Yo !

Cet OS est pour la Nuit du FoF, sur le thème Vitrine !

Bonne lecture !

Hold 'Em Like Puppies

Il y a eu des photos. Marinette les a vues, et elle a rougi. Adrien et elle courbés au-dessus des bacs remplis de fripes. Adrien et elle dans le parc. Adrien à genoux devant elle. Elle a regardé les photographies dès qu'Alya lui a envoyé le premier lien. Rapidement, les gens ont retrouvé son instagram, qu'elle a immédiatement fait passer en privé. Elle avait eu le temps de recevoir plusieurs centaines de message.

Elle n'imagine même pas ce que ça doit être pour Adrien. Elle, elle a éloigné son téléphone et elle a passé une bonne nuit. Elle n'a pas beaucoup dormi, elle n'a fait que rêver.

[Jeudi, 7:38

A : Adrien ^. .^

Et un cachet avalé ! Et une journée qui commence ! Bien dormi ?]

Elle commence sa journée avec le sourire, un peu insouciante et pleine de hâte.

« Me puce ? Qu'est-ce que tu as pris ?

— Euh … Une vitamine ! Je crois que j'ai pris un peu froid hier, comme je suis restée tard dehors avec juste ma veste, donc mieux vaut booster mon système immunitaire ! Je vais être en retard, je file bisous-bye ! »

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Elle arrive en avance, le temps de prendre un chocolat chaud au distributeur et de s'asseoir sur les marches pour saluer les nouveaux arrivants. Quand Juleka descend du porte-bagage du vélo de son frère, elle retrouve rapidement sa petite-amie à l'intérieur du bâtiment. Marinette consulte ses notifications sans rien trouver d'important. Quand elle relève la tête, Luka marche vers elle.

« Eh. Comment ça va ? »

Elle lui sourit. C'est vrai qu'il l'a vue au plus mal, lui aussi. Et puis … Et puis quoi ? Elle a eu beaucoup à faire, elle a trouvé un nouveau refuge. Elle baisse les yeux.

« Mieux. Et toi ? »

Il n'a pas l'air du lui tenir rigueur de leur éloignement de ces derniers mois. Elle trouve qu'elle a été brusque. Et elle n'avait même pas remarqué, avant d'y penser, avant de le voir et de se dire qu'il lui avait manqué. Il sort une cigarette. Il a dû commencer récemment. Zut.

« On fait aller. J'essaie de profiter de ma dernière année sans avoir le BAC à préparer.

— Luka …

— Oui ? »

Il la regarde. Il la regarde, il la regarde vraiment. Il la regarde, c'est drôle, pas du tout comme Chat Noir la regarde. Pourtant, elle sent toute son affection. Ça la réchauffe de l'intérieur.

« Je … je te dois des excuses.

— Il s'est passé quelque chose ? »

Elle hausse les épaules. Elle finit le sucre au fond de son gobelet. Elle a envie de regarder son téléphone. Ce ne serait pas gentil.

« On peut dire ça. J'y vois plus clair maintenant. Euhm … Adrien et moi, on sort ensemble.

— Oh.

— Oui. Je suis désolée.

— Eh. T'as pas à t'excuser. Tu m'as jamais menti. Depuis le début, je savais que tu l'aimais.

— C'est … Tu le prends bien ?

— Je mentirais si je disais que je n'étais pas triste. Mais tu as l'air de vraiment l'aimer et … ça fait plaisir de te voir heureuse. »

Elle sourit, presque piteusement, honteuse d'être heureuse, qu'il soit, comme toujours, aussi parfait face à elle. La sonnerie retentit et elle fronce les sourcils. S'il n'y a pas d'attaque, Adrien est toujours à l'heure. Elle regarde à nouveau son téléphone. Pas d'alarme. Pas de message non plus.

« Je veux pas te mettre en retard. Mais si jamais tu veux qu'on fasse quelque chose ensemble, hésite pas. Et t'es la bienvenue sur le Liberté.

— Merci. Je demanderai à Juleka quand vous répétez ! »

Elle file. Personne ne s'alarme du retard d'Adrien. Après tout, c'est courant. Il n'y a que Marinette qui sait que ce n'est pas normal.

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Jeudi, 7h30

« Adrien ? »

Il relève le nez de sa tasse de thé, cligne longuement des yeux, pas encore bien réveillé.

« Bonjour, Père. Vous n'êtes pas dans votre bureau ?

— Est-ce que j'ai l'air d'être dans mon bureau ? »

Adrien s'affaisse sur son siège. Le ton sec le réveille brusquement, et il écarquille les yeux. Il n'a pas la moindre idée de ce qu'il a fait de mal. Ou peut-être que si. Mais ce n'était pas mal. Gabriel pose une photographie sur la table du petit-déjeuner.

« P-Père ! Je peux vous expliquer !

— Il n'y a rien à expliquer, Adrien. C'est purement inacceptable.

— Mais …

— Pas de mais ! Tu sais que je déteste les excuses. Tu es la vitrine des Agreste. Tu ne peux pas te laisser aller à de pareilles fantaisies. »

Peut-être qu'Adrien n'est pas si bien réveillé que ça, parce qu'il ne trouve pas en lui la force de retenir son rire amer. Son père fixe de grands yeux sur lui. Adrien secoue la tête. Il sourit. Il n'arrive pas à reculer. A s'excuser. Il sait que c'est ce qu'il devrait faire. Mais il n'a rien fait de mal.

« Merci pour votre éclaircissement, Père. »

Il a les mots acides, et le sourire amer. Il regarde son père dans les yeux.

« Mais il se trouve qu'une vitrine, ce n'est pas un métier. C'est un objet. Et au cas où vous auriez manqué de le remarquer, je respire.

— Je ne te permets pas d'être insolent !

— Vous avez statué, et m'avez fait comprendre qu'il y avait à mon sujet un conflit d'usage entre vous et l'état du vivant.

— Adrien ! Monte dans ta chambre !

— Et vous ne niez même pas ? »

Le sourire d'Adrien est parti, ce sont les larmes qui menacent maintenant.

« J'ai dit : monte dans ta chambre.

— Je suis votre fils ! Si vous vouliez une poupée à habiller, c'était pas le bon procédé !

— Tu ne penses pas ce que tu dis.

— Pour une fois ! Vous n'écoutez plus personne, depuis que Maman est morte ! »

Il n'a jamais utilisé ces mots. Jamais dans cet ordre. Jamais face à son père. Il en a versé, des larmes lourdes de chagrin, mais pour la première fois elles semblent quitter son corps en emportant avec elles le poids des doutes. Comme si tout ce temps, quelque part, il pensait qu'elle était encore là. Que tant qu'il ne le disait pas, tant qu'il fermait les yeux, il la gardait en vie à l'intérieur de lui.

« Ne parle pas de ta mère ! Silence !

— Non ! Maman est morte, et même si elle était en vie, elle préférerait mourir que vous voir comme ça ! Que nous voir comme ça !

— Comment peux-tu – Adrien. »

Le ton est moins sec. Plus calme. Gabriel prend sur lui. C'est rare.

« Est-ce que tu souhaites retourner voir un psychologue ? »

Et c'est la goutte de trop. Celle qui fait déborder l'océan et qui saccage tous les ports.

« J'ai pas besoin d'un psychologue. J'ai besoin … j'ai besoin de quelqu'un qui m'appelle Chaton. »

La colère d'Adrien descend aussi vite qu'elle est montée. Il attrape son sac.

« Je ne voudrais pas être en retard au collège. »

Il quitte la maison, le pas pressé, le dos droit, le regard aussi glacé que celui de son père. Il déteste ça, mais il sait qu'il tient de lui.

Et quand ils ont fait une centaine de mètres en voiture et que le gorille s'arrête à un feu rouge, il ouvre la portière, laisse ses affaires et court plus vite qu'il n'a jamais couru.

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« Tu penses qu'il est malade ? »

Marinette grimace. Malade, il pourrait répondre aux messages, non ? La cloche du déjeuner sonne, et elle rassemble ses affaires aussi vite qu'elle peut.

« Je vais passer chez lui pour lui apporter les cours.

— Ça peut pas attendre ce soir ? Vous aurez plus de temps pour … tu sais …

— Je préfère y aller maintenant. Je pourrai dire aux professeurs ce qui ne va pas. »

Rien sur son téléphone. Toujours rien. Alors elle se transforme pour arriver plus vite chez les Agreste. Elle reprend sa tenue civile quand elle arrive devant le portail. La voix de Natalie lui répond.

« Oui ?

— Je, euh … Je viens pour apporter les devoirs à Adrien ! »

Un silence lui répond d'abord. Puis la boîte aux lettres s'ouvre.

« Vous pouvez les déposer ici.

— Est-ce que … Est-ce qu'il va bien ? »

Pas de réponse. Elle dépose les cours. La caméra recule, et elle est encore plus inquiète.

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Elle a mal au dos à force de s'inquiéter. Elle n'est pas passée chez les Agreste, par peur d'un nouveau refus au goût terrifiant. Elle veut juste … Juste s'emmitoufler dans le plaid qui a l'odeur d'Adrien. Essayer d'appeler, et sans doute pleurer un peu.

Et il est là. Et il a le culot d'être là. De lui sourire.

« Qu'est-ce que –

— Désolé. J'ai pas pris mon téléphone. »

Elle inspire. Expire.

« Tu peux expliquer ? »

Il a les yeux rouges. Est-ce qu'il a pleuré ? Elle a envie de dire qu'il n'a pas le droit. Qu'elle était morte d'inquiétude. Mais il tend les bras devant lui, demande une étreinte si désespérément qu'elle ne peut pas ne pas le prendre dans ses bras, recueillir ses sanglots.

« Je crois que … ton chaton est un chat de gouttière, maintenant.

— Quoi ?

— Je veux plus jamais retourner chez lui. Je veux pas.

— D'accord. D'accord. Viens là, Chaton. »

Et il le sait, il le sent que c'est ici, chez lui.

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Et les lettres du titre ça fait HELP. Voilà. Dodo.