Comment motiver Hikaru pour qu'il se lève
Quand le réveil sonna, Akira appuya aussitôt sur le bouton arrêt afin de ne pas déranger les voisins. Il souleva ensuite légèrement la couverture pour s'asseoir sur le bord du lit à l'occidentale – Hikaru avait beaucoup insisté pour prendre ce modèle – et s'étirer. Derrière lui, le souffle de Hikaru s'arrêta un instant dans un grognement, puis reprit avec régularité. Akira se retourna pour le regarder. Hikaru avait remonté la couette le plus haut possible, et seuls ses cheveux et son nez dépassaient. Ses paupières closes ignoraient le petit jour qui commençait à se répandre dans leur chambre.
C'était leur premier matin à deux dans leur nouvel appartement.
Akira se leva, se rendit dans la salle de bains et se prépara. Il avait pris un bain la veille au soir, mais il se lava à nouveau le visage et le corps des traces de sueur de la nuit. Il retourna ensuite dans la chambre pour choisir un costume et une chemise pour la journée. Il regarda à nouveau Hikaru ; ce dernier n'avait pas bougé et son souffle régulier avait la lenteur d'une inconscience persistante. Alors Akira l'appela en cherchant son épaule pour le secouer :
« Hikaru ! La salle de bains est libre ! »
Un grognement et un frémissement sous la couette lui répondirent à contrecœur. Akira insista :
« Nous devons aller à l'Institut pour recevoir les détails de nos prochains matchs. N'es-tu pas curieux de savoir contre qui tu vas jouer ? »
Cette fois-ci, le grognement fut plus affirmatif et le mouvement de couette plus ample. Mais Hikaru ne se leva toujours pas. Akira commença à comprendre pourquoi la mère de celui-là lui avait souhaité bon courage et persévérance quand ils lui avaient annoncé qu'ils allaient emménager ensemble. D'ailleurs, Akira aurait dû s'en douter : Hikaru n'arrivait-il pas juste à l'heure à leurs rendez-vous du matin, souvent mal coiffé et sans avoir pris le temps de petit-déjeuner ? Ce n'était pas un détail auquel il avait prêté attention jusqu'à présent, car Hikaru n'était jamais en retard à un match ou une partie de go, mais, en y repensant, il y avait certains indices vestimentaires et comportementaux qui trahissaient le peu d'appréciation que celui-ci pouvait avoir pour le matin.
Hikaru était toujours roulé en boule sous la couette, immobile et la respiration lente et profonde.
Akira décida de hausser la voix et de faire appel à l'une des fibres sensibles de Hikaru.
« Hikaru, je prépare le petit-déjeuner, si tu veux manger chaud, il faut que tu te lèves. »
Akira attendit un instant, mais seule la respiration de Hikaru lui répondit. Comme il avait faim, il se rendit néanmoins dans la cuisine.
Lors de leur emménagement de la veille, sa mère lui avait fait la surprise de remplir le réfrigérateur et les placards de ses produits préférés ; c'était sa manière à elle de le soutenir. Tout était déjà rangé et prêt à l'emploi. Elle avait même programmé l'autocuiseur pour que le riz soit frais pour le matin ; la veille au soir, ils avaient fini de déballer les autres cartons en grignotant un plat tout préparé du supermarché le plus proche.
Ce matin-là, Akira cuisina donc le même petit-déjeuner que sa mère avait l'habitude de lui préparer : du riz accompagné de natto, une omelette roulée sur elle-même, des légumes en condiments, de la soupe miso et une tasse de thé vert.
Les odeurs du petit-déjeuner se répandirent bientôt dans l'appartement, et Akira retourna dans la chambre pour vérifier si elles étaient parvenues jusqu'à Hikaru. Ce dernier ignorait toujours la matinée qui commençait avec une obstination marquée. Akira se souvint alors de la machine à café que Hikaru avait apportée et que la mère d'Akira avait rangée dans un placard. Akira la sortit, fouilla le même placard à la recherche du filtre et du café nécessaires, et commença à préparer une tasse fraîche en espérant ne pas faire d'erreur. Il avait déjà vu Ogata accomplir ce rituel chez ses parents, et se fiait à ses souvenirs. Pendant que le café filtrait, il mangea son propre petit-déjeuner qui commençait à refroidir.
À son tour, l'odeur du café frais commença à se répandre dans l'appartement. Akira en remplit une grande tasse et l'apporta dans la chambre, pour la poser sur la table de chevet, au plus proche du nez de Hikaru :
« Hikaru, le café est prêt ! »
Un grognement, mais pas de mouvement. Akira essaya de tirer sur la couette pour découvrir Hikaru, mais celui-ci résista des deux mains tout en se roulant en boule.
C'était décidément ridicule !
Akira songea à aller chercher un verre d'eau pour le verser sur la tête de Hikaru, mais il ne voulait pas tremper leur lit. Il chercha donc une autre solution, et cette fois-ci une évidence lui vint à l'esprit.
« Hikaru, si tu te lèves tout de suite, nous aurons le temps de faire une partie de go avant d'aller à l'Institut. »
Un frémissement parcourut la couette, et la tête de Hikaru émergea, les yeux clos sous des sourcils froncés :
« 4-4 », annonça-t-il avec une voix plus assurée que son expression.
Akira refusa de céder :
« Non, Hikaru, si nous jouons, ce sera devant le goban, et quand tu seras habillé. »
Hikaru se redressa dans le lit tout en grognant :
« Pourquoi ?
— Parce que tu n'es pas malade, et que je refuse donc de jouer au lit.
— Si, tu vois, je suis malade », essaya Hikaru en toussotant maladroitement.
Akira se montra intransigeant :
« Tu ne l'es pas. Lève-toi, fais ta toilette, et rejoins-moi au goban. Si tu tardes, il n'y aura pas de nigiri. »
Akira quitta cette fois-ci la pièce, et s'arrêta non loin de la porte. Il entendit Hikaru qui se levait en grommelant et en promettant de le battre. Akira sourit : il aurait dû deviner plus tôt qu'une partie de go était le meilleur moyen de motiver Hikaru à se lever.
Ce texte a été inspiré par le thème « motiver » de la cent soixante-quatrième nuit d'écriture du FoF, le forum des francophones du site fanfiction où l'on peut se retrouver pour discuter et s'amuser. Et vous, avez-vous besoin de motivation le matin ? N'hésitez pas à me laisser un message pour me dire ce que vous avez pensé du texte !
