Yo !

La suite !

Code secret

[Mercredi, 7:35

A : Adrien ^. .^

Médicament pris !]

[A : Mari . Net

Bien joué ! [emoji confettis, emoji confettis, emoji confettis]]

Elle a retrouvé sa psychiatre, elles ont pu parler. Marinette s'est excusée, et la psychiatre lui a dit qu'elle n'avait pas à le faire. Que c'était normal, et courant, de sécher des rendez-vous quand ça devient important. Que ce n'est pas à elle que l'absence de Marinette pose problème, mais à Marinette elle-même.

La psychiatre ne l'a pas dit, mais Marinette a pensé : oui, à moi, à moi et à mon entourage.

C'était mercredi après le week-end avec Chat Noir, et elle s'est autorisée, encore une fois, à demander de l'aide. Elle se demande si elle ne se repose pas trop sur lui, mais quand elle lui a expliqué ce dont elle avait besoin, il a eu l'air infiniment soulagé, il a dit je suis heureux de pouvoir t'aider il a dit merci. Heureux. Merci. C'est Marinette qui devrait dire ça non ?

Elle a commencé son nouveau traitement, elle le prend à heures fixes, au petit-déjeuner, quand ses parents tournent le dos. Elle pense qu'elle devra leur dire. Elle repousse ce moment.

Une semaine qu'elle arrive à le prendre tous les jours, et quand elle arrive au collège elle croise le regard d'Adrien. Il lève le poing, et elle rougit, et lève le sien. Une semaine. Ce n'est pas grand-chose, mais ça semble un pas en avant notable. Adrien lui fait signe de le rejoindre à l'écart et elle regarde autour. Être avec lui est devenu plus naturel, elle a peur des suspicions.

« Marinette ! Bravo, pour la semaine.

— C'est … »

C'est normal. C'est pas si difficile. C'est rien. Ces phrases viennent naturellement à Marinette, mais non. Elle ne veut pas dire ça. Elle ne veut pas mentir. Elle ne veut pas dévaloriser ses efforts, l'épuisement, le courage dont elle a fait preuve. Elle a souvent du mal à recevoir les compliments, mais là, cette fois, de la part d'Adrien, de son partenaire, elle sait qu'elle le mérite.

« Merci. C'est grâce à toi aussi.

— C'est toi qui m'envoies les messages, hein !

— Bien vouloir les recevoir, je te jure que c'est déjà énorme.

— Qu'est-ce que tu veux faire pour célébrer ? J'ai … pas trouvé d'idée de cadeau ? J'avais pensé à un gâteau, mais je me suis dit qu'il serait forcément moins bon que ceux de tes parents et si je demandais à tes parents un gâteau avec ton nom ils seraient … enfin … tu ne leur a toujours pas dit ?

— Toujours pas. Mais je le ferai.

— Je sais. Alors ? Qu'est-ce que tu veux ? »

Marinette réfléchit. Et elle repense au samedi qu'ils ont passé ensemble. Elle se demande si ça lui plairait. S'il n'en a pas trop marre des vêtements.

« Tu … Ça te dit, une après-midi fripes ? Il fait beau et ça fait un certain temps que je veux de nouvelles pièces. Si … enfin, c'est pas très cool pour toi en fait. C'est ton boulot d'essayer des vêtements, c'est … nan, on peut se faire un cinéma ! Ou … ou des librairies ? Enfin, on n'est pas obligés non plus de dépenser de l'argent, on pourrait en profiter pour ranger un peu le QG et puis aménager et juste, après, boire un thé en regardant une série sur Netflix ! Ou encore … »

Et Adrien rit. Il rit d'un rire clair. D'accord. Marinette ne croit pas avoir dit quelque chose de ridicule pourtant. Elle a peut-être trop parlé. Il essuie une petite larme.

« Désolé. C'est … un peu surréaliste. On dirait un rencard. »

Elle sent son visage la brûler d'un coup, une rougeur monter de son cou jusqu'à la racine de ses cheveux et son partenaire rit encore. Elle plisse les yeux, vient lui enfoncer l'index dans le dessin de sa fossette.

« C'est malpoli, de se moquer d'une Lady.

— Je me moque pas. Faire les fripes, ça me semble très bien.

— T'es sûr ? Parce que –

— J'ai compris qu'on pouvait faire autre chose. Mais ça me tente. Quand tu parles de vêtements, tu rayonnes. »

Elle rougit encore, tente un air courroucé sans y parvenir, et comme la cloche retentit, abandonne.

« Pour une fois qu'on n'a pas l'excuse d'un akuma, on doit essayer de ne pas être en retard. »

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Ils ont passé une heure et demie à faire les friperies du centre et après être passés dans les Halles pour aller chercher un café froid au Starbucks, ils peuvent enfin s'asseoir. Ils ont deux sacs chacun, beaucoup trop pleins. Ils n'ont pas été raisonnables, loin de là, mais les bacs à un euro étaient plus que prometteurs, et si Adrien hésitait sur une chemise, Marinette en pinçait deux bouts et disait « avec un point là ça fera une ligne plus edgy au niveau des épaules et avec un débardeur en-dessous tu pourras te permettre des décolletés fous », et Adrien la prenait. Si Marinette hésitait sur une jupe, Adrien disait « le temps va se réchauffer, tu seras plus confortable », et Marinette haussait un sourcil et Adrien rougissait et marmonnait quelque chose sur les jambes musclées de sa Lady et Marinette lui grattait le haut de la tête et la prenait.

Alors, voilà.

Marinette pousse un long soupire, rajuste ses lunettes de soleil neuves sur son nez. Elle pense à ce qu'Adrien a dit plus tôt, et gratte le sol de son pied.

« Dis …

— Oui ?

— Si … Enfin, disons … hm …

— Certes. »

Elle lui bourre l'épaule.

« Si c'était un rencard. Ça. Si ça, là, c'était un rencard. Ça t'irait ? »

Elle rougit. C'est pas exceptionnel. Elle n'est pas exceptionnelle, sans le masque, et si Adrien n'a jamais sous-entendu qu'il n'était plus intéressé, il n'a pas non plus renouvelé ses avances. Il lui a laissé du temps, mais lui aussi a pu prendre du recul. Avec ces derniers mois, l'idée qu'il se faisait de sa parfaite Lady a dû tomber en miettes.

« Le code.

— Quoi ?

— Le code secret. Notre code d'amoureux. »

Elle se souvient. Sa gaffe en plein cours. C'est sans doute comme ça qu'il a compris. Elle réalise seulement, et elle lui fait des yeux ronds.

« Chat ! Je suis sérieuse, c'est pas le moment !

— C'est exactement le moment. C'est exactement pour ce moment que tu as créé ce code secret.

— Mais ! Je ! Je peux pas être une fausse ! Et puis les … Les choses ont changé ! »

Il sourit. Il pose son gobelet en plastique sur le banc et vient se poster à genoux devant Marinette, se permet de lui prendre la main.

« C'est vrai. Il s'est passé beaucoup de choses, depuis. Mais y a des choses qu'ont pas changé, tu sais ? Et l'idée que tu puisses avoir envie d'un rendez-vous avec moi, ça me rendra toujours fou de joie, tellement fou de joie que j'ai presque plus aucun discernement et tout le discernement qu'il me reste c'est celui que tu m'as offert sur un plateau ce jour-là. Alors dis-le.

— Je suis … Je suis obligée ?

— Oui. »

Il retient son rire. C'est difficile, mais il retient son rire. Elle prend une inspiration.

« Je suis axiologue en mécanique cantique. »

Et il laisse éclater son rire quand elle enfonce le visage dans ses mains. Elle crie.

« Mon Dieu ! Mais c'est la pire déclaration du monde ! Je me hais !

— Mais nan, mais nan. C'est la plus belle déclaration qu'on m'ait jamais faite. La plus personnelle, la plus joyeuse et la plus parfaite.

— Dis-le toi aussi. Sinon c'est pas juste. Je me sens ridicule alors qu'à la base cette idée était pour te protéger de fausses moi.

— D'accord. Je suis axiologue. En mécanique. Cantique. »

Il détache chaque mot, la force à accrocher son regard. Il n'y a que lui. Il n'y a que lui au monde pour dire ces mots avec autant d'amour et de force, et oui. Oui, dans la bouche d'Adrien, c'est la plus belle déclaration du monde.

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