Bonjour tout le monde !

On se retrouver pour clôturer la première partie de cette série sur le Witcher. La suite sera sur la même fiction, pas d'inquiétudes. Sans compter que l'écriture en est déjà fini et la correction devrait démarrer sous peu. D'autres aventures, d'autres rencontres et d'autres enjeux nous attendent dans le futur, mais il est aujourd'hui temps de refermer le livre sur les affaires de la Salamandre et de Jacques d'Aldersberg.

J'espère vous revoir vite sur la seconde partie.

En attendant, laissez des reviews (je ne mords pas) et à très vite.

Bises

Zia

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Trouver la sortie ne fut pas trop difficile. Dehors, ils retrouvèrent les Scoia'tael plus ou moins en un seul morceau. Yaevinn vint à leur rencontre pour savoir s'ils avaient trouvé ce qu'ils voulaient.

- Généralement, les plots twists, je les préfère dans les romans, pas dans la vraie vie, grogna Ace en renfonçant son chapeau sur son crâne. Surtout quand j'en suis à plus d'une journée sans sommeil.

- On a trouvé ce qu'on voulait en partie, mais pas de la façon dont on l'imaginait, informa sombrement Geralt.

- Comment ça ? s'enquit l'elfe alors que Toruviel venait vers eux pour savoir ce qu'il en était.

- On a eu le leader de la Salamandre.

- Pourquoi j'ai l'impression que ce n'est pas suffisant ? demanda le bras droit du leader de la révolte.

- Eh bien, la Salamandre ne bosse pas seule. Derrière, on a la Rose Ardente ! ricana narquoisement le D.

- Pas très surprenant, commenta Yaevinn.

Et il marmonna en ancien langage quelques qualificatifs concernant la Rose Ardente peu glorieux. Le fait est que Geralt voulait avertir Foltest rapidement, ce qui impliquait retraverser les marécages. L'idée évolua quand Yaevinn lui montra des barques accostées un peu plus bas contre l'escarpement rocheux.

- Le soulèvement de Wyzima nous attend, annonça Yaevinn en rejoignant les barques.

- Arrête avec ta rhétorique et prends des rames, lui ordonna froidement Geralt.

Le point fut appuyé par Ace qui lui enfonça une rame dans les bras.

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Yaevinn leur indiqua où trouver ce cher Foltest. L'homme était dans le Quartier du Temple, à proximité de la caserne. Quand ils arrivèrent là-bas, ils le trouvèrent en compagnie de Radovid. Et à côté, on avait Jaskier qui vint à leur rencontre.

- Geralt…

Le barde s'interrompit en voyant Ace qui lui offrit un sourire froid.

- On se connait, non ?

- Un mot, le barde, et je pète les genoux, avertit le D. A moins que tu préfères la castration, c'est ton choix.

Le barde se tourna de nouveau vers Geralt en déglutissant nerveusement, faisant qu'il ne vit pas le sourire satisfait du D. dans son dos.

- Vous arrivez à un moment qui rentrera sûrement dans l'histoire.

- Jaskier, je suis content de savoir que tu es toujours vivant, moi aussi, mais j'ai des choses importantes à faire, soupira le Loup Blanc avec un brin de lassitude.

- Plus important qu'une alliance entre la Temeria et la Redania avec des conséquences spectaculaires ?

- Le barde, on est debout depuis un jour et demi, si tu as quelque chose à dire, dis-le avant que je décide qu'un glaive dans le fion est une bonne solution, soupira Ace en se frottant les yeux avec la paume de ses deux mains.

- D'accord, je vais tout vous expliquer avant que le Roi ne fasse arrêter Yaevinn.

- Il ne l'arrêtera pas tant que nous serons là, nia le Loup.

- Le Roi sera forcé de me reconnaître au moins comme un allié temporaire, siffla l'elfe.

- Tu en es certain ? demanda Jaskier en le regardant d'un air sceptique. Après tout, il a déjà un allié en la personne du souverain Radovid de Redania.

- J'en suis certain. Les humains ont des vies aussi brèves que les éphémères. Ils ont peu de chance de me surprendre, qu'il s'agisse d'un roi ou d'un poète. Sans offense, maître Jaskier.

- Mais on ne peut pas traverser la citée sans le consentement du Roi, rappela Geralt. Tu restes un elfe recherché par la loi.

- On peut pas se torcher le cul avec et faire quand même ce qu'on a à faire ? s'enquit Ace avec espoir.

- Non, lui asséna le plus vieux des mutants.

- Bon tant pis.

- Allons parler à votre roi, alors.

Le groupe s'éloigna donc de la grande porte pour se rapprocher des deux souverains en armure qui palabraient un peu plus loin. Si Radovid fit un effort de rester impassible en les voyant venir, malgré le dégoût et la haine que la présence de non-humains lui inspirait, Foltest sembla ravi de les voir venir.

- Bienvenus à vous, sorceleurs !

Ace se contenta de croiser les bras quand Geralt faisait l'effort de courber la tête avec un « sire » en salutation.

- Il y a de nombreuses choses qui doivent être discutées, commença Radovid.

- L'heure n'est pas à la palabre, fils, coupa Foltest. Nous devons éteindre le feu de ce bordel. Tu auras la main de la princesse, et si la vie m'a appris quelque chose, la moitié de mon royaume une fois que je serais mort. Mais il reste l'affaire du Grand Maître d'Aldersberg, nous devons nous débarrasser de lui. Et je suis certain que les sorceleurs s'en chargeront.

- Ah ouais ? marmonna Ace. On chasse les monstres, pas les hommes, généralement.

- La tête de chat, à votre cou, ne parle pas en votre faveur, sorceleur… Ace, c'est bien ça ?

Zut, la réputation de son école le précédait encore.

- Nous vous paierons autant que vous le désirez, assura Radovid.

- Nous sommes des mutants, pas des… oh et puis merde. Dix milles.

- N'est-ce pas un peu excessif ? demanda Foltest en fronçant les sourcils.

- Allons, Foltest, la Temeria vaut bien plus que ça, lui dit le seigneur Redanien.

- Je suppose que le garçon a raison, mais vous rentrerez chez vous avec huit milles.

- Neuf milles sept cent, j'ai besoin d'une nouvelle tenue, négocia Ace en montrant entre deux doigts un pan de sa veste de cuir fatiguée.

- Huit mille cinq cents et je commissionnerai les forges royales de la faire pour vous.

- Nous avons un accord, confirma Geralt.

- Bien, nous sommes tous d'accord.

Foltest se tourna vers son futur genre et lui dit ce qu'il attendait :

- Radovid, tes armées doivent mâter l'Ordre en Redania et dans le nord de mes terres.

- Mes armées embarqueront pour une mission d'assistance fraternelle, assura le jeune souverain.

La phrase n'était pas la bonne chose à dire, cela rappelait un peu trop le coup qu'avait fait Henselt, le souverain de Kaedwen, durant la dernière guerre contre Nilfgaard, afin de grapiller quelques terres en plus.

- Je veux aucune putain d'assistance fraternelle ! Je n'aime pas cette tournure ! Tu dois écraser ces chevaliers de l'Ordre et te retirer !

- Détendez-vous Foltest, mes enfants dirigeront cette terre, je n'ai pas l'intention de la détruire.

Ace se massa le nez sous son chapeau en soupirant profondément, pendant que Jaskier, lui, ne perdait pas une miette de l'échange et prenait des notes sur un parchemin qu'il avait étalé sur une planche de bois, une bouteille d'encre nouée par un lacet autour du cou. Geralt se racla discrètement la gorge, coupant la dispute entre les monarques.

- Pardonnez-moi, vos majestés, mais je pense qu'il est temps que nous…

- Une dernière chose, sorceleurs, exigea Foltest.

Ace retint le grognement qui lui brûlait la gorge. Il manqua de pleurer de frustration en entendant la suite :

- Parlons politique, et ne me parlez pas de neutralité. J'ignore si c'est intentionnel ou une influence latente du Chat Noir qui a mystérieusement disparu, mais la compagnie en laquelle vous vous trouvez montre que vous êtes impliqués dans tout ça, si ce n'est enfoncés jusqu'au cou dans cette affaire. Pour le premier paysan venu, dans les rues, il est question de l'Ordre qui affronte mes armées. Mais ne vous trompez pas, c'est une confrontation entre moi et le Grand Maître. Ce fanatique ambitieux…

- … dirige toutes les actions de la Salamandre et a intentionnellement provoqué la révolte, termina Ace avec lassitude.

- Que dîtes-vous ?! s'exclama le roi.

- On s'est dit que vous aimeriez savoir ceci, majesté, lui dit Geralt.

- Et c'est très intéressant. Et cela signifie que l'Ordre est l'ennemi. Est-ce bien clair ?

- Comme de l'eau de roche. L'Ordre est l'ennemi, pas la Scoia'tael.

Un rictus apparut brièvement sur le visage de Radovid alors qu'Ace applaudissait mentalement Geralt. Parfaite méthode pour glisser le bébé.

- Parfaitement. Mais seulement si ces bâtards aux longues oreilles cessent de brûler ma citée et assassiner mes marchands. Vous entendez cela, n'est-ce pas Yaevinn ?

L'elfe ne s'était pas trop approché des souverains, arborant jusqu'à présent un air parfaitement indifférent. Cependant, il n'avait loupé aucune miette de la conversation et savait comment répondre :

- Et si ces bâtards aux longues oreilles cessent, peuvent-ils, en tant que combattants pour la liberté et la décence, compter sur la clémence du roi, voire son amnistie ?

Le ton était calme, tranquille, presque amusé.

- Seulement ceux qui déposeront les armes. Et… tous ne pourront être pardonnés, le peuple ne comprendrait pas. Yaevinn, vous, vous devrez disparaître. Vous devrez vous éloigner le plus possible, je m'assurerai que mes officiers ne vous donnent pas la chasse pendant quelque temps.

- Retenez-les plus que quelques jours, insista Geralt. Et ordonnez-leur de ne pas chercher trop minutieusement… en gratitude pour son aide dans l'anéantissement de Jacques d'Aldersberg.

- Accepte, Yaevinn, c'est mieux que rien et c'est un premier pas dans la bonne direction. Et dis-toi que si le roi ne respecte pas sa parole, tu pourras toujours renforcer les effectifs de Iorveth ou Insegrim, encouragea Ace.

Yaevinn accepta sans sourciller.

- Si Deith Ichaer le recommande, alors j'accepte sans hésitation.

Les deux rois eurent un air surpris devant ça, mais Yaevinn ne se justifia pas. Geralt n'avait certainement pas oublié. La Marque des Rois. C'était comme ça que Yaevinn avait appelé cet étrange don d'Ace. Et il avait bien l'intention d'avoir le fin mot de cette histoire un jour ou l'autre. Parce qu'aujourd'hui, il ignorait pourquoi, mais cela lui semblait familier. Et ce devait être important pour que l'elfe se plie à lui sans discuter.

- Majesté, il reste encore une affaire. Cela concerne votre fille, la princesse. Comment se sent-elle ?

- Bien mieux qu'elle ne l'était en tant que strige, mais elle ne sera plus jamais la même, j'en ai peur. Comment puis-je vous remercier, messieurs ?

- Si vous pouviez mettre une prime sur la tête du sorceleur Schrödinger, ça m'arrangerait pas mal ! ricana Ace.

- Hilarant, soupira Geralt.

- Le plus drôle, c'est que tu crois que je déconne.

- Sans s'attarder sur les mauvaises plaisanteries de mon camarade, sachez que je suis content de savoir que la princesse se porte bien. J'espère simplement que vous pourriez vous assurer que les amis des sorceleurs qui l'ont aidée puissent en dire autant.

Hint, hint.

- Oui, c'est quelque chose que je peux faire. Avez-vous trouvé qui était derrière tout ça ?

- De Wett était responsable. Allez savoir si c'est pour Nilfgaard ou l'Ordre… Cependant, les responsables savaient que cela affaiblirait votre position avec la princesse provoquant le chaos en tant que strige.

- Ce sale traître ! Si je pouvais mettre la main sur lui…

- Son corps sert de fertilisant pour les marécages, il ne posera plus de souci. Pourriez-vous dire à Thaler qu'Ann a tenu ses engagements ? demanda paisiblement Ace en rangeant ses mains dans son dos.

- Enfin une bonne nouvelle ! En attendant, Wyzima brûle et les combats font rage, la traverser ne sera pas chose facile.

Dire que les gens voyaient les sorceleurs comme des machines à tuer, sans savoir qu'ils avaient plus de satisfaction à lever une malédiction qu'à trancher un monstre.

Le glaive était le dernier recours.

Du moment qu'il existait une chance de sauver la princesse, il fallait tenter sa chance. Cela en valait la peine.

Le trio se mit en marche, arrivant au niveau de Jaskier qui prenait toujours ses notes.

- Ainsi, le brave Foltest prononça ces mots : « Vertueux Radovid… » marmonnait le barde.

- Radovid est tout sauf vertueux. Salopard, enculé, connard lui vont bien mieux, rectifia Ace.

- Mais qu'est-ce que tu fabriques ? demanda Geralt alors que Jaskier adressait un regard noir au Chat Noir.

- J'essaye de garder une trace fidèle et précise de ce qu'il se passe ici, répondit le barde en replongeant dans ses notes.

- Foltest a dit très exactement « L'heure n'est pas à la palabre, fils. Nous devons éteindre le feu de ce bordel ».

Le poète releva le nez en soupirant d'agacement.

- Autant l'un que l'autre, vous n'avez aucun sens de la poésie. Il y a la vérité du temps, et celle de la légende.

- Tu ne changeras jamais.

- Qu'est-ce que je suis content que tu n'aies jamais connu la légende du One Piece et de Gol D. Roger ! Le bordel que t'aurais foutu ! gémit Ace en se massant le nez.

Cela aurait été une traque encore plus sanglante. Une battue frénétique. Forte chance qu'il n'y ait pas survécu.

- Vous saurez que la plume est bien plus forte que l'épée. C'est vous, par contre, qui ne changez pas. Vous partez sauver le monde quand personne ne vous le demande.

- J'vais pas sauver le monde, je vais récupérer les mutagènes pour l'oncle Vesemir. Ce monde, j'en ai légèrement rien à foutre, lui dit Ace.

Et il regarda Yaevinn qui hocha la tête. Les deux bruns dépassèrent le barde, bien que l'elfe lance un « bonne chance » amusé à Jaskier. Geralt secoua la tête et suivit le mouvement.

- Bonne chance ! lança Jaskier dans leur dos.

Et ils en auraient bien besoin. Parce que sur leur route, ils tombèrent sur un contingent de l'Ordre de la Rose Ardente, mené par Siegfried en personne qui regarda Geralt avec haine et colère.

- Tu as commis une erreur en croisant ma route.

- Tu es celui qui est dans l'erreur, lui pointa Geralt sans s'occuper de Yaevinn et Ace qui avaient déjà sorti leur arme.

- Arrête de grogner, Loup et sors ton arme !

- Cela t'amuse de travailler pour un homme fou ? Tu assassines par plaisir ou tu ne fais que suivre des ordres ?

- Je n'ai aucune raison de t'écouter ! Tu n'es même pas humain !

- Oh ? Alors le gros bras derrière toi, il l'est plus que nous, peut-être ? demanda Ace en pointant le grand mutant en armure semblable à la paire qu'ils avaient rencontrée dans les laboratoires de la Scoia'tael.

Siegfried n'avait aucune réponse à donner. Alors, en hurlant, il fonça à l'assaut, suivi de ses hommes.

- Je prends l'mutant ! annonça Ace en esquiva la majeure partie de l'assaut.

Yaevinn se chargea du reste de l'escouade pendant que Geralt s'occupait de Siegfried.

Devoir le tuer était triste, bien triste. Si l'homme avait ouvert à peine un peu les yeux, il aurait vu l'erreur et aurait pu évoluer, mais il s'était enfoncé dans l'obscurité, et le résultat était que son corps tomba bientôt sans vie sur la terre battue du Quartier du Temple.

L'Ordre montrait malheureusement son vrai visage. Sous les armures brillantes, les chaires n'étaient que pourriture. Ace prit néanmoins la peine de refermer les yeux du défunt Siegfired, jusqu'à ce qu'un civil sorte de chez lui et les interpelle, les invitant chez lui. Vu qu'il vivait dans une maison de brique, il était vrai que c'était plus sûr que dehors dans la rue.

Et apparemment, ils n'étaient pas les seuls qu'il avait mis à l'abri dans sa demeure.

Ils trouvèrent Vivaldi qui avait des ennuis de tous les côtés, pour on ne savait quelle raison. Apparemment, il était un traître pour l'Ordre (compréhensible) et pour la Scoia'tael (va savoir pourquoi). Sans parler que tout le monde ici parlait de signes, prophéties et autres conneries. Personne pour avoir une vraie conversation sérieuse. Vu qu'il y avait Vaska ici, c'était compréhensible. Sans parler du vieil ermite d'Eaux Troubles qui parlait de la Chasse Sauvage ayant été vue régulièrement à proximité de Wyzima ces derniers temps. Autre personne du patelin, la gamine qui aurait dû devenir une Naïade. Elle n'avait pas encore été transformée, en tout cas, mais elle était ici, à l'abri, auprès de l'ermite.

L'homme qui les avait interpellés leur annonça que pour accéder aux quartiers de l'Ordre, ils pouvaient utiliser la porte dans sa cave, qui donnait sur une autre cave, et, éventuellement, une sortie.

- Ne faîtes pas attention à la goule, elle n'est pas méchante, leur dit l'homme alors qu'ils descendaient dans la cave.

- La goule ? répéta Yaevinn en fronçant ses sourcils.

Le trio échangea un regard et descendit dans la cave où un feu de camp était allumé. Il y avait en effet une goule, ou plutôt un gravier qui tournait en rond autour du feu. La créature releva le nez en les voyant.

- Sorceleuse ! Je suis ravi de vous revoir ! s'exclama le monstre avec sa voix nasillarde.

- Ah. C'est toi, reconnut Ace d'un air blasé.

Il le montra du pouce et se tourna vers Geralt qui fixait le monstre avec un visage de marbre.

- Tu vois, j'ai pas consommé de fisstech pour imaginer un gravier qui parle !

Et le D. se tourna de nouveau vers la bête.

- Je vois que la guerre est à ton goût, Vetala.

- Je n'ai plus besoin de me cacher dans le cimetière. C'est plus sécurisé ici. Je sors la nuit et je trouve ma nourriture en abondance dans la rue. J'ai pas à me plaindre !

Le malheur des uns faisait le bonheur des autres. En l'occurrence, la guerre faisait la joie des charognards.

- Aucun habitants n'a émis d'objection à ta présence ? s'étonna Yaevinn.

- Ils me craignent quelque peu, mais la gamine a le courage de venir me voir et parle, parle, parle, parle… ça n'a pas de fin !

- Intéressant, mais on doit y aller, coupa Geralt en se dirigeant vers la porte au fond de la cave.

- Les occupants de la cave voisine ne sont pas très accueillants, avertit le gravier.

- Reste sage, on va s'en charger, lui dit Ace.

Et il s'avéra que le monstre avait raison. C'était un nid de brouxes qui avait élu domicile dans la cave à côté. Ce qu'elles foutaient là, c'était une autre question, mais cela faisait des suceurs de sang en moins. En haut, ils trouvèrent un homme qui gémissait sur sa mort prochaine qui eut tout de même l'obligeance de leur dire que pour sortir, il fallait passer par la fenêtre.

Dehors, ils se firent interpeler par des soldats de la garde… qui changèrent de discours en voyant qu'il s'agissait de Geralt. On en voit souvent des hommes qui ont l'air d'avoir tout juste la quarantaine et qui ont déjà des cheveux blancs comme neige ?

En attendant, il s'avéra qu'ils arrivaient juste à temps car des soldats de l'Ordre préparaient une attaque. Cependant, ce ne furent pas des chevaliers de la Rose qui lancèrent l'assaut. Ce fut des mutants en armures noires. Pour le coup, l'escadron de garde de la cité était très utile pour occuper la majorité des créations de la Salamandre et du Grand Maître.

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Seulement, le feu et les combats rendaient la traversée de la ville plus compliquée. Et impossible de passer par les toits. Autre solution, les égouts.

Que celui qui dise que c'était la meilleure idée du siècle soit pendu haut et court.

La première chose qu'ils avaient remarquée, c'était l'absence de vie. Pas la moindre, outre des mouches à merde en quantité. Mais surtout, aucun noyeur.

La réponse du pourquoi du comment leur vint rapidement : un zeugl. Un foutu zeugl avait élu domicile dans les égouts. Le truc qui puait le plus après la kikimorhe.

Sans parler de ses tentacules et de ses deux rangées de dents, ce poulpe géant des décharges était venimeux. Ses tentacules étaient difficiles à détruire et il avait tendance à aplatir un maximum sa tête pour la garder sous l'eau, sauf pour se nourrir, puisque c'était son vrai point faible. Mais pour le forcer à sortir, il fallait abattre un maximum de tentacules et dieu que ces trucs étaient rapides et solides.

Mais malgré l'odeur fétide et le danger, ils parvinrent à s'en sortir.

- J'en finis avec tout ça et je me prends un bain, rien à foutre ! Eurg ! J'empeste autant que le mendiant le plus crade du Grey Terminal ! râla Ace.

- Arrête de geindre, on a encore du travail, le rappela à l'ordre Geralt.

- A oui, c'est vrai, toi et les zeugls, c'est une grande histoire d'amour. Vesemir m'a raconté cette histoire à ton sujet avec un zeugl que tu as poursuivi jusque dans une décharge, dans le Tretogor.

- Quelle histoire ? Je ne m'en rappelle pas.

- Tu lui demanderas de te la remettre en mémoire, ton amnésie te cache une histoire très savoureuse.

Il tira la langue au Loup Blanc qui ne savait pas s'il devait le prendre au sérieux ou pas.

Ils reprirent leur route dans l'eau croupie et parvinrent à sortir des égouts, droit sur un vieux prêcheur sauvage entouré de quelques villageois, priant le Feu Éternel.

- Ils prient au lieu de lutter contre le feu… dh'oine… soupira Yaevinn avec lassitude.

- Un peu de sympathie pour eux. Ils ont perdu leurs proches et leur maison. La prière les aide à accepter les faits.

Une étrange ombre passa sur le visage de l'elfe.

- Beaucoup d'elfes sont aussi en deuil, aujourd'hui…

Ils grimpèrent les marches permettant de quitter la zone des bas-fonds et dépassèrent le poste qu'occupait avant l'armurier de l'Ordre. Ils étaient presque arrivés à destination quand d'autres mutants leur barrèrent la route. Yaevinn fut grièvement blessé dans l'affrontement, l'empêchant de continuer vu qu'il ne parvenait plus à brandir son arme, et qu'il saignait abondamment.

- Bloede arse ! Il m'a eu ! cracha l'elfe.

- C'est moche, commenta Ace en observant la plaie. On peut la cautériser pour réduire le sang, mais tu vas avoir besoin de vrais soins avant de pouvoir réutiliser ce bras.

- Allez-y, je vais essayer de retrouver mon groupe, ils m'aideront. Tuez ce bâtard d'Aldersberg ! Allez !

Les deux mutants se consultèrent du regard et enfin, poussèrent les portes du quartier général de l'Ordre de la Rose Ardente.

Ils arrivèrent dans une antichambre avec une porte gardée à l'autre bout. Gardes qui refusèrent de les laisser passer.

Et qui finirent à genoux quand Ace lâcha son Haoshoku pour leur signifier sa mauvaise humeur.

La scène sur laquelle ils arrivèrent était surréaliste. La moitié du quartier était réfugiée ici, entre les murs de l'Ordre, dinant copieusement, riant, discutant. Les enfants jouaient et se courraient après.

Et au milieu de tous, il y avait Jacques qui, en dépit de son armure, avait un nourrisson dans les bras. En voyant les mutants entrer, il rendit l'enfant à sa mère et s'adressa à eux :

- Admirez mes gens. Ils dinent à ma table, se réchauffent à mon feu et se réjouissent d'être protégés des affres de la guerre.

- Tu crois vraiment que c'est la vue de femmes et d'enfants qui vont faire qu'on va tourner les talons ? demanda Ace en redressant son chapeau avec son index.

Le chevalier vint vers eux.

- Je n'ai pas l'intention de vous tromper. Le Froid Blanc arrive, un cataclysme qui enfouira le monde sous la neige et la glace. Chaque nuit, je rêve d'étendues glacées et la mort de l'ancienne civilisation.

- Je connais la prophétie d'Ithilinne, assura Geralt.

- On ne peut éviter le cataclysme ! Et les rois préfèrent perdre leur temps dans des petites guerres locales afin d'étendre leur territoire pendant que les elfes sont devenus des terroristes qui se battent pour une cause perdue.

- C'est leur vie, s'ils veulent se battre pour leur race, c'est leur choix. Et il n'y a pas que des elfes dans les rangs de la Scoia'tael. Haflings, nains et j'en passe, rappela Ace.

Si Jacques l'entendit, il ne montra rien. Il se détourna des deux mutants pour rejoindre l'immense cheminée qui réchauffait la pièce, passant au travers les civils. Les possibles spectateurs de la confrontation n'avaient aucune importance pour le trio. Ils n'étaient qu'un brouhaha lointain pour ces trois hommes. Devant les flammes, Jacques frotta ses mains recouvertes d'acier et les tendit vers l'âtre pour se réchauffer. Un peu difficile avec l'armure, mais avec sa magie, qui pouvait dire ce qu'il pouvait faire ou sentir.

- Le monde a besoin d'un sauveur, annonça le Grand Maître alors que les deux chasseurs de monstres le rejoignaient. Un homme de la situation. Quelqu'un pour attiser la flamme dans le cœur des gens.

- Ha. Toi, le sauveur du monde ? commenta narquoisement Geralt en se plaçant à sa droite alors qu'Ace prenait la gauche du quinquagénaire humain.

- Pas de problème pour enfiler ton armure avec tes illusions de grandeur ? s'enquit plaisamment le D.

Le Grand Maître se détourna et commença à s'éloigner en marchant.

- Venez, je vais vous montrer quelque chose.

Il les entraîna hors de la pièce, dans les arcades d'un cloître qui baignait dans une lueur nébuleuse, avançant d'un pas lent et tranquille entre les arches, les deux mutants méfiants dans son dos. Jacques avait l'intention de leur faire une leçon un peu spéciale :

- Les Humains sont faibles, fragiles et prompts au mal. J'ai l'intention de créer un homme nouveau, parfait, forgé dans le Feu Éternel.

- T'en as fini ? Parce que si c'est le cas… coupa Geralt en s'arrêtant.

Suivant l'exemple de son camarade, Ace dégaina son glaive d'acier.

Jacques s'immobilisa et leur jeta un vague regard par-dessus son épaulière d'armure proéminente.

- Vous doutez de moi ? Je ne vous en blâme pas. J'avais mes doutes, moi aussi, mais à présent, ma vision est puissante.

Les deux médaillons des mutants s'agitèrent, indiquant l'usage de magie, les faisant foncer à l'assaut, mais trop tard. Jacques avait levé les bras vers les voûtes de pierres taillées…

Et ce fut le noir.

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Ils revinrent à eux dans un couloir glacé. Littéralement. La neige et la glace avaient recouvert les pierres. La seule chose qui disait qu'ils n'étaient pas dans une grotte, dans une banquise, c'était l'arche en pierre qui semblait conduire vers l'extérieur, un peu plus loin hors du couloir. Les deux mutants se relevèrent de là où ils étaient tombés, face contre terre, dans la légère poudreuse et plissèrent les yeux, le temps que leurs pupilles de chat se fassent à la pénombre. Ils regardèrent autour d'eux, notant un lourd mur de neige et de glace leur barrant la route dans leur dos. Pas le choix, ils devaient aller vers l'avant et l'arche.

Et plus ils avançaient, plus la lumière augmentait.

Jacques les attendait sur le seuil. Mais il n'attendit pas d'être à portée de glaive pour parler :

- Voyez ! Vos œillères tomberont et vous ne pourrez que comprendre…

- J'attendais plus de quelques tours de passe-passe, commenta Geralt.

Ace fonça comme une furie sur Jacques. Il ne supportait pas qu'on utilise la magie sur lui, et encore plus sans lui laisser le choix ou lui demander son avis ! Le chevalier venait de signer son arrêt de mort. Jacques dégaina son arme et para le glaive du D. en grimaçant.

- Tu crois que c'est une illusion, Geralt ? Oh non, ce n'est rien d'aussi bas.

Il parvint à repousser Ace et recula de quelques pas, entraînant les deux mutants vers le seuil.

- Où sommes-nous ? demanda Geralt.

Malgré son arme à la main, il restait calme, attendant le bon moment pour frapper et un moyen de sortir de cet endroit.

- Voyez de vous-même.

Et il recula d'un bond, en dépit de sa lourde armure, entraînant Ace et Geralt dans sa suite. Dehors, d'immenses glaciers hauts comme des montagnes les encerclaient. En se retournant, on voyait qu'ils venaient de sortir des ruines de ce qui ressemblait à une tour très familière. Et pour cause, c'était le même bâtiment qui servait de QG à la Rose Ardente à Wyzima. A croire qu'en leur absence, une période glaciaire s'était abattue sur la capitale, au point de tout engloutir dans des glaciers immenses et des crevasses, ne laissant que des ruines et un labyrinthe froid sur son passage, le tout sous un ciel de plomb.

Le spectacle était si saisissant qu'Ace ne chercha même pas à continuer son assaut. Il resta là, avec Geralt, les bras ballants, à regarder les ruines de la ville glacée qu'ils avaient parcourue longuement ces derniers mois.

- Maintenant que vous avez vu les tours de Wyzima prisonnières des glaces, vous comprenez ?

- Tu radotes, D'Aldersberg, lui annonça froidement Geralt. Que veux-tu ?

Le souffle des mutants formait de la buée devant leur visage.

Le chevalier écarta les bras, montrant les glaciers autour d'eux.

- C'est le futur ! Le Froid Blanc a détruit la civilisation humaine ! C'est la fin des temps !

- Et ? demanda Ace en clignant des yeux.

Il avait repris sa contenance et paraissait peu impressionné des paroles de leur adversaire. Son glaive en travers de ses épaules, il poussa le culot jusqu'à se curer le nez avec son petit-doigt pour montrer son désintérêt. Geralt le regarda faire, impassible, et ferma les yeux. Même avec un visage de marbre, le dégoût et l'exaspération se lisaient parfaitement.

- Il n'est pas question de perdre courage et de nous rendre ! insista Jacques. Nous pouvons encore échapper à notre destin !

- Ne t'attends pas à me voir sortir un Shut up and take my money, je suis pas convaincu ! se moqua Ace.

- Garde tes discours pour la plèbe, exigea Geralt.

- Vous devez comprendre que l'Ordre et la Salamandre ont travaillé au but de sauver l'humanité !

- Tout les criminels disent agir pour une noble et grande cause, lui pointa le Loup Blanc.

- C'est à croire que tu as envie que je te découpe en morceau, tu utilises des arguments qui ont un effet contraire sur moi, cracha Ace. T'es pas le premier et tu seras pas le dernier à déblatérer sur ces conneries pour le Greater Good.

- Vous manquez cruellement d'humanité. Il est l'heure de la leçon il semblerait, leur dit Jacques.

Mais il ne vint pas à l'affrontement. Dans une lueur bleutée, il se téléporta… ailleurs.

- Dis-moi que ton Haki arrive à le percevoir, demanda Geralt en regardant autour d'eux.

- Laisse-moi me concentrer et je te dis ça, répondit Ace.

Autour d'eux, des esprits de feux apparurent.

- Je m'en charge, trouve-le, exigea Geralt en changeant de lame pour prendre celle en argent.

Et il fonça à l'assaut, laissant son camarade brun immobile dans la neige, se concentrant pour retrouver une trace de Jacques d'Aldersberg.

Le temps de finir avec les iffrits et Ace partit en courant vers leur gauche, traversant une maigre route entre deux crevasses. Comprenant par là que son camarade de l'Ecole du Chat avait repéré leur adversaire, Geralt le suivait, heureux de ses réflexes surhumains qui lui assuraient de ne pas faire de mauvaise chute sur le sol gelé.

Seulement leur course s'arrêta bien vite.

Shani venait d'apparaitre devant eux.

- Toi ? Ici ? Mais comment ? s'enquit Geralt.

Son trouble était tel qu'on entendait presque la surprise dans sa voix.

La jeune médecin se contenta de jouer avec ses doigts en haussant des épaules.

- C'est la nature de cet endroit.

- Cet endroit ou cette époque ? demanda Ace.

- Place. Ceci est une vision issue de l'esprit du Grand Maître. Sa vision du futur comme il l'a vue dans des flashs de visions, teintées de ses croyances et ses peurs. Vous allez rencontrer beaucoup de choses, ici. Les conséquences de vos décisions.

Un blizzard commença à se former autour d'eux, s'intensifiant dans leur dos comme pour leur couper toute opportunité de faire demi-tour.

- Il n'y a que le blizzard derrière nous, et rien, outre la mort, au-delà.

- Du moment qu'on a le Grand Maître au bout, ça me va, assura Geralt en reprenant contenance.

- Je vais vous suivre, dans le cas où vous auriez besoin d'aide.

Et ils reprirent leur course dans les couloirs gelés entre les falaises scintillantes, grimpant lentement en altitude, jusqu'à rencontrer deux étranges créatures. A croire que Vegapunk s'était lancé dans les expériences inter-espèces. Des créatures, partiellement imberbes, leur sautèrent dessus. Elles avaient la morphologie d'un croisement entre un ours et un gorille, s'avançant vers eux à quatre pattes (comme les gorilles justement), avec un semblant de crinière et de barbe pour encadrer leur gueule bien trop humaine pour que cela n'en devienne pas dérangeant.

Très dérangeant.

C'étaient les seules présences de vie dans ces contrées gelées.

Shani continuait de les suivre. Elle devait être une création de la magie à partir de l'esprit de Geralt, car elle ne laissait aucune trace dans la neige et n'avait aucune réaction au froid. Certainement une image parfaite que le Loup Blanc avait de son amante.

Ace espérait vraiment que son Haoshoku le mette à l'abri d'une intrusion mentale de la part du Grand Maître, il ne savait pas comment il réagirait en voyant ses proches, après ces quarante ans de séparation.

Ils venaient de tuer une nouvelle créature quand une nouvelle apparition leur coupa la route.

Ace en lâcha son arme sous le choc.

C'était un homme, portant d'étranges vêtements bleu sombre et un haut chapeau au sommet plat décoré par d'étonnantes lunettes. Un blond qui donnait vie à un paradoxe en lui-même. Sa posture laissait présager une bonne éducation, et même si Geralt n'avait jamais vu des vêtements de ce genre, quelque chose lui disait qu'ils devaient coûter cher. Pourtant, en dépit de sa richesse et d'un possible haut statut social, il avait le regard d'un combattant et une abominable cicatrice sur le visage qui aurait très bien pu lui prendre l'œil gauche.

- Tu n'as pas changé, toujours le même. Une créature sauvage qui ne fait qu'attirer mort et destruction sur son passage, tout en prenant des vies humaines sans battre des paupières. Un monstre assoiffé de sang, dit le jeune homme de tout juste une vingtaine d'années avec un étrange sourire sur les lèvres.

- Qui es-tu ? demanda Geralt en levant son arme.

Une barre de fer s'interposa sans que le blond lui accorde le moindre regard, malgré l'arme qu'il brandissait dans la direction du Sorceleur.

- La preuve qu'une source n'en a que faire du Haoshoku. Demandez-lui donc qui je suis, répondit l'inconnu en bleu.

Le Loup se tourna vers le Chat Noir silencieux qui avait baissé la tête, le visage masqué sous son chapeau noir. Le léger tremblement régulier de ses épaules disait que le D. se retenait de pleurer.

- Il n'empêche que vous avez assassiné le résultat de l'évolution. Ces créatures que vous avez tuées, c'est le futur de votre humanité. Les arrières petits-enfants des enfants de vos proches. Avec le Froid Blanc, l'homme a dû s'adapter, et nos atouts luxueux, tels que nos esprits, ne sont plus que de lointains souvenirs. Retour en arrière, à l'âge où l'homme ne pensait qu'à survivre et continuer sa race. Avant même qu'il sache se tenir sur ses pattes arrière. Après, quand on sait comment nous nous sommes séparés, on peut dire que c'est peut-être pour le mieux.

- Ace ? Tu le connais ?

Le D. renifla un instant, travailla sur sa respiration et répondit avec une voix tremblante retenant à grande peine ses larmes :

- On… On s'est rencontré dans un bidonville, quand on était des gamins. Il… Il a été mon premier ami, celui qui m'a aidé à cesser d'être une bête sauvage pour devenir un gars plus… civilisé. Il est devenu mon frère, avec Luffy… jusqu'à ce que ses parents le retrouvent. Des nobles.

- J'avais fugué parce que je n'aimais pas cette vie en cage, reprit le blond. Je suis rentré, parce que c'était la seule solution pour qu'ils ne tuent ni Ace, ni Luffy, pour m'avoir… détourné du droit chemin. Quand j'ai su qu'il était prévu de raser par les flammes le bidonville où on vivait quasiment, j'ai essayé de fuir de nouveau. De fil en aiguille, j'ai fini sur un petit bateau de pêche qui a été détruit dans le port par un homme qui pourrait être vu comme un des Rois du monde.

- Tu es mort, Sabo. On n'a retrouvé de toi que tes lunettes et ton chapeau, lui dit Ace sans le regarder.

Sabo retira son chapeau et colla son front à celui du Chat Noir en souriant. Un sourire familier à Geralt. Grand, un brin moqueur, mais rempli de joie de vivre. Celui qu'Ace arborait dans ses bons jours.

- Ce gars est une source, le temps et l'espace, ce n'est rien pour lui. Et sans même le savoir, il va nous aider. Rentre et vient me chercher. Parce que moi, je viendrai pour toi, si je ne l'ai pas encore fait pour une raison quelconque. Nous sommes des frères. La mort et le temps n'y changeront rien.

Un maigre sourire apparut sur les lèvres d'Ace et le blond se redressa en remettant son haut chapeau sur le crâne, avant de donner son arme à son frère. Sauf qu'en changea de main, l'arme changea aussi d'apparence. Cela ressemblait à présent à une lance. Une longue lance au corps de bois très large, de couleur rougeâtre, parcouru par une spirale noire. Au bout, la lame était courbe de la même façon qu'un sabre zerrikanien, quoique peut-être un peu moins et bien trop épais, même pour une hallebarde, sans compter qu'une simple arme de soldat n'avait généralement pas quelque chose d'aussi décoré.

Et puis, elle était assez grande, dépassant aisément les deux mètres.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Le bisentô de Oyaji.

Cela n'aidait pas Geralt.

- Le bisentô est une arme de mon monde. Et celle-ci, je peux t'assurer que c'est celle de mon capitaine. La taille n'est peut-être plus la même, mais c'est exactement la même arme, j'en mettrais ma main à couper.

Ace se tourna vers son frère pour avoir des explications mais le blond n'était plus qu'un souvenir, ne laissant que des flocons tourbillonnant dans le vent. Sans comprendre pourquoi, Geralt se retrouva avec un des glaives d'acier de son camarade. Celui qu'il devait tenir de son école d'origine vu le dessin en tête de chat sur le pommeau.

- Cadeau.

- Tu es certain ?

- Ta gueule et prend ce glaive.

Geralt le récupéra. Cela pourrait toujours être utile.

Ace essuya ses yeux avec son poignet, cachant qu'il avait pleuré à son camarade et reprit sa marche, les entraînant toujours plus haut dans les hauteurs. Ils trouvèrent d'autres créatures, d'autres « humains » du futur sur leur chemin, jusqu'à arriver à une caverne devant laquelle le Grand Maître les attendait.

- Je vois que vous avez rencontré nos arrière-petits-enfants et leur état bestial, commenta l'homme. Vous comprenez pourquoi vous ne pouvez pas vous opposer à mon plan ?

Un maigre rire lui échappa quand Ace manqua de le décapiter avec son arme, pour passer au travers le Grand Maître comme s'il n'était qu'une illusion.

- Cela ne montre toujours pas en quoi toute cette glace justifie tes crimes, pointa justement Geralt.

- Seule un grand plan suivi sans la moindre hésitation peut sauver l'humanité de ce que mes visions m'ont montré !

- Tu accordes beaucoup d'importance à tes rêvasseries.

- Beaucoup de personnes de mon talent ont prédit le Froid Blanc. Le refroidissement général est la destinée de ce monde.

- Pourquoi lutter contre, alors ?

Les paroles que prononça Jacques lui semblèrent assez familière :

- Tu as toujours dit que l'homme était acteur de son propre destin. Je cherche à changer le destin de toute l'humanité.

- En volant à tout le monde la chose la plus précieuse que nous avons, qui est le Libre Arbitre. T'as rien compris à la vie, en gros, lui pointa amèrement Ace.

- Ace… Geralt… j'entends les gémissements de ceux qui ont péri. Entendez leurs plaintes et vous comprendrez ma douleur.

Et son apparition s'évanouit dans un tourbillon de flocon de neige, les laissant seul devant l'entrée d'une caverne. Shani passa devant, comme si elle savait où ils devaient aller. Elle pénétra sans hésitation dans la caverne. Un très court tunnel dans la glace, les faisant monter toujours plus haut dans cette Wyzima de glace.

C'est là qu'un invité apparut sur leur route. Le cavalier squelettique fantomatique couronné et en armure. L'apparition prenait toute la hauteur du couloir et son teint translucide laissait tout juste deviner une armure en lambeaux sur son squelette sans jambes. Sa simple présence faisait naître crainte et peur dans l'esprit des mutants, mais ils ne montrèrent rien, se contentant de se mettre en garde.

C'était le Roi de la Chasse Sauvage qui les regardait avec un sourire moqueur sur sa face squelettique et deux yeux jaunes brillant de malveillance.

Lui foncer dessus n'était pas une technique recommandable.

- Vous ne pouvez pas arrêter ça, sorceleurs. La Mort vous suit ! dit l'apparition.

Et il disparut dans un tourbillon, les laissant au milieu d'une embuscade de spectres. Ace planta le bisentô dans la neige à proximité et sortit dans la continuité son glaive d'argent pour chasser les fantômes.

Affaire bien vite réglée, leur permettant de enfin gravir la pente et de sortir du couloir sur des plaines encore plus glacées. Le froid se faisait plus intense, ils devaient en finir vite s'ils ne voulaient pas être changés en statue de glace.

Cependant, le Grand Maître leur envoya une autre apparition. Si c'était pour les décourager, ce n'était pas le bon plan. Cette fois, c'était Toruviel qui leur coupa la route, dans toute sa posture droite et fière de Aen Seidh qui se bat pour sa liberté.

- Vous les avez tués alors qu'ils n'étaient coupables de rien, pointa l'elfe. Ils n'ont pas voulu mourir dans le froid, ni de vivre en tant que spectre. Personne ne leur a laissé le choix.

- Devions-nous les laisser nous tuer ? Ce n'est pas notre style, Toruviel, lui pointa Geralt.

- Aucun de nous n'a choisi la route que nous devons suivre.

- On est nombreux qui aurait voulu d'une autre vie, approuva Ace.

- Mais les choix que nous faisons dans nos vies nous mènent là où nous sommes aujourd'hui, confirma Geralt. Il ne nous reste que les regrets et les « si j'avais su ».

- Qu'avez-vous à dire pour moi ? demanda l'elfe. Je voulais la paix, cependant, la guerre est ce que le destin m'a servi.

- Pourquoi vous êtes si fataliste ? s'enquit Geralt. Je parle des elfes en général. Tu aurais pu fuir, mais tu as choisi de te battre.

Le léger froncement de sourcil disait que le Loup Blanc avait dû la vexer, mais elle continua avec son ton calme qui ne laissait rien deviner :

- Et je choisis de me battre de nouveau. Je vous accompagnerai, seulement pour un temps.

Et pour les aider, elle les aida, leur montrant la route en compagnie de Shani et les aidant à vaincre les abominations de ce que serait l'espèce humaine dans le futur, avec, dans leur dos, le blizzard qui gagnait toujours plus de terrain sur eux, leur réservant une mort froide et douloureuse.

Ils gravirent des monts gelés, affrontant les ennemis sur leur route, avant de tomber de nouveau nez à nez avec une apparition du Grand Maître.

- Est-ce que vous comprenez enfin, sorceleurs obstinés ? L'Humanité va périr et ceux qui survivront deviendront des bêtes ! leur dit Jacques avec presque désespoir. Mon plan permet d'éviter tout ça.

- Mais c'est quoi ce plan, bordel ! s'énerva Ace.

Geralt lui adressa un regard. Son camarade lui volait les mots de la bouche.

- Les nations humaines ne peuvent survivre au froid qui arrive que par un exode de masse vers le sud.

C'étaient les Zerrikaniens et les Nilfgaardiens qui seraient contents de voir autant de nordiques. Quoiqu'Emhyr pourrait décider de s'emparer des terres vides laissées derrière pour enfin conquérir le nord, après l'échec des deux premières guerres. Ou alors, les Anciennes Races reprendraient les terres qu'on leur avait volées et essaieraient de se reconstruire pour ne plus se faire avoir par les humains. Cela éviterait peut-être l'extinction.

- Avec toi pour les guider ? devina Geralt.

- Je suis prêt à faire cela. Je vois le futur et j'impose le respect, sans avoir besoin de la Marque des Rois. Je gouvernerais parfaitement. Bien entendu, je dois me débarrasser de tout ce qui se trouvera sur notre route, surtout les non-humains.

- T'es juste un gros raciste ou simplement un xénophobe ? demanda Ace. C'est quoi ton souci avec eux ?

- Je suis prêt à tout pour sauver le genre humain. Peu importe le prix. Vous connaissez l'adage « La Fin justifie les Moyens ».

- Tu es un être pathétique, Aldersberg. Comment peux-tu croire à tes propres mensonges ? demanda Geralt.

- Humph, souffla l'homme. Les non-humains… leur extinction n'est pas un but, mais un moyen. Mais puisque vous détestez tant les humains, je vais vous laisser avec mes serviteurs qui ne sont plus humains. Vous avez beaucoup en commun, vous devriez vous entendre.

Et il disparut pour laisser des mutants prendre sa place. Des spécimens ratés. La présence de Toruviel, vétérane de Brenna, était très appréciable.

La pente était plus abrupte, et la glace ne rendait pas l'ascension facile.

Et ce froid, ce blizzard qui leur gelait les miches de plus en plus férocement. Ace était certain que du givre commençait à prendre sur ses vêtements.

Et pour les arrêter, Siegfried, mort au combat, apparut sur leur route.

- L'Ordre aurait pu sauver l'humanité !

- Avec un coup d'état, des assassinats, des expérimentations sur des enfants ? demanda Geralt. Navré, mais le prix est trop fort.

- Pourquoi est-ce que je discute avec vous ? Vous prétendez être des protecteurs des humains, mais vous les jetez en pâture aux monstres ! Pourquoi ? Parce que vous n'êtes pas des humains vous-même !

- On protège pas les humains, on protège les gens, et ça inclus les elfes, les nains et tout le panel ! protesta Ace.

- J'aurais dû voir vos vraies couleurs et vous tuer quand j'en ai eu l'occasion.

- Essaye donc, provoqua Geralt.

Siegfried tira son arme et deux chevaliers apparurent pour l'aider.

Pas de quoi les empêcher de continuer de monter, surtout quand ils étaient au bord d'un ravin et qu'il était si simple de les pousser dans le vide avec un Aard bien placé.

Malgré les obstacles et les ennemis, ils reprirent leur chemin vers le sommet. Pendant un instant, Alvin apparut devant eux, silencieux, pour les observer, comme s'il les jugeait, comme si les mutants l'avaient déçu, avant de disparaître.

Ils ne pouvaient se permettre d'être distraits, ils devaient continuer d'avancer.

Pour tomber sur une troisième apparition de Jacques qui était déçu par tant d'entêtement.

- Que vous êtes têtus. J'avais besoin de vous, pourtant, pour guider mes brebis pendant les premières années de l'hiver.

- J'en doute, lui dit Geralt. Après tout, tu as volé nos secrets à Kaer Morhen pour les utiliser pour les pires causes.

- J'avais besoin de sorceleurs. Des sorceleurs stables, pas comme ce désastre de colère qu'est Ace. Les Loups étaient ceux avec le plus de potentiel, mais je sais que les secrets de leurs mutations avaient été perdus.

Comment ? Ce n'était pourtant pas répandu que la seule épreuve qui pouvait encore être accomplie était celle du Choix, puisqu'ils n'avaient plus ni la méthode, ni le personnel approprié pour faire l'Épreuve des Herbes, puis celle du Rêve qui en découlait. Lambert, de la génération après Eskel et Geralt, était le dernier sorceleur complet à avoir été formé. Les autres après lui n'avaient eu que des mutations partielles et expérimentales qui avaient fini par leur coûter la vie.

- Les sorceleurs étaient parfait pourtant, mais vous manquiez de courage et ambition. Je n'ai fait qu'accomplir vos plus profonds désirs.

Euuuuuh… non ?

- Tu as pris nos secrets comme s'ils t'appartenaient. Tu n'es qu'un voleur, un hypocrite, lui reprocha Geralt.

- Êtes-vous donc à ce point incapables de voir la route dorée de mes visions !?

- Je vois surtout les hommes en blancs venir te chercher avec une camisole de force. Parait qu'il y a un bon asile psychiatrique du côté de Foltsam, pointa Ace.

- Tch. Mes chevaliers vous montreront la réalité avec un langage que vous comprendrez peut-être.

- Arrête avec tes laquais et montre que t'en as dans le ventre en te battant toi-même ! reprocha Ace.

Trop tard, Jacques n'était plus là et d'autres mutants débarquaient avec des chevaliers de la Rose Ardente. Cela en devenait lassant.

Ils finirent par arriver en haut de la pente, pour voir ce qui ressemblait au squelette du palais de Wyzima un peu plus loin devant eux. Les murs n'étaient plus, il n'y avait plus que les arches, les arques et les piliers recouverts de neige, formant un étrange colisée. Avant qu'ils ne puissent avancer, une femme leur apparut. Une belle femme, aux longs cheveux bouclés dont le blond tirait presque sur le rose à la lueur du soleil. Elle avait un visage doux en amande et des tâches de rousseurs, en plus d'une fleur d'hibiscus dans les cheveux. La femme portait une longue robe large à manche courte et elle était visiblement pieds nus. Quelque chose en elle était familier à Geralt.

Il regarda son collègue qui avait penché la tête sur le côté avec perplexité, puis la femme qui les fixait en silence avec un petit sourire de coin. Le déclic se fit sur le sentiment de familiarité. En lui mettant un visage à peine plus osseux et des cheveux noirs, cette femme aurait été la jumelle d'Anabela.

- De la famille ? s'enquit Geralt.

- Langue au chat ? répondit Ace toujours aussi perplexe.

- Et c'est une réponse bien triste que voilà, mais les faits sont là, sourit la femme. C'est simple, n'est-ce pas, entre les gens et les monstres, de faire l'erreur et de confondre l'un pour l'autre. Et souvent, les monstres ne sont pas ceux qu'il n'y parait et bien des gens en font les frais. Je le sais très bien moi-même. Cela m'a pris l'homme que j'aimais, la vie de milliers d'innocents et la mienne, tout ça pour le sang de l'enfant que je portais.

Ace fronça les sourcils. Pourquoi est-ce que cela lui était familier ? Et qui était cette personne qu'il avait l'impression de connaître ? Pourquoi ce ton de voix lui donnait un sentiment de chaleur, d'amour et de sécurité ?

- Cet homme est clairement un fou, digne des plus grands délires de complots et de persécution du Gouvernement Mondial. Le genre d'homme qui se serait rendu de lui-même à Ohara pour aider à raser l'île. Je me demande même si Sengoku aurait approuvé un plan comme le sien, continua la femme en fixant Ace qui la regardait avec les sourcils froncés. Ce monde vous crache peut-être à la figure pour un changement qu'on vous a imposé, mais vous pouvez leur prouver que vous êtes bien plus que les monstres qu'ils pensent que vous êtes en arrêtant les délires de ce fou. Qu'ils vous jugent, après, peu importera, parce que vous connaîtrez la Vérité et ça sera la seule importance. Cet homme lutte contre la Nature, contre l'Inévitable. La vie va et vient, il faut s'adapter aux os qu'elle nous lance.

- Nous le ferons, ma Dame, assura Geralt.

La blonde le regarda avec un sourire malicieux et se détourna avec une étrange élégance pour s'avancer vers le pont reliant la falaise de glace à la ruine du palais royal.

- J'admets que tu as ton charme, Geralt de Riv. Mais dommage pour toi, mon seigneur l'est bien plus, sans parler de son charisme. Ou du fils qu'il m'a donné.

Et sans un mot de plus, elle disparaît.

- Tu sais qui c'était ? demanda Geralt à son camarade.

- Un soupçon, mais je préfère ne pas m'y concentrer pour ne pas perdre les pédales et me faire tuer, répondit Ace qui foudroyait le sol du regard.

Logique.

Suivis par Shani et Toruviel, ils s'avancèrent sur le pont de glace qui s'effondra sous leurs pieds, les forçant à sauter de l'autre côté. Ils se retournèrent pour voir si les dames les avaient suivies, mais elles étaient toujours au début du pont.

- Allez-y sans nous, leur dit Toruviel.

- Personne, outre vous deux, ne peut entrer au cœur de sa vision. Le Grand Maître ne l'autorisera pas, précisa Shani.

- D'accord, merci, remercia Geralt.

Ace tira sur son chapeau pour dire la même chose et les deux femmes s'évanouirent dans les airs par enchantement. Ils tournèrent les talons et rejoignirent donc les ruines, trouvant l'homme entre les colonnades.

- Si j'avais voulu me la jouer les gladiateurs, je me serais inscrit à un tournoi de Dressrosa, maugréa Ace alors qu'ils avançaient avec détermination vers Jacques qui les attendait.

- A présent, vous voyez la nécessité d'agir, peu importe le prix ? Ace, Geralt…ouvrez donc les yeux et vos esprits !

- Non, c'est bon, je veux personne dans mon esprit, reste loin de lui, merci, refusa Ace.

- Je ne sais pas pour l'hôpital près de Flotsam, mais je sais qu'ils soignent des gens comme toi à celui St Lebioda, renchérit Geralt.

- En me poursuivant, vous avez prouvé que j'ai raison ! Vous avez affronté les dangers qui attendront l'humanité et vous avez survécu !

- Le tribunal a rendu son jugement. Coupable, annonça Ace en faisant tournoyer le bisentô autour et au-dessus de sa tête avant de se mettre en garde.

- Jacques d'Aldersberg, ton délire s'arrête ici, acheva Geralt en sortant sa propre lame d'acier.

- Un peu de patience, il est encore temps de changer d'opinion. Imaginez des milliers traversant des étendus glacés. Pourriez-vous les défendre ? Vous et une poignée de sorceleurs rongés par le doute, comme Berengar ? Tout bonnement impossible. Seuls les Frères Supérieurs, mes mutants, peuvent le faire. Mais ils ont besoin d'être formés et dirigés. Ils ont besoin de vous deux !

- Ta gueule, tu me fais chier, rouspéta Ace.

- Mais réfléchissez !

- J'ai une offre, moi aussi, annonça Geralt. Rends-toi. Retire tes mutants et agenouille-toi devant le Roi, tu sauveras bon nombre de vie.

- J'ai bien peur que je doive vous donner une douloureuse leçon sur la confiance et la politesse.

- Va t'faire enculer par Kaidou, sinon, c'est toujours une option, proposa le D. avec un sourire insolent.

Le combat commença, mais Jacques ne tira pas son épée, il se contenta d'esquiver les assauts des sorceleurs pour ensuite se téléporter à l'abri, laissant derrière lui une nouvelle embuscade de mutants. Les deux sorceleurs en avaient assez de ce jeu du chat et de la souris.

- A terre ! demanda Ace. Je vais te montrer comment j'ai réussi à devenir une terreur à tout juste sept ans !

Geralt s'agenouilla et laissa son camarade se mettre en marche, sautant et tournoyant partout dans de longs cercles, maniant avec maestra l'arme entre ses mains, que ce soit pour frapper, empaler ou trancher, allant jusqu'à l'utiliser comme support pour des acrobaties. Certes, il n'avait pas autant de souplesse qu'aurait pu avoir son corps de femme dans cette situation, mais il restait tout de même assez mortel pour mettre rapidement à terre les mutants.

Écoutant un étrange instinct, alors que le dernier des mutants tombait à terre, Geralt pivota sur son genou et enfonça sa lame dans le vide. Lame qui fut parée de justesse par le bouclier de Jacques qui venait de réapparaître à cet endroit. Armé. Prêt à se battre. Mais toujours pas seul parce qu'il était avec toute une troupe d'élémentaires de feu. Le Grand Maître leva son épée et frappa la hampe de l'arme d'Ace, interceptant un autre coup.

Enfin, l'homme acceptait de se battre et de ne plus fuir la queue entre les jambes pour les forcer à lui courir après.

Du haut d'une des arches, le Roi de la Chasse les observait en souriant, regardant les élémentaires tomber les uns après les autres et Jacques perdre rapidement ses forces devant les mutants frustrés et en colère.

Il était temps.

- GERALT ! appela Ace.

Suivant son instinct et le cri de son camarade, le Loup Blanc fit une roulade un peu plus loin dans l'arène de neige brûlée, ensanglantée et piétinée, alors qu'Ace faisait pareil de son côté. Jacques recula précipitamment quand le Spectre de la Chasse apparut devant lui. Il leva son bouclier avec effroi et crainte.

Compréhensible, parce que d'une d'une simple claque, il le renversa et l'immobilisa, avant que le blizzard n'apparaisse et les coupe du reste de ce monde gelé comme un ring.

Le problème quand on combat dans une vision, c'est que ce n'est pas la force du corps qui compte, mais celle de l'esprit, et clairement, dans ce domaine, le Spectre de la Chasse était plus puissant que le Grand Maître, toute Source fusse-t-il.

Le Roi se tourna vers les deux sorceleurs qui s'étaient relevés avec méfiance, l'arme au poing et observaient le spectre avec méfiance.

- Comme on se retrouve, Loup. Et il y avait tellement longtemps, petit D. Alors, avez-vous accompli vos destinées ? s'enquit le spectre.

Il débarquait… pour leur demander des nouvelles ? Tout ça pour un stupide brin de causette ?

- La Salamandre agonise, elle ne sera bientôt plus qu'un souvenir, lui répondit Geralt.

Cela fit rire le spectre.

- La Salamandre n'est rien. Elle n'était qu'une particule de chaos, l'outil d'un homme fou que vous étiez sur le point d'achever. Regarde-toi, Loup. Ton passé, ton destin, la raison de ta résurrection… Tout cela reste inconnu aux yeux de tous. Tu es en bonne compagnie, avec ce vagabond, héritier d'un trône inexistant qui lui vaut la haine de tous en son monde d'origine.

Ace se mit à siffler comme un félin en colère.

- Ce sont beaucoup de mots qui ne servent à rien, pointa Geralt.

- Dis ce que tu as à dire et casse-toi avant que je ne me débarrasse de ce fantôme ridicule qui serait invendable comme déguisement d'Halloween ! cracha Ace.

- Ahah ! Tant de fougue et de bravade ! De rage, tant de choses que même les deux pieds dans la tombe, tu es capable de montrer ! Vous qui disiez que tout était une question de choix et que le destin n'était que fumisterie. Voyez à quel point vous avez tort. Je suis venu pour l'âme de quelqu'un que vous avez tous les deux longuement côtoyé pendant quelque temps, comme il l'a été écrit. Vous pouvez m'affronter, mais la fin restera la même. La mort.

- La question est de savoir qui mourra, pointa le Loup Blanc.

Le spectre se contenta de rire.

- Je ne peux être tué. Vous pouvez repousser votre fin, mais elle arrivera un jour ou l'autre. Occupons-nous plutôt de ceux qui sont déjà morts. Réfléchissez à vos actes, sorceleurs. Je me tenais à proximité quand, chacun votre tour, vous avez passé le pas de Kaer Morhen, un présage de sa chute. Le D., je t'ai vu désobéir consciencieusement à ton capitaine et foncer dans un combat que tu savais que tu perdrais, causant la mort de ceux que tu appelais tes amis, ta famille. Quant à toi, Loup, je t'ai vu juger les villageois des faubourgs, ne laissant que le sang et les flammes derrière toi. A vous deux, vous avez attiré la mort sur ce pauvre Raymond, mis en danger cette innocente Shani, tout cela parce que ce qui comptait, c'était votre objectif et rien de plus. Le Chaos marche dans vos pas respectifs et devient un ouragan lorsque vous êtes ensemble. Vous avez abattu des centaines, si ce n'est des milliers avec vos armes. Vous avez jeté de l'or dans les mains des Scoia'tael, créant de nouveaux massacres. Vous avez quitté le chaos sur Wyzima seulement pour apporter la destruction sur un village tranquille comme Eaux Troubles.

La colère était dans l'air et la neige se fendait autour d'Ace qui appréciait très peu qu'on lui jette à la figure les conséquences de ses choix et ses actes. Geralt non plus, mais il cachait bien mieux son sentiment. Le Seigneur de la Chasse n'avait cependant pas encore fini :

- Chacune de vos décisions à tous les deux n'apportent qu'un peu plus de destructions et chacun de vos choix conduit à un mal encore plus grand. Comment est-ce que vous vous êtes sentis quand vos amis elfes ont mis le feu à Wyzima et se sont mis à massacrer des dh'oine ?

- Arrête, gronda Geralt alors que les fissures commençaient à atteindre la glace sous l'épaisse couche de neige.

- Ne le niez pas, sorceleurs. Vous êtes mes parfaits champions, un moyen idéal d'apporter encore plus de destructions. Peu importe les mondes ou les routes que vous arpentez, la mort et le chaos vous suivent. Alors, comme cette fois-là, il a tant d'années en arrière pour chacun de vous… Acceptez-le. Ne luttez pas contre. Donnez-moi un autre homme que vous avez détruit.

Il voulait le Grand Maître, clairement. Sauf que l'homme était la proie des sorceleurs, une vengeance pour ce qu'il avait fait.

- Jacques d'Aldersberg est à nous, refusa Geralt.

Un rictus déforma la face squelettique du spectre.

- Vous osez vous opposer à moi ? Je perçois pourtant votre faiblesse grandissante alors que la vie s'échappe de vous par vos blessures ! A chaque goutte, la mort se rapproche. Aucun vous n'a la moindre chance face à moi.

Et comme pour le leur prouver, le son du tonnerre résonna et Geralt eut l'impression de se prendre une claque dans la face avec la force d'une tornade. Des fissures apparurent sur le sol, sous la forme du spectre, identique à celles produites par le don d'Ace.

- Haoshoku, reconnut le D. Il l'a, lui aussi.

Le spectre se contenta de rire.

- Agenouillez-vous devant moi.

- Pas question, c'est une affaire entre lui et nous, refusa Geralt.

- Mais de toute façon, vous voulez le tuer.

- Exact, accorda le Loup Blanc. Mais pour nos raisons et elles n'ont rien à voir avec les vôtres. Très loin des vôtres.

- Le D. ne courbe pas l'échine comme ça, tu sais. Donc, avant qu'on ne décide de bannir un énième spectre de ta sale trogne, qui reviendra à la charge un jour ou l'autre, on le sait, ramasse tes affaires et casse-toi, recommanda Ace.

Cela fit rire le spectre encore plus fort.

- Vous voulez vraiment me combattre ? Ainsi soit-il. Votre fuite de la mort s'arrête ici, au bout de ma lame…

Il avait sûrement l'intention de dire aux deux mutants de tirer leur lame, mais Ace n'avait pas l'intention de combattre. Il était blessé, épuisé, et fatigué. Alors, il fit ce qu'il savait faire le mieux. Il fit preuve de la même discrétion et fourberie qui lui avait valu d'être le digne successeur à la tête des Chasseurs de l'équipage de Shirohige. Profitant du grand standing du spectre, il avait effacé sa présence pour se glisser dans son dos. D'un bond, il arriva à s'élever assez haut pour atteindre la hauteur de la tête du spectre et avec tout son Haki, la détacha de ses épaules avec un bon coup de glaive.

Le spectre se contenta de disparaître.

Il n'était pas mort, ils s'en doutaient. Il reviendrait, mais ils avaient gagné du répit.

- Je craignais qu'il ne propose une partie d'échec, commenta Geralt.

- J'aurais encore préféré une partie de gwynt, mais mon pêché mignon, c'est le poker, rétorqua Ace.

Ils se tournèrent vers Jacques, blessé et étendu dans la neige, qui, maintenant libre du sort du Roi de la Chasse, essayait en vain de reculer. Geralt marcha vers lui d'un pas déterminé, son glaive d'acier à la main. Il accéléra le pas et la mit sous le menton du Grand Maître qui cessa de reculer. Lentement, il leva les mains comme pour dire qu'il se rendait, avant de faire un bref geste chargé de magie qui arracha des mains du Loup Blanc l'arme qui vola au travers la zone pour se planter plus loin dans la neige. Avec un soupir, Ace alla ramasser l'arme sous le regard indéchiffrable de Geralt et le sourire victorieux de Jacques.

Mais il s'effaça rapidement.

Pas plus déphasé que ça par l'envol de son glaive d'acier, Geralt de Riv attrapa sa lame d'argent dans son dos. Il s'en saisit à deux mains, avant de se placer lentement au-dessus du chevalier moribond, la lame noircissant à vue d'œil, prête à mettre un terme à sa vie.

- Non ! refusa Jacques en cherchant à prendre quelque chose dans le col de son armure. Ce glaive est pour les monstres !

- Mais tu en es un, comme nous, Jacques d'Aldersberg, commenta paisiblement Ace en rejoignant son camarade pour assister à la mise à mort.

Et dans un bruit de métal qui se tord, le glaive d'argent traversa l'armure, puis les os de l'homme, afin de percer directement le cœur et tuer sur le coup celui qui avait causé tant de mal et de destruction par ses désillusions et ses ambitions.

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La première chose que Geralt vit en ouvrant les yeux, c'était qu'il faisait nuit. Ensuite, ce fût la tête à l'envers de Jaskier au-dessus de lui.

- Enfin tu te réveilles, Geralt. Je commençais à me faire du souci. Maintenant, il manque plus que…

Un grognement sur leur gauche attira leur attention. Ace se redressait de là où il était étalé sur la pierre.

Un regard tout autour disait qu'ils avaient quitté la vision. Ils étaient de retour dans le cloître de la Rose Ardente. Et tout semblait étrangement calme. On entendait même les insectes.

- Où est le Grand Maître ? demanda Geralt en se remettant debout.

Ace était déjà sur ses pieds et ramassait l'arme de Shirohige qui l'avait apparemment suivi.

- Il est là-bas, mort, informa le barde en montrant du doigt la dépouille de l'ennemi public numéro un, épinglé au sol avec le glaive d'argent de Geralt. Pendant un moment, j'ai bien cru que vous deux aussi, vous étiez morts. D'ailleurs, c'est quoi ce changement d'apparence, Portgas ?

- Pas tes affaires, le barde, rétorqua Ace. On a été longtemps inconscient ?

- Assez longtemps pour que l'Ordre soit mis en déroute et que Foltest reprenne le contrôle.

- Et Yaevinn ? s'enquit Geralt.

- Il était là, gardant un œil sur vous deux, jusqu'à ce que j'arrive il y a quelques instants. Puis, il a dû partir.

- Foltest le laissera disparaître dans la nature, j'espère, soupira Ace en s'approchant de la dépouille de leur adversaire.

- Aucun doute là-dessus, après tout, les non-humains ont fait pencher la balance en la faveur de Foltest. Et pour vous ? Vous avez réussi ?

- Oui, nous n'avons plus qu'à prendre le dernier élément du corps de Jacques, ou le trouver dans ses appartements et enfin finir ce chapitre.

Du pied, Ace repoussa la main toujours dans le col de la côte de maille, trouvant un vieux médaillon en dimeritium qu'il avait apparemment cherché à arracher. Geralt s'approcha à son tour alors que son camarade retirait l'armure du chevalier pour voir s'il cachait les mutagènes sur lui. Il ramassa l'amulette et l'observa, ne pouvant s'empêcher de trouver l'objet de métal bleuté étrangement familier.

- Ahah !

Victorieusement, Ace brandit une petite boite en bois vieilli par le temps, remplie à ras-bord de formules de produits à utiliser pour causer des mutations.

- Alors ? Vous avez trouvé ? s'enquit Jaskier.

- Yup. On va pouvoir ramener ça à Kaer Morhen. Oncle Vesemir sera content, confirma Ace.

Et il confia la boite à Geralt qui la rangea soigneusement dans sa sacoche à élixir, le médaillon toujours dans sa main.

- Jaskier, regarde ce que j'ai trouvé sur le Grand Maître, appela Geralt.

Au trot, le barde vint à leur niveau et observa le médaillon dans la paume du Loup Blanc.

- Un médaillon de dimeritium ? interrogea Ace.

- Pas n'importe lequel. Il ressemble beaucoup trop à celui que Triss m'a demandé de donner à Alvin, précisa Geralt. Il lui ressemble, mais il m'a l'air plus vieux, plus usé. Pendant toutes ces années, il a dû le porter sous sa cuirasse.

- Ce devait avoir beaucoup de valeur pour lui, supposa Jaskier. Ou un charme.

- Ce devait être son moyen de repousser la magie hostile. Ou alors, pour contrôler des dons innés, comme ces visions persistantes.

- C'est quelque chose qu'on ne saura jamais, pointa le poète.

- Peu importe, Jacques d'Aldersberg, s'il s'agit bien de son vrai nom, est mort.

- Puisse Davy Jones avoir pitié de son âme, soupira Ace en s'accroupissant pour fermer les yeux du défunt.

Il ouvrit la mâchoire du mort et y glissa une pièce en or avant de la refermer, puis se relever. Devant les regards perplexes, il s'expliqua :

- Davy Jones est le démon des océans, dans ma culture. Et la pièce dans la bouche est une tradition de chez moi. Cela permet à l'âme de payer son droit de passage et ne pas finir damnée et sans repos.

- Eh bien, c'est la fin de l'histoire, annonça Geralt.

- Et la suite ? demanda Jaskier.

- J'ai deux personnes à retrouver, ce qui va m'amener vers le sud, une fois que j'aurais rassuré Vesemir sur ma santé, informa Ace en se laissant aller sur le manche du bisentô comme une canne de berger.

- Et toi Geralt ?

- Comment ça ? s'enquit le Loup Blanc.

- Tu as récupéré ce qu'on vous avait volé, punit ceux qui t'ont offensé. Joué les politiques et démantelé des complots. Tu as aimé et tué… avec Portgas, tu as fait beaucoup de route, Geralt. Que vas-tu faire à présent ?

Le lourd soupir du mutant voulait tout dire.

- Je suis épuisé, Jaskier. Je ne veux qu'un peu de paix et de calme.

- Comme je m'en doutais. Je te connais depuis un quart de siècle et je n'ai jamais vu autant de fatigue dans tes yeux. Les gens attendent trop de toi, et pourtant, tu affrontes les obstacles peu importe que cela soit raisonnable ou pas.

- J'dirais pas non à une sieste, je l'admets moi aussi ! ricana Ace.

- Ne vous trompez pas. Tout comme j'ai été ravi de faire ta connaissance, Portgas ou te revoir, Geralt, je pense que toi, mon vieil ami, tu aurais dû rester là-bas, sur l'île d'Avallach.

- Mais j'ai bien peur de ne jamais pouvoir trouver le repos, pointa Geralt avec lassitude.

- Que puis-je dire, que la chance soit avec vous sur vos routes, sorceleurs.

- Et sur la tienne aussi, barde, salua Ace.

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Le combat sanglant en Wyzima avait dévoilé la folie de Jacques d'Aldersberg.

Les gens cessèrent de faire confiance aux chevaliers de l'Ordre et les considérèrent comme des ennemis. Foltest en profita pour limiter le pouvoir de l'Ordre.

Il pardonna la mutinerie des non-humains, puisqu'ils l'avaient aidé à mettre un terme à la rébellion de l'Ordre.

Cependant, la merci du Roi fut de courte durée, ne pouvant effacer le dédain et la haine. Rapidement, les unités de Scoia'tael firent leur réapparition sur les routes forestières. La renommée de Yaevinn pour son rôle dans la défaite de l'Ordre attira plus de jeunes elfes sous sa bannière.

De leur côté, les Magiciennes de la Loge échouèrent à gagner plus d'influence sur Foltest.

Les temps de guerres n'apportaient que la misère et le chaos.

Avec le temps, tout revint à la normalité.

Les bons comme les mauvais avaient survécu, et peu savaient ce qu'il s'était vraiment passé durant ces quelques mois à Wyzima.

Il y avait ceux que le Destin avait réuni.

Comme Geralt de Riv et Portgas D. Ace.

Et ceux qui avaient été rassemblés autour d'eux. Et qui choisirent de rester silencieux.

Qu'est-il donc arrivé par la suite aux deux sorceleurs ?

Cela est une autre histoire tout à fait différente.

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Si Ace avait refusé sa récompense et choisi de partir devant pour rassurer Vesemir (et lui montrer sa vraie apparence maintenant qu'il l'avait retrouvée), ce n'était pas le cas de Geralt qui avait besoin de quelques orins pour pouvoir s'assurer un peu de repos.

Hors du bureau, les soldats de gardes somnolaient à leur poste, pendant que Foltest remettait une somme rondelette au sorceleur pour tous les services qu'il avait rendus à la nation avec les récents incidents.

- La Temeria et la Redania sont maintenant alliés, et ce, en grande partie grâce à vous, disait Foltest dans ses quartiers royaux à Geralt. Voici une belle récompense en gage de ma gratitude pour vos services.

Une grosse bourse en or changea de main.

- Votre majesté, je vous en remercie.

Le temps de ranger l'argent, Geralt s'inclina brièvement et tourna les talons pour quitter les lieux. Il ferma la porte du bureau derrière lui et descendit le long couloir lumineux percés par de nombreuses fenêtres et vitraux.

Jusqu'à ce qu'une odeur de sang lui monte au nez.

Il s'arrêta et regarda autour de lui pour voir le long d'un des murs une légère traînée de sang. Il la suivit du regard pour tomber sur deux gardes morts, vaguement jetés hors des regards dans une alcôves.

Il ferma les yeux et se concentra.

Il sentait une présence menaçante se rapprochant rapidement du bureau de Foltest.

Avec un rictus, Geralt dégaina son arme et fit demi-tour, fonçant de toute la vitesse de ses jambes vers la pièce qu'il avait quittée, juste à temps pour voir un étrange individu vêtu de tissu et de cuir assassiner les deux gardes du souverain et entrer en trombe dans le bureau.

Il accéléra le pas alors que l'homme était déjà sur Foltest qui esquivait du mieux qu'il pouvait en dépit du poids de son armure royale. Dans sa course, le mutant jeta une dague sur son adversaire qui la para avec une de ses machettes, mais ce fut suffisant pour que le Loup Blanc parvienne enfin à rejoindre le combat et utilise un signe pour éloigner l'assassin du souverain.

L'assassin fit de nombreuses pirouettes, se battant avec ses deux épées courtes, affrontant le style traditionnel mais rapide du mutant qui ne lui laissait aucun répit, sentant venir les coups de par son Haki naissant. Mais il devait bien admettre que l'assassin était fort. Et agile aussi. Sans parler de sa vitesse. Ou même de ses réflexes. Il roulait, sautait, parait, esquivait et tournoyait agilement.

Pendant un instant, Geralt se demanda si ce n'était pas un des camarades d'Ace qu'il affrontait, parce que son comparse de l'Ecole du Chat avait tendance à bouger ainsi quand il n'utilisait pour arme que ses poignards.

Le mobilier du bureau paya les frais du combat destructif entre les deux hommes, sous le regard inquiet et fasciné du souverain.

Dans un geste inattendu, Geralt jeta sa bourse sur son adversaire qui leva les bras par réflexe pour se protéger le visage.

Grave erreur.

Le glaive d'acier du Loup Blanc eut raison de son bras droit dans un mouvement descendant qui rependit du sang partout.

Le suivant lui trancha le ventre, perçant les organes internes, et le faisant tomber à genoux. Puis, dans une pirouette, il passa derrière son adversaire et l'acheva d'un coup précis dans le dos, le faisant tomber face contre terre.

Doucement, avec méfiance, échangeant son glaive contre un poignard plus utile au corps à corps, Geralt contourna le corps et s'agenouilla à côté de lui pour le retourner sur le dos. Il repoussa la capuche et retira le tissu masquant les traits de l'agresseur, pour se relever d'un bond et reculer de quelques pas, ignorant Foltest qui se rapprochait derrière lui.

Dans la mort, depuis le sol, deux yeux ambrés le fixaient depuis l'ombre de la capuche.

Deux yeux luisant de chats.

Deux yeux comme les siens.

Deux yeux de Witcher.