Quand le vaisseau parvint finalement dans le système solaire Terrien, les réfugiés à son bord commençaient à souffrir d'une certaine bougeotte. Bon, le mal des blédards n'avait pas atteint des sommets irréparables, ceux où vous décidez de mettre la main sur une hache et de poursuivre femme et enfant à travers les couloirs de l'hôtel où vous résidiez, mais il n'en était pas moins présent.

Bruce supposait que c'était une réaction logique pour les Asgardiens – d'après les histoires racontées par Thor, Loki, leur mère et les réfugiés qui ne demandaient pas mieux que de bavarder afin de se changer les idées, ils constituaient une race extrêmement active et avaient décidé de canaliser cette énergie dans la guerre pour la majeure partie. Se retrouver coincé à bord d'un vaisseau spatial menaçant de partir en lambeaux, sans rien à faire que ruminer encore et encore les mêmes platitudes afin de se consoler… n'importe qui aurait du mal.

Ça et ils venaient de réchapper à la destruction de leur planète. Les souvenirs traumatiques tendaient à s'incruster en premier plan dans l'esprit, surtout quand ils recevaient un milieu favorable pour leur permettre de bien fermenter – et un endroit clos, où vous étiez entouré de gens aussi traumatisés que vous-mêmes et incapable de trouver une distraction, n'était définitivement pas le type d'environnement qui permettrait une résilience quelconque.

Bruce n'était pas qualifié du tout pour affronter un problème pareil, et il se demandait si une armée de psychiatres réussirait seulement à faire face. Enfin, il faudrait les trouver, ces psychiatres, parce que l'expert en physique nucléaire ne pensait pas que SHIELD en fournirait de bons, ou réussirait à trouver un créneau pour caser l'intégralité des survivants à moins de pratiquer la thérapie de groupe.

Curieusement, c'étaient les géants bleus – les jötnar, c'était leur nom – formant l'entourage de Loki et du petit prince qui semblaient les plus en paix avec la situation, mais Bruce avait cru comprendre qu'il y avait des tensions politiques à l'œuvre entre leur planète et Asgard, ça en disait probablement assez sur la question.

En attendant, Frigga et ses fils se préparaient à descendre sur Terre afin d'entrer en pourparlers avec le gouvernement américain pour l'octroi d'un lopin où rebâtir leur culture – les réfugiés pourraient vraisemblablement partir ailleurs pour demander asile, mais le pays ayant subi l'Incident et servant de base plus ou moins reconnue aux Vengeurs était certainement mieux préparé à accueillir des aliens sur son sol.

C'était grand, les États-Unis, ils pouvaient bien céder l'équivalent d'une ville à une culture extraterrestre qu'ils pourraient ensuite exploiter tout à loisir.