Yo ! Voici un OS écrit pour la Nuit du FoF, en un peu plus d'une heure, sur le thème Cauchemar !

Cet OS est un peu spécial puisque je le dédie à Misty dont c'est l'anniversaire aujourd'hui !

Je sais qu'il est un peu tard mais joyeux anniversaire ! J'espère que tu as passé une très chouette journée !

Bonne lecture tout le monde !

Clown triste

C'est la nuit d'Halloween. Vendredi premier novembre, cinq heures du matin. Ils ont déjà eu un akumatisé dans la soirée, mais les pouvoirs du Papillon sont en pleine expansion, alors ils ont décidé de patrouiller toute la nuit. De toute façon il n'y a pas école le lendemain. Ils ont divisé la patrouille en deux : Chat Noir a pris la première partie, de vingt-trois heures à trois heures, et Ladybug a repris la relève. Elle a dit qu'elle rentrerait chez elle à sept heures, mais en fait elle n'a pas l'intention de revenir avant le lever du soleil. Il a bruiné toute la nuit, c'est l'heure glaciale et tout est fermé. Son costume est humide, et même s'il la protège efficacement du froid, elle sent ses cheveux geler sur sa tête, la peau de ses joues comme de la glace, ses lèvres engourdies. Elle se permet une pause, à la moitié de son service. Si elle n'en prend pas, elle va geler.

Elle file sur les toits, se demande si Chat Noir, lui aussi, est allé là-bas pour se réchauffer. S'il vient parfois, comme il lui arrive, sous sa forme civile, juste pour profiter du lieu et de son calme miraculeux à Paris. Elle arrive vite devant la serre, va pour se détransformer mais remarque que la lumière est arrivée. Lentement, très lentement, elle ouvre la porte. Personne ne peut avoir découvert cet endroit, pas vrai ? Elle se tient fermement sur ses gardes, glisse un œil à droite, à gauche. Sur le canapé, rien de menaçant. Un chaton endormi. Son Chaton endormi. Elle était pourtant certaine qu'il était rentré chez lui. Il remue légèrement, et elle avance silencieusement vers la cuisinière, met du lait à chauffer.

« Ladybug ? »

La voix est brumeuse mais pas vraiment enrouée.

« Pardon, je te réveille ?

— Non, non. Je somnolais. »

Elle fronce les sourcils. Il n'a pas à somnoler ici, pas quand il pourrait être chez lui à dormir. Elle veut lui poser la question, lui poser mille questions, en fait, jusqu'à ce qu'il lui raconte tout exactement. Mais elle sait qu'elle n'y parviendra pas si elle le brusque. On lui a souvent dit qu'elle était peu subtile, et pourtant très douce. Un curieux mélange. Pour cette fois, elle va devoir miser sur la douceur. Alors dans l'eau elle ajoute du sucre, et du cacao, et aussi un peu de cannelle et un jaune d'oeuf, tout ce qui lui semble réconfortant. Elle sert deux tasses de chocolat chaud, vient s'asseoir sur le canapé, tout à côté de Chat Noir. Elle aussi, elle aurait bien besoin d'un bout de couverture.

« Tu as déjà fini ta patrouille ? J'ai peut-être vraiment dormi … »

C'est rare, de voir Chat Noir si calme. Il prend la tasse dans ses mains, et elle remue jusqu'à trouver une position confortable. C'est rare, aussi, qu'ils soient aussi proche physiquement.

« Je me suis permis une petite pause. J'avais un peu froid. »

Très lentement, presque comme un fantôme, Chat Noir lève la main, la pose sur la joue de sa Lady. Habituellement elle se serait dégagée, mais la paume brûle presque d'avoir tenu la tasse, et le geste est tellement étrange, d'une tendresse incrédule, pure. Chat Noir la touche comme un enfant qui n'a jamais caressé un chien.

« Tes joues sont glacées.

— C'est juste mes joues. Le reste est gardé au chaud. »

Chat Noir opine du chef et reprend sa main, qui laisse comme une trace frémissante sur la joue de Ladybug. Ils boivent un moment, sans rien dire. Peut-être que Ladybug n'est pas aussi douée qu'elle l'espérait pour tourner autour du pot.

« Et toi ? Je peux savoir ce que tu fais là ? »

Chat Noir la regarde à nouveau, il a des yeux écarquillés, comme s'il avait peur de se faire gronder. Ladybug lui sourit, pour le rassurer, non, non, il n'a pas fait de bêtise, si elle est un peu brutale c'est qu'elle est très inquiète. Il prend le sourire comme on prend un cookie, pince les lèvres, baisse la tête pour se frotter le nez contre son genou.

« C'est … rien de spécial. »

Ladybug sent quelque chose dans son estomac, une petite déception qui renforce l'inquiétude. Elle aurait voulu qu'il lui parle. Au moins cette fois. Il est peut-être trop tôt. Elle sait que ça prendra du temps. Mais elle n'est pas patiente.

« Ah bon ? Vraiment ? Chaton. »

Sa voix est plus autoritaire qu'elle ne l'aurait voulu, mais Chat Noir rit. Peut-être du ton, peut-être du surnom. Il parle.

« Non, c'est … C'est un peu ridicule. »

Ladybug comprend que c'est de lui-même qu'il rit. Elle, elle ne trouve pas ça très drôle. Elle sait maintenant que l'autodérision dont il peut faire preuve n'est pas désinvolte. Les piques qu'il peut se lancer à lui-même, il les pense. En fait, tout ce qu'il dit avec humour, c'est ce qu'il ne peut pas dire autrement, par peur. Par peur de quoi ? Ladybug ne le jugera jamais, refuse qu'il se trouve ridicule.

« Dis toujours.

— C'est … »

Il rit à nouveau, un peu plus fort. Le rire est clair, familier à Ladybug. Elle appuie son épaule contre cette de Chat Noir une, deux secondes.

« J'ai fait un cauchemar. C'est tout.

— Tu veux me raconter ? »

Il secoue la tête. Ses oreilles sont baissées. Ladybug essaie de le regarder dans les yeux, mais il s'esquive. Elle se dit, si elle s'ouvre d'abord, peut-être que ça marchera. Juste un peu. Ce n'est pas facile, comme résolution.

« Je ne crois pas te l'avoir déjà dit, mais j'adore la couture. Et … Un jour, j'ai rêvé que je n'arrivais pas à enfiler le fil dans mon aiguille. Juste ça. Vraiment, il n'y avait rien d'autre dans ce cauchemar, et dans les faits ça semble tellement infime mais … Mais j'étais terrifiée. Quand je me suis réveillée je n'arrêtais pas de pleurer. En dehors des faits c'est juste … l'ambiance, j'imagine. La peur de ne pas réussir, aussi. J'ai immédiatement essayé d'enfiler une aiguille, mais je tremblais trop, c'était impossible. Après, je ne sais plus comment je me suis calmée, mais j'ai réussi à me rendormir. C'est sans doute très bête aux yeux de quelqu'un d'autre mais moi, ce cauchemar m'a marquée. Même quand j'y pense, ça me fait encore peur. Alors tu vois ? C'est pas ridicule du tout.

— J'ai rêvé de ma mère. »

Ladybug sent son souffle se couper. Il a lâché ça sans préavis et elle se rend compte qu'elle a mis les pieds dans quelque chose d'énorme. Déjà, elle a envie de pleurer. Peut-être qu'il dira juste ça, parce que peut-être bien que ça résume tout, tout ce qu'il pouvait y avoir de terrifiant dans ce cauchemar, de terrifiant dans ce réveil, quand on réalise soudain que la mère n'est pas là. Il ne reste plus que l'angoisse du rêve et la tristesse de la réalité. On prend le pire de tout.

« Elle vomissait. Elle arrêtait pas de vomir et je voulais lui tenir les cheveux mais j'arrivais pas à bouger. Et à côté y avait C – Y avait une amie à moi, qui me répétait qu'elle avait faim et qu'il fallait qu'on aille acheter des chaussures. C'était … Oppressant. C'est tout.

— Ne dis pas que « c'est tout », Chaton. C'est beaucoup. Je te jure, tu … Je sais pas quoi te dire. Chaton … Viens là. »

Ladybug pose sa tasse, tente un câlin de réconfort. Chat Noir tient la sienne fermement, ses phalanges blanchissent sous la pression et au lieu de se relaxer tout son corps se tend. Ladybug se demande si elle a fait un faux pas, mais un sursaut renverse un peu de lait sur le canapé et elle se dit que non. C'est bien, ça fait du bien, de pleurer.

« Là, là. »

Elle essaie de se rappeler de ce que sa mère à elle fait, quand elle pleure tout ce qu'elle peut et qu'il n'y a plus de mots à dire, plus d'argument ni plus de raison. Elle se dit que son accent doit être terrible, mais elle se souvient de cette comptine, celle que sa grand-mère chantait à sa mère et que sa mère lui a chantée, petite.

« Ní wá wá, ní wá wá … yîge ní wá wá … »

Elle chante, se répète parce qu'elle ne se souvient plus de tout, et Chat Noir n'arrête pas de pleurer, les mains serrées et les yeux fermés, elle chante et un éclat qui ressemble à un rire perce entre les sanglots.

« Elle est, elle est, elle. »

Chat Noir essaie de parler sans y parvenir et au bout d'un moment il n'y a plus de larmes, plus qu'un rire, fatigué mais sincère.

« Elle est horrible, cette chanson. »

Sur le moment, Ladybug ne s'arrête pas sur le fait qu'il comprenne le Chinois. Elle se souvient vaguement de ce que ça veut dire, sa mère lui avait expliqué et alors elle avait pensé, heureusement que la fin et joyeuse, alors elle y tient, elle finit sa chanson jusqu'à ce que Chat Noir respire doucement, comme un enfant qui s'endort. Quand il s'est repris il boit une gorgée de chocolat, sourit mais n'ose pas la regarder. Ses yeux sont brillants, comme du verre lisse.

« Tu vas devoir y aller, non ? »

Ladybug pense qu'il doit être bientôt six heures. La ville est calme, vue d'ici, et elle ne veut pas le laisser tout seul.

« Laisse. Je sais pas toi, mais moi, je n'ai pas fêté Halloween du tout. Un film d'horreur, ça te tente ? »

Chat Noir la regarde enfin, il est plein d'espoir et ne peut pas mentir. Oui, ça le tente, mille fois oui. Quelque temps, oublier que c'est le réel qui le terrifie au-delà de tout.

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Et voilà ?

J'espère que ça vous aura plu, surtout à toi, Misty !

Des bisous !