Hello ! :)
Et voici la suite de la sortie au restaurant de nos deux fauves. On vous laisse découvrir comment ça se passe malgré le petit bémol.
Shadow: Merci pour ta review et ta fidélité. Contente que cette histoire te plaise toujours autant !
K-FicModo: Si tu aimes leurs moments à deux, tu vas être servie ;) Merci pour ta review.
Bonne lecture à tous !
L'addition payée, Aomine salue le gérant d'un signe de main en sortant et se glisse dans la ruelle pour rejoindre leur prochaine étape. À côté de lui, il donne un léger coup d'épaule à Kagami pour attirer son attention.
« Merci.
— Pour quoi ? C'était le deal que je te paie le repas. Mais je te préviens, ça sera pas resto tout le temps ! Même si je vais gagner la prochaine fois, achève Kagami en grommelant.
— C'est vrai ça, il m'était dû ce repas ! Ricane-t-il. On verra, en attendant j'aime bien manger à l'œil !
— Tu m'étonnes... T'habitues pas trop. »
Ils traversent rapidement le quartier, animé à cette heure avec ses nombreux bars et restaurants. Il aime bien ce coin qui reste assez simple, sans immenses boutiques débordant de marchandises, comme si ici tout était un peu plus à dimensions humaines. Ils ne tardent pas à rallier leur destination et s'installent dans un coin tranquille de la salle.
Aomine apprécie l'atmosphère de l'endroit autant que la première fois. Elle est même plus animée lui semble-t-il. Revenir ici lui donne un peu le vertige, il prend toute la mesure de combien les choses ont évolué entre eux. Il délaisse son perfecto, retrousse un peu ses manches et file au bar pour passer commande avant de s'installer sur la banquette au cuir élimé mais confortable.
« Toujours aussi cool l'ambiance
— Yeah... J'aime bien cet endroit aussi. Même si comme je le disais à Kuroko je suis pas trop du genre à sortir au bar... commente Kagami en retirant sa veste.
— J'ai pas eu l'impression... » relève Aomine un brin surpris.
Kagami rigole, un peu gêné, et s'adosse au fond de la banquette :
« Ouais... Mais c'est parce que Tatsuya était là et parce que je te fréquente... C'est pas ma routine en tout cas ! »
Le brun ricane en retour. C'est vrai qu'il y a des circonstances atténuantes.
« Essaierais-tu de dire qu'on a une mauvaise influence sur toi ?
— Ouais, ça se peut ! J'ai un rythme de vie plutôt régulier même avec mon boulot qui a pas vraiment d'horaires... » Il sourit et ajoute plus bas : « Enfin... C'est bien de changer un peu aussi.
— Moi, accusé de dévergondage... on aura tout entendu ! » s'indigne faussement Aomine en roulant des yeux.
Il note toute l'ironie de la situation, que ce soit avec Kagami qui le chamboule au point de remettre en question toute son existence ou bien le fait qu'il ait peut-être déjà soi-disant, contaminé le pur et innocent Kise de ses vices. Les versions divergent encore selon le point de vue...
« Bizarrement, je pense que c'est pas la première fois qu'on t'accuse d'un truc comme ça », note Kagami tandis qu'on leur apporte leurs boissons. « Tu me donnes l'impression d'avoir peut-être un côté fêtard... » ajoute le rouge en plissant les yeux comme pour mieux l'analyser.
Aomine se contente de soutenir son regard en buvant sa bière. C'est vrai qu'il a eu une période de débauche qui a commencé plus tôt qu'elle n'aurait dû. Il apprécie toujours de sortir, mais il doit bien admettre que c'est devenu rare sans son acolyte et encore plus depuis qu'il a tendance à repérer les sales types plutôt que de profiter. Préférant laisser planer le mystère, il lance dans un sourire amusé :
« Je ne parlerai qu'en présence de mon avocat.
— Je vois... À ce point-là alors. »
Kagami sourit et n'insiste pas. Après tout, il n'est pas vraiment certain de vouloir savoir comment Aomine s'amuse d'ordinaire. Et pour sa part, malgré son côté sage, il a fait son lot de bêtises et de soirées arrosées aussi, même s'il est vrai que ça lui semble remonter à loin et que ce n'est que récemment qu'il a recommencé à sortir.
Mais Daïki, soucieux de ne pas le laisser s'imaginer n'importe quoi non plus, consent à lâcher quelques informations. Après tout, ils sont aussi là pour apprendre à se connaître, non ?
« Rien de bien méchant. Peut-être un peu d'abus... Mais pour ma défense, Kise avait accès à des soirées légendaires, ça aurait été difficile de faire autrement.
— Des soirées légendaires ? » répète Kagami un peu ahuri, se demandant bien à quoi ça peut bien ressembler, d'autant plus si c'est une soirée à laquelle on a "accès". « Et c'est qui, Kise ? Une sorte de star ? ajoute-t-il, perdu.
— Un de mes anciens coéquipiers. Je t'en ai déjà parlé, c'est un de ceux avec qui je partais en vacances. Eh bien figure-toi qu'il était mannequin. Parfois il était payé pour assister à des fêtes privées, et souvent il était invité par des connaissances. Mais les gens du milieu, disons qu'ils savent s'amuser... Ryota en a vite fait le tour et a commencé à m'incruster pour pas se sentir seul. Et le comble ! Depuis, il m'accuse de l'avoir initié à une vie de débauche.
— Oh... OK. » Kagami hoche la tête, même s'il a beaucoup de mal à imaginer en quoi on pourrait passer un bon moment dans ce genre de soirée – lui, ça le fait frissonner rien que d'y penser. « J'imagine que pour la vie de débauche, c'était un travail d'équipe, ajoute-t-il avec un sourire en coin.
— Pff... tu parles ! Comme si j'avais eu le choix. Qui sait dans quelles emmerdes il se serait fourré si j'avais pas été là », explique-t-il agacé en repensant à certaines soirées plus que glauques. Puis il soupire et s'adoucit. « M'enfin, j'étais jeune et con et Kise avait beau dire que c'était pour le dépanner, je sais que c'était surtout pour me changer les idées. Alors j'imagine que oui, c'était du travail d'équipe... »
Kagami acquiesce, constatant qu'Aomine a l'air plutôt proche de ce Kise... Mais il a cru comprendre qu'il avait gardé des liens forts avec les anciens de son équipe. Il est un peu envieux et jaloux, sa vie sociale lui semble bien morne et inintéressante à côté. En tout cas, ces paroles semblent confirmer le côté protecteur qu'a Aomine... Avec Momoi, avec lui, et avec ses autres amis aussi apparemment.
« Et il se fourre plus dans les ennuis ton Kise maintenant ? demande-t-il.
— Oh si certainement... mais il est plus souvent à l'étranger qu'ici alors je peux pas grand-chose pour lui », répond-il en haussant les épaules avant de relever, narquois : « Et puis mon Kise est une cause perdue de toute façon, c'est un problème à lui tout seul.
— Hm ouais... J'ai noté ta tendance à l'exagération aussi, sourit Kagami en reprenant sa bière.
— Nan je t'assure... si t'as la malchance de le rencontrer, tu verras... »
Aomine aime bien l'idée que le ton de Kagami laisse entendre l'écho de la jalousie. Mais il se demande s'il ne se fait pas des films. C'est vrai qu'il est proche du blond, ou qu'il l'a été. Pourtant en imaginant la potentielle rencontre entre les deux, il a l'intuition féroce que le plus jaloux des deux sera sa tête de linotte préférée...
« Yeah... Je jugerai par moi-même. »
Si Kise est aussi haut en couleur que Kuroko et qu'Aomine lui-même, Kagami n'est sans doute pas au bout de ses surprises, ce qui finit par l'inquiéter un peu d'ailleurs.
Pensif, Aomine boit un peu de bière et se demande ce qui peut bien se passer dans la tête de son vis à vis. Son estomac se contracte en repensant au soir où il avait compris la force du lien entre Kagami et Himuro. Ce sentiment d'être un étranger, celui qui dérange, celui de trop. L'angoisse de ne pas avoir assez de temps pour tisser une relation aussi précieuse, tout en espérant y parvenir. L'amertume de découvrir qu'il n'était peut-être que de passage dans sa vie, quand d'autres la partageaient depuis plus longtemps. Il ne sait pas trop comment rassurer Kagami s'il éprouve quelque chose de similaire, ni s'il doit le faire. Alors au risque de prendre ses rêves pour la réalité, ou de transférer ses angoisses, il change de sujet.
« Demain faudra que t'en profite pour te reposer, oublie pas que les deux jours qui vont suivre seront épuisants. »
Kagami relève la tête pour regarder son vis-à-vis, son cœur se réchauffant à cette évocation. Il contemple quelques instants le brun sans rien dire, animé d'émotions contraires. Ce n'est pas la première fois qu'il joue au jeu de la séduction, dans ce genre de soirée où l'on apprend peu à peu à se connaître, mais il y a une différence de taille : il ne l'a jamais fait avec quelqu'un avec qui il avait déjà tissé des liens amicaux auparavant. Il a un peu l'impression de jouer aux funambules et il sent chez le brun la même prudence tandis qu'ils traversent ce territoire inconnu, en équilibre sur cette ligne au centre de laquelle ils essaient de se rejoindre.
« Je m'inquiète pas trop », annonce-t-il sincèrement, avant de railler : « Mais d'accord, je ferai bien attention à ne pas me coucher trop tard et à manger équilibré.
— C'est ça moque toi... on en reparle à l'arrivée hein, marmonne Daïki dans sa chope.
— En vrai, comme j'ai jamais fait de randonnée en montagne... Possible que ça m'épuise. Peut-être que tu devras m'attendre des fois !
— Le contraire m'étonnerait. Mais comme ça fait un moment pour moi, il me faudra sûrement un temps d'adaptation.
— De toute façon on n'est pas pressés. Cette fois, c'est pas une compétition, remarque le rouge avec un sourire complice.
— C'est vrai, t'as pas tort. J'aimerais juste rejoindre le lac avant le coucher du soleil mais si on part assez tôt on n'aura pas besoin de courir, affirme Aomine affichant un sourire en réponse.
— Alors on partira aux aurores. De toute façon y a rien de plus agréable que de marcher au grand air de bon matin », affirme Kagami, avant d'ajouter d'un ton rêveur : « Quand je suis à L.A... J'adore aller à la plage au lever du soleil. Parfois je vais surfer, parfois je fais un footing au bord de l'eau, parfois je me pose juste dans le sable pour regarder l'océan. À cette heure-là c'est comme si... les couleurs étaient plus pures. »
Il rit, un peu embarrassé par ces aveux, faisant tourner son verre de bière dans sa main.
Aomine l'écoute, un peu surpris par la confession mais il s'imagine très bien Kagami en lève tôt, s'adonnant à toutes sortes d'activités pendant que la plupart des gens dorment, lui inclus. Pour sa part, il est plutôt d'accord avec le côté grand air mais se lever aux aurores pour en profiter reste problématique... C'est pour ça qu'il a plutôt tendance à admirer les couchers de soleil, mais il comprend ce qu'il veut dire. À l'aube tout semble plus clair, intact. Presque immaculé. D'autant plus en pleine nature, dans sa montagne.
« C'est ce qui était prévu. Et puis si tu aimes les levers de soleil, là où je compte établir le bivouac tu seras servi.
— C'est vrai ? J'ai hâte de voir ça », sourit Kagami.
Aomine répond à son sourire, amusé par son enthousiasme. Si ça peut lui faire plaisir, il est encore plus impatient, ne serait-ce que pour voir sa réaction face au spectacle qu'offre cet endroit. Les photos qu'il a pu prendre ne rendent jamais hommage à ses souvenirs.
« Moi aussi. J'ai besoin d'une piqure de rappel. »
Se sentant toujours en équilibre sur ce fil ténu tandis qu'ils font connaissance et se tournent autour comme pour se jauger, Kagami en revient à une valeur sûre qui fonctionnait déjà dans leurs rapports amicaux. Il décide de le provoquer un peu tout en cherchant à en savoir un plus sur lui, et reprend d'un ton gentiment moqueur :
« Et de toute façon, faut bien que tu te bouges un peu pendant ton repos forcé, sinon effectivement tu vas finir par engraisser, surtout si j'y mets mon grain de sel… Et puis, je suis sûr que t'es du genre à aimer paresser mais à devenir invivable sans un truc pour te défouler !
— Hé j'te permets pas ! » s'offusque Aomine en donnant un léger coup de coude à son voisin. « Je suis toujours hyper agréable à vivre. Et même si j'ai pas ton métabolisme, je m'entretiens je te signale. Juste... pas au lever du soleil, y a que les psychopathes pour faire ça si tôt, affirme-t-il joueur avant de siroter sa bière.
— Toujours agréable à vivre ? » répète Kagami sans tenir compte de sa dernière remarque. « Ça c'est le genre de choses dont je vais me souvenir ! » Il rigole, doutant fortement de la véracité de cette déclaration.
Le brun sait que s'ils passent plus de temps ensemble, Kagami finira par le démasquer, découvrir son visage d'ours mal léché. Il plaisante bien sûr, et son ami le devine mais joue le jeu.
« Oui parfaitement... du moment que je n'ai ni faim, ni sommeil et eu ma dose d'adré, je peux être charmant.
— Hm je vois... Je note pour veiller sur ces trucs-là et profiter de ta charmante compagnie alors ! »
Kagami avale le fond de sa bière. Lui-même n'est pas sûr de pouvoir se définir comme "agréable à vivre". Il se voit comme un gars gentil, mais il a parfois mauvais caractère et certainement tendance à être grognon. Mais il est vrai que l'estomac bien rempli et bien défoulé, lui aussi sait se montrer "charmant". Et il espère bien savoir montrer cet aspect de lui à Aomine.
Le brun lui adresse un sourire satisfait et décide de changer de sujet. Même s'il aime bien leur petit flirt, il ne se sent pas encore assez à l'aise, ou ivre pour le poursuivre, encore moins en public. De toute façon, il n'a pas pour but de mettre sa "conquête" dans son lit ce soir. Ils ont le temps pour ça. Il... a besoin de temps pour ça.
« Tu m'as pas raconté, comment ça se passe ton taf en ce moment ? Tu as repris les entraînements ? »
Kagami considère la question, tâtonnant un peu au fil de son émotivité pour parler d'un sujet qui lui semble presque trivial dans ce contexte. Car à cet instant, son travail et ses activités quotidiennes lui paraissent bien lointaines. Il s'éclaircit la gorge et répond finalement :
« Ouais j'ai repris, ça se passe plutôt bien. On a l'occasion de participer à un autre tournoi dans un mois. Pas en IRL, cette fois, un truc sur Internet. Donc va falloir bien se préparer dans les prochaines semaines.
— Ouais ça tu m'en as parlé. C'était cool à suivre la dernière fois, si je peux j'y jetterai un coup d'œil aussi.
— Je te dirai sur quelle chaîne c'est diffusé. J'ai hâte d'y être, mais on a encore pas mal de trucs à bosser », ajoute Kagami en fronçant les sourcils. Il parle rarement de son travail et se sent un peu maladroit dans l'exercice, mais après réflexion, il explique : « Notre équipe est encore jeune. Ça fait quoi, un an qu'on l'a constituée ? On a pas mal de marge de progression. Sans compter qu'on n'est pas non plus encore des experts individuellement parlant dans ce genre de jeu.
— C'est une bonne chose alors, ce n'est que le début. Tant qu'il y a des points à améliorer ça reste stimulant. Du coup vous avez eu des propositions de sponsors j'imagine depuis votre presque victoire, vous en avez déjà choisi ?
— Ouais, c'est en cours de négociation. Une marque de hardware. Ça devrait pas mal nous aider. Heureusement qu'on a Momoi, qu'est-ce que c'est chiant cette partie-là ! » Il lève les yeux au ciel, frémissant à l'idée de discuter avec des sponsors et négocier des clauses de contrat. La paperasse et les palabres, très peu pour lui !
« C'est génial ça comme nouvelle ! Les négociations et la paperasse c'est son truc. Je crois que plus elle en a à gérer, plus elle est heureuse. Je te jure, des fois je rêve de pouvoir lui refiler mes rapports... » confesse-t-il avec une moue dégoutée.
S'il y a bien une chose qui ne lui manque pas trop du boulot en ce moment, c'est bien cette partie-là.
« C'est marrant, on a tous les deux un ou une meilleure amie avec des goûts bizarres », note Kagami en se détendant un peu dès qu'il parle de son frère de cœur. « Mais bon, vu qu'ils aiment aussi le basket et les jeux vidéo... Ils sont pas irrécupérables.
— C'est vrai, on doit pouvoir en tirer quelque chose de bien », confirme Aomine entre deux ricanements. Puis en fixant le fond de sa bière il déclare, pensif : « N'empêche j'me suis toujours demandé pourquoi elle m'avait choisi. On n'avait rien en commun à cet âge-là, même pas le basket. M'enfin... je suppose que je ne suis pas irrécupérable pour elle non plus. »
Kagami hausse les épaules :
« Je pense pas qu'on se choisisse par affinités de goût quand on est gamins, mais par affinités tout court. Question d'alchimie, quoi ! »
Il sourit, c'est vrai que pour sa part il s'est tout de suite bien entendu avec Tatsuya, sans même trop savoir pourquoi. Leur amour pour le basket leur a certes permis de renforcer leurs liens et de passer plus de temps ensemble, mais ils auraient probablement été amis sans ça.
Daïki réfléchit un peu aux propos de Kagami. Ils lui tirent un demi sourire. Il ne peut s'empêcher de penser que c'est tout aussi vrai à tous les âges. Même si en vieillissant, les activités et les hobbies permettent de favoriser les affinités de goût, parfois il y a des rencontres et des attachements au-delà de toute logique. Une œillade sur le côté et un sourire de connivence échangé appuie un peu plus le raisonnement de Kagami. L'alchimie. Ouais... c'est peut-être bien ça qui crépite dans l'air entre eux à chaque fois.
Ils se commandent une nouvelle bière et discutent de choses et d'autres, sans trop voir le temps passer dans l'atmosphère musicale agréable du bar. Il y a un peu de monde mais pas assez pour surcharger l'ambiance, et ils n'ont pas besoin d'élever la voix en parlant. Il commence à se faire tard et bien que ce soit toujours un peu à contrecœur, Kagami se résout à rentrer. Et puis, il se raisonne. Après-demain, ils vont se revoir. Loin de la ville, loin de leurs connaissances, de leur travail. Il ne peut s'empêcher d'espérer que ça va tout changer. Pour eux. Se sentant presque obligé de se justifier de ce départ, il lance au brun avec une œillade malicieuse, son ton contredisant l'émotion qui serre son cœur :
« Après tout, t'as dit que fallait que je me repose !
— C'est marrant, je t'aurais cru moins obéissant que ça... se moque Aomine en retour.
— Je sais faire preuve de discipline, c'est tout », réplique Kagami en haussant les épaules.
Il se lève et enfile sa veste tandis qu'Aomine en fait de même, puis ils paient leurs verres et sortent dans la nuit. Il fait un peu frais ce soir et Kagami frissonne avant d'enfoncer les mains dans les poches de son jean.
Aomine n'est pas du genre frileux, mais il remarque que Kagami rentre la tête dans ses épaules au fur et à mesure qu'ils marchent. D'instinct, il a envie de le rapprocher de lui pour qu'il ait moins froid. Pourtant quelque chose d'indicible le retient. Il hésite, tiraillé entre l'envie et la bienséance. Comment son geste sera-t-il perçu ? En a-t-il le droit ? Noyé dans ses réflexions, il est distrait par les battements de son cœur désynchronisé et n'écoute Kagami que d'une oreille. Une petite voix assez remontée contre lui pour une obscure raison, lui rappelle qu'il a toujours eu très peu de considération pour l'avis d'autrui et initié ce genre de contacts avec ses amis sans jamais se poser de questions. Finalement, c'est un nouveau frissonnement de son voisin qui met un terme à ses tergiversations. Il en a bien trop envie pour pouvoir résister de toute façon, et l'air frais de ce soir lui donne une excuse toute trouvée pour se justifier auprès de sa conscience qui le regarde de travers.
Alors nonchalamment, comme s'il s'était toujours autorisé ce geste familier, il vient enrouler un bras autour de la nuque de Kagami et laisse sa main s'échouer sur son épaule tout en poursuivant leur discussion sur la saison de basket qui les anime, le cœur battant.
Kagami tressaille légèrement, surpris par le geste. Il s'efforce de ne pas se laisser distraire et de continuer à discuter normalement. Il peut sentir le poids de son bras autour de lui, très conscient de sa proximité physique. Il éprouve un trouble diffus, pas désagréable. Faute de vraiment le réchauffer physiquement, ce geste a le mérite de le faire pour son cœur. Il sourit sans s'en apercevoir, acquiesçant aux propos du brun et ne faisant plus trop attention à ce que lui-même est en train de raconter. Oubliant ses bonnes résolutions, il n'a plus très envie d'arriver chez lui et aimerait prolonger la balade tard dans la nuit, à déambuler sans but dans les rues de la capitale.
Daïki réalise qu'ils n'ont jamais été si proche physiquement, à part peut-être dans un one on one. Ainsi accolés, il a parfaitement conscience de la stature de Kagami, de son parfum qu'il se surprend à reconnaître et de sa voix s'échouant si proche de son oreille. Il en frissonnerait presque s'il n'avait pas si chaud. Il ne se souvient pas avoir ressenti ça avec qui que ce soit d'autre dans une accolade, toujours plus fraternelle que... que quoi au juste ? Il ne parvient pas à mettre de mots dessus, le définir. Il ne peut que constater l'effet que ça lui fait.
Ils finissent par arriver en vue de l'immeuble de Kagami, une pointe de déception dans le creux du ventre à l'idée de devoir le lâcher bientôt.
Une fois devant l'entrée, Kagami hésite quelques instants, la main déjà posée sur la poignée, avant de déclarer à voix basse, un sourire au coin des lèvres :
« Cette fois je vais pas te voler un baiser... Merci pour la soirée. Ça m'a fait plaisir. »
Le brun se sent rougir, il ne pourrait nier qu'il y a pensé aussi. Il n'aurait pas dit non pourtant... bien qu'il ait l'étrange sentiment que le prochain qu'ils échangeront doit venir de lui. Après tout il a promis une vengeance à Kagami pour ce vol éhonté. Peut-être que le faire languir un peu, pourrait faire partie du châtiment se dit-il en retrouvant son sourire de conspirateur.
Il fait un pas en avant pour s'approcher de Kagami qui vient de déverrouiller la porte de chez lui. Il prend appui sur le cadrant et lui demande à voix basse, taquin :
« Pourquoi, on a peur des représailles ? »
Et avant qu'il ne puisse réagir ou se retourner, il pose un baiser léger sur la joue de sa victime.
« Ça m'a fait plaisir aussi », souffle-t-il en s'écartant d'une souple impulsion.
Kagami déglutit, le cœur cognant contre ses côtes. Aomine lui fait trop d'effet, d'autant qu'il découvre juste son côté séducteur. Son sourire tremble un peu tandis qu'il hoche la tête.
« Bonne nuit, Ao. »
Il se dépêche d'ouvrir sa porte avant que son trouble ne se voit trop, mais il ne peut s'empêcher de jeter un coup d'œil par-dessus son épaule tandis qu'il entre dans le vestibule. Il sourit encore au brun, espérant lui transmettre dans ce regard ce qu'il éprouve à cet instant, bien que ce soit confus pour lui-même. Ses sentiments pour Aomine tempêtent dans sa poitrine, cette attirance magnétique, cette tendresse, cet espoir mêlé de joie et de peur qui fait battre son cœur si fort. Il se retourne rapidement et se hâte vers l'escalier, le feu aux joues.
Toujours le sourire aux lèvres, Aomine regarde Kagami s'enfuir. Il se demande vaguement ce qui le retient de le rejoindre, le suivre jusqu'à son appartement mais cette fois aucune voix ne se manifeste pour lui donner le courage de franchir le pas. Son rythme cardiaque ne parvient pas à se calmer tandis qu'il rejoint son propre immeuble, repassant la scène encore et encore dans son esprit, se maudissant d'avoir esquivé sciemment ses lèvres et se félicitant de son petit jeu l'instant d'après. C'est comme si deux entités distinctes bataillaient continuellement pour imposer leur volonté lorsqu'il est près de lui. Aomine le séducteur invétéré sûr de ses charmes qui sait ce qu'il fait, et Daïki, intimidé d'être attiré par un homme et qui ne sait pas comment réagir. C'est aussi grisant qu'épuisant, mais ce soir, c'est l'euphorie qui semble l'emporter.
Une fois chez lui, Kagami se prépare pour la nuit avec des gestes automatiques, ses pensées tournées vers le brun. Il se repasse les détails de la soirée, et se dit qu'au global, elle peut être considérée comme encourageante. À part ce petit bémol lorsqu'Aomine a refusé d'aller au bar de Kuroko, l'atmosphère est restée détendue, presque comme avant... Mais il le sait, et il l'a dit à Aomine, ça ne sera pas comme avant, lorsqu'ils étaient "juste amis". Et c'est tant mieux. Avant, ça ne lui convenait pas. Ce qui les attend est incertain, mais au moins ils avancent et se laissent le temps d'explorer leur relation. Ce week-end de randonnée lui apportera sans doute plus de réponses... Il est curieux, impatient et anxieux de les découvrir.
Avec ses pensées en tête, il se glisse sous la couette et croise les bras sous son crâne, le regard fixé sur les ombres mouvantes sur son plafond. Sa joue picote à l'endroit où se sont posées les lèvres d'Aomine. C'était un baiser pour le moins pudique, mais c'était déjà beaucoup. Kagami ne peut s'empêcher d'y voir un signe. Quelque chose qui le conforte dans l'idée que le brun a vraiment aimé cet autre baiser. Qu'il pourrait en aimer d'autres. Il ferme les yeux à cette idée, ses pensées dérivant rapidement, et il lui faut un assez long moment avant de parvenir à s'endormir.
