Yo ! Cet OS est écrit en retard pour la Nuit du FoF de mars, sur le thème Frapper.

Bonne lecture !

Bang bang

Elle regarde les références que sa psychiatre lui a données. Oui, oui, elle s'y reconnaît. Elle a rempli le questionnaire. Elle a envie de la revoir maintenant, pour en parler à nouveau, mais elle va devoir faire avec ses pensées désordonnées. Elle a une patrouille, de toute façon.

« Ma Lady … »

Quand elle arrive, Chat Noir a les oreilles basses. Il ne la regarde pas, il regarde ses pieds. Il ne fait même pas semblant d'aller bien.

« Chaton ? Qu'est-ce qui ne va pas ? »

Il regarde autour de lui, puis au loin. Il ne sait pas comment aborder le sujet. Lui dire qu'il sait. Qu'il la connaît. Qu'il l'a démasquée, et malgré lui. Qu'il est désolé. Tellement désolé.

« C'est … On peut en parler en patrouillant ?

— Bien sûr. »

Elle garde un pas lent, prend son temps en marchant sur les toits. Elle s'approche de Chat Noir pour lui bourrer l'épaule, et il a un rire un peu triste. Il ne l'a toujours pas regardée.

« J'ai une amie. Une amie qui m'est très chère.

— Oh. »

Un moment, Marinette a l'impression qu'il va lui dire qu'il est tombé amoureux. D'une autre que d'elle. D'une fille de sa classe. De quelqu'un qui ne lui ment pas, jamais, de quelqu'un à qui il n'a pas besoin de mentir. Un amour entre deux civils. Elle pensait qu'elle serait soulagée, mais en fait, elle se sent l'envie de pleurer. Ça la frappe. Si Chat Noir ne l'aime plus, qu'est-ce qu'il restera ? Elle sera seule. Toute seule en haut de la Tour Eiffel, avec ses yeux pour pleurer et une dépression caractérisée, sans plus le moindre doute. Elle ne remarque qu'elle s'est arrêtée de marcher que quand Chat Noir s'arrête à son tour, se tourne vers elle. Elle lève les yeux vers lui. Cette fois, il la regarde, et il semble inquiet.

« Ma Lady ?

— Pardon, tu disais ?

— Je disais … tu es sûre que ça va ? Tu es toute pâle.

— Ah, oui. Je n'ai pas beaucoup dormi. Tu me parlais de ton amie ?

— Oui. C'est que … je pensais qu'elle allait bien. Et en fait, non. Pas du tout. Et je m'en veux de ne rien avoir remarqué.

— Oh. C'est normal, tu sais ? Tu ne peux pas savoir si la personne ne te le dit pas.

— J'aurais dû le deviner. Voir les signes.

— Chat Noir … Cette amie, elle a de la chance de t'avoir pour ami. Crois-moi. Tu tiens à elle, ça se voit.

— Mais … maintenant que je le sais … Qu'est-ce que je dois faire Ladybug ? »

Elle réfléchit. Chat Noir la regarde dans les yeux avec tellement, tellement d'espoir. Comme si elle détenait la vérité absolue. Il a besoin d'elle. Et elle se sent sur le point de craquer, encore. Non, pas maintenant. Elle a mieux à faire que pleurer et crier. Elle doit réfléchir, mais son esprit est confus. Elle n'est pas fatiguée, pourtant. Toute son énergie vibre sans jamais converger vers un point fixe.

« Tu … Dire la vérité, non ? Dis-lui que tu as vu que quelque chose n'allait pas. Que tu veux l'aider, si tu peux. C'est le cas, non ?

— Oui ! Mais j'ai … j'ai peur qu'elle le prenne mal ? Enfin, elle n'est jamais tout à fait à l'aise en ma présence … Je … J'ai peur qu'elle ne me déteste. »

Ladybug part dans un fou-rire, et elle sait que ce n'est pas juste pour Chat, qui se confie sincèrement à elle, mais l'idée est tellement incongrue. Elle lui offre un grand sourire. La tristesse de plus tôt est partie, l'angoisse reste en fond, endormie mais prête à jaillir.

« Mais qui pourrait te détester, Chaton ? Tu es la personne la plus adorable, sincère, gentille, attentionnée et courageuse que je connaisse. Si elle te déteste, laisse-moi te dire qu'elle n'en vaut pas la peine. Je suis certaine qu'elle tient à toi.

— Mais … Et si … Si je la blesse en lui disant la vérité ?

— C'est ta décision, Chat Noir. L'un comme l'autre peut faire du bien et du mal. Alors fais le choix que tu ne regretteras pas. »

Chat Noir opine solennellement du chef, et Ladybug se demande s'il a d'autres questions. Il la regarde dans les yeux, ne vacille pas.

« D'accord. Je vais lui dire la vérité. »

Elle lui frotte le crâne d'un geste léger, lui sourit.

« Tu fais le bon choix. »

Elle aime la sérénité qui traverse un moment les prunelles de Chat Noir. Elle lui aurait dit ça, peu importe son choix. C'est le sien. Il est forcément bon. Les sourcils de Chat Noir se haussent et se plient. Son regard devient douloureux.

« Je suis désolé.

— Désolé ? Désolé de quoi ?

— Je suis tellement désolé Marinette. Je n'ai jamais rien vu. Et maintenant … Je voulais pas, je te jure, Marinette … »

Ladybug ouvre la bouche. Il ne vient pas de l'appeler comme ça. L'information met un temps à monter au cerveau et quand elle y arrive enfin, c'est percutant.

BANG.

Bang, il sait. Bang, comment ? Bang, depuis quand ? Bang, non, non, non.

« Qu'est-ce que tu … »

Elle n'arrive pas à finir sa phrase. Elle se recule, comme si elle avait reçu un coup, se recule jusqu'à ce que son dos touche une cheminée, et elle se laisse glisser contre les pierres jusqu'à être assise par terre. Elle se prend la tête dans les mains, et elle entend les pas de Chat Noir qui s'approchent.

« Ma Lady … Ma Lady, tout va bien.

— Nan ! Nan, tout va pas bien !

— Marinette …

— Comment … Comment c'est possible ? Comment ? J'ai … Je dois arrêter, alors ? Rendre mes boucles d'oreille ?

— Marinette, ce n'est pas nécessaire.

— Arrête de m'appeler comme ça ! Et qu'est-ce que tu en sais, hein, de si c'est nécessaire ? Tu sais rien ! »

Elle le repousse alors qu'il s'approche, et le halètement de Chat Noir lui fait relever la tête. Il la regarde, blessé. Il a à nouveau les oreilles basses quand il chuchote :

« C'était méchant. »

Et elle a honte, à nouveau, une honte qui la brûle en entier, toutes les jambes et tout le torse et tout le visage. Elle veut disparaître, mourir maintenant. Des larmes lui montent, mais elle ne veut pas pleurer. Elle se relève.

« J'aurais pas dû dire ça. »

Elle s'appuie contre la cheminée comme on se tient à une bouée de secours. Sans, elle ne tiendrait pas.

« Je suis juste … Je suis désolée …

— C'est rien.

— Nan, c'est pas rien. Chat Noir, j'avais pas le droit de te faire mal. C'est pas normal. Je peux pas te faire du mal, pas moi, pas à toi. Je veux que quand tu me vois, tu sais que tout va bien se passer, parce que c'est ça que tu représentes pour moi.

— Ladybug. C'est déjà le cas.

— Mais je suis … Je suis juste … Juste Marinette. C'est ridicule.

— Comment ça ridicule ? Marinette ? Je t'interdis de parler d'elle comme ça ! Euh, de toi comme ça !

— Tu … Chaton. Tu es extraordinaire. Comment tu peux ne pas être déçu ?

— Déçu ? Moi de toi ? Chat Noir de Ladybug ? Je m'y connais un peu en Science-Fiction, et crois-moi que ce scénario, personne ne pourrait le gober.

— Alors tu n'es pas déçu ?

— Pas une seconde. Je suis juste … »

Marinette attend la fin, le cœur battant. Plus amoureux. Il n'est plus amoureux. C'est tout. D'accord. Elle devait s'y attendre.

« Désolé. J'aurais dû voir que ça n'allait pas.

— Je t'ai dit que –

— Accepte mes excuses. S'il-te-plaît. Je suis sincèrement désolé.

— D'accord. J'accepte tes excuses. Mais c'est pas grave, tu sais ? Tu es sans doute la seule personne qui sait que quelque chose cloche, à part peut-être ma mère.

— Tu as des amis qui tiennent à toi, Ladybug.

— Je sais. Mais je ne veux pas les encombrer avec ça. Et puis tu sais … C'est un peu prétentieux mais … J'ai l'impression qu'ils ne comprendraient pas. C'est bizarre, non ? »

Chat Noir lui sourit. Il s'approche doucement, attrape la main de Ladybug avec la sienne, lui laisse le temps de s'enfuir si elle le souhaite.

« Pas vraiment. Je parle jamais de ma mère. Quand je dis qu'elle me manque … Si quelqu'un me répondait qu'il comprend … J'aurais envie de lui crier dessus. De lui dire que c'est pas possible qu'il comprenne, parce que cette douleur, elle est à moi, juste à moi, et je peux pas envisager que quelqu'un d'autre puisse la connaître parce que …

— Parce que comment eux, ils pourraient arriver à vivre aussi bien s'ils avaient aussi mal ? Est-ce que ça veut dire que c'est juste moi qui suis faible ?

— Est-ce que c'est égoïste, d'avoir mal au point qu'on ne veut entendre parler de rien d'autre ? Est-ce que d'avoir mal à ce point, ça fait de moi une mauvaise personne ?

— Est-ce que je suis triste par paresse d'aller bien ? Pourquoi tout le monde est heureux sauf moi ? Pourquoi c'est facile pour eux de sourire ? »

Chat Noir ne répond rien, et Marinette serre ses doigts. Elle n'est pas toute seule, à ressentir ça, alors. Elle prend les doigts et les porte jusqu'à son visage, caresse sa joue avec. Elle relève le regard pour trouver les yeux verts de son partenaire. Ils sont humides de larmes qui ne veulent pas couler.

« Merci d'être là, Chat. »

Et,

Bang.

Il lui sourit. Elle sent que son cœur rate un battement. Elle n'aurait pas cru. Elle le regarde, elle regarde ses lèvres, ses yeux, ses lèvres, et maintenant elle sent ses lèvres et,

BANG !

Ça la frappe, plus fort encore, ça la frappe comme un coup de pied dans le ventre, des lèvres contre des lèvres et elle ne sait pas si elle le veut ou non mais elle sait que Chat Noir ne lui a pas demandé son avis et elle se sent trahie, bien plus qu'elle ne l'a jamais été. Elle se recule brutalement, le fixe de deux grands yeux bleus. Il papillonne, la scrute, un peu abasourdi, étonné d'être là.

« Je … »

Elle ne dit rien, choquée. Elle ne peut pas croire qu'il a fait ça. Qu'il l'a poignardée d'un coup. Qu'il leur a fait mal, à tous les deux. Deux fois dans la soirée, elle l'a repoussé physiquement. Il fait un pas vers elle, elle recule. Elle tremble.

« Je voulais pas … Je suis désolé. »

Avec trois temps de retard, elle le gifle. Sa main lui fait mal, et elle sait que la joue de Chat Noir est rougie, pas seulement par le froid. Elle souffle une expiration tremblante.

« Plus jamais. Plus jamais tu fais ça.

— Je te promets. Plus jamais. »

Il a gardé la tête sur le côté, déplacée par la gifle et Ladybug opine plusieurs fois du chef, sur le point de craquer. Elle n'en peut plus, cette fois. C'était le coup de trop.

« J'ai besoin de rentrer. Appelle-moi si tu as besoin. »

Chat Noir ne dit rien et elle saute sur un autre toit, prenant la direction de chez elle. Quand elle est hors de vue, Chat Noir envoie son coup de pied le plus puissant dans la cheminée, siffle de douleur avant d'attraper son tibia.

« Comment j'ai pu faire ça ? »

Il lance un coup de poing dans la cheminée, invoque son cataclysme, et avant que sa main ne touche la brique, il s'arrête. Ladybug n'est pas là pour réparer sa bêtise, cette fois. Lessivé, il retourne sa main vers lui, et fait disparaître son grelot dans un bruit triste et brisé.

.

Bang bang,

He shot me down,

Bang bang,

I hit the ground,

Bang bang,

My baby shot me down …

.

.

Voilà ? Me frappez pas. Moi aussi je souffre. Normalement à un moment ça va aller mieux ?

D'ici là mes excuses.

(Je pense à Alixe qui dit que je maltraite Adrien. Mais je fais pas exprès !)

Bref. Ce texte traîne depuis longtemps parce que je voulais pas le poster avant d'en avoir un autre, moins lourd. Et c'est ce que la Nuit de juin m'a offert, donc vous pouvez vous réconforter au prochain chapitre ?

A très vite !