La nuit était bien avancée quand Kali pénétra dans le sanctuaire silencieux, aussi furtivement que ses nombreux sacs le lui permettaient, Kyu volant doucement dans son sillage. Certains des articles qu'elle avait achetés un peu plus tôt allaient être bon pour la poubelle après avoir passé des heures en plein cagnard, mais elle s'en moquait complètement.
Elle se devait, après le risque qu'elle avait fait courir à Yuji par son manque de précaution quelques jours plus tôt, de tout faire pour rectifier le tir, ou, au moins, ne pas empirer les choses.
L'européenne descendit les escaliers menant aux sous-sols qu'elle partageait avec le lycéen, se dirigeant dans un premier temps dans la cuisine déserte pour se débarrasser promptement de ses emplettes, avant de s'élancer vers sa chambre. En passant devant la porte d'Itadori, elle ne put s'empêcher de remarquer qu'une faible lumière filtrer par l'encadrement, témoignant que l'adolescent ne dormait pas encore.
Peut-être pourrait-elle aller le voir une fois qu'elle aurait fait toutes les choses qu'elle avait à faire... La douce et bienveillante présence du garçon aux yeux noisette ferait un bien fou à son âme chamboulée.
L'européenne entra dans sa chambre en soupirant, la petite chauve-souris la dépassant pour aller reprendre sa place sur son oreiller, poussant un petit cri aigu. Sans perdre un instant Kali passa sa robe par-dessus sa tête pour aller enfiler une tenue d'intérieur plus commode, composée d'un court shorty léopard et une ample débardeur noir échancré à paillettes. Elle vint ensuite attacher ses cheveux d'automne en une haute queue de cheval, tout en allant s'agenouiller devant son lit.
Sous le regard un rien étonné du petit fléau volant, elle se mit à quatre pattes pour aller farfouiller sous le sommier, au milieu de la poussière, s'y faufilant en partie. Mais pourquoi diable l'avait-elle mise aussi loin ? Elle aimait vraiment se compliquer la vie franchement...
"C'est un spectacle assez alléchant que tu offres là, crevette... Dois-je y voir une nouvelle invitation éhontée ?"
Kali sursauta en entendant la voix de Sukuna derrière elle, se tapant la tête contre les lattes du sommier.
"Aie !"
Elle s'extirpa de sa salissante cachette avec précipitation, des moutons de poussières accrochés à son débardeur et à ses cheveux, se retournant pour découvrir le roi des fléaux qui la fixait, un sourire en coin aux lèvres, une lueur terriblement amusée dans son regard sanglant. Visiblement, son hypothèse avait été erronée... Yuji avait simplement dû s'endormir la lumière allumée, et le démon millénaire avait du trainer depuis, attendant son retour pour venir chercher de la compagnie et du divertissement...
Manquait plus que ça ce soir, franchement.
"Bonsoir, Sukuna-san..." bougonna Kali en se relevant, s'époussetant un peu avant d'aller se frotter le crâne là où elle s'était cognée, n'accordant qu'un bref regard au fléau tatoué qui avait une nouvelle fois délaissé une partie de ses vêtements, se présentant simplement vêtu d'un short rouge face à elle. Cet homme était-il décidément allergique aux t-shirts ? Elle devrait se pencher là-dessus, un jour où elle aurait le temps... Mais là, il y avait plus urgent.
Elle se tourna vers son lit, l'évaluant rapidement de son regard d'or, offrant ainsi son dos à la vue de Sukuna qui ne put retenir une moue mécontente, fronçant un peu les sourcils. Il n'aimait pas être ignoré, et la petite hybride ne l'avait pas habitué à un tel comportement. Quelle mouche l'avait donc piquée ?
Alors que Kali allait attraper le bord inférieur du sommier, il parcourut la distance le séparant du meuble avant de s'y laisser lourdement tomber, faisant rebondir de son oreiller le rat volant qui poussa un petit cri de mécontentement, fusillant l'homme du regard.
"Eh !" s'écria la demoiselle en se redressant pour fixer le tatoué, nonchalamment assis sur le matelas, cherchant visiblement à attirer son attention. "Sukuna-san, s'il vous plait, ça ne m'aide pas ça !"
"C'est comme ça que tu me salues, petite insolente ?" commença comme si de rien n'était l'intéressé, fixant avec détachement les ongles sombres de sa main. "Qu'est-ce qui t'agite comme ça ? Je ne pense pas qu'il y ait un quelconque culte moderne nécessitant de se mettre la tête sous un lit..."
Comprenant qu'il avait décidé de faire son gamin, l'hybride tenta quand même de déplacer le lit malgré sa présence dessus, mais Ryomen l'empêcha de le bouger d'un seul centimètre par une simple pression de ses pieds sur le sol, un sourire terrible aux lèvres. Kali finit par abandonner avant d'être essoufflée, bien consciente qu'elle ne pourrait rien faire tant qu'il ne l'aurait pas décidé.
"Sukuna-san..."
"Hum ?" se contenta-t-il de répondre, ne lui accordant pas un regard à présent, préférant aller monter les dents au petit fléau volant se trouvant à quelques dizaines de centimètres de lui.
"Sukuna-san, s'il vous plait." Reprit la jeune femme en usant de tout son self control, refusant de céder à l'exaspération. "Pourriez-vous me laisser déplacer mon lit, je vous prie ? J'ai besoin de récupérer quelque chose d'important dessous."
"D'important ?" répéta-t-il, se tournant à nouveau vers elle. "Et de quoi s'agit-il donc, crevette ?"
Elle le fixa quelques secondes, cherchant à trouver la réponse qui lui permettrait d'obtenir la coopération, ou tout du moins, la non opposition du démon. Mais au fond, avec lui, il valait mieux jouer cartes sur table... Elle n'était pas encore assez bonne stratège pour le rouler.
"Si je vous disais que si vous me laissez le récupérer, je vous le montre, je suppose que cela n'aura aucun impact sur vous ?"
"Pas le moindre..."
Kali soupira, s'appuyant sur le montant de son lit, maudissant intérieurement en cet instant le caractère enfantin du roi millénaire. Elle était quand même pas aidée.
"C'est une arme." Finit-elle par dire, se redressant un peu tout en encrant ses prunelles dans celles de son vis-à-vis où déjà apparaissait une étincelle de curiosité.
"Une arme ? Tu ne parles pas d'une arme humaine, j'espère ? Parce que ce genre de chose n'a absolument aucun intérêt contre des fléaux, tu en as conscience, au moins ? Même le plus faible des niveaux 3 ne souffrirait que de quelques égratignures au pire ! Franchement, vous me faites rire avec vos piètres tentatives humaines de rivaliser à toute la puissance de l'occulte ! Bientôt, quand je serai libre..."
Sentant que cette discussion n'aurait pas de fin, Kali finit par abandonner, se laissant tomber à genoux pour se faufiler aussi vite que possible sous son lit, allant se saisir de la boite qu'elle avait dissimuler à l'autre bout du sommier, scotcher aux lattes pour passer inaperçue. Elle avait hélas trop bien œuvré, car elle dut tirer comme une folle dessus pour rompre les liens, écoutant d'une oreille le monologue du roi des fléaux littéralement au-dessus de sa tête.
"Crevette ? Dis, tu m'écoutes au moins quand je te parle, petite insolente ? J'essaie de te donner une leçon là, tu devrais m'écouter religieusement !"
En disant cela Sukuna se releva du matelas pour venir se saisir du bord du lit, le soulevant comme s'il avait s'agit d'un fétu de paille, éjectant par la même Kyu qui poussa un cri aigu profondément outré. Il découvrit ainsi une Kali couverte de poussière, les mains crispées sur un petit coffre en bois à moitié libéré de ses attaches, clignant des yeux en voyant à quel point l'aider aurait été facile pour lui.
"Eh bien éh bien... Y a du laisser-aller niveau ménage, crevette." commenta l'homme tatoué avec un sourire narquois, faisait s'enflammer le sang de la demoiselle dans ses veines.
Le goujat ! Elle tira d'un coup sec pour enfin parvenir à libérer l'objet de sa quête, se relevant avec autant de dignité que possible, s'éloignant de quelques pas du démon qui ne la quittait pas des yeux, terriblement moqueur. Il laissa retomber sans ménagement aucun le lit avec fracas, venant se planter devant la petite hybride qui serrait contre sa poitrine son trésor, un rien boudeuse. Elle tenta de s'épousseter un peu, bien consciente de la piètre apparence qu'elle devait offrir en cet instant précis, reniflant doucement. Dieu que son nez pouvait la gratter...
"Bon alors, crevette..." recommença le fléau millénaire, son regard tombant malgré lui vers la mystérieuse boite que l'étrangère s'était donné tout ce mal à récupérer. Qu'est-ce qu'elle avait bien pu encore trouver ? "Fais-moi donc voir cette fameuse ar..."
"A-TCHAAAA !"
Sukuna se redressa imperceptiblement, les yeux écarquillés, comme électrisé, un rien prit de court par le puissant éternuement ayant secoué la petite hybride. Ça, il ne s'y était pas du tout attendu. Il pouvait sentir les cheveux courts de sa nuque se redresser sous le coup de la stupéfaction, faisant gonfler son sang dans ses veines. Elle l'avait... surprit ?
Il dévisagea sans un mot ce petit être inculte d'à peine quelques mois qui se frottait doucement le bout du nez, les yeux un peu plissés, comme se remettant de son exploit.
Se souvenait-il ne serait-ce seulement de la dernière fois où il avait presque... sursauté ? Avait-il baissé sa garde face à elle, tant elle lui paraissait acquise à sa cause ? Surement un peu...
Elle venait pour ainsi dire d'accomplir une prouesse, même si elle ne s'en rendait pas compte et qu'il n'en laisserait jamais rien paraitre. Un rien courroucé malgré tout, il vint poser une main sur le sommet du crâne de l'européenne, lui secouant doucement la tête, se penchant vers elle.
"Comment une si petite chose peut-elle faire autant de bruit ? Sauvageonne ! Ton vieil hindou ne t'a-t-il rien enseigner des bonnes manières ?"
"Excusez-moi..." souffla faiblement Kali, le feu lui montant aux joues, fuyant son double regard rubis. "Pas fait exprès..."
"Tu aurais pu réveiller le gamin, crevette ! Fais attention !" Il se redressa un peu, allant lui planter une pichenette au milieu du front en guise de punition.
"Aie !" s'écria l'intéressée, posant une main sur son front décidément très maltraité ce soir. "Mais j'ai pas fait exprès ! Si vous m'aviez pas obligée à me rouler dans la poussière, j'en aurais pas eu autant dans le nez !"
"Le nez ?" Sukuna se pencha vers elle, les mains sur les hanches, terrible et moqueur. L'improbabilité de la situation, le malaise flagrant de la petite et l'occasion que ça lui offrait de la tourmentait un peu l'amusaient plus qu'il ne l'aurait avoué. "Quel nez ? Vu le boucan que tu fais c'est une trompette que tu as là !"
"Raaaah ! Arrêtez, vous êtes impossible ! J'ai juste éternué !" Elle resserra sa prise sur la boite qu'elle tenait toujours, faisant volte-face, quittant la pièce à grandes enjambées, le visage un peu cramoisi. Quel mufle !
"Où vas-tu comme ça ? Faire trembler d'autres murs de ce vieux sanctuaire ? Fais attention, il pourrait bien s'effondrer à force..." L'interpella le démon dans son dos, lui emboitant visiblement le pas, trop heureux d'avoir une nouvelle raison de la taquiner.
Inconsciemment, Kali se demanda si elle ne préférait pas encore quand il essayait d'abuser d'elle...
"Kyuuu !"
Au-dessus de sa tête, l'européenne vit la petite chauve-souris passer le long du couloir pour se diriger vers la cuisine du refuge, lieux où elle souhaitait se rendre.
"Ah, dommage, il a pas fait de crise cardiaque celui-là..." soupira lourdement Ryomen non loin, faisant lever les yeux au ciel à la jeune femme. Visiblement, le roi des fléaux avait du mal à diriger le concept de cerbère...
Kali et Sukuna débarquèrent finalement dans la cuisine qu'elle éclaira avant d'aller poser son précieux chargement sur la table, tout près des sachets de victuailles sèches qu'elle n'avait pas pris le temps de ranger plus tôt. Elle se laissa tomber sur une chaise, laissant courir ses doigts le long du riche acajou à la teinte chaude dans lequel était confectionné le coffret, en admirant les finitions dorées, le cadenas à code incrusté le maintenant pour l'heure fermée...
Un des autres des cadeaux de Prasad...
Avec des gestes pleins de déférence, Kali actionna le mécanisme du cadenas, faisant coulisser les chiffres sous ses doigts jusqu'à former celui qui l'ouvrit dans un léger cliquetis, lui permettant d'ouvrir le couvercle dans un doux chuintement. Elle soupira en découvrant sous son regard d'or l'objet qui reposait, comme assoupit, sur un velours d'un bordeaux profond, son acier rutilant brillant de mille feux sous la lumière blafarde de la cuisine. L'hybride prit alors la lourde arme dans sa main, l'admirant avec fascination, comme à chaque fois où ses yeux s'étaient posés sur elle auparavant...
Elle était... parfaite...
Un colt python à 6 coups, un canon de 15 centimètres, une crosse en ébène retravaillée pour être parfaitement adaptée à ses mains, fait dans un alliage spécial résistant à l'énergie occulte se traduisant par des fils d'or courant tout le long du révolver.
Et ses munitions... Kali attrapa d'une des balles luisantes dont la tête semblait être faite d'améthyste, reflétant la lumière environnante et qui étaient jusque-là sagement alignées d'un des deux côtés de la boite, attendant patiemment d'être armée et tirer pour détruire leur cible... Des chef-d 'œuvres de savoir-faire occulte, des concentrés d'énergie pure équivalant, chacun, à un classe 1.
Elle en avait six à disposition. Pas une de plus.
Chaque tir devait être le bon...
Mais chaque tir pouvait être fatal s'il était bien porté...
"Un pistolet ?"
La voix de Sukuna extirpa la jeune femme de sa contemplation, la ramenant dans l'espace et le temps présent, son regard se portant vers l'homme tatoué qui la surplombait, un rien intrigué, pouvant sentir l'énergie s'échappant des munitions étalées devant lui.
"Pas un pistolet, Sukuna-san..." souffla doucement la demoiselle, caressant le long canon rutilant du bout des doigts alors qu'il allait se saisir d'une balle, la détaillant à la lumière de la cuisine. "LE révolver... C'est une merveille, non ?"
Elle se tourna vers lui, lui adressant un sourire étincelant et candide qui arracha une petite moue au démon.
"Mouarf..." lâcha-t-il finalement, laissant tomber la munition dans la boite d'acajou. "Tout ça, c'est juste des trucs qui brillent... Des accessoires... Si tu n'as pas la puissance en toi-même, ça ne sert à rien !"
"Heureusement, tout le monde n'est pas aussi puissant que vous, Sukuna-san !" s'amusa Kali, récupérant les projectiles, ouvrant le barillet d'un coup sec.
"Parle pour toi !" Il tira une chaise pour s'y laisser tomber, tirant un des sachets plastique à portée de sa main pour commencer à en fouiller le contenu. "C'est d'un ennuie du coup de n'avoir aucun adversaire digne de ce nom..."
"Je ne sais pas si je peux ne serait-ce que concevoir cela... Moi, j'ai l'impression d'être cernée de toute part ..." La demoiselle chargea les 6 balles dans chacune des chambres de l'arme, vérifiant que toutes soient parfaitement alignées dans leur axe. D'un coup de poignet, elle remboita le chargeur circulaire dans un bruit sec. Elle pointa ensuite le revolver vers le mur lui faisant face d'un mouvement souple du bras, glissant son doigt sur la gâchette, imaginant un ennemi sans visage qui serait enfin à sa portée. "Mais malgré tout ce qu'ils semblent tous croire... Je ne suis pas sans défense... Et si je tombe, ça ne sera pas sans combattre."
Ryomen ne dit rien, se contentant de glisser un regard vers la petite hybride pourchassée, aussi bien par le temps lui-même que par des hommes, pensif. Acculée, voilà ce qu'elle semblait être, plus encore qu'auparavant... Même si cela arrangeait bien ses projets la concernant, il fallait reconnaitre que ce n'avait rien d'une situation enviable...
Au bout de quelques instants il reprit malgré tout la parole, allant se saisir d'un autre sac pour en inspecter l'intérieur, cherchant quoi que ce fut qui aurait pu lui taper dans l'œil.
"... Il s'est passé quelque chose, pour que tu sortes l'artillerie lourde, crevette ? Pas que ça m'intéresse... Mais le gamin a été particulièrement chiant aujourd'hui."
La jeune femme ne répondit pas dans un premier temps, se contentant de fixer le revolver qu'elle ramena vers elle, fronçant un peu les sourcils, l'air soucieuse. Oui, c'était flagrant que quelque chose la tracassait... On pouvait lire en elle comme dans un livre ouvert.
"... j'ai..." Commença-t-elle finalement, un peu hésitante. "J'ai fait une bêtise y a quelques jours. J'ai laissé des traces de mon énergie occulte lors d'une chasse. Et ceux qui me cherchent ont apparemment pu trouver cette piste... J'ai une drôle d'impression depuis hier, j'ai... j'ai comme l'impression d'être suivie. Et puis un drôle d'énergumène m'a abordé tout à l'heure. Il disait faire partie des hommes de Prasad, mais je n'arrive pas à savoir s'il dit vrai ou pas...Je le sens pas."
Ah. Effectivement, la situation n'était pas très engageante.
Tout en réfléchissant aux implications des informations que lui avait donné Kali, Sukuna pris un paquet cylindrique bleu électrique entre ses mains, cherchant à comprendre ce qu'il renfermait. Des biscuits ? Noir ? On aurait dit du charbon...
Dans l'état de profonde fragilité où se trouvait la petite, elle ne pouvait pas se permettre de semer des petits cailloux blancs menant à elle. Elle ne pourrait pas se défendre avec son énergie occulte sans faire céder son pentacle. D'où le gadget argenté...
"Un énergumène, dis-tu..." reprit finalement l'homme tatoué avant de se tourner vers son interlocutrice, la pointant de son paquet de biscuit d'un air accusateur. "Toi, tu as encore parlé à des inconnus... Après tu t'étonnes d'avoir des problèmes !"
"Même pas vrai !" Se défendit l'hybride aux yeux d'or, repoussant le sachet bleu de son giron de son pistolet. "C'est lui qui m'est tombé dessus !" Elle s'accouda à la table, posant son visage contre le canon de son arme, un peu petit sourire en coin. "Voyez-vous, je me suis souvenue de votre conseil, je ne lui ai pas accordé ma confiance. La preuve que je vous écoute !"
"Hum..." Il lui offrit un air peu convaincu, laissant tomber les biscuits sur le plan de travail.
Il se pencha alors vers elle, se faisant brusquement charmeur, glissant un doigt à l'ongle acéré et sombre sous son menton.
"Crevette..." susurra-t-il tout bas de sa voix grave, faisant la sourde oreille aux petits grognements de Kyu qui restait à l'affut non loin. "Tu sais ce qu'il te suffirait de faire, pour avoir des moyens de te défendre manière bien plus efficace qu'avec tous les artefacts du monde. Tu es à moitié fléau, et si tu pouvais user de tes pouvoirs à ta guise, sans te soucier de ton pentacle, tu n'aurais rien à craindre de couards te traquant dans l'ombre..."
"Vous alors..." Kali sentait la pointe de son ongle griffer doucement sa peau, faisant naitre des étincelles dans ses veines. Il avait un peu plus relâché son incroyable aura qui semblait couler le long de son corps, lourde comme du plomb, fluide de l'eau, envoutante comme la plus exquise et dangereuse des liqueurs... "Vous ne perdez jamais une occasion de vous vendre ..."
"Comme si j'en avais besoin, petite impudente."
Il lui attrapa d'un geste vif le menton, l'attirant à lui, la faisant brutalement plaquer ses mains sur la table. La lueur de ses yeux de lave s'était faite incandescente, terriblement joueuse, faisant faiblement déglutir l'européenne qui ne savait que trop bien combien les revirements d'humeur du roi des fléaux pouvaient être rocambolesques, la mettant un peu sur ses gardes.
"Je pourrais simplement te montrer à quel point tu es actuellement sans défense, crevette, histoire d'illustrer mes propos..."
Kali encra son regard d'or dans le sien, déterminée à ne pas encore une fois se sentir démunie aujourd'hui. Bien entendu, elle savait pertinemment que Sukuna avait l'ascendance sur elle (il l'avait sur tout le monde sur cette terre au fond...). Mais cela ne signifiait pas non plus qu'elle devait se jeter à ses pieds à chacun de ses caprices. Il n'avait pas envie de la tuer, une petite voix dans son esprit le lui en donnait presque la certitude. Il s'ennuyait comme un rat mort avec Yuji et elle était la seule 'distraction' qu'il avait à portée de main. Il pourrait la blesser, assurément... Juste pour assoir son autorité de mâle ancestral misogyne. Mais là encore, elle était sûre de pouvoir y échapper avec une pirouette...
Insolente, l'appelait-il régulièrement... ça, au moins, c'était dans ses cordes.
Lentement, Kali releva sa main toujours armée de son colt étincelant, l'agitant doucement dans la lumière pâle du luminaire les surplombant, affichant un sourire qu'elle espérait plein d'une assurance qu'elle ne possédait qu'en partie.
"Et moi... Tester mon nouveau moyen de défense ?"
En entendant cela, un sourire carnacier s'étira sur les lèvres du démon tatoué, dévoilant ses dents immaculées aux canines légèrement proéminentes. Un vrai prédateur, qui paraissait s'amusait au plus haut point.
"Tu oserais, petite insolente ? "
Un silence un rien électrique tomba dans la cuisine alors qu'ils se défiaient du regard, se jaugeant l'un et l'autre.
Elle ne manquait quand même pas de toupet, cette petite crevette...
Au bout de quelques secondes elle rompit cependant le contact visuel en soupirant doucement, levant les mains en l'air en signe de reddition, un petit sourire aux lèvres.
"Vous avez gagné, je n'en ferai rien. De 1, ça ne vous ferait très certainement pas le moindre mal et cela me ferai perdre une précieuse munition pour rien. De 2, vous seriez sans doute capable de switcher avec Yuji au moment du tir histoire que se soit lui qui prenne la balle. Lui serait blessé, grièvement, et vous en profiteriez pour re négocier quelque chose avec lui en échange de sa survie... Il n'en ressortirait rien de bon..."
Sukana la fixa encore un instant avant de la relâcher en ricanant, se laissant retomber contre le dossier de sa chaise en croisant ses bras sur son torse puissant.
"Tu es plus futée qu'il n'y parait, crevette..."
"Laissez-moi prendre ça comme une sorte de compliment, Sukuna-san..."
Il haussa les épaules et les sourcils, visiblement insensible à la tentative d'ironie de la jeune femme. "Prend le comme tu veux je m'en moque. En attendant, fait moi à manger, j'ai faim."
A son tour, Kali s'adossa à sa chaise, toujours le revolver en main, croisant ses bras sur son ventre, visiblement mal à l'aise.
"Hum... ça vous dit des chips ? C'est bien les chips..."
Ryomen braqua alors son regard sur la petite hybride, la scrutant avec intensité, un sourire en coins aux lèvres. Elle détourna ses yeux dorés des siens, chose qu'elle ne faisait que rarement, comme honteuse, ce qui amplifia encore l'impression qu'il avait que quelque chose se tramait là, l'intriguant instantanément.
"Eh bien eh bien, princesse crevette..." L'homme tatoué s'accouda à la table, ne lâchant pas son étrangement silencieuse vis-à-vis, un sourire narquois aux lèvres. "J'ai bien l'impression... Que quelqu'un ici ne sait pas faire la cuisine, en plus du ménage..."
"C'est... C'est faux !" Kali se leva de sa chaise tout en encrant courageusement son regard dans celui du tatoué, le feu lui montant aux joues à grande vitesse, prise la main dans le sac. "Je... je sais faire chauffer des trucs... Et ouvrir des boîtes... Et passer des commandes ! à l'heure actuelle ça suffit largement pour pouvoir manger !"
Sukuna la fixa tout en laissant échapper un ricanement condescendant, allant s'attraper le menton d'une main, railleur au possible.
"Les femelles de ce temps, franchement ! Même plus bonnes en arts ménagers..."
Il retourna alors fouiller les sachets de victuailles se trouvant devant lui, ignorant consciencieusement Kali qui le foudroyait du regard, boudeuse au possible. Il finit par en extraire des bols de nouilles instantanées et commença à les regarder avec attention, lisant les instructions marquées dessus.
Il avait tellement vu le gamin en faire qu'il serait parfaitement capable de se débrouiller sans l'aide de la crevette, il en était certain. Et puis... Il avait bien envie d'essayer, histoire de voir s'il pouvait dompter ces choses modernes l'entourant.
Après une brève hésitation entre deux parfums, il en choisit un, en déchirant l'emballage tout en se levant pour se diriger vers la machine qui faisait de l'eau chaude. Il appuya sur l'unique bouton de l'appareil, le faisant émettre un petit chuintement qui devait certainement témoigner de sa mise en marche. En attendant que l'eau arrive à ébullition, le démon souleva le couvercle du bol de nouilles pour en sentir le contenu, intrigué, pour ensuite aller attraper les sachets d'assaisonnement à l'intérieur.
Alors qu'un léger sifflement commençait à se faire entendre, Sukuna observait le fond de la coupe en plastique où reposées les nouilles séchées, les détaillant du regard. Comment diable les humains arrivaient-ils donc à leur donner cet aspect-là ? Mystère...
En attendant que la machine infernale finisse de crisser, le fléau ancestral alla s'appuyer au plan de travail, détaillant les petits sachets d'assaisonnement entre ses mains, y lisant une liste d'ingrédients étranges qui lui étaient complètement inconnus. Que venaient faire au milieu du poulet et du soja des lettres et des chiffes ? Il fronça les sourcils, perplexe.
Quel drôle de monde que celui-ci...
D'un coup, Ryomen sentit comme une pression sur lui, l'extirpant de son observation pour le faire relever la tête, découvrant Kali qui s'était rassise à la table tout près et qui le scrutait de ses yeux félins dorés, le visage posé dans ses mains en coupe, un sourire presque... attendri flottant sur ses lèvres.
Il se renfrogna un peu, sur la défensive. Qu'est-ce qu'elle avait encore, la crevette ? Il n'y avait aucune once de moquerie dans son regard, juste une sorte de... Fascination brute et candide, le déstabilisant un peu. Il avait du mal à suivre le fil de ses pensées par moment, car, franchement, il ne voyait pas ce qu'il avait fait pour attiser une telle attention. Il croisa les bras sur sa poitrine tatouée, haussant un sourcil, dubitatif.
"Quoi, crevette ? On ne t'a jamais appris que c'était mal poli de dévisager les gens comme ça ?"
"Ah..." La demoiselle sursauta faiblement, rougissant un peu avant de lui offrir un sourire amusé, passant une main dans sa nuque dégagée, un peu penaude. "Mon dieu, désolée ! C'est ironique, vu que j'ai dit la même chose pas plus tard qu'il y a quelques heures à l'huluberlu dont je vous ai parlé !"
"Tu parles d'ironie..." Il sourit à son tour, allant récupérer la bouilloire dans son dos qui avait cessé de siffler, remplissant son bol de nouilles jusqu'au trait indiqué avant d'en refermer le couvercle pour y poser des baguettes dessus, le maintenant ainsi fermé. "Je m'en suis délecté d'une succulente, ce matin, en apprenant qu'une certaine petite sauvageonne, ayant couiné tant et plus pour gouter à un pauvre bout de poisson, se retrouvait à devoir boire du sang de fléau mineur en guise de petit déjeuner..."
Kali ne put s'empêcher de laisser échapper un léger ricanement, glissant son regard vers Kyu qui s'était aplatit un peu plus loin sur la table, la scrutant de ses petites prunelles rouges. Cette réflexion, elle s'y était tellement attendue...
"J'aurai dû parier que vous me diriez cela. Et parier gros."
"En même temps." Il souleva un peu le couvercle du bol, jetant un œil à l'intérieur pour en vérifier l'avancée de la cuisson. "c'était pire qu'une perche tendue, admet le..."
"Complètement. J'aurai fait la même si j'avais eu l'occasion." En disant cela elle tira un sachet de commission vers elle, récupérant un paquet de chips au curry qu'elle ouvrit et posa devant elle, son sourire ne disparaissant pas de ses lèvres, en enfournant une sans plus attendre.
De son côté Sukuna jugea que ses pates étaient prêtes. Il les égoutta grâce aux ouvertures prévues à cet effet dans l'opercule, ajouta les assaisonnements dont il jeta les sachets dans l'évier et vint s'assoir à la table, commençant à touiller le contenu de son bol en glissant un regard à la demoiselle, un rien réprobateur.
"C'est censé être ça, ton dîner... Ces trucs ?"
Kali leva les yeux au ciel en se laissant tomber contre le dossier de sa chaise, enfournant un nouveau pétale doré avant de répondre. Il jouait les paternels ?
"Vous ne vous êtes fait des ramen que pour vous, je vous signale ! Je m'adapte !"
"Et puis quoi encore ? C'est toi qui devrais me faire à manger, petite impudente, et pas l'inverse ! Je me débrouille seul ce soir uniquement parce que j'avais envie d'essayer de faire ces choses par moi-même... Ça m'intriguait. "
Il attrapa quelques nouilles entre ses baguettes, les approchant de son nez pour en humer le parfum à présent qu'elles étaient mélangées à tout le reste des ingrédients, avant de les faire glisser entre ses lèvres, les aspirant d'un geste sûr et précis.
Kali coula un regard vers lui malgré elle, détaillant le moindre de ses gestes... Elle admirait le jeu de ses doigts agiles autour des baguettes, le mouvement des muscles puissants de ses bras sous sa peau tatouée, la courbe déliée marquée de traits noirs de sa nuque penchée... Quoi qu'il fasse, il avait cette aura hypnotisante et affreusement sensuelle qui paraissait complètement capturer la moindre de ses pensées. Rien que de le voir évoluer dans la cuisine, se faire à manger. Voir ses mains s'activer, ses yeux perçants décrypter les instructions d'un simple bol de ramen... En tant qu'être millénaire évoluant dans un environnement inconnu, il était sexy à se damner quoi qu'il puisse faire.
La demoiselle sentit de légers crépitements commençaient à pétiller au creux de son ventre, la faisant enfourner une nouvelle poignée de chips histoire de détourner son attention.
Putain... Elle devait vraiment avoir un grain...
Dans sa précipitation, de petites miettes brillantes étaient demeurées à la commissure de ses lèvres délicatement ourlées, attirant le regard double rougeoyant du démon qui n'avait rien perdu du regard appuyé de l'l'hybride sur son être, lui arrachant un sourire ravit. Finalement, ça ne lui déplaisait pas qu'elle le reluque comme ça, la petite étrangère.
Il avala une nouvelle bouchée de nouilles avant de se redresser, se penchant vers la jeune femme pour aller essuyer du pouces les restes de snacks salés au coin de ses lèvres, la faisant se figer sur place, le fixant avec perplexité. Il ramena ensuite son pouce jusqu'à sa propre bouche, léchant son doigt d'un langoureux coup de langue tatoué qui fit doucement déglutir la demoiselle, le ravissant un peu plus encore.
"Sauvageonne." susurra-t-il doucement, retournant à son bol de nouilles bien entamé. "Je comprends mieux pourquoi tu es un petit mochi."
"Que... Pardon ?" L'intéressée regardait son interlocuteur visiblement très fier de sa nouvelle pique, les yeux ronds comme des soucoupes.
Il laissa échapper un petit ricanement, touillant un peu le bouillon épicé du bout de ses baguettes, taquin. "Un mochi, crevette. Tu es toute moelleuse."
Le feu monta violemment au visage de la demi démone, un cri strident et mécontent de Kyu résonna à quelques centimètres d'eux. Venait-il vraiment de la traiter de sphère gélatineuse ?
"Enfin là de suite." reprit le roi de fléaux en lui glissant un regard amusé, un sourire en coin ornant ses lèvres. "Tu ressembles plus à une tomate qu'à autre chose. Bientôt je verrai plus la différence entre ton minois et tes cheveux, tu sais..."
"Et après vous osiez dire que vous étiez un gentleman !" Kali enserra son torse de ses bras, affichant une moue particulièrement boudeuse et enfantine. "Je ne mange pas que des chips quand même ! Je mange aussi de la viande !... Et ça ne se fait pas de critiquer le physique d'une dame..."
"Qui te dit que je critique ?" s'amusa Sukuna en la regardant faire, profitant pleinement de la distraction pétillante que lui offrait l'européenne. "Je n'ai jamais aimé les sacs d'os de toute façon. Je ne comprends pas cette mode moderne des femmes rachitiques. Elles donnent l'impression de pouvoir se faire casser en deux à la moindre caresse. Et si tu finis par m'ennuyer et que je décide de te manger, au moins, j'aurai quelque chose à me mettre sous la dent."
En entendant cela, la demoiselle braqua son regard d'or sur son interlocuteur, gonflant la poitrine pour lui notifier son mécontentement. En plus d'être molle, elle était un casse-croûte sur patte à présent... De mieux en mieux !
"J'ai toujours mon flingue pour me défendre, vous savez..."siffla-t-elle en expirant, de mauvaise humeur, plissant les yeux pour lui envoyer un regard assassin qui sembla cependant rebondir sur lui, ne le troublant aucunement. Mais quel mufle !
Il rigola, reprenant une bouchée de ses nouilles. Comment pouvait-il être à la fois si séduisant et si exaspérant ? Il était bien le roi des démons !
D'un coup une mélodie retentit depuis la poche du short de Kali, la faisant légèrement sursauter. Elle reconnut l'intonation de la chanson hymn for the weekend de Coldplay, qui était la sonnerie personnalisée de son protecteur. Il tombait à pic, son sauveur !
La jeune femme alla se saisir de son téléphone, prenant la communication en passant en mode visio, tombant ainsi nez à nez avec l'hindou, faisant éclore un large sourire sur ses lèvres.
"Prasad !" commença-t-elle d'un air guilleret. "Comment vas-tu ? Tu fais attention à toi ? Je comptais justement t'appeler ! Oh... pendant que j'y pense... On va devoir parler en japonais par contre ce soir."
Le vieil homme au visage buriné par les années haussa un sourcil, perplexe. Voir son visage faisait instantanément du bien à la petite hybride, apaisant un peu ses craintes.
"Maharani, il est plaisant de vous voir ainsi... En japonais, dîtes vous ? Mais pourquoi donc ?"
La demoiselle afficha un air mystérieux avant de tendre son mobile au bout de son bras, le tournant afin d'inclure dans l'image Sukuna qui se contenta de glisser un regard vers elle, continuant cependant son repas comme si de rien n'était.
"Parce que je ne suis pas seule !"
En découvrant Ryomen, Prasad demeura dans un premier temps muet de stupeur, ses yeux sombres s'écarquillant sous la surprise.
"Le... Le... maharaja ?"
Sa protégée savoura un peu son effet, sachant combien son 'père' avait en haute estime le démon couronné qui lui avait depuis son réveil appris à respecter, comme étant le monarque absolu du monde occulte. Après son propre réveil, pouvoir voir de ses propres yeux le fléau devait sans nul doute son second souhait le plus cher. Elle était heureuse de rendre cela possible cette nuit.
"Prasad, je te présente Sukuna-san. Sukuna-san je vous présente Prasad ! Vous voulez pas dire bonsoir, Sukuna-san ?"
Le roi tatoué aspira une nouvelle bouchée de nouilles avant de regarder le vieil homme sur l'écran, détaillant rapidement son teint hâlé inconnu jurant avec la neige de ses cheveux, son grand âge flagrant vu les rides striant son noble visage, l'étrange tuyau sous son nez, le maintien fier et la lueur vive au fond de ses yeux noirs. Sa teinte de pezau mise à part, c'était à peu près comme cela qu'il s'était imaginé l'homme ayant éduqué la crevette, d'après ses dires et la haute estime qu'elle avait de lui. Un patriarche. Un chef de famille sage, mais complètement gaga de sa protégée occulte...
Le démon soupira, reportant son attention à son bol de ramen.
"Tu l'as bien trop gâté, vieil homme... C'est une vraie petite sauvageonne, ta protégée."
"EH !" s'offusqua immédiatement l'intéressée, reportant son téléphone vers elle. Il ne manquait pas de toupet, pour ainsi la critiquer devant Prasad !
"Ahah !" Le rire de Prasad fut hélas entre coupé de toux. "Je n'y peux rien, Sultan. Veiller sur elle a toujours été la mission de ma famille. Son réveil a été l'accomplissement de toutes nos vies, à moi et à mes ancêtres. Je lui offrirai tout ce qu'elle désire, jusqu'à ma vie, si cela lui plait."
"Jamais !" Intervint-elle alors que Sukuna levait les yeux au ciel, visiblement peu sensible à la tirade de vieil homme. "Tu repars dans tes non-sens, Prasad. Je t'ai toujours dit que ce que je souhaitais, c'est que tu restes en vivant. Tu es comme un père pour moi..."
"On est tous condamné à mourir, ma reine..." se contenta-t-il de répondre placidement, comme à son habitude, irritant un peu la demoiselle.
L'idée de sa mort proche la terrifiait plus qu'elle ne souhaitait le concéder... Il était son phare, son point de repère. S'il venait à disparaitre, elle perdrait l'être le plus cher à son cœur...
"Pas moi." laissa brutalement tomber Sukuna, terminant son bol de nouilles instantanées, le reposant sur la table dans un bruit sec, extirpant Kali de ses pensées.
La demi-démone reporte son regard d'or vers lui, fronçant les sourcils, courroucés. "Sukuna-san... Vous êtes terrible !"
"Il n'a pas tort dans un sens." intervint calmement Prasad. "Vous-même, si vous complétez votre cercle d'encrage, Maharani, vous échapperez à la mort. Pour mon plus grand soulagement..."
Nous y revoilà... Kali déglutit faiblement, peu à l'aise de voir ce sujet récurent hélas revenir sur le tapis. Après les nouveaux doutes s'étant ajoutés aux autres cet après-midi, elle ne savait plus trop si sa transformation était une réelle bénédiction, même si cela demeurait sa seule échappatoire...
"Justement, Prasad... Tu n'as toujours pas de pistes, je suppose ?"
Une ombre passa dans ls yeux onyx de l'hindou. "Rien de sérieux hélas, Maharani, je le crains."
Kali ne put savoir si cette nouvelle l'accablait réellement ou la soulageait un peu... Peut-être des deux, très certainement...
"Ne t'en fais pas pour la crevette." Ryomen reprit la parole, attirant à nouveau sur lui toute l'attention des deux autres. "Elle a une solution toute trouvée, même si elle se fait désirer..."
"Cre... crevette ?" Questionna Prasad, fronçant ses sourcils, ne comprenant visiblement pas de qui il était question.
"Plutôt que de perdre ton temps avec l'orbe de la crevette, tu ne pourrais pas plutôt te pencher sur mes reliques, vieil homme ?" continua le fléau tatoué, se laissant aller contre le dossier de chaise avec nonchalance. "Partager mon corps avec l'autre gamin est d'un ennui mortel."
Le protecteur de l'européenne le fixa, comme pesant le pour et le contre. Il osait hésiter à concéder à sa demande, réellement ?
"Je pourrais..." reprit le vieil homme après un bref instant de réflexion ayant fortement déplu à Sukuna. "Je pourrais effectivement mettre mes équipes sur la recherche de vos reliques, Sultan...Mais... Peut-être, qu'en attendant que nous les retrouvions, vous pourriez jeter un œil sur la Maharahi, sa sécurité n'est pas une mince affaire, comme vous avez pu vous en rendre compte vous-même."
Il... cherchait à négocier ?
Sukuna éclata de rire avant de foudroyer le téléphone du regard, brusquement plus sérieux.
"Je comprends mieux d'où vient cette fâcheuse habitude qu'à la crevette de chercher à négocier à la moindre occasion. Mais sache, vieillard, que je supporte mal l'idée que des êtres inférieurs cherchent à me donner des ordres. Ne sais-tu donc pas qui je suis ? Je pourrais la trancher ici même juste pour te le rappeler."
D'un coup, la majesté des fléaux relâcha sa terrible aura dans la cuisine, en saturant chaque centimètre carré d'une puissance incommensurable, rendant l'air presque irrespirable. Kyu en fut pour ainsi dire écrasé contre la table, incapable de bouger. Kali, elle, plus coutumière de l'aura du démon, se releva périlleusement, lâchant son téléphone qui glissa sur la table alors qu'elle pointait courageusement son arme vers Sukuna, le toisant d'un regard enflammé.
Voilà encore un de ses effroyables revirements d'humeurs, embrasés par un mot somme tout anodin mais qui lui paraissait à lui être une insulte à sa majesté. Elle commençait presque à en être habituée et ne s'en étonnait plus que moyennement, même si, il lui fallait le reconnaitre, elle n'appréciait pas beaucoup cette facette de sa personnalité. Un seul mot suffisait à faire vriller son terrible égo, mettant en péril la survie de tous ceux se trouvant dans son giron.
Il lui fallait … Rester calme. Désamorcer la crise. Attirer son attention ailleurs.
"Prasad ne cherchait pas à vous manquer de respect, Sukuna-san." La maîtresse des flammes d'ombres tenta d'apaiser son interlocuteur d'une voix douce et posée, tendant cependant les muscles de son bras dans l'attente potentiel d'un tir dévastateur. "Il s'inquiète juste pour moi et cherche à me protéger. Il sait que l'étau de mes poursuivants se resserre autour de moi... Tout comme vous. C'est pour ça qu'il a augmenté les effectifs me surveillant. Chacun ses moyens... "
Sukuna la dévisagea, implacable, comme cherchant à soupeser la moindre de ses paroles. Que cherchait-il à déceler en elle ? Elle avait du mal à le deviner...
"Maharani ?" la coupa Prasad dans ses pensées, terriblement inquiet, sa voix lui parvenant de son téléphone abandonné non loin. "Maharani tout va bien ?"
Le fléau couronné se leva à son tour, s'avançant vers elle avec une allure prédatrice faisant légèrement se crisper la demoiselle. Il s'arrêta quand le canon de son arme vint toucher son torse, le métal glacé se heurtant à la fermeté de sa peau tatouée. Il la regarda, un sourire en coin aux lèvres, et elle le soutient avec cette forme de courage effronté qu'il appréciait chez elle, soupirant doucement.
"Et toi, crevette ? Ne devrais-tu pas baisser les yeux face à moi, histoire de te faire pardonner pour celui que tu sembles considérer comme ton père, au lieu d'ainsi me tenir tête ?"
Kali demeura muette dans un premier temps, tiraillée.
Que devrait-elle donc faire à présent ?
Concéder, et s'incliner... Ou jouer ?
Non... elle n'avait foutrement aucune envie de faire preuve de prudence. Elle était déjà condamnée à mort, elle pouvait bien tenter sa chance...
"Vous menacez de me couper en deux, Sukuna-san..." souffla-t-elle doucement sans détourner ses prunelles des siennes. "Alors je suis navrée, mais je me vois mal vous tendre la nuque pour vous faciliter le travail."
Les pupilles de Ryomen se dilatèrent légèrement en entendant la réponse de la petite hybride, lui arrachant un ricanement. La petite effrontée... Brusquement, il plaqua le corps de la jeune femme d'un coup contre le sien, une main au creux de ses reins, l'autre allant agripper sa queue de cheval d'automne. Le canon de l'arme qu'elle tenait toujours glissa jusqu'à sa gorge, s'enfonçant au niveau de sa carotide, son autre main libre vint se plaquer contre son puissant pectoral strié de noir. Malgré la surprise flagrante qu'il pouvait lire dans le regard d'or de l'européenne, ainsi que la brusque tension parcourant son être comme de l'électricité, elle ne lâcha pas ses yeux des siens, continuant à le défier. Se rendait-elle compte à quel point il aurait pu être facile pour lui de l'anéantir ?
"Qui te dit..." murmura-t-il de sa voix grave et caressante. "...que ce ne serait qu'en deux, petite insolente ?"
Ils se dévisagèrent quelques instants sans plus rien dire, l'air entre eux s'alourdissant de menaces informulées, d'énergie occulte brute, mais également... de quelque chose de plus bestiale et primaire... Comme à chaque fois qu'ils se retrouvaient si proche l'un de l'autre, une forme de désir animal semblait crépiter entre eux, saturant leurs sens aiguisés par la crise. Kali déglutit faiblement, sentant le feu embraser le sang dans ses veines alors qu'elle pouvait lire la faim de Sukuna s'attiser au fond de la lave de ses yeux toujours braqués sur elle.
"Maharahi ?" La voix de l'hindou se faisait de de plus en plus paniquée. "Sultan, je vous en conjure, ne lui faites pas de mal ! Je... Je vais envoyer des hommes au sanctuaire pour la secourir..."
"N'en fait rien, Vieil homme." siffla d'un ton sans appel le fléau millénaire, impérieux. "Sinon c'est eux que je découperai en pièces."
Ryomen relâcha sa prise sur les cheveux de la jeune femme, puis il porta sa main libre à sa joue pour l'effleurer du bout de ses ongles sombres et pointus, ne parvenant pas à détacher son regard de celui de Kali, incandescent.
"Tu sais bien que je ne peux rien faire au vieil homme, n'est-ce pas ? Je ne sais pas où il se trouve, je ne pourrais pas lui faire payer son manque de respect éhonté. Alors à quoi joues-tu, à me défier ainsi ? Je pourrais facilement te le faire payer à toi, par contre..."
"Je vous défie, vous trouvez ?" susurra l'impertinente demi démone du bout de ses lèvres délicatement ourlées, un léger sourire les habillant à merveille. "Je ne fais que réagir à vos actes pourtant, Sukuna-san, de façon proportionnée et adéquate."
"De façon proportionnée et adéquate à mes actes, dis-tu ?" répéta-t-il, un sourire terrible dévoilant ses dents étincelantes et pointues. "Vraiment, crevette ? "
Il plaqua un peu plus son corps au sien, allant saisir son menton avec fermeté, approchant ses lèvres des siennes, les faisant délicatement se frôler. Comme enivrée, la demoiselle éloigna son arme du cou du fléau, les yeux mi-clos, le souffle court et le cœur tambourinant à tout rompre dans sa poitrine. Putain, comment faisait-il pour lui faire perdre pieds aussi facilement ? Et dire que Prasad était non loin, au bout du téléphone abandonné sur la table...
"Et si je fais ça, crevette, comment vas-tu répondre de façon proportionnée et adéquate, dis-moi ?"
A peine eut-il prononcé ces mots qu'il effaça les ridicules millimètres les séparant encore pour commencer à l'embrasser, coupant le souffle à sa prisonnière.
Ses lèvres avaient le gout épicé des ramens qu'il avait mangé, faisant naitre un sourire sur celles de l'hybride.
Kyu poussa un faible cri de contestation depuis la table, toujours écrasé par la puissance phénoménale libérée par le démon millénaire. Cependant, en cet instant, elle s'en moquait éperdument, se hissant sur la pointe des pieds pour mieux pouvoir répondre aux baisers du roi tatoué, passant ses bras, dont l'un toujours armé de son révolver, autour de sa nuque. Ses mains à lui trouvèrent naturellement ses hanches, glissant sous son t-shirt pour pouvoir aller se saisir de sa chair tendre et douce, la griffant de ses ongles acérés. Sa langue se glissa dans sa bouche, allant taquiner sa consœur, approfondissant à chaque seconde un peu plus leurs baisers partagés.
Putain...
Il avait envie de terriblement plus... Mais le rat volant ne cessait de crier non loin, sans cesse plus fort, et il risquait d'éveiller Yuji, chose qu'il ne voulait assurément pas. A contre cœur Ryomen interrompit leur échange, et se redressa lentement, allant passer son pouce sur la bouche un peu rougie de l'hybride, la dévorant du regard.
"Je crois que ça me plait bien ton truc..." Murmura-t-il tout bas, un sourire satisfait aux lèvres. "Proportionné et adéquate... Je passe l'éponge pour cette fois, crevette... Mais que ça ne se reproduise plus."
Il s'éloigna un peu avant d'aller se pencher vers le téléphone, s'adressant directement à Prasad en foudroyant l'appareil retourné de son regard de feu.
"Sache que je fais ce qui me chante et je n'ai aucune obligation envers qui que ce soit. C'est le seul et le dernier avertissement que je te donne, vieillard."
"Sultan ?" s'étouffa l'intéressé de l'autre côté du monde, son timbre de voix trahissant un terrible fébrilité. "Où est la Maharani ? Maharani, vous allez bien ?"
Alors que Sukuna balayait l'air pour chasser un Kyu furieux lui tournant autour alors qu'il avait rappelé à lui son écrasante aura, Kali se jeta sur son portable pour le porter à son oreille, oubliant qu'elle était en visio.
"Je... je vais bien, Prasad. Ne t'inquiète pas." Elle glissa un regard vers l'homme torse nu foudroyant la chauve-souris du regard, prenant visiblement terriblement sur lui pour ne pas lui régler son compte. "Sukuna... Sukuna-san a juste un fort caractère."
"Le caractère du plus grand roi ayant jamais foulé cette terre !" Compléta ce dernier, levant l'index, professoral.
"Le caractère d'un gamin capricieux à l'égo extraordinairement surdimensionné, malgré toute sa puissance..." siffla Prasad avec humeur dans la langue originelle de Kali, lui demandant des trésors de self control pour ne rien laissé paraitre.
Incontestablement, Sukuna venait perdre beaucoup de point de charisme aux yeux de son protecteur, c'était évident. Toucher à elle, c'était LA chose à ne pas faire... Prasad avait bien un fils de son sang, mais leur relation étaient compliquées, vu que ce dernier n'avait jamais voulu reprendre le flambeau de leur mission sacrée. A l'éveil de Kali, leurs relations s'étaient encore un peu plus distendues, vu combien le chef de famille lui accordait de l'importance, plus qu'à toute autre chose. La petite hybride était devenue la prunelle de ses yeux, l'air de ses poumons fatigués, la raison de chacun de ses actes. Alors la menacer était une chose qu'il ne pouvait tolérer, même de la part de l'être qu'il savait le plus puissant du monde.
"Qu'a-t-il dit ?" demanda Ryomen en haussant un sourcil, débarrassé de Kyu qui était allé se percher sur l'un des meubles de la cuisine, ses yeux lançant des éclairs. Il alla piquer le paquet de chips que la jeune femme avait abandonné un peu plus tôt, s'appuyant avec nonchalance contre la table, en fixant le contenu avec intérêt. N'arrêtait-il donc jamais d'avoir faim ?
"Que votre puissance était incontestable, voyons." mentit Kali, un sourire un rien amusé aux lèvres.
Il renifla doucement, comme s'il n'avait en aucun cas besoin de l'approbation de quiconque pour être certain de sa suprématie, rejetant le paquet sur la table.
"Hum... Je me fous royalement de son avis. Vient plutôt me mettre en marche la boite magique, j'ai envie de voir la suite des aventures des mini humains qui s'entretuent."
Sans lui laisser le temps de réagir, le fléau vint lui attrape le poignet et l'entraina à sa suite pour aller dans le salon. Il se laissa tomber dans le canapé rouge, s'y installant confortablement, avant d'aller se saisir de la télécommande pour la tendre vers Kali, la secouant doucement. Elle le regarda alors, haussant les sourcils et les épaules, lui montrant le téléphone qu'elle tenait d'une main et son arme de l'autre.
Sukuna soupira lourdement, levant les yeux au ciel. "Lâche donc ton pistolet, cowboy, il ne servira à rien contre moi."
En entendant ça, Kali ne put retenir un petit sourire, croisant ses bras sous sa poitrine. "Cowboy ? Yuji vous à fait voir des westerns ?"
"Maharani..." Les interrompit Prasad, toujours présent au bout du fil. "Vous avez sorti le colt ?!"
Et merde... Niveau discrétion, c'était râpé. Soupirant à son tour, vaincue, l'hybride posa son révolver sur la table basse et alla s'assoir de l'autre côté du canapé. Elle récupéra la télécommande que lui tendait un Ryomen victorieux, allumant la télé avant de brusquement se tourner vers le démon, le pointant de la zapette d'un air farouche.
"Les... habits... restent." Elle articula avec soin chacun de ses mots, tentant d'y mettre autant d'autorité dont elle était capable. "Quelque puisse être la chaleur infernale qu'il puisse régner. Ou quelque puisse être l'excuse que vous pourrez bien trouver. Pas touche."
L'intéressé haussa les épaules, affichant une petite moue espiègle. "Rabat joie..."
"Les... Les habits ?"
Kali eut l'impression que de l'eau glacée lui coulait le long du dos. Voilà une discussion qu'elle aurait préféré que Prasad n'entende pas...
"Donc oui, le colt..." Reprit la jeune femme, espérant ainsi détourner l'attention de son protecteur sur autre chose que la fâcheuse tendance du roi des fléaux à vouloir la dénuder... ou de se dénuder lui-même ! "Eh bien, pour tout t'avouer, un étrange individu est venu à ma rencontre aujourd'hui. Il connaissait les phrases de sécurité. Il a dit s'appeler... Comment c'était déjà... Waza... Wata.. Wata-quelque chose Hiroaki je crois."
"Oh, Watanabe, fils, vous voulez dire ?" Prasad se passa pensivement la main sur le menton, se calant dans son large fauteuil. "Un sacré phénomène, je le conçois. Son père s'en fait des cheveux blancs avant l'heure. Mais je vous assure qu'il fait vraiment partie de nos hommes, sa famille est rattachée à la mienne depuis des décennies."
"Hum... " maugréa Kali, moyennement rassurée en repensant à l'étrange personnage aux yeux couleur anis. "Il est carrément flippant oui..."
D'un coup Sukuna vint donner un coup de coussin dans le dos de l'hybride, la faisant sursauter.
"Eh !"
"Les mini-humains, crevette !" s'impatienta-t-il de mauvaise grâce, trouvant visiblement sa discussion avec Prasad des plus ennuyeuses.
"Vous m'avez pas dit ce que vous vouliez, comme mini-humains !" s'offusqua l'hybride, pointant la télévision de la main. Qu'il pouvait être gamin parfois !
"Le truc d'hier, voyons !" répliqua le démon tatoué, comme si cela avait été une évidence absolue qu'elle aurait du savoir.
"Game of Thrones ? Mais je dois le regarder avec Yuji !"
Sukuna la regarda en plissant les yeux, visiblement contrarié, son aura recommençant déjà à se faire plus lourde et menaçante dans la pièce. Kali avait beau être un tantinet suicidaire et adorer l'adolescent, elle se voyait mal risquer sa vie pour une série télévisée...
"Bon, O-KAY !" concéda avec un rien d'exaspération la demoiselle aux yeux d'or, cliquant sur les boutons pour lancer rapidement un épisode. "Vous avez gagné ! Mais je vous préviens... je ne regarderai pas !"
"Ah mais si c'est pour me déranger en parlant avec ton vieil homme, crevette, tu retournes dans la cuisine en attendant d'avoir fini ! Et tu en profiteras pour me ramener d'autres trucs à manger !"
Ils se défièrent du regard pendant une poignée de secondes avant que Kali ne finisse par céder, se levant d'un bond, s'éloignant à grandes enjambées.
"Vous êtes impossible !" Bougonna-t-elle en quittant la pièce, traversant le couloir désert et plongé dans l'obscurité. "Et si je vais dans la cuisine... C'est que parce que j'ai faim ! Absolument pas pour vous obéir..."
Au fond elle-même, elle savait que ce n'était qu'en partie vrai... Mais ainsi elle pouvait terminer sa conversation avec Prasad tranquillement, sans risquer une nouvelle gaminerie du roi des capricieux.
"Il a un caractère de cochon !" souffla l'hindou depuis le téléphone que Kali avait emporté avec elle, lui arrachant un sourire en coin.
Jamais elle n'avait cru entendre son protecteur parler de la sorte de celui qu'il nommait pourtant le sultan, car il s'évertuait habituellement à garder son sang-froid en toutes circonstances. Apparemment, l'image qu'il avait de Sukuna avait été bien écorchée, ce soir.
"Je vous avais prévenue, c'est un personnage unique en son genre…" s'amusa la petite hybride, allant s'assoir à la table de la cuisine, Kuy venant se poser devant elle.
"Je n'imaginais pas à ce point..." concéda-t-il du bout des lèvres, passant une main dans ses cheveux blanchis par les années.
"EN JAPONAIS, BANDE DE SAUVAGES !" éructa l'homme tatoué depuis le salon, les faisant sursauter, Prasad, Kyu et elle, faisant rater un battement à leur cœur surpris.
Kali se tourna vers la porte, interloquée. Il... Il les entendait de là-bas ? N'était-il pas sensé regarder sa série ? Comme quoi, il s'intéressait bien plus à ce qu'ils se disaient qu'il voulait bien l'admettre, le gamin...
A cette idée, un léger sourire apparut sur les lèvres de la demoiselle qui alla doucement caresser le petit fléau volant pour le rassurer.
"Maharani..." reprit donc finalement Prasad en japonais, peu désireux d'à nouveau attiser le mécontentement du démon caractériel cohabitant avec sa protégée. "Que vous voulez Hiroaki ?"
Dans un premier temps Kali ne répondit pas, se contentant de fouiller dans les achats qu'elle avait fait un peu plus tôt, choisissant quelques snacks pour la soirée. Elle regarda son paquet de chips à moitié entamé, une légère grimace déformant sa bouche.
Il l'avait traité de mochi, le goujat...
Elle devrait peut-être lui ramener des choux de Bruxelles pour se venger... Elle aurait pu les enrober de chocolat, histoire de le piéger... Il faudrait qu'elle y pense la prochaine fois qu'elle ferait des courses...
"Maharani ?"
La voix de Prasad extirpa la petite hybride de ses pensées, la faisant fixer l'écran de son téléphone.
"Il... voulait me mettre en garde. Me dire que j'avais été imprudente et qu'on m'avait repérée. Que tu étais au courant, et qu'au lieu de me prévenir tu avais préféré augmenter les effectifs autour de moi. Je sais que tu ne cesses jamais de penser à mon bien, mais je ne suis pas une enfant, Prasad. Malgré mon âge. Je suis consciente des choses. Je suis capable de gérer. Et je gérerai justement bien mieux si j'avais toutes les cartes en mains. Enfin toutes les cartes... Toutes celles que je peux avoir au moins. Est-ce que tu comprends ?"
Il soupira, se laissant aller contre le dossier de son fauteuil.
"Oui... Je comprends ce que vous voulez dire, Maharani... Je n'ai pensé qu'à votre sécurité, vous le savais."
"Je sais et je n'en doute pas un seul instant." Kali adressa un sourire complice à l'écran de son téléphone. "Mais je dois aussi prendre soin de moi par mes propres moyens. Promets-moi, je t'en conjure, qu'à l'avenir, tu ne me cacheras plus jamais rien, s'il te plait."
"Vous avez ma parole, ma reine." L'hindou posa sa main sur son cœur, solennel, la fixant avec une sincérité débordante.
Comme à chaque fois qu'elle discutait avec lui, l'européenne pouvait sentir ses craintes s'apaiser quelques peu, tant sa bienveillance à son égard était sans borne. Il avait le don de la rassurer et de lui redonner confiance. Assurément, il était ce qui s'approchait le plus pour elle d'un père...
"Crevette !"
La voix puissante de Sukuna retentit depuis le salon, ramenant Kali à la réalité présente. Le très séduisant et très capricieux roi des fléaux semblait de nouveau s'impatienter...
"Je vais devoir y retourner, Prasad." soupira l'hybride en rassemblant les différents sachets qu'elle comptait apporter au démon, Kyu volant jusqu'à son épaule pour s'y percher. "ça m'a fait plaisir de te parler."
"Maharani..."
La voix de vieil homme attira l'attention de l'intéressée sur l'écran de son portable, la faisant se figer, intriguée par le ton qu'il avait employé.
"Oui, Prasad ?"
Il sembla hésiter quelques instants, attisant un peu plus la curiosité de la demoiselle. Finalement, il reprit la parole.
"Dois-je chercher les reliques du Sultan ?"
Kila se tut en entendant sa question, complètement prise de court.
Les reluques de Sukuna...
Chacune d'entre elles rendrait un peu plus de sa terrifiante puissance originelle au roi des fléaux.
Chacune d'entre elles risquait d'effacer un peu la capacité de Yuji à le canaliser.
Que faire ?
Permettre à Sukuna de retrouver sa liberté ou protéger Yuji ?
C'était un dilemme insoluble.
Sukuna ou Yuji ?
Yuji ou Sukuna ?
Elle glissa un regard vers le salon, réfléchissant à toute vitesse, le cœur tambourinant à tout rompre dans sa poitrine, raisonnant jusqu'à ses oreilles.
Elle pensa au sourire si doux de Yuji, son âme lumineuse et chevaleresque, son courage face à une situation impossible qui lui avait été imposée par les sombres jeux du destin.
Elle pensa à Sukuna, qu'elle connaissait pour ainsi dire si peu tant il se dissimulait derrière son épaisse carapace de roi des démons intouchable, mais qu'elle sentait bien plus complexe qu'il ne souhaitait le montrer...
Elle pensa à elle-même, à sa propre prison avant son réveil. A la solitude, l'angoisse, la peur, le froid et l'obscurité qu'elle avait connu durant ce qui lui avait paru être une éternité.
Ça... Elle ne pouvait le souhaiter à quiconque...
"Oui..." murmura-t-elle doucement, fermant les yeux, sentant son cœur se briser en sachant que ses mots risquaient peut-être de condamner Yuji. "Oui, s'il te plait, Prasad... Cherche les..."
Elle déglutit faiblement, cherchant à se rassurer en se disant qu'avec un peu de chance, Prasad aurait aussi peu de chance avec les doigts du démon millénaire qu'avec la moitié de son orbe. Et, même s'il venait à les trouver... Il serait toujours tant de réfléchir à quoi en faire.
L'hindou acquiesça.
"... Vos désirs sont des ordres, Maharani... Je reste votre éternel obligé. Prenez soin de vous, je vous en conjure."
Il raccrocha alors, laissant seule Kali dans la cuisine, quelque peu troublée. Qu'avait-elle fait ? Était-ce le bon choix ? Qu'aurait-elle pu faire d'autre, de toute manière ? Les reliques de Ryomen étaient extrêmement puissantes, il valait mieux qu'elles soient entre les mains de Prasad que d'autres individus...
Armée de cette conviction un peu rassurante, la jeune femme mit son téléphone dans sa poche et récupéra ses victuailles, retournant vers le salon où l'attendait un Sukuna particulièrement guilleret qui l'accueillit avec un large sourire. Visiblement, GOT avait un étonnant effet sur lui...
"Tu en as mis du temps, crevette !" Commença-t-il avant de tapoter l'espace du canapé près de lui, tout sourire. "Allez, vient t'assoir, plus vite que ça."
Kali posa les nombreux sachets de snacks qu'elle avait apporté sur la table, Kyu se laissant tomber au milieu, avant de glisser un regard suspicieux vers l'homme tatoué étrangement sympathique.
"Je vous préviens, Sukuna-san que si vous essayez encore de m..."
"je serai un vrai gentleman, crevette." la coupa-t-il, levant les yeux au ciel.
En entendant cela, l'hybride ne put s'empêcher de hausser un sourcil, venant planter ses mains sur ses hanches.
"Après hier, je me méfie de votre définition de ce mot !"
"Tu rabâches, petite effrontée..." soupira-t-il, un sourire en coin. "Tu as dit au vieil homme de chercher le reste de mes reliques, crevette. Alors je veux bien ... ne pas te taquiner outre mesure, ce soir."
En entendant cela, elle se laissa tomber à l'autre extrémité du canapé, laissant sa tête aller contre le dossier en fermant les yeux, terrassée par une brusque fatigue. Était-il donc impossible d'échapper à cet homme ?
"Alors vous écoutiez... Vous savez que c'est pas très pol..."
D'un coup un poids s'abattit sur ses cuisses, la faisant sursauter. Elle se redressa un peu, rouvrant les yeux pour découvrir que le démon millénaire s'était allongé de tout son long sur le canapé, posant la tête sans même lui avoir demandé la permission sur ses jambes.
"Vous gênez pas surtout !" S'offusqua Kali, le feu lui montant aux joues.
Sukuna posa un bras sur ses cuisses nues, se tournant vers elle en se plaquant contre son ventre avec un sourire terriblement espiègle, visiblement très fier de lui.
"Jamais crevette... Tu n'as qu'à pas à être moelleuse comme un mochi, ça fait de toi un excellent coussin !"
L'intéressée s'étouffa à moitié en entendant cela, son visage virant au cramoisi. "Mais il y en a pleins, des coussins ! Et vous aviez dit que vous me laisseriez tranquille ce soir !"
"Tututut..." s'amusa le roi de fléaux, allant poser un doigt sur les lèvres de la petite hybride, se distrayant haut plus haut point de son air ouvertement troublé. "J'ai dit que je ne te taquinerai pas outre mesure... Pas que je ne le ferais pas du tout... Maintenant, silence, tu m'empêches d'entendre les hurlements des mini-humains !"
Sans lui laisser le temps de répondre, Sukuna se réinstalla confortablement contre la demoiselle, allant attraper un sachet au hasard sur la table, fier comme un paon.
Kali quant à elle fixa quelques instants sa nuque tatouée, interdite, sentant chaque centimètre carré de sa peau en contact avec le fléau comme irradier de chaleur.
Elle ferma les yeux, se laissant doucement retomber en arrière, vaincue pour la soirée.
Elle était Kali, hybride rarissime, maitresse des flammes d'ombres...
Crevette-mochi...
Et à présent coussin du roi des fléaux...
C'était pas de tout repos de côtoyer cet homme-là, assurément...
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Mot de l'auteur :
M : Hellooooo tout le monde ! J'espère que vous allez bien ! Et que votre rentrée ou retour de vacances s'est bien passé ! Courage à toutes et à tous et vivement les prochaines vacances lol
Mer ci d'avoir lu ce nouveau chapitre, j'espère qu'il vous aura plu, moi je me suis pas mal amusée en l'écrivant en tous cas.
Kali, arrivant fringuée à la Calamity Jane : Yeah, j'ai un flingue maintenant !
Sukuna, moqueur : Pas besoin de ça pour te défendre, crevette, tu as qu'à éternuer au visage de tes adversaires pour les mettre au tapis …
Kali, virant au cramoisi : Mais arrêtez avec ça, j'avais de la poussière plein le nez et j'ai pas fait exprès !
M : tenez, j'ai réussi à prendre un cliché de Sukuna, intérieurement, quand la choupette l'a fait sursauter !
Sukuna, outré : J'ai pas sursauté !
M, un sourire en coin : intérieurement, oui !
Kali : en tous cas, j'ai hâte de pouvoir m'en servir sur quelqu'un ! Genre si quelqu'un me traite encore de mochi ou autre truc du genre...
Sukuna, levant les yeux au ciel : je fais que constater, crevette...
Kali, croisant les bras sous sa poitrine : où si quelqu'un se sert de moi comme d'un coussin...
Sukuna, haussant les épaules : t'es plus confortable, c'est pas ma faute …
Kali, outrée : En plus vous m'avez mangé toutes mes chips !
Sukuna, regardant ailleurs : mouarf, elles étaient même pas si bonnes que ça !
Kali, choquée : Mais c'est pire encore !
M : c'est la loi de la jungle ma parole par ici... Te laisse pas faire Kali choupette !
Bref, un grand merci à tous et à toutes de nous suivre ! Merci encore particulièrement à celles et ceux qui prennent le temps de laisser un com ou plusieurs, ça fait chaud au cœur !
Je vous dis à très vite pour la suite de nos aventures, portez vous bien !
