémit faiblement l'européenne, venant essuyer d'une main les larmes coulant le long de ses joues. "C'est d'une cruauté..."

"Mais attendez..." commenta à son tour le futur exorciste, la gorge de plus en plus serrée. "Me dites pas qu'il est train de se laisser mourir de faim en tenant le corps de Setsuko entre ses bras... "

"C'est trop horrible, Yuji..." murmura sa colocataire en se tournant vers lui, venant attraper avec une profonde détresse d'une main la manche ample de son t-shirt, ses yeux bicolores brillant de mille feux à cause des larmes les emplissant.

"C'est surtout idiot, il avait qu'à la manger. Même s'il n'y avait pas grand-chose à se mettre sous la dent, ça lui aurait fait des protéines."

La bouche moqueuse de Sukuna venait de se matérialiser sur la joue de son hôte, lâchant une remarque narquoise qui offusqua immédiatement les deux jeunes gens larmoyants qui se regardèrent, outrés.

"T'es vraiment qu'un monstre, S'kuna !" cracha Itadori, venant plaquer violemment sa main contre son visage, toujours affreusement en colère contre lui après l'épisode de tripotage de l'autre nuit.

"Qu'est-ce que vous êtes sensibles, tous les deux ! Se mettre dans des états pareils pour si peu …" continua-t-il en se matérialisant ailleurs, comme si de rien n'était, devenu plus que coutumier de ce jeu entre lui et le gamin. Intérieurement, le démon millénaire soupira, perplexe par rapport à tout ce déboire de sentiments, toujours d'humeur boudeuse de son côté...

"Mais c'est tellement triste, comme histoire, Sukuna-san !" tenta de le raisonner l'européenne, pointant d'une main la télévision où continuait de se dérouler le film, inconsciente des tensions nouvelles existant entre les deux âmes habitant le corps de l'adolescent. "Ils sont morts de faim parce que personne n'était là pour les protéger, alors que ce n'étaient que des enfants... Vous ne pouvez pas êtes aussi insensible !"

"Peuh ! Non, c'est juste la loi du plus fort, crevette. Les faibles meurent, ainsi vont les choses …" s'entêta le roi démoniaque, une moue aux lèvres. Ce monde moderne marchait vraiment sur la tête, prônant à tout va l'égalité alors que ce concept n'avait été inventé que par la masse des misérables cherchant à mettre à genoux les puissants... Pourquoi vouloir à ce point bouleverser l'ordre naturelle des choses ? Les êtres inférieurs servaient les êtres leur étant supérieurs, c'était tout simplement logique.

"C'étaient juste des enfants..." répéta Kali, resserrant encore un peu plus sa prise sur son coussin, glissant son regard triste vers les images animées défilant à l'écran.

"Ne faites pas attention à lui, Kali-sempai !" intervint Yuji, plaquant sa main libre sur la matérialisation de son invité détestable, courroucé. "Il est d'une humeur massacrante depuis... oh, et puis ça n'a aucune importance !"

A ces mots Sukuna se renfrogna un peu, la contrariété rejaillissant en lui tel un brasier. Il avait toutes les raisons du monde d'être de mauvaise humeur, n'en déplaise au puceau lui servant d'hôte ! Car c'était bien à cause de lui qu'il était en colère, et de personne d'autre... Il trouverait bien une façon de se venger de lui, il se le jurait !

L'européenne, elle, fixa son vis-à-vis en reniflant doucement, perplexe. Elle sentait bien qu'il s'était passé quelque chose entre les deux êtres enchainés l'un à l'autre contre leur gré depuis la nuit où elle était arrivée au sanctuaire, deux jours plus tôt, même si elle ne savait pas exactement ce que s'était. En effet, depuis lors, l'adolescent s'était montré légèrement distant avec elle, ses traits terriblement tendus, comme s'il n'avait pas dormi du tout, l'inquiétant profondément. Il n'avait cessé de prétexter de devoir potasser ses manuscrits pour s'enfermer visiblement à contre cœur dans sa chambre, l'abandonnant à ses interrogations teintées d'angoisses. Kali, ainsi abandonnée à elle-même dans le sanctuaire, Kyu ayant également à nouveau disparu dans une de ses mystérieuses escapades, en avait profité pour dormir le plus possible pour se remettre de l'assimilation de son dernier repas, sombrant dans un sommeil sans rêve des heures durant.

Le troisième jour, émergeant enfin de son état de profond épuisement, la demoiselle avait décidé qu'il était tant de confronter l'adolescent, ne supportant pas l'idée qu'il put la fuir ainsi. Elle l'avait alors cherché et rapidement trouver dans le salon, assit devant un film qu'il venait apparemment de lancer vu que le générique défilait encore. Elle s'était alors installée dans un bond à ses côtés, lui adressant un sourire des plus doux, ne lui laissant pas le choix de sa compagnie, désireuse de briser cette détestable et incompréhensible distance s'étant dressée entre eux. Jamais elle n'aurait pu croire qu'il s'apprêtait alors à visionner le film le plus triste qu'il lui fut jamais donné de voir, les troublant tous deux profondément... Quelle idée de faire ce genre de longs métrages, franchement !

"Et vous avez complètement raison, sempai, c'est un film terrible... J'ai mal choisi... " bougonna l'adolescent en éteignant la télévision, à présent que le film était terminé, la mine abattue, extirpant son interlocutrice de ses pensées. Vraiment, il ne semblait pas être en grande forme...

"Mais non !" rétorqua avec entrain l'européenne, se rapprochant encore un peu plus du jeune homme. "Il était très beau malgré tout... très … bouleversant … Bon j'en regarderai pas des comme ça tous les jours, c'est vrai... Mais ça m'a quand même plu, et puis ça m'a fait plaisir de passer du temps avec toi ! On s'est pas beaucoup vu ces derniers jours ..."

Yuji demeura silencieux, lui glissant un regard un peu triste qui lui serra le cœur.

"Oui, c'est vrai..." finit-il par concéder, laissant tomber son attention sur l'ours qu'il tenait toujours dans ses bras, allant jouer avec l'une de ses oreilles d'une main. "Désolé, Sempai, ce n'est pas contre vous... Je dois travailler et m'entrainer et je..."

"Il y a pas que ça, Yuji, j'en suis certaine..." Le coupa Kali avant de s'approcher encore un peu plus. Avec une douceur extrême elle tendit une main vers son visage, venant la poser contre sa joue, prenant de court le lycéen qui se retourna un peu vers elle, les yeux écarquillés. "Tu as vu tes cernes ? On dirait que tu n'as pas dormi depuis des jours..."

Itadori la dévisagea sans un mot, sentant tous le poids de la fatigue accumulée ces dernières 48 heures s'abattre brusquement sur lui.

L'hybride avait vu juste, il n'avait presque pris aucun repos depuis que Sukuna avait à nouveau profité de son sommeil pour prendre le contrôle, la nuit où elle était arrivée au refuge. Rester éveillé le plus possible était la seule solution qu'il avait pour le moment trouvée pour contrer le démon, même si, il le savait parfaitement, ce n'était absolument pas une solution viable sur le long terme. Le jeune homme espérait juste tenir jusqu'au retour de Gojo qui lui aurait très certainement une stratégie bien plus élaborée afin d'empêcher le fléau de se balader librement...

"C'est par rapport à Sukuna-san ?" Reprit Kali d'une voix douce, cherchant à ne pas braquer son vis-a-vis qu'elle savait très tendu dès qu'il s'agissait du roi des fléaux skoitant son corps.

Il acquiesça lentement à contre cœur, soupirant profondément. "Oui... Il... Enfin, je ne voudrais pas vous inquiéter pour rien. Je me charge de le tenir à distance, n'ayez pas peur."

"Oh, Yuji..." murmura-t-elle, se sentant irrémédiablement coupable, elle qui était complice des escapades nocturnes de Ryomen. "Tu t'empêches de dormir, c'est ça ?"

"L'autre pervers profite des moments où je dors..."

"Pour prendre le contrôle de ton corps..." lâcha l'européenne, terminant la phrase de son interlocuteur qui la dévisagea, médusé.

"Que... Comment le savez-vous … ?" bégaya-t-il, prit de court.

Kali gigota un peu sur place, mal à l'aise, baissant son regard. Elle ne pouvait pas laisser le futur exorciste se malmener de la sorte, elle ne le supporterait pas... Il allait lui falloir se confesser, il n'y avait pas d'autres choix. Ainsi, elle pourrait peut-être le convaincre qu'elle n'était pas en danger, malgré la présence intermittente de la malédiction millénaire non loin.

"Yuji... Je... Je le savais déjà. Il est justement venu me parler l'autre soir..."

"Il a QUOI ?" s'écria brusquement Yuji qui sentit comme de la glace figer son sang dans ses veines, écrasant son cœur, faisant sursauter la demoiselle. Il vint se saisir des bras de la jeune femme, la faisant se tourner vers lui, le regard fou d'inquiétudes. "Il vous a attaqué ? Il vous a fait du mal ? Kali-sempai, dîtes moi qu'il ne vous a rien fait !"

"Tout va bien, Yuji." répondit aussitôt l'intéressée, un rien désarçonnée par la puissance inconsciente de l'étreinte des mains du lycéen sur sa peau, trahissant plus que mille mots la peur viscérale que la seule idée de cet entretien faisait naitre chez lui. "Il ne m'a rien fait du tout. Je vais parfaitement bien. Tout va bien."

Elle vint prendre avec délicatesse son visage entre ses mains, caressant avec une infinie tendresse ses pommettes de ses pouces, cherchant à l'apaiser. Itadori la scruta une poignée de secondes supplémentaires, sa respiration qui s'était emballée se calmant progressivement, la tension de ses épaules se relâchant un peu.

"Vous n'avez rien..." souffla-t-il, comme pour s'en convaincre lui-même.

"Je n'ai rien. Je vais bien..." confirma-t-elle d'une voix caressante. "Je te le jure..."

Yuji laissa alors échapper un soupire déchirant et se laisser tomber contre le dossier du canapé, comme vidé de ses forces. Il allait finir par avoir sa peau, ce foutu démon...

"Je n'en reviens pas...Il est allé vous voir..." bougonna l'adolescent, fixant le plafond de ses yeux cernés. "Qu'est-ce qu'il vous voulait, sempai ? Vous auriez dû crier, ça m'aurait surement réveillé..."

"Oh..." hésita un instant Kali, se doutant qu'il ne serait certainement pas une bonne idée de dire au chaman tout ce qui s'était passé cette nuit-là, se repassant mentalement la scène. "Discuter... Tuer son ennuie je pense... Il n' pas beaucoup d'interlocuteurs depuis son réveil."

"hum... Vous savez, il est tellement amoureux du son de sa propre voix que je ne suis pas certain qu'il en ait vraiment besoin, d'interlocuteurs..." Ironisa le lycéen, un faible sourire aux lèvres, en glissant un regard vers sa colocataire. "Mais c'est sur que c'est pas avec moi qu'il pourrait taper la discut'... Il me sort des yeux... J'ai bien essayé au tout début... J'ai vite compris qu'on était complètement incompatibles ! Comme de l'eau et de l'huile..."

L'européenne s'adossa près de lui, le couvrant d'un regard doux, l'écoutant attentivement. C'était la première fois que le porteur du fléau se confiait ainsi à elle.

"ça ne doit pas être facile tous les jours..." souffla-t-elle, compatissante, se rendant elle-même parfaitement compte à quel point les âmes des deux hommes étaient diamétralement opposées.

Yuji réfléchit quelques instants, fronçant légèrement les sourcils, songeur. "Franchement ça peut aller... Mais s'il jacassait pas à longueur de temps, se serait encore mieux ! Il arrête pas, je vous jure, sempai. Il pose des questions tout le temps, il commente tout, il a des avis sur tout... Et puis son avis, c'est le seul valable évidemment ! Y a pas d'échange possible en fait, il se fait juste des monologues interminables...C'est une vraie diva !"

La réflexion arracha un léger rire à la jeune femme, agissant comme un baume sur le cœur de l'adolescent fatigué. Il était tellement heureux de pouvoir à nouveau parler librement avec elle... L'idée que Sukuna ait pu la voir seule le contrariait toujours autant, ainsi que le fait qu'il puisse se balader comme ça la nuit, mais le fait qu'elle soit au courant venait de lui ôter un poids incommensurable des épaules. Ils allaient pouvoir trouver des solutions, ensemble, au moins le temps de l'absence de Gojo.

"Après..." temporisa un peu l'étrangère. "Se réveiller dans un monde complètement inconnu et totalement différent du sien doit être très... déstabilisant, il faut le reconnaitre. Mille ans, c'est pas rien !"

"Mouarf..." lâcha avec dédain le lycéen, haussant les épaules. "Il ne mérite pas votre empathie, Kali-sempai. C'est le mal incarné, ce mec. Il n'y a rien de bon en lui..."

"Hum... Le mal incarné, hein..." L'hybride se remémora les discussions qu'elle avait eu jusqu'à présent avec le roi des fléaux, la plongeant dans une profonde réflexion. Au fond, elle connaissait si peu Sukuna... Elle ne connaissait pas vraiment son passé et très peu son histoire. Tout ce qu'elle savait de lui se résumait surtout à ce qu'on lui avait raconté. Et, en mille ans, dieu seul savait à quel point des faits pouvaient être manipulés ou déformés. Pas qu'elle crut un seul instant qu'il était un enfant de cœur, sa seule aura écrasante témoignait largement contre lui, mais la demoiselle se demandait malgré tout s'il n'était plus complexe que les gens voulaient bien le faire croire...

"Vous devriez peut-être dormir ailleurs qu'au sanctuaire, sempai..." finit par murmurer Yuji du bout des lèvres, jouant avec son ours assoupis entre ses larges mains pour se donner contenance.

"Hein ?" L'hybride se redressa dans l'instant, comme si elle s'était pris une décharge électrique, dévisageant avec incompréhension Itadori. "Dormir... ailleurs ?"

Yuji acquiesça, une ombre ternissant l'éclat noisette de ses yeux. "Le temps que Gojo-sensei revienne au moins. Se serait plus sûr... Je ne pourrais pas m'empêcher de dormir infiniment. Et rien n'empêchera S'kuna prendre le contrôle et de se venir vous voir. J'ai bien pensé à vous demander de m'attacher au lit mais il est balèse, il trouvera certainement un moyen de se libérer..."

"Hors de question." Répliqua l'intéressée, croisant ses bras sous sa poitrine. "Je reste."

"Mais sempai ! C'est pour votre sécurité !" s'alarma l'adolescent, se redressant à son tour pour lui faire face.

Elle secoua la tête négativement, braquée comme une mule. "Non. Je viens à peine de te retrouver, j'irai nulle part. Ce n'est pas grave si Sukuna-san vient me voir. Je ne suis pas sans défense non plus, Yuji..."

"Kali-sempai, vous ne vous rendez pas compte de la dangerosité de ce mec..." maugréa le futur exorciste, sentant qu'il allait avoir bien du mal à la convaincre.

"Si, détrompe-toi, Yuji... Mais je ne vais pas le fuir pour autant. En plus, c'est plus sûr pour moi de rester ici pour le moment. Dehors, il y a des gens qui en ont visiblement après moi. Ils ne savaient apparemment pas à quoi je ressemble ni mon identité précise, mais ils se rapprochent, c'est certain. Leur piège de l'enchère le prouve bien..."

"Oh... C'est vrai qu'il y a ça aussi..." soupira le lycéen, baissant les épaules. Ici ou ailleurs, il y avait visiblement des menaces partout autour de la demoiselle aux yeux félins. "Gojo-sensei m'a brièvement expliqué... Est-ce que vous savez qui en a après vous ?"

"Non..." murmura l'européenne, ramenant son coussin contre sa poitrine, un sentiment d'oppression l'étreignant brusquement à cette simple idée : elle était traquée... "Prasad a mis des gens sur le coup mais ils ont été terriblement précautionneux pour ne pas qu'on puisse remonter jusqu'à eux..."

"Peut-être... peut-être devriez-vous arrêter de chercher le reste de votre orbe un temps ? Le temps que ce monsieur trouve les responsables..." suggéra innocemment l'adolescent, lui arrachant une grimace. "Ce n'est pas si mal que ça d'être une hybride, non ?"

La jeune femme soupira profondément en se laissant glisser au fond du canapé.

"Yuji... chaque jour que je vis en tant qu'hybride... je meurs un peu plus. Je ne suis pas comme toi, mon côté humain est comme... dévoré petit à petit par mon côté fléau, affaiblissant mon corps jour après jour. Mes besoins en sang riche en force occulte et en orbes ne cessent de croitre, juste pour me maintenir en vie. Et quand j'utilise mes pouvoirs... c'est encore pire."

Elle leva les yeux vers le plafonnier éclairant d'une lumière blafarde la pièce, ressassant intérieurement tous les déboires que sa nature lui avait fait connaitre jusqu'à présent. Si seulement elle pouvait mettre la main sur celui qui avait bâclé son pentacle... Elle le lui ferait lourdement regretter !

"d'où vos scellés ?" Questionna l'exorciste, fixant avec sérieux sa vis-à-vis.

Elle acquiesça avant de reprendre la parole, encrant son regard inhumain au sien. "Un jour, pas longtemps après mon réveil, j'ai utilisé mes sorts sans aucune restriction, complètement grisée par la sensation de puissance que j'avais." Elle se redressa d'un mouvement, une lueur éblouissante embrasant ses prunelles à la simple évocation de ce souvenir, un large sourire s'étirant sur ses lèvres. "J'étais littéralement devenue une flamme, Yuji. Je n'étais qu'incandescence ! Que force et potentiel ! Je me sentais tellement libre... jamais je n'aurais voulu que cela s'arrête... l'idée même d'obstacle était devenue irréelle !"

Elle se tut brutalement, une ombre passant dans ses yeux, ses épaules s'affaissant légèrement.

"Mais à trop puiser dans mon cercle d'encrage... j'ai failli en mourir... Je me suis effondrée, mon corps humain aux frontières de la mort, mon cœur au bord de l'explosion. Si Prasad n'était pas intervenu et ne m'avait pas posé mon tout premier scellé pour me couper de mon énergie occulte, j'y serai restée, ça ne fait aucun doute... J'ai passé plusieurs jours dans le coma après ça. Et je n'ai jamais pu libérer mon énergie comme ce jour-là. Je suis obligée de limiter à quelques minutes à peine le temps que je passe à user mes pouvoirs, sous peine de le payer très lourdement... C'est tellement frustrant !"

Elle se leva d'un bond, jetant le coussin sur le côté, et commença à arpenter le salon de long en large, toujours observée par Itadori que ne perdait pas une miette de ses mots.

"Et même en dehors de cela... Prasad m'a mis en garde que ma seule nature d'hybride faisait de moi une cible, que cela pourrait attiser les envies de gens mal intentionnés...Va savoir pourquoi d'ailleurs !"

Depuis son espace vital, Sukuna, qui écoutait également avec grande attention les dires de l'européenne tiqua en entendant sa dernière phrase, se redressant un rien sur son trône, se sentant potentiellement mis dans cette catégorie de 'gens mal intentionnés' mentionnés par le fameux Prasad. Il était certain que si ce dernier était au courant des projets qu'il avait pour sa petite princesse chérie, il ne sauterait pas de joie...

"Je suis un peu comme..." reprit Kali, plantant ses poings sur ses hanches. "Une putain de licorne à paillettes dont des braconniers rêvent de planter la tête empaillée au milieu de leur salon ! ça n'a rien d'enviable, comme situation... Si Prasad n'avait pas été là pour me protéger et m'éduquer, je surement morte depuis longtemps !"

Un rien essoufflée après sa tirade, elle revint s'assoir à côté du lycéen, prenant une de ses mains les siennes, solennelle, plongeant ses yeux dans les siens. "Alors non, Yuji, je ne peux pas mettre en pause ma recherche... Je dois trouver le reste de mon orbe. J'en ai besoin ne serait-ce que pour survivre... pour... vivre, libre, sans cette multitude d'épées mortelle de Damoclès sans cesse au-dessus de mon crâne... Pour arrêter d'inquiéter tous ceux qui m'aiment ou de dépendre de la protection des uns et des autres... Tu comprends ?"

Itadori ne dit rien dans un premier temps, assimilant toutes les informations que venaient de lui dévoiler son interlocutrice, soutenant son regard bicolore. Elle aussi vivait une situation des plus délicates... Jusqu'à présent, il ne s'en était pas rendu compte. Mais à présent il comprenait mieux les enjeux qui la poussaient à agir comme elle le faisait. L'adolescent se sentait... touché par le fait qu'elle lui ait confié tout cela, son cœur se gonflant de fierté.

"Oui, Sempai. Je vou... BLOUARG !"

Le lycéen n'eut pas le loisir de finir sa phrase. L'ours-boxer qu'il tenait toujours contre lui venait de se réveiller sans crier gare et lui assener un violent crochet du droit, le jetant au sol.

"Oh mon dieu, YUJI ! Ça va ?" S'inquiéta immédiatement l'européenne qui se précipita vers lui, s'agenouillant à ses côtés, son regard allant et venant entre lui et la peluche possédée qui dansait sur le canapé, visiblement ravis de son œuvre. "Mais c'est pas un jouet ce truc ?"

"Non..." maugréa le garçon en se massant la joue, un peu humilié par cette violente et déplaisante interruption alors qu'il s'apprêtait à sortir une phrase des plus classieuses. "c'est un incarné du proviseur... Il m'aide dans mon entrainement. Dès que je relâche mon niveau d'énergie occulte, il m'envoie une baigne..."

"Ah oui... Et il fait pas semblant visiblement..." commenta Kali, dubitative. "Tu vas bien, tu es sûr ?"

"Oui oui, Sempai... Ne vous inquiétez pas, je suis solide !" Il lui adressa un sourire rassurant en pliant un de ses bras musclé pour bander ses muscles, lui arrachant un léger rire.

"ça, je n'en doute pas une seconde !" S'amusa l'hybride avant de se relever, tendant sa main vers le jeune homme toujours au sol pour l'aider à l'imiter.

Ce dernier la couvrit d'un regard tendre et vint délicatement se saisir de ses doigts, les serrant avec précaution entre les siens. Il se redressa d'un mouvement souple, se retrouvant tout proche de la demi démone, la dépassant d'une bonne tête, ses yeux plongés dans les siens. Ils se fixèrent une poignée de secondes sans rien dire, un sourire entendu ornant leur visage à tous les deux. Yuji n'avait toujours pas lâchait la main de la demoiselle, sentant une douce chaleur se rependre dans tout son corps depuis ce simple point de contact. Il se sentait si bien quand elle était là...

D'un coup une forme sombre fit son apparition dans un coin de son champ de vision, faisant sursauter l'adolescent qui comprit immédiatement ce dont il était question, devenu assez coutumier de la chose...

"Sempai, attention !" Cria-t-il en venant se placer dans son dos d'un geste rapide pour la protéger de son corps, réceptionnant l'ours incarné qui s'était à nouveau réveillé et qui avait bondit sur eux, ses gants de boxe prêts à frapper. Itadori le plaqua violemment contre son torse, partiellement énervé par cette nouvelle interruption impromptue. "Alors là, je dis non, Tyson ! Que tu t'en prennes à moi, pas de soucis, mais pas touche à Sempai !"

"Ty... Tyson ?" s'étonna l'hybride en se rapprochant, un peu hésitante, fixant d'un regard suspicieux la peluche qui s'était arrêté de se débattre, se rendormant entre les bras implacables du chaman.

"Oui... Pour Mac Tyson..." éluda le jeune homme en se tournant vers elle, lui adressant un léger sourire qui s'effaça cependant face à l'air dubitatif de l'hybride, l'étonnant. "Vous ne connaissez pas Mac Tyson ? L'un des plus grands boxeurs de tous les temps ?"

Kali secoua négativement la tête, une légère moue aux lèvres. "Non... Je t'avoue que je ne m'intéresse pas trop à ce genre de sport... Mais Tyson c'est chou comme nom. Ça lui va bien..."

Elle vint caresser le haut de la tête de l'ourson devenu inoffensif, un sourire amusé aux lèvres. "Gojo a de sacrées méthodes d'apprentissage quand même..."

"Tant que c'est efficace !" déclara le lycéen en haussant les épaules, visiblement pas choqué pour un sous par ces procédés très peu orthodoxes, amusant son interlocutrice. Vraiment, c'était une crème, ce garçon...

D'un coup un puissant gargouillis se fit entendre dans le salon, faisant instantanément s'empourprer les joues de l'européenne qui vint poser une main sur son ventre, gênée.

"Aaah... je crois qu'il y en a un qui s'impatiente en toute discrétion..." ironisa l'étrangère pour se donner contenance. "Je suis désolée, Yuji, je vais devoir t'abandonner un petit moment."

"M'abandonner ? Pourquoi ?" s'inquiéta l'adolescent, s'approchant d'elle, ne voulant pas qu'elle parte. "Si vous avez faim, je peux vous cuisiner quelque chose. Je suis pas un chef mais je vous promets que j'ai quelques recettes assez bien rodées..."

Un éclat triste traversa les yeux félins de l'étrangère, lui pinçant le cœur. "Oh, Yuji, j'aurais adoré... Mais c'est pas ce genre de nourriture dont j'ai besoin. Il faut que j'aille chasser."

"Chasser ? Si tôt ?" s'étonna Itadori, faisant encore un pas vers elle, rongé par une violente inquiétude. "Et l'orbe que vous mangez ? Et puis... Vous êtes en état ?"

Kali le regarda avec tendresse, venant poser sa main sur sa joue pour le rassurer. "Tout ira bien, Yuji. Comme je te l'ai expliqué, j'ai besoin de plus en plus d'énergie occulte pour stabiliser mon cercle d'encrage. L'orbe que Kyû m'a apporté n'a fait que couvrir le trou béant que j'avais creusé en m'affamant depuis mon retour à Tokyo. Il m'en faut à nouveau, je le sens. Et je préfère ne plus trop tirer sur la corde..."

"Oh... D'accord..." souffla l'adolescent à contre cœur, peu enclin à laisser l'hybride quitter la sécurité de leur refuge pour aller chasser le fléau toute seule. "Vous ferez attention à vous, promis ?"

"Juré, craché..." lui assura-t-elle dans un sourire, ne le rassurant cependant pas.

"Vous revenez vite ?" questionna-t-il encore, voulant à tout prix la garder à ses côtés. SI seulement il pouvait lui donner son sang...

"Le plus vite possible." promit-elle en lui adressant un clin d'oeil, mutine. "Je passerai peut-être faire quelques courses avant de revenir. Comme ça, on pourra cuisiner ensemble à mon retour, d'accord ? Tu n'as qu'à m'envoyer une liste par message."

A ces mots, le porteur de Sukuna sentit comme des papillons battre au creux de son ventre, emplissant ses yeux d'une joie immense. Il s'imaginait déjà, côte à côte avec l'hybride, dans la petite cuisine du sanctuaire, préparant ensemble le dîner qu'ils partageraient ensuite en tête à tête, comme un couple. "Vous voulez vraiment ?"

"J'en serai ravie, Yuji... Et, s'il te plait..." Elle fit un pas vers lui, se hissant sur la pointe des pieds pour venir déposer un baiser furtif sur sa joue, faisant instantanément naitre un brasier sur les joues du réceptacle démoniaque, ainsi que dans ses veines. "Essaie de te reposer un peu... Tu n'as pas à t'inquiéter autant pour moi... Allez je file !"

Elle fit alors volte-face, quittant la pièce d'un pas bondissant, ravie au plus haut point d'avoir pu parler à cœur ouvert avec son adorable colocataire qui lui était comme statufié sur place, sous le choc du baiser.

Elle avait un peu menti à Yuji en lui assurant que la chasse se déroulerait sans soucis, mais c'était uniquement pour qu'il ne s'inquiète pas outre mesure... Vu sa fragilité actuelle, elle ne savait pas vraiment comment son corps allait réagir à l'utilisation de ses flammes, mais de toute manière elle n'avait pas le choix ! Elle avait réfléchi, ces derniers jours, à la proposition de Sukuna et cette dernière lui paraissait bien trop extrême pour qu'elle puisse l'accepter !

Se vendre corps et âme à cet homme, sans même être sure qu'il ne se laisserait pas d'elle en un instant et ne la tuerait pas sur un coup de tête...

Non, vraiment, elle userait de tous les moyens à sa disposition afin d'éviter d'avoir à passer un tel pacte !

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Mot de l'auteur :

M, retirant enfin son casque de protection : Hello tout le monde, et bon lundi ! Comment allez-vous ? La forme ? Un nouveau petit chapitre pour commencer la semaine, j'espère qu'il vous aura plu !

Sukuna, boudeur, qui jete un crâne vers M, la ratant de peu : Pourquoi c'est toujours le gamin qui a le droit aux attentions de la crevette en premier ? Le câlin, maintenant le bisou, c'est quoi la suite ?

Yuji, flottant littéralement au-dessus du sol : L'amouuuuur !

Sukuna, croisant les bras, mécontent : Alors là, rêve ! Je dis non !

Yuji : Je dis ouiiiiiiiiiiiiii !

Sukuna : Il est insupportable, le puceau, INSUPPORTABLE !

M, moqueuse : T'es pas juste jaloux en fait ?

Sukuna, outré : ABSOLUMENT PAS !

M : Ah oui, c'est flagrant...

Yuji, qui flotte au-dessus d'eux : Jalouuuuuux !

M : C'est vrai qu'il a l'air un peu niais quand même ...

Sukuna : un peu ? Il est tellement niais qu'il doit avoir de la guimauve à la place du sang et qu'il doit chier des paillettes !

Yuji : Rageuuuuuux !

Sukuna, allant chercher des crânes sur son trône : Oh putain je vais le faire redescendre de là-haut moi, ça va pas faire un pli !

M, haussant un sourcil : Toujours le grand amour entre ces deux là... Bref ! Un immense merci à tous et à toutes, grâce à vos votes (histoire également publiée sur wattpad) on est arrivé 1er du top 'Itadori' c'est un truc de fou ! (Même si j'avoue que je ne comprends pas bien comment ça marche, mais dans tous les cas, merci infiniment)

Sukuna, qui vise Yuji avec l'un de ses crânes : Et pour 'Sukuna' ? Je dois avoir un truc à part entière vu la majesté de ma personne.

M, parlant d'un coup beaucoup plus bas : Oui alors on est peut-être un peu aux fraises à ce niveau-là...

Sukuna, lâchant son crâne, outré : KUWA ? Tout ça c'est ta faute, ma petite, je suis soi-disant le personnage masculin principal mais on ne fait que m'entre voir !

M : Ehoh, mollo mon bon monsieur, je fais au mieux ! On va vachement plus te voir très bientôt, alors ronge ton frein !

Sukuna, haussant un sourcil : Ronger mon quoi ? Tu oses parler de mon sexe, impertinente ?

M : Oh le terrain glissant … Donc ! Merci de nous suivre, merci pour vos votes et vos commentaires, vous êtes fabuleux !

Miss Kannazuki, un merci tout particulier ! Love love ! Pour répondre à ta question, j'écris au fur et à mesure, je suis juste dans une période d'insomnie assez intense... Et ce qui est bien, avec les insomnies, c'est que ça offre des heures à tes journées... ça raccourcit aussi ton espérance de vie mais bon, détail XD J'espère que ton lundi s'est bien passé, compassion extrême pour le boulot! Et que le chapitre t'a plu 😊

Je vous dis à tous à très vite pour la suite ! Des bisous de tout le monde !

Sukuna, toujours boudeur : Certainement pas de moi, bandes de mécréants !

M : Même de lui, c'est sa façon de vous remercier ! A plus !