Chapitre 4 : Et je suis en train de m'effondrer, Je crois que je m'effondre

Le visage du directeur Dumbledore détenait une expression de profond chagrin face aux nouvelles de Severus Rogue. Il a commencé à faire les cent pas, ses lèvres bougeaient en marchant mais aucun son ne sortait de sa bouche.

Severus croisait les bras pendant qu'il regardait l'agitation de Dumbledore.

Après environ cinq minutes d'attente, Rogue a commencé à penser tout haut

"Il devra être déplacé ailleurs, rester avec cette satanée famille ne semble pas être une sage décision."

Dumbledore, tout en continuant à marcher "C'est plus facile à dire qu'à faire Severus. Le garçon est protégé là-bas."

"Seulement de l'extérieur, il n'est pas protégé de l'abus qu'il endure à l'intérieur de ces murs."

Albus Dumbledore acquiesça, sa bouche se figea et il cessa de faire les cent pas. "Il va falloir que je trouve une autre solution. Heureusement, le temps joue en notre faveur. Harry n'aura pas à se soucier de retourner là-bas avant la fin de l'année scolaire."

Rogue acquiesça tandis que Dumbledore marquait une pause. Lorsqu'il reprit la parole, il répondit à la question suivante de Rogue.
"Je ne pense pas que je vous accompagnerai dans votre bureau. J'ose dire que Harry doit probablement en avoir assez avec cette découverte que vous avez faite concernant cette malheureuse et impardonnable situation."

Severus sourit à cette déclaration. Le garçon était certainement assez embarrassé, d'autant plus que c'était lui qui l'avait découvert. Il se souvint alors de son visage qui s'était rembrunit. Il ressentit soudain une irritante culpabilité qui le tenaillait. Le garçon avait besoin qu'on s'occupe de lui.

"Dois-je demander à Potter d'aller voir Madame Pomfrey ?

Dumbledore secoua la tête. "Je crains d'avoir envoyé Poppy faire une course ce soir, et elle ne reviendra pas avant une heure ou deux."

Le visage de Rogue exprima sa confusion. "Monsieur le Proviseur, vous ne pensez pas qu'il soit sage de laisser le garçon partir sans traitement ?"

Les yeux de Dumbledore brillent d'un éclat malicieux sous ses lunettes en demi-lune. Il tendit ensuite à Rogue un pot de crème cicatrisante après l'avoir fait surgir de nulle part.

Severus ne put s'empêcher de fermer les yeux de frustration. "Très bien, je vais donner le pot à Potter et le renvoyer chez lui. Mais je pense toujours qu'il devrait recevoir un traitement professionnel. Vous n'avez pas vu ses blessures, Albus. J'ai l'impression qu'elles nécessiteront plus d'attention que l'application d'une simple pommade."

Les bords de la bouche de Dumbledore se crispèrent, comme s'il essayait de cacher un sourire. "Oh non, il sera soigné, Severus, mais pas par Madame Pomfrey."

Les yeux de Rogue se rétrécirent et alternèrent entre le pot qu'il tenait dans ses mains et le petit sourire qui ornait désormais le visage de Dumbledore.

"Je ne suis pas la nourrice de ce garçon" siffla le professeur Rogue.

"Vous l'avez dit vous-même, Severus, ce garçon a besoin d'un traitement professionnel." Dumbledore joignit les mains comme si la conversation était terminée, avant de se diriger vers son bureau.

Rogue ne put s'empêcher de se renfrogner lorsque Dumbledore se détourna.

Une fois le directeur assis, ses yeux se levèrent pour se tourner à nouveau vers Rogue.

"Après Poppy, c'est en vous, Severus, que je place ma confiance concernant vos talents de guérisseur. Et je crains que..." Dumbledore s'interrompt, son visage exprimant une profonde tristesse. "Je crains que Harry ne connaisse à nouveau une année très difficile, et nous n'avons pas besoin que toute l'école soit au courant, cela ne ferait qu'alourdir le poids qui pèse sur ses épaules."

Rogue céda. Il savait que c'était son dernier mot, et on ne discute pas avec Albus Dumbledore.

Les robes sombres de Rogue s'enroulèrent autour de lui et il se retourna rapidement pour se diriger vers la cheminée.

La voix de Dumbledore retentit derrière lui, sur un ton de regret. "Dites à Harry que je suis désolé de ne pas avoir pu venir le voir personnellement."

D'un signe de tête, Rogue disparut dans un flot de flammes vert émeraude, laissant Dumbledore sourire tristement en retournant à sa lecture.


En l'espace de cinq minutes, Rogue réapparut dans la cheminée. Il passa devant Harry et posa la pommade sur son bureau, l'air contrarié.

Harry observa son professeur avec confusion, car Rogue n'avait encore rien dit. Il regarda son professeur s'asseoir sur son fauteuil et commencer à déboutonner les poignets des manches de sa chemise noire boutonnée.

"Hum, excusez-moi, monsieur ?"

Rogue haussa les sourcils, comme s'il attendait que le garçon continue, mais ne leva pas les yeux. Il commença à retrousser les manches blanches de son maillot de corps par-dessus les manches noires déboutonnées.

Harry humidifia nerveusement ses lèvres avant de demander "Professeur, où est Dumbledore ?

Rogue répondit en croisant enfin le regard de Harry. "Le professeur Dumbledore ne viendra pas vous voir ce soir. Il a d'autres affaires importantes à régler" déclara-t-il nonchalamment en finissant de retrousser ses manches.

Une expression déçue traversa les traits de Harry qui détourna le regard.

Rogue le regarda fixement. "Il vous présente ses excuses."

"Oh" répondit lentement le jeune garçon.

Il semblait que le directeur de l'école ne se préoccupait pas beaucoup de ses blessures. Non pas que Harry ait voulu que d'autres personnes le voient dans cet état, mais l'idée que Dumbledore ne pouvait même pas lui accorder une minute le faisait se sentir... malheureux.

Rogue observa le garçon qui fixait ses mains.

"Dois-je monter voir Madame Pomfrey maintenant ?" demanda Harry à voix basse.

Rogue roula des yeux. "Potter, interprétez les signaux voulez-vous ?"

Harry croisa le regard de son professeur, son visage étant un masque de confusion.

Rogue soupira bruyamment et secoua la tête. "Je suis là, avec mes manches retroussées et un pot de crème cicatrisante posé à côté de moi, et vous êtes là avec une demi-douzaine de griffures, d'écorchures, d'hématomes sur le dos."

Une rougeur embarrassée couvrit les joues de Harry. "Vous voulez dire que... Enfin vous allez ? Ce n'est pas vraiment une bonne idée... Je ne pense pas que..."

"Très clair Mr Potter" rétorqua Rogue.

Harry plissa les yeux devant l'insulte.

Le professeur ferma les yeux et commença à se frotter les tempes en faisant de petits cercles. "Ce sera beaucoup moins pénible pour nous deux si vous vous taisez, si vous enlevez votre robe et votre chemise et si vous vous asseyez."

Harry s'exécuta, comprenant qu'il n'avait pas d'autres issus, et retira ses vêtements déchirés. Puis, lentement, comme s'il était condamné à mort, il se dirigea vers le tabouret en face de Rogue et s'assit.

Rogue ne put s'empêcher d'avoir un rictus en regardant Harry dans les yeux. "Tournez-vous, Potter."

Avec une nouvelle bouffée d'embarras, Harry acquiesça en lui tournant le dos. "C'est vrai. Euh... désolé" ajouta-t-il maladroitement.

Rogue marmonna quelque chose d'inaudible tout en ouvrant le pot de crème cicatrisante.

Le professeur commença à appliquer la crème lorsque sa mâchoire se décrocha à la vue du dos de Harry. Il avait, certes, l'air mal en point, mais de près, c'était... indescriptible. Les lésions étaient profondes et beaucoup d'entre elles étaient toujours ouvertes et ensanglantées. Chaque blessure était entourée d'ecchymoses, et certaines étaient "décolorées" d'une manière très étrange

Rogue savait ce que signifiait cette décoloration et, alors qu'il commençait à appliquer la crème avec autant de douceur que possible, il décida de poser quelques questions à Harry.

"Les avez-vous bien nettoyé, ces coupures ?"

Harry se sentit mal à l'aise face à ce ton accusateur. "Non, monsieur. Je n'aime pas particulièrement les inspecter" répliqua-t-il de façon ironique.

Après quelques minutes, qui paraissaient des heures pour Harry, Rogue demanda à voix basse "À chaque fois ?"

Harry ne répondit pas de suite. Ses yeux se fermèrent lorsqu'il répondit. "Cela arrive régulièrement, oui."

Rogue secoua la tête, ses yeux se fermant tandis qu'il tentait d'apaiser la colère qu'il sentait monter en lui. Ces moldus stupides... Pendant tout ce temps, ils ont fait ça au garçon, et personne ne l'a jamais remarqué. Comment était-ce possible ? Il était furieux. Furieux contre ces moldus, évidemment, pour avoir fait ça, furieux contre le garçon pour n'avoir jamais rien dit, mais également furieux contre le corps enseignant et lui-même. Puis il se demanda pourquoi devrait-il être furieux contre lui-même ? Il n'a rien fait de mal. Certes, le garçon était dans sa classe depuis cinq ans, il le voyait pratiquement tous les jours et n'avait jamais rien remarqué d'anormal... mais ce n'était pas son problème.

Harry prit alors la parole. "Je ne peux pas, je veux dire... J'ai essayé de comprendre pendant toutes ces années ce que j'avais fait."

Harry s'interrompit et le professeur Rogue fut dégoûté par ses paroles.

"Potter, commença Rogue d'un ton dangereux, il n'y a rien que vous ayez pu faire pour mériter ce genre de traitement."

Harry ferma les yeux, le picotement familier de ce qui devrait être des larmes s'agitant aux coins de ses paupières. En réalisant soudainement ce qu'il était en train de faire, Harry essaya de se sortir de sa pitié. Qu'est-ce qu'il faisait à admettre ses pensées les plus profondes et les plus sombres ? Et au professeur Rogue ! Mais il y avait quelque chose dans cette situation. Quelque chose dans la douceur et la bienveillance de l'homme à l'égard de Harry. Enfin, aussi doux et attentionné que Rogue pouvait l'être. Cela lui faisait penser à Sirius.

"Mais il doit bien y avoir quelque chose..." poursuivit faisait longtemps que Severus ne s'était pas senti aussi en colère. "C'est le fait que tu existes qui les met en colère, Potter !"

Les yeux émeraude de Harry s'écarquillèrent, un souvenir du dernier trimestre, lorsqu'il avait regardé dans le pensine, lui revenant en mémoire.

/Laissez-le tranquille. Qu'est-ce qu'il vous a fait ?"
"Eh bien, c'est plutôt le fait qu'il existe, si tu vois ce que je veux dire..."/

Harry se mordilla la lèvre avec culpabilité. Il n'aimait pas que son cerveau établisse une corrélation entre la façon dont les Dursley le traitaient et la façon dont son père et ses amis traitaient Rogue. Son père n'était pas comme les Dursley. Harry se rendit alors compte que son cerveau avait également mis le professeur Rogue et lui-même dans la même catégorie. Il essaya de chasser ces pensées de son esprit, ça le mettait mal à l'aise.

Une autre question vint alors à l'esprit du jeune garçon, une autre question qui le sortit de ses pensées actuelles.

"Professeur Rogue ?"

"Hm ?"

Harry s'arrêta devant le grognement agacé de son professeur. Se mordant la lèvre avec détermination, il poursuivit sa question.

"Je me demandais simplement comment vous aviez pu voir le souvenir exact que vous cherchiez."

Le professeur n'arrêta ses soins qu'un instant, puis continua son travail tout en répondant.

"Parce qu'à ce moment-là, c'était la seule chose que tu ne voulais pas que je voie. C'est pourquoi, lorsque j'ai exécuté la legilimencie sans que tu sois prêt à le faire, c'était au premier plan de ton esprit."

Harry hocha la tête d'un air penaud.

Même de dos, Rogue pouvait voir que le jeune garçon était embarrassé.

"Si tu avais pris la peine de t'entraîner l'année dernière, poursuivit le professeur en connaissance de cause, tu aurais été capable de me repousser. Je n'aurais jamais vu les sévices que tu as enduré."

Les épaules de Harry se crispèrent. Rogue se déplaça lentement pour s'asseoir en face de l'adolescent.

"Monsieur Potter."

Le ton sévère du professeur attira l'attention de Harry.

"Il y a peut-être des événements dans votre vie que vous ne voulez pas que je voie, pas plus que vous ne le feriez pour le Seigneur des Ténèbres" dit Rogue en prenant une profonde inspiration. "Mais moi, au moins, je suis de votre côté."

Harry soutint le regard adouci de Rogue, il pouvait voir l'épuisement que le professeur cachait habituellement si bien.

Il y avait eu de nombreuses fois où Harry ne savait pas de quel côté était réellement Rogue, malgré la foi constante de Dumbledore dans le sorcier. Mais quelque chose dans la façon dont son professeur venait de déclarer sa loyauté, et dans l'expression de son visage, donnait à Harry l'envie de le croire.

Tandis que le professeur continuait à appliquer la pommade avec une douceur que Harry n'aurait pas cru possible de la part de cet homme, le jeune garçon pouvait sentir la tension dans ses épaules commencer à s'estomper. Maintenant que le niveau de gêne avait baissé, il ne pouvait s'empêcher de sentir la fatigue le recouvrir. Il était épuisé. Sa tête se mit à pencher tandis que ses paupières devenaient lourdes, très lourdes.

Le tabouret glissa sur le côté dans un bruit strident, propulsé par la force de Harry qui tombait dans la direction opposée. Il y eut un fracas immédiat lorsque Rogue lâcha le pot de crème pour saisir Harry par le bras.

"Potter !" cria Rogue en remettant le garçon sur ses pieds.

Harry essaya de se débarrasser du vertige qui l'assaillait. Il avait du mal à se concentrer sur Rogue alors que tout tourner autour de lui.

"Arrêtez de bouger autant" marmonna Harry de façon presque incohérente.

Rogue resserra son emprise sur Harry et le regarda avec inquiétude. Il le guida ensuite jusqu'à la chaise située derrière son bureau et l'y fit asseoir. S'assurant que Harry n'allait pas encore s'évanouir, il lâcha l'adolescent.

"Restez ici et ne pensez même pas à bouger."

Posant son menton dans la paume de sa main, Harry attendit le retour du professeur les yeux fermés.

Le professeur revint avec deux fioles de potion. Il tendit d'abord à Harry la plus petite.

"Buvez ça"

Harry acquiesça et prit la fiole. Il avala le liquide au goût atroce en trois gorgées. Une expression de dégoût traversa ses traits. "On dirait le bonbon Bertie Crochue avec le goût du vomi..." lâcha-t-il en tendant la fiole vide à Rogue.

Ce dernier s'en empara rapidement, une expression de mépris sur le visage.

"Erm, désolé professeur. Je veux dire, merci. Je me sens déjà mieux", ajouta Harry, penaud.

"C'est bien. Pensez-vous pouvoir marcher seul jusqu'à ta tour ?" La voix de Rogue était teintée de sarcasme.

"Oui" dit Harry sèchement.

"D'accord, alors. Sortez."

Rogue se dirigea vers la porte et l'ouvrit. Il resta debout tandis que Harry se levait lentement de son siège.

Harry se sentait très mal. Rogue avait été si... si peu Rogue, et il devait aller insulter cet homme pour que tout redevienne normal. Il attrapa sa robe et sa chemise sur une chaise voisine et commença à s'approcher du sorcier.

"Professeur ? Je vous remercie de ce que vous avez fait."

Comme si Harry n'avait rien dit du tout, Rogue le poussa vers la sortie. Il lui tendit ensuite une autre fiole.

"Prenez la moitié de cette fiole ce soir et l'autre moitié demain. C'est pour éliminer l'infection qui s'est déclarée sur certaines de vos blessures" ajouta-t-il devant le regard interrogateur de Harry.

Harry prit la fiole dans ses mains et la retourna avant de regarder Rogue. "Monsieur ?" demanda-t-il.

Rogue roula des yeux en soupirant. "Vraiment, Potter. Ne croyez vous pas que j'ai déjà entendu des choses bien pires que 'ça a un goût de vomi' à propos de mon travail ?"

Harry ne put s'empêcher de sourire. "J'en suis sûr, monsieur."

Rogue lança à Harry un regard sévère, avec la plus petite pointe de sourire, presque invisible, sur ses lèvres habituellement moroses. "Bonne nuit, Potter."

La porte se referma au nez de Harry, qui décida de se rhabiller avant de se rendre à la tour de Gryffondor. En inspectant ses vêtements, Harry constata que les déchirures avaient été réparées et qu'ils semblaient neufs. Quand a-t-il fait ça ? se demanda-t-il. Ce qui était encore plus étonnant, c'était que Rogue ait pris le soin de réparer ses vêtements, et Harry ne put s'empêcher de sourire en commençant à sortir des cachots.

À suivre...