Dire que Moira n'avait pas prévu ce qui allait se passer était un euphémisme. Ce sur quoi elle avait parié avait marché, oui, au bout d'un moment. Sa stratégie de l'aimant s'était vérifiée, oui, mais… L'intervention d'un élément extérieur avait aidé à accélérer les choses.
On peut dire que Derek Hale était plutôt bien tombé.
La petite étoile lui avait permis de rapprocher l'astre de Stiles du Psinet et de l'amener à sa portée à elle, mais le reconnecter avait été fastidieux et à vrai dire, elle avait failli ne pas y arriver. Et puis… Elle avait senti son énergie à lui, ce loup qu'elle avait soigné. D'un seul coup, la manœuvre s'était avérée plus simple, comme si inconsciemment, Stiles s'était raccroché à la fois à la petite étoile et à cette puissance discrète et pas censée être psychique. C'était un phénomène aussi surprenant qu'inattendu aux yeux de la M-Psi, qui n'avait jamais vu ça.
Remarque, elle ne s'attendait pas non plus à voir une partie des souvenirs du jeune homme lui exploser à la figure, lui montrant des images qu'elle aurait aimé ne jamais voir. Certaines étaient horribles, d'autres moins, mais elles avaient toutes quelque chose en commun : les émotions. Oui, chacune transpirait les émotions. Pas que ça la dérange en soi, toutefois… Le but était de rester discrète, et c'était exactement pour cette raison qu'elle avait décidé de son plein gré de rester sous le joug de Silence. Parce que si elle attirait l'attention sur sa personne, l'on se pencherait sur l'enfant qu'elle attendait. La suite était très simple à deviner. Ce qu'elle avait découvert, on le découvrirait aussi. Mais la puissance émotionnelle de ces souvenirs qui ne lui appartenaient pas était telle qu'elle n'arrivait tout simplement pas à reprendre le contrôle sur sa personne, du moins pas complètement. Mieczyslaw Stilinski était bien plus empathique qu'elle ne l'avait imaginé et pourtant, elle était consciente de sa nature cardinale, y compris dans cette classification indésirable aux yeux de la majorité de la population Psi.
Se relever ne fut pas simple tant les souvenirs échappés l'accablaient. Moira n'avait jamais été complètement Silencieuse. Toutefois, dans le monde Psi, il valait mieux tout faire pour se plier aux règles et ne pas sortir de la masse, se fondre dans le moule jusqu'à ne plus être soi-même. Ainsi, elle s'était en quelque sorte habituée à la froideur et la sobriété de l'existence. Ce qui sortait de l'ordinaire devenait douloureux et difficile à vivre. Concernant les émotions ressortant des souvenirs de l'hyperactif… L'inconfort se retrouvait décuplé, si bien que la jeune femme eut bien du mal à se mettre debout et lorsque cela fut fait, elle retira aussitôt ses chaussures à talons. Tant pis si elle se retrouvait pieds nus mais dans son état, marcher ainsi était bien trop difficile.
- Il faut partir, dit-elle d'une voix rauque. Tous. Vous devez tous vous mettre à l'abri.
Elle aussi, en y repensant. Elle baissa son regard sur le jeune homme à qui elle venait d'éviter la mort de justesse.
Stiles tremblait comme un dingue dans les bras de Derek. Il avait le visage hagard, des gouttes de sueur perlant sur ses tempes et sur son front. Il semblait complètement ailleurs, désorienté et incapable de parler ou même de réfléchir. Avait-il des séquelles ? L'avait-elle réellement sauvé ? Raccroché au Psinet, oui. Pour le reste… Il faudrait voir. Ce qu'elle avait fait était aussi risqué qu'inédit.
Elle jeta un dernier coup d'œil mental au Psinet.
L'étoile de l'hyperactif avait retrouvé ses couleurs mais semblait avoir perdu de sa vitalité.
xxx
Le manoir Hale avait plus ou moins été rénové depuis un moment. Disons qu'il était habitable et qu'on pouvait y vivre sans attraper froid, ce qui était déjà pas mal. La décoration était à revoir mais au moins, le règne de la poussière et des toiles d'araignée avait pris fin, tout simplement parce qu'avant ce jour fatidique, Derek et Peter allaient y passer un coup de temps à autres. A deux, ils avaient abattu un travail monstre. Depuis des mois, ils avaient pour projet de s'occuper de cet endroit pour y vivre et ainsi lâcher un jour le loft. C'était un endroit sympa, mais le manoir de leur famille restait dans leur cœur. Ils pensaient pouvoir s'y installer d'ici un an, quelque chose comme ça.
Finalement, les évènements les obligeaient à y loger plus tôt que prévu. Tous ensemble. Très honnêtement, ce n'était pas la place qui manquait, parce qu'il fallait pouvoir accueillir tous les membres de la meute présents durant l'affrontement entre Stiles et Noah. Moira avait été très claire là-dessus : le conseiller avait vu leur visage, alors ils devaient tous se cacher, en particulier Lydia mais ça, elle ne leur avait pas encore précisé. Elle était en train d'examiner Stiles, dans une chambre à l'étage. Elle l'avait sauvé, oui, mais voulait s'assurer qu'il n'ait pas de séquelle et, le cas échéant, soigner ce qui pouvait l'être. Elle aussi était devenue une fugitive : s'opposer à un Conseiller était un crime passible de mort.
La voilà qui descendait les escaliers, pieds nus. Les talons avaient été abandonnés depuis longtemps. La jeune femme semblait lessivée mais elle persistait à vouloir garder un semblant d'impassibilité sur son visage. Question d'apparence, sans doute. L'on se retourna vers elle d'un même mouvement. Si Isaac et Jackson étaient partis installer leurs affaires dans une chambre et que Liam était allé se doucher, Peter, Derek et Lydia gambergeaient dans le salon depuis un moment.
Derek se leva instantanément et lui demanda des nouvelles. C'était lui qui avait proposé à la M de venir avec eux. En soi, elle était elle aussi en danger, et les avait tous sauvés, dans un sens. L'ancien alpha ne ferait pas la même erreur que Scott : il savait être reconnaissant et accepter l'aide qu'on pouvait lui apporter. Alors autant aider à son tour. Moira leur cachait des choses, c'était certain, mais il sentait qu'elle avait un bon fond. Elle en avait forcément un. De tous les Psis qu'il avait aperçus jusqu'à présent, elle était la plus humaine – Stiles mis à part. Disons qu'il sentait que son masque d'indifférence était une façade et que son Silence n'était pas aussi parfait que ne l'était celui des autres. Il y avait quelque chose en elle qui titillait sa curiosité, et pas que.
- Sur le plan physique, tout a l'air de fonctionner. J'ai passé son cerveau au crible et réparé les quelques lésions que j'ai trouvées. Techniquement, tout va bien. S'il a des séquelles, elles seront surtout de l'ordre du mental. Il se repose, alors je ne peux pas juger de son état psychologique pour l'instant.
Derek et Lydia soupirèrent de soulagement. Peter, quant à lui, fixait cette jeune femme aussi curieuse qu'étonnante. La banshee passa se frictionna les bras, comme si elle avait froid.
- J'ai eu tellement peur, souffla-t-elle.
Son visage hagard témoignait du choc de ce qu'il s'était passé. Elle mettrait du temps à s'en remettre, c'était certain. Derek se retourna vers elle et posa une main sur son épaule.
- On a tous eu peur, dit-il d'une voix fatiguée. Mais c'est fini maintenant, tout va bien.
Oui, tout allait bien, pour l'instant. Ils étaient dans un endroit que les Psis n'avaient pas sur leurs radars pour l'instant, Stiles était sorti d'affaire et tout le monde était sauf – exception faite de Noah, donc on ne parlait pas pour l'instant. Il s'était passé tellement de choses qu'aborder ce sujet risquait d'en faire disjoncter plus d'un, l'hyperactif le premier. Chaque chose en son temps. Cela faisait réellement beaucoup de choses à avaler d'un coup. Derek perçut de très légers tremblements, à peine visibles, qui secouaient avec discrétion le corps de Lydia.
- Tu devrais manger un peu, nota-t-il.
- Je n'ai pas extrêmement faim, soupira-t-elle.
- Mais tu n'as plus rien dans le ventre alors il va falloir y remédier, intervint Peter en passant un bras autour d'elle.
Il fit un discret clin d'œil à Derek, qui comprit et encouragea la jeune femme. Finalement, elle finit par accepter et Peter l'accompagna dans la cuisine.
Dans le salon, ne restaient plus que Derek et Moira ce qui, il fallait être honnête, arrangeait le loup. Il avait des tas de questions à poser à cette Psi particulière. A l'heure actuelle, elle était la seule capable de lui répondre. Deaton aurait pu le faire également s'il ne s'occupait pas de faire disparaître le corps du shérif. Le loup frissonna à cette pensée alors que dans un sens, il n'arrivait pas à croire à ce fait. Pour lui, Noah était simplement… En hibernation. Son cœur se remettrait à battre, on mettrait une prothèse à son bras amputé, puis il reviendrait. Une possession… Ne pouvait pas tuer, si ? Pourtant, il s'était effondré, telle une poupée désarticulée, un jouet animé dont on enlevait les piles.
- Puis-je m'assoir ? Demanda Moira.
On l'avait invitée au manoir, oui, mais elle ne savait pas pour combien de temps, ni ce qu'elle avait le droit de faire. Ici, elle était membre d'une autre espèce, comme Stiles. Hors de question pour elle de prendre ses aises alors que tout pouvait se retourner contre elle à n'importe quel moment. On lui faisait confiance, oui, dans une certaine mesure seulement.
Derek hocha la tête et lui indiqua d'un geste vague de la main le prochain fauteuil qu'il vit. Si Moira contrôlait à peu près bien son visage de sorte à être la moins expressive possible, son langage corporel et son odeur lui révélaient bien des choses. Déjà, la lenteur et la lourdeur de ses mouvements témoignaient de son épuisement bien réel. Elle avait donné tout ce qu'elle avait non seulement pour sauver Stiles, mais également pour faire en sorte qu'il garde le moins de séquelles possibles de cet épisode. Derek se doutait que c'était loin d'être facile. En fait, cela lui faisait l'effet d'un prodige. Peut-être finirait-il par comprendre ou s'habituer à une telle force psychique et enfin accepter l'existence d'une espèce aussi puissante. Enfin, l'idée avait déjà fait son chemin dans son esprit depuis longtemps, elle était en train de s'y installer doucement. Il s'assit à son tour, de manière à se retrouver face à elle. Son instinct lui soufflait qu'il pouvait très clairement lui faire confiance, mais les vieilles habitudes avaient la peau dure et sa raison prenait le dessus.
- Je sais des choses et je pense que cela pourrait t'intéresser, fit-elle après un silence.
Derek tiqua au tutoiement auquel il ne s'attendait pas… Mais se rappela qu'elle l'avait déjà tutoyé, lorsqu'elle s'occupait de raccrocher Stiles à cette chose étrange qui échappait à sa compréhension : le Psinet. Ainsi, il ne la reprit pas et décida de faire de même.
- Tu comptes me demander quelque chose en échange de ces informations ?
L'air de rien, il gardait en mémoire l'attitude de Stiles envers elle, lorsqu'elle était venue, mandatée par Noah Stilinski pour le soigner. Si l'hyperactif avait pu lui fournir ce qu'elle désirait, Derek n'était sans doute pas en mesure de faire la même chose. Il restait sur ses gardes et tenait à ne mettre personne dans l'embarras, Stiles y compris. Parce qu'il avait secrètement peur que sa demande le concerne. L'énigmatique « double-cardinal » avait été assez éprouvé comme cela et Derek comptait bien le préserver et lui permettre de se reposer le temps qu'il faudrait. Il avait failli mourir… Encore.
Moira secoua la tête.
- En aucune manière, répondit-elle. Je pense juste qu'il est important que tu le saches et que tu transmettes l'information aux autres membres de ta meute.
Derek la sonda. Physiquement, il n'obtint pas grand-chose. Son odeur, par contre, dégageait une forme de… Nervosité. La sienne s'en teignit probablement aussi, et pas simplement parce qu'elle semblait réellement être au courant de quelque chose. Elle avait parlé de la meute. De sa meute.
- L'autre jour, tu voulais savoir qui avait battu le double cardinal.
Une lueur s'alluma dans les yeux du loup qui ne dit rien. Plus que de l'intérêt, c'était même de l'inquiétude.
- Lorsque j'ai réussi à raccrocher Mieczyslaw au Psinet, j'ai involontairement eu accès à quelques-uns de ses souvenirs. Ils m'ont comme… Explosé à la figure.
Derek se redressa dans son siège. Il ne perdait pas une miette des paroles de la Psi. Son cœur ne battait pas régulièrement malgré sa nature tirant vers l'inexpressivité. C'était comme ça. Un être vivant ne pouvait jamais contrôler son rythme cardiaque dans son entièreté. C'était biologiquement impossible. Elle ne mentait pas, disait même l'entière vérité. Il sentit même une pointe de douleur dans son odeur. Si ce qu'on lui avait raconté sur les Psi était vrai, la demoiselle n'était pas complètement Silencieuse. D'une manière ou d'une autre, ce qu'elle avait vu l'avait atteinte émotionnellement.
- Et ? Dit-il simplement, attendant la suite.
Avoir l'occasion de connaître l'identité de la personne ayant passé l'hyperactif à tabac était une chose qui ne se présenterait sans doute qu'une fois. De son côté, Stiles avait fait la tombe lorsqu'il l'avait interrogé. Il avait peur. Peur de quelque chose. Alors il se pourrait que la révélation de Moira puisse lui tranquilliser l'esprit. Celui qui avait osé passer Stiles à tabac n'oserait plus jamais s'approcher de lui. Parce que Derek comptait bien lui faire payer. Il avait vu tous ces bleus, toutes ces blessures. Si l'on ajoutait cela à l'état mental de l'adolescent, état mental assez pitoyable… La rage coulait dans les veines du loup, mais il avait assez de sang-froid pour se contrôler.
Pour l'instant.
- Si tu veux protéger ta meute et éviter que Mieczyslaw ne subisse à nouveau ce genre de traitement, je te conseille de t'éloigner de ton alpha, lâcha Moira sans cesser de le regarder.
Derek accusa le coup sans réellement comprendre au départ, et cela s'expliquait. En si peu de temps, il s'était passé tant de choses qu'il ne s'attendait pas à devoir encaisser toujours plus. C'était beaucoup trop, mais il fallait croire qu'une entité supérieure trouvait que ce n'était pas suffisant.
Et encore.
S'il savait.
Néanmoins, il finit par comprendre et Moira eut la patience et la bonne idée de ne rien dire. Il fallait bien le laisser digérer. Elle avait dû le faire aussi, à sa manière, l'affect envers McCall en moins. Mais le sort du double cardinal ne la laissait pas indifférente.
- Comment ? Finit par lâcher Derek d'une voix enrouée.
Il n'avait aucune raison de mettre sa parole en doute. De toute manière, son cœur transpirait la sincérité. A cela s'ajoutaient l'attitude et les derniers actes de Scott. La presque exécution de Stiles. Les mots durs de l'alpha. La mission suicide. L'envoi d'Isaac au casse-pipe.
Alors un passage à tabac… C'était si probable…
- Il lui a donné rendez-vous, lui indiqua Moira aussi froidement que possible.
- Stiles… On a vu ce dont il est capable, souffla-t-il.
Tout ce que la M s'accorda fut le haussement de son sourcil droit. Si l'homme face à lui pensait avoir tout vu de la puissance de Stiles, il se trompait lourdement.
- Il l'a laissé faire, lui apprit-elle en croisant les bras sur sa poitrine.
Le souffle de Derek se coupa un instant. Tout d'abord, il choisit de ne pas y croire, et contesta cette information, alors que le cœur de Moira lui hurlait la vérité à travers ses battements révélateurs. Oui, il s'était laissé faire. Le pire, c'était que ça allait de pair avec son attitude chaque fois qu'il venait au loft. Il laissait le choix aux autres de juger de son sort et décidait de ne pas le contester. Scott avait failli l'exécuter – il ne s'était pas ravisé de son propre chef –, et Stiles s'était résigné. Mais quelque chose ne collait pas.
- Il avait les moyens de se défendre, articula-t-il, ne pouvant décemment croire que Stiles avait laissé son ancien meilleur ami le tabasser.
- Que sont des moyens face à une menace, Derek ? Demanda Moira, se permettant une familiarité.
Cette fois-ci, le loup comprit l'information bien plus vite qu'il ne le devrait. Ses yeux transmirent à Moira toute l'émotion qu'il ressentait. Toute l'horreur qui le traversait. Scott était pourri jusqu'à la moelle mais tout de même, pas à ce point-là… Et pourtant, c'était si vrai, tellement probable ! Lui qui avait toujours voulu régler les problèmes dans la meute en évitant de tuer qui que ce soit avait manqué récemment, et par deux fois, de mettre fin à la vie de deux personnes. Stiles, puis Isaac. Alors des menaces ? Oui, bordel, c'était atrocement plausible.
- Qu'est-ce qu'il lui a dit ?
C'était à peine un souffle, un murmure. Qu'elle ait entendu ou non ses mots, Moira avait décidé depuis le début de lui dire la vérité, sans rien lui cacher.
- Il a inclus la banshee dans l'équation.
Le cœur de Derek manqua un battement. Non. Il voulut déceler quelque chose dans les yeux de la M-Psi, une forme d'espièglerie, quelque chose qui lui signifierait qu'elle lui faisait une plaisanterie. Parce qu'il avait beau comprendre que Scott était capable du pire, il ne voulait pas croire qu'il en était arrivé là.
- Si Mieczyslaw ne s'était pas laissé faire, ton alpha aurait fait du mal à la banshee. Je ne sais pas s'il l'aurait tuée directement, ou juste blessée. Le fait est qu'il connait la corde sensible du double cardinal et qu'il n'a eu aucun mal à s'en servir pour obtenir ce qu'il voulait.
Derek était bouche bée. Il eut un vertige, alors même qu'il était assis. Deux visages apparurent à son esprit. Stiles. Le visage tuméfié, le regard absent. Et Lydia.
Lydia. Indemne. Avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Une silhouette sombre, près d'elle, les griffes sorties.
Cela faisait depuis la guérison de Derek que la meute restait plus ou moins rassemblée au même endroit et Lydia s'était par conséquent toujours trouvée avec les autres, pas seule avec Scott. Mais il était là, la plupart du temps. Il était là.
Derek eut la nausée.
- Attendez, vous voulez dire que…
Le loup tourna brusquement la tête vers l'entrée du salon. Jackson se trouvait sur son seuil, l'air hagard.
- Vous voulez dire qu'il a accepté de se faire tabasser pour la protéger ? Termina le kanima, blanc comme neige. Vous avez vu ça ?
Derek serra les poings. Bien sûr qu'il avait entendu. Isaac, Liam et Peter devaient également avoir perçu la conversation. La puissance de l'ouïe d'un loup pouvait être surprenante.
- J'ai vu d'autres choses, mais ce point en faisait partie, consentit à révéler la M sans qu'une émotion n'éclaircisse son visage.
C'était sans doute une conséquence de leur proximité au moment de la reconnexion inespérée de l'hyperactif. N'ayant jamais reconnecté de Psi au Psinet auparavant, Moira ne saurait dire si voir certains souvenirs d'autrui lui exploser à la figure était quelque chose de normal ou non et ce n'était certainement pas quelque chose dont elle pourrait parler à ses pairs.
- Il a… Il a…
Les yeux dans le vague, Jackson ne réussit pas à s'exprimer mais s'avança assez pour se laisser tomber avec eux, sur un fauteuil, l'air exsangue. Non, définitivement, Stiles n'était pas un ennemi.
- C'est complètement suicidaire, finit-il par souffler.
Derek ne put qu'acquiescer. Oui, ça l'était. On pouvait confondre ça avec de l'altruisme, mais cela allait si loin qu'on se rapprochait plus de cette appellation. C'était dangereux. Scott aurait pu le tuer ! Et la fois où il avait réellement failli le faire, Stiles s'était résigné et avait accepté son sort. Son cœur se serra. Là, Scott n'avait pas eu pour intention de le tuer, mais bien de lui faire du mal.
- Il a toujours été de votre côté, que voulez-vous. Un E-Psi a toujours à cœur de faire passer les autres avant lui.
- Ce n'est pas normal, articula Derek.
- Disons que ça l'est pour lui, lâcha simplement la M.
Et d'un coup, cette simple information éclaircissait de nombreuses choses, dont des actes et attitudes de l'hyperactif. Cette facilité qu'il avait de s'oublier. De se préoccuper de leur sort sans penser réellement à lui.
Derek comme Jackson, fragilisés par toutes ces nouvelles, songèrent au même moment à quel point c'était terrifiant.
Mais surtout, leurs deux loups abandonnèrent définitivement et de leur propre chef – sans consulter leur partie humaine – toute loyauté à leur alpha dans un silence tonitruant.
