Cette fic est écrite dans le cadre de la 89ème nuit écriture du FoF (Forum Francophone) pour le thème "Trace". Le FoF est un forum regroupant tous les francophones de ffnet où l'on peut discuter, demander de l'aide ou s'amuser entre nous. Le lien se trouve dans mes favoris. Rejoignez-nous !
Cet OS est dédié à Saad Maia, à qui je souhaite au passage un excellent anniversaire ! J'espère que ce mini-cadeau te plaira, je t'avoue que moi-même je ne sais pas quoi en penser (C'est vraiment pas mes persos habituels, quoi)...
Otabek avait été forcé de le reconnaître, cette rencontre avait laissé des traces. Mais pourquoi ? Pourquoi l'avait-il autant marqué ? Ce n'était qu'un gamin. Un gamin de dix ans alors qu'il en avait quatorze, un gamin russe qui serait éternellement un concurrent à ses yeux. Et un concurrent féroce, à ce qu'il avait pu lire dans son regard.
Yuri Plisetsky. Qui était-il ? D'où sortait-il ? Comment un enfant de cet âge-là pouvait-il avoir une telle allure de soldat, de tueur ? Pourquoi l'avait-il autant captivé ? Ces questions, et surtout la dernière, Otabek se les était posées souvent. Et il y avait cherché des réponses.
D'abord, il s'était demandé pourquoi ce blondinet l'avait autant intrigué. Ce n'était qu'un jeune parmi les autres, dans un camp d'été comme les autres. Mais il y avait eu un petit quelque chose, chez lui. Ce regard déterminé et féroce qui avait contrasté avec son physique enfantin et innocent, cette perfection et cette application qu'il mettait dans chacun de ses gestes pendant que ses yeux exprimaient clairement son ennui mortel pour ces cours de ballet. Oui, c'était peut-être ça, qui l'avait autant intrigué. Parce que Yuri était le premier patineur à avoir donné l'impression de rejeter autant que lui tout ce qui s'apparentait à des cours de danse. Ça ne voulait pas dire qu'il n'était pas doué pour cela, bien au contraire. Seulement, contrairement aux autres patineurs qui dansaient par passion, il suffisait de regarder Yuri quelques secondes pour voir que lui dansait juste pour gagner. Lui-même avait décidé à la fin de ce cours de ne plus jamais faire de cours de ballet, parce qu'il n'aimait pas ça. Yuri non plus n'aimait pas ça, mais pourtant il continuait, il s'acharnait, malgré son ennui clairement visible. Comment un enfant de dix ans pouvait-il décider de prendre sur lui pour continuer une discipline qu'il n'aimait pas, juste pour satisfaire un objectif de perfection et de résultats qu'il n'atteindrait pas avant plusieurs années ? Ce jour-là, il avait décidé que le mot qui décrivait le mieux Yuri était bien le premier qui lui était passé par la tête lorsqu'il l'avait vu. Il était un véritable soldat.
Ensuite, ce blondinet l'avait captivé. Il s'était un peu renseigné sur lui mais, à l'époque de leur rencontre, Internet restait relativement silencieux à son sujet. Un article évoquant la carrière de sa mère et ses tournées à travers le monde, plusieurs écrits sur des blogs de fans qui affirmaient que Yuri serait la prochaine étoile montante russe, la relève de Victor Nikiforov. Il réalisa assez vite qu'ils avaient raison. Alors que la plupart des patineurs sacrifiaient leur enfance et leur adolescence en espérant que cela payerait quand ils auraient une vingtaine d'années, Yuri avait grillé les étapes. A onze ans, il était le plus jeune patineur à accéder au podium de la finale du Grand Prix Junior. A treize ans, il remportait l'or de cette même compétition et, lorsque, à quinze ans, il avait clôturé sa carrière de junior, il était devenu le seul double champion du monde junior et double médaillé d'or du Grand Prix.
Après ça, il avait observé ce blondinet. De loin, bien sûr. Otabek n'aimait pas les interactions sociales, il n'aimait pas se faire remarquer et n'avait pas de temps à perdre à essayer de se sociabiliser avec des personnes qui ne l'intéressaient pas. Sauf que Yuri, lui, l'intéressait. Et il l'intriguait. Alors il avait admis le fait que seul Internet lui permettrait de l'observer de loin et il avait épluché ses vidéos, ses chorégraphies, ses interviews. Vu le tempérament de feu de Yuri, il ne regrettait pas cette décision d'avoir gardé ses distances. Dans un premier temps, du moins. Plus il l'observait, plus il réalisait qu'il avait envie de briser cette distance, d'aller lui parler. Mais quand ? Comment ? Pour lui dire quoi ? Et ce n'était pas comme si les occasions étaient multiples, ils se croisaient parfois en compétition. Parfois. Le reste du temps, des milliers de kilomètres de distance les séparaient. Alors à quoi bon aller lui parler ? C'était tellement plus simple de continuer à l'observer dans l'ombre…
Enfin, il avait sauvé ce blondinet. Alors qu'il commençait à se persuader que rester caché était peut-être une bonne idée, il avait été attiré par les cris de groupies surexcitées. Il avait vu Yuri courir à toute allure et se cacher dans une ruelle pour échapper à une foule de fans qui le suivait sans relâche. Alors que Yuri se tapissait contre le mur en espérant qu'aucune d'entre elles ne le verrait lorsqu'elles passeraient devant la ruelle – ce qui était purement impossible – il avait vu en lui quelque chose qu'il n'avait jamais remarqué, depuis tout ce temps. A cet instant, Yuri n'avait plus été un soldat, plus un prodige du patinage, plus une énigme inapprochable. Il avait juste été un adolescent désespéré et épuisé. Un adolescent pas si différent que ça de lui, en fait.
Alors il avait décidé d'intervenir, de sortir de l'ombre avec sa moto le temps de jeter un casque à Yuri et de lui dire de monter. Il avait arrêté de se poser des questions, de se demander pourquoi ce gamin l'intriguait autant, ce qu'il avait de si particulier, pourquoi il l'obsédait depuis qu'ils s'étaient rencontrés dans un camp d'été, cinq ans auparavant. Il avait mis ces questions de côté. Quand une rencontre laisse de telles traces, mieux valait l'accepter – et passer le plus de temps possible auprès de celui qui nous a autant marqué.
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