Titre : Le pouvoir des mots
Auteur : Lady Zalia
Disclaimers : Bonjour ! Vous avez un instant pour parler de notre seigneur Lovecraft (l'auteur du mythe de Cthulhu) 😆 ? Si vous ne connaissez pas, vous allez en découvrir un peu dans ce chapitre… 😉
L'histoire va un peu changer de registre puisqu'on va alterner entre quelques passages légèrement Horreur/Suspense et d'autres plus classiques Aventure/Romance. J'espère que cela ne va pas trop vous dérouter et surtout que cela va vous plaire ! C'est une expérience totalement nouvelle pour moi et je suis très enthousiaste à l'idée de vous faire découvrir un peu de cet univers !
Voici donc le premier Crossover [Harry Potter/Mythe de Cthulhu] ! XD Pas d'inquiétude, Harry et Voldy restent les uniques personnages principaux de cette histoire. (Ah oui et j'en profite pour rappeler qu'une relation sexuelle explicite entre deux hommes aura lieu dans ce chapitre !) Je ne vous en dévoile pas plus, bonne lecture !
Chapitre 6
Voldemort avait attendu presque une semaine. Le mercredi, il avait envoyé un laconique message au libraire pour le prévenir qu'il avait beaucoup de travail et qu'il ne serait pas disponible avant samedi soir. Il lui avait proposé de venir à 19h pour l'emmener à sa demeure et Harry s'était empressé d'accepter, notant sa réponse à la va-vite sur une vulgaire feuille de papier moldue.
Le mage noir s'amusa de l'influence qu'il avait déjà sur le jeune sorcier. Avec quelques baisers et des mots doux, il l'avait fasciné et l'avait attaché à lui. Il suffisait de voir avec quelle fébrilité il avait attendu sa visite ! Il en avait éclaté de rire. Les choses étaient si simples… Avec la Légilimencie, il s'était assuré d'avoir les réactions qu'il attendait, les réponses qu'il espérait.
Et pendant ce temps, il en avait profité pour régner dans l'ombre, manipulant le Magenmagot et la plupart des organes du ministère pour sculpter le pays selon sa volonté.
Le samedi après-midi, il était retourné à sa demeure pour se changer et mettre en place le décor : Dans son bureau, le grimoire d'Eldritch avait été grand ouvert, une ébauche de traduction à côté. Dans sa chambre et salle de bain, des draps frais, des serviettes propres. Dans sa cuisine, de quoi permettre à son elfe de préparer des mets raffinés, et dans son salon, plusieurs bouteilles de grands crus. Tout était prêt pour sa mascarade. Lui-même avait revêtu un ensemble parfaitement ajusté : Pantalon noir, chemise blanche, gilet long noir aux boutons d'argent et cravate de soie vert sombre. Il avait attaché ses cheveux bruns avec un simple lacet de cuir noir et s'était rasé de prêt.
Lorsqu'il apparut à Godric's Hollow, Harry l'attendait déjà dans la ruelle derrière sa boutique, signe de son impatience. Sa tenue était nettement plus décontractée que la sienne, cependant il avait revêtu une cape noire de belle facture pour se protéger du froid, et ses chaussures semblaient neuves.
Il arborait un large sourire et il semblait même trépigner d'impatience.
Voldemort lui tendit la main pour le tirer jusqu'à lui, et il l'embrassa passionnément, profitant que la rue soit suffisamment étroite pour les protéger des regards indiscrets.
- Et bien Harry, vous aurais-je manqué ?
- William… J'avais vraiment hâte de vous revoir, mais… Ne pourrait-on pas se tutoyer, à présent que nous… sommes en relation ?
Le mage noir s'amusa de sa timidité. Il avait pensé "sortons ensemble" mais le mot lui avait semblé trop vulgaire et il n'avait pas osé le prononcer.
Il repoussa le jeune sorcier un peu plus loin dans l'impasse pour le plaquer contre le mur et l'embrasser à nouveau, savourant la myriade d'émotions qu'il pouvait lire sur son visage.
- Je dois cette vieille habitude à mon éducation, je le crains. Mais je vais tâcher de faire un effort, tutoyons-nous puisque tel est ton souhait.
- Merci. Je suis heureux de passer la soirée avec toi. Cette semaine m'a paru longue en ton absence. Tu nous fais transplaner ?
- Allons-y.
Ils réapparurent immédiatement au milieu du jardin et Voldemort le conduisit à l'intérieur. La nuit était déjà tombée et le temps était humide et froid, ils se dirigèrent donc immédiatement en direction du salon où un feu était allumé dans la cheminée. Nagini était roulée en boule sur le tapis, et Harry la salua d'un léger signe de tête.
- Bonsoir Nagini. William, je ne savais pas comment te remercier pour ton invitation, alors cette semaine j'ai fait ça… J'espère que cela te plaira.
Il sortit de sa sacoche un parchemin roulé et le déplia devant lui, dévoilant une peinture de Nagini enluminée à la manière d'un manuscrit médiéval. Elle était repliée sur elle-même au centre du dessin tandis que son nom était inscrit en haut. Le libraire avait utilisé différentes nuances d'encres vert, argent, et noir et Voldemort ressentit une vive surprise face à ce cadeau. Il ne s'y attendait absolument pas, et il resta quelques secondes immobile, fasciné par l'œuvre d'art.
- Oh Harry, voilà bien longtemps que plus personne ne m'avait offert un tel présent… Je suis vraiment touché. Merci. Viens… Allons tout de suite lui trouver une place dans mon bureau.
Il n'avait guère de décoration au mur et il n'avait jamais perçu l'utilité d'apprendre des sortilèges d'agrément, heureusement Harry lui invoqua un cadre à la bonne taille et il put l'accrocher juste à côté de son fauteuil.
Immanquablement, le vieux grimoire ouvert au beau milieu du bureau avait attiré l'attention du libraire et lorsqu'il s'en approcha pour l'observer, Voldemort ne fit pas un geste pour l'en éloigner.
- C'est donc sur ça que tu travailles ? Est-ce que je peux regarder ?
- Tu peux, mais j'aimerais m'en tenir loin pour ce soir, il m'a bien suffisamment occupé l'esprit cette semaine. C'est un très vieux grimoire qui donne les instructions pour un rituel, sauf qu'elles ont été rédigées sous forme de récit. L'auteur a vécu il y a plusieurs siècles, et pour préserver ses secrets, il a scindé son rituel en 4 parties et a écrit chacune d'entre elles dans une langue différente. Je parle russe, allemand et français mais le vocabulaire est ici archaïque, sans compter qu'il faudra que j'engage quelqu'un pour la partie en roumain. Mais ne parlons plus de travail, d'excellents alcools nous attendent au salon.
Le mage noir sourit intérieurement en voyant la curiosité naturelle du libraire le pousser dans la lecture. Il n'allait certainement pas lui demander de le traduire pour lui, non. Il allait tout faire pour qu'il le lui propose de lui-même…
L'entraînant à sa suite en direction du séjour, il claqua des doigts pour convoquer son elfe de maison, qui se mit à leur servir deux coupes de champagne.
- Est-ce qu'on trinque à notre premier week-end en tant que couple ?
Harry avait rougi en prononçant ces mots, et Voldemort ressentit une pointe de désir le traverser.
- Je trinque à ta présence dans ma vie.
Une présence qui allait lui offrir le rituel ultime, le pouvoir de contrôler le temps.
Il but tranquillement, laissant son elfe resservir son invité chaque fois que son verre était vide. Après une semaine sans avoir de ses nouvelles, le libraire était déjà prêt à se jeter dans son lit, mais lui-même avait envie de prendre son temps.
Pour acquérir l'immortalité, il s'était libéré des besoins primaires, mais cela ne signifiait pas qu'il ne pouvait plus apprécier de la bonne nourriture et des alcools fins. Son elfe avait semblé étrangement réjouit lorsqu'il lui avait ordonné de préparer un repas, et le menu qu'elle lui avait présenté était fastueux sans être copieux : coupelles de saumon cru mariné aux agrumes en entrée ; magret de canard accompagné de pommes de terre rôties, de haricots verts et d'une purée d'airelles pour le plat principal et un saint-honoré en guise de dessert.
À table, Harry ne le lâcha presque pas du regard, et ils parlèrent à nouveau de leurs voyages respectifs. À l'écouter, le jeune sorcier semblait de nature à s'émerveiller d'un rien, profitant toujours de ses escales pour visiter les constructions sorcières comme moldues. Il lui raconta comment il avait acheté un appareil photo moldu pour capturer les paysages, en particulier les ruines anciennes, et comment il fréquentait les marchés populaires, déguisé en vagabond, pour goûter toutes les spécialités locales. Plus intéressant, il lui révéla aussi qu'il avait du mal à rester calme face à ceux qui abîmaient la nature devant lui, et qu'il n'était pas aussi pacifique qu'il le paraissait. Comme il avait déjà pu le découvrir, il n'hésitait pas à s'attaquer aux braconniers sorciers, même s'ils étaient plus nombreux que lui. Il lui avoua cependant qu'il avait aussi failli briser le secret à plusieurs reprises en mettant en fuite des braconniers moldus ou des pollueurs, et Voldemort s'amusa de son espièglerie.
Dans l'ensemble, Harry Potter ne semblait guère s'embarrasser des règles et des lois lorsque que quelque chose lui tenait à cœur, et le mage noir ne put s'empêcher d'y voir là un trait commun entre eux. Il lui décrivit à son tour quelques anecdotes de voyages, édulcorant parfois son récit lorsqu'il avait utilisé la magie noire. Il lui dévoila qu'il avait parfois trompé ou ensorcelé des moldus dans le but de leur voler des grimoires de contes, et le libraire ne sembla pas s'en offusquer.
- Je serais bien le dernier à te juger, moi-même j'ai déjà… Ahem… pillé quelques tombes dans le même but. La première fois, c'était pendant les vacances de Noël alors que j'étais en dernière année à Poudlard. J'avais embarqué quelques amis dans l'aventure, mais nous sommes tombés sur des protections que nous n'avions pas prévues et nous avons failli y rester bloqués. Heureusement, j'ai réussi à envoyer un Patronus à un camarade à l'extérieur et celui-ci a prévenu les Aurors. Je me souviens encore de la tête de ma mère… Je lui ai promis que je ne recommencerai jamais, mais je crois que cet échec m'a frustré plus qu'autre chose.
Le sourire qu'arborait Harry à l'heure actuelle avait quelque chose de magnétique, et Voldemort se sentit malgré lui fasciné par son visage. L'animation avec laquelle il parlait avait illuminé ses yeux et agitait les mèches de ses cheveux comme s'ils étaient doués d'une vie propre.
Après le dîner, ils rejoignirent à nouveau le salon où il lui servit cette fois un excellent cognac prélevé dans les caves de Lucius. Le libraire avait désormais les joues rouges et les mouvements approximatifs et Voldemort fit signe à son elfe d'arrêter de remplir son verre. Il ne voulait pas qu'il s'endorme alors que la soirée était loin d'être terminée…
Il utilisa sa magie pour rapprocher la chaise de son invité et se pencha sur lui pour l'embrasser, laissant vagabonder ses doigts le long de son bras. L'impression de chaleur provoquée par l'alcool l'avait amené à écarter le col de sa tunique, offrant le champ libre à sa gorge.
Harry avait répondu à son premier baiser mais cela ne lui suffit pas, et il fondit sur la peau offerte pour en goûter la saveur. À nouveau, le parfum du jeune sorcier le frappa. C'était délicat mais il aimait cette fragrance, celle des livres, de la magie et des végétaux.
Le libraire haleta au contact de ses lèvres sur sa gorge, électrisant le mage noir. C'était pour cela qu'il l'avait amené dans cet état. Il savait que le libraire n'aurait de toute façon opposé grande résistance, mais il aimait ses amants offerts, dociles à ses moindres volontés.
- Harry, viens avec moi…
***/+/***
Harry évoluait dans un univers de coton. Il se sentait bien, il avait chaud… presque trop chaud d'ailleurs. Son corps était plongé dans une sorte d'apesanteur, comme lorsqu'il volait sur un balai, et cette impression lui procura un sentiment de félicité intense. Ils étaient tous deux allongés sur l'immense lit de l'alchimiste, et William était penché sur lui.
Lorsque son amant avait entrepris de le déshabiller, il avait tenté de ne pas rester passif en lui retirant sa cravate, mais c'était tout ce qu'il avait pu obtenir. William avait manifestement décidé de lui faire perdre le contrôle de son corps par des suçons et des caresses, s'emparant de sa main chaque fois qu'il parvenait à défaire un bouton.
Le libraire était du genre têtu, mais l'alchimiste punissait ses tentatives par de légères morsures ou récompensait au contraire sa soumission par des baisers. Il était cependant à mille lieues de songer à le repousser, et il empoigna bientôt les draps entre ses doigts pour canaliser son excitation.
Au bout d'un moment, il se retrouva entièrement nu tandis que son amant était encore habillé, et il grogna de frustration face à cette injustice.
- William ! Laisse-moi te retirer tes vêtements !
En guise de réponse, l'autre sorcier s'assit sur lui et se saisit de ses poignets avant de le faire taire par un baiser terriblement dominateur.
- Laisse-toi faire. Je te promets que tu ne le regretteras pas.
Cela faisait des mois que Harry n'avait plus eu de relation sexuelle, et il devait bien reconnaître que l'alchimiste s'y prenait bien. Une fois convaincu de sa reddition, il avait lâché ses poignets pour s'occuper de sa verge en érection, et ce furent cette fois des gémissements de plaisir qui s'échappèrent de sa gorge. William lui fit la meilleure fellation de toute sa vie, emprisonnant ses sens et obnubilant ses capacités cognitives au point qu'il en oublia presque de respirer. Il avait l'impression de sombrer dans une sorte de rêve capiteux, de perdre jusqu'à la sensation de son propre corps pour ne se concentrer que sur ça, cette chaleur autour de son sexe, cette langue sur sa peau.
Il faillit jouir, mais son amant l'avait saisi à la base, le maintenant d'une main de fer dans cet état extatique, presque douloureux par son intensité. Après quelques minutes de ce traitement, il était au bord de l'apoplexie, mais il savait que ce n'était pas fini. L'alchimiste lui avait écarté les jambes et il serra à nouveau les draps lorsqu'un doigt, puis deux se frayèrent un chemin en direction de son rectum. William se montrait doux et manifestement désireux de lui apporter un plaisir intense malgré sa volonté de dominer leurs échanges, et Harry fut bientôt prêt à le supplier pour obtenir la délivrance.
- Je t'en prie, viens !
Loin de s'exécuter, son amant stoppa tout mouvement, dardant sur lui son regard carmin.
- Que serais-tu prêt à faire pour cela ?
Il y avait quelque chose de fascinant dans ces prunelles couleur rubis et Harry ouvrit la bouche sans parvenir à formuler une phrase cohérente.
- Tout… Tout ce que tu veux… William…
Sa réponse sembla amuser l'alchimiste
- Oh, vraiment ? Puisque c'est ainsi, tu mérites ce plaisir que je vais t'offrir…
Retirant ses doigts, il présenta cette fois son sexe au bord de son anus, avant de le pénétrer après un dernier regard. Le sexe en lui semblait si chaud ! Il ne savait plus rien faire d'autre que crier et haleter tandis que son amant le pilonnait, son propre sexe toujours prisonnier de ses doigts. Comme s'il le frappait en plein cœur, le choc se répercutait dans l'ensemble de son corps à chacune de ses poussées. Soudain, il s'immobilisa à nouveau et l'observa, comme s'il voulait contempler le corps sous lui, et son sourire arracha un instant Harry à la langueur dans laquelle il était plongé. C'était un sourire conquérant, le sourire d'un maître qui admire sa propriété.
Cependant, il n'eut pas le temps de l'interroger à ce propos que les mouvements en lui avaient repris, rendant impossible toute pensée cohérente.
Il perdit toute notion du temps, et lorsque l'orgasme le foudroya, il eut l'impression que son corps avait parcouru des kilomètres en courant. Il se sentait fourbu, épuisé par l'effort, son cœur reprenant doucement son rythme habituel. Une fine pellicule de sueur semblait recouvrir sa peau, et une brusque sensation de froid l'avait envahi, le faisant rechercher instinctivement la présence de son partenaire.
Redressant la tête, il rajusta ses lunettes sur l'arrête de son nez et tenta de percer à travers l'obscurité de la pièce. L'alchimiste était allongé non loin de lui, sa tête surélevée d'un bras, un fin sourire au visage.
- William… C'était époustouflant.
Sa voix était légèrement enrouée et il comprit qu'il avait dû tirer sur ses cordes vocales.
- J'espère bien. Je ne voudrais pas que tu te détournes de moi…
Harry rit doucement face à l'absurde réflexion de son amant.
- Je n'ai aucune raison de faire une chose pareille. Je suis fidèle en amour et tu es quelqu'un d'exceptionnel.
- Tu me vois ravis de l'entendre. Je trouve moi aussi que tu es un amant exquis.
Le libraire fit la moue.
- Je n'ai pas fait grand-chose. J'aimerais te rendre la pareille, la prochaine fois.
- Mon cher Harry, tu as été exactement comme je le désirais. Crois-moi, j'ai pris un plaisir intense à te posséder, et cela fait bien longtemps que je n'avais pas eu d'amant aussi beau et intelligent entre mes cuisses.
Harry était trop fatigué pour analyser réellement les propos de l'autre sorcier. L'alcool et l'endorphine aidant, il papillonna des yeux et s'installa plus confortablement avant de se souvenir qu'il n'était pas dans son lit.
- C'est sans doute un peu tard pour demander, mais… Est-ce que je peux passer la nuit ici ?
- Je te rassure, je n'avais pas autre chose en tête. Dors, Harry.
Le Gryffondor étouffa un bâillement et se redressa juste le temps de retirer ses lunettes. Il se glissa sous la couette avec un large sourire, certain que son amant dormirait à ses côtés.
***/+/***
Harry se réveilla le lendemain matin, alors que la lumière du jour avait envahi la vaste chambre. Il devait sans doute être près de 10h, car le soleil était haut dans le ciel, et il papillonna des yeux, cherchant machinalement ses lunettes sur la table de nuit.
Son esprit était encore brumeux de la veille, pourtant il n'avait pas eu l'impression de boire tant d'alcool que cela…
William semblait être levé depuis longtemps, car la place à ses côtés était froide, cependant il eut un sursaut en constatant la présence de son immense python, roulé en boule au pied du lit.
Une main sur le cœur dans l'espoir d'apaiser son rythme cardiaque, il prit le temps de l'observer. Nagini avait relevé son museau en sentant ses mouvements, mais elle ne semblait pas le moins du monde agressive.
Il eut un rire nerveux et se leva pour partir à la recherche de ses vêtements et de sa baguette. Il trouva le tout soigneusement plié sur une table basse, et il s'aventura jusqu'à la salle de bain attenante pour prendre une courte douche. L'eau lui remit les idées en place mais il n'aurait pas été contre l'une de ces fameuses potions contre la Gueule de Bois de la petite boutique de l'Allée des Embrumes…
Il sortit de la chambre pour tomber nez-à-nez avec l'elfe de maison de son hôte qui semblait l'avoir attendu.
- Bonjour monsieur. Le maître est actuellement à son bureau en train de travailler. Il vous propose de prendre un petit déjeuner seul.
- Oh, bonjour ! Euh, Dana, c'est ça ? Je me sens encore un peu barbouillé à vrai dire. Donnez-moi juste une pomme s'il vous plaît. Je vais aller le rejoindre.
La petite créature sembla s'émerveiller qu'il ait retenu son nom, car elle s'inclina en rougissant avant de disparaître avec un bruit de bouchon. Il n'avait pas fait 5 mètres qu'elle était apparue avec une pomme pour la lui tendre.
- Monsieur veut-il que je le conduise au maître ?
- Non merci, je crois que j'ai retenu le chemin.
Le couloir en lui-même devait faire la longueur de son séjour tout entier, heureusement il parvint à se repérer jusqu'à finalement arriver au bureau de l'alchimiste. Ce dernier était penché sur l'épais grimoire qu'il avait vu la veille, les sourcils froncés en une moue boudeuse, cependant il releva la tête en l'entendant entrer, et son visage s'adoucit considérablement.
- Harry ! Bonjour. Comment vas-tu ?
- Très bien, merci. Quand je me suis réveillé, Nagini était roulée en boule sur le lit, ça m'a un peu surpris, je t'avoue…
Son amant lui offrit un sourire sardonique.
- Oui, elle dort sur mon lit habituellement. Comme tu ne semblais pas trop effrayé hier, je n'ai pas jugé utile de l'en déloger. Mais je lui ai rappelé de ne pas t'attaquer.
- Ça va, c'était surtout la surprise de trouver un python géant sur un lit, mais je suppose que je vais devoir m'y habituer. Et comme tu m'avais dit de ne pas venir chez toi sans m'annoncer, j'ai préféré ne pas trop l'approcher. Je vois que tu es plongé dans ta traduction. Est-ce que je peux t'aider ?
- Je ne voudrais pas abuser. Dana m'a dit que tu n'avais pas voulu déjeuner ?
Le libraire lui présenta la pomme dans laquelle il avait déjà croqué.
- Un fruit frais me suffit amplement. Alors, je peux regarder ? Tu as attisé ma curiosité…
***/+/***
Voldemort réprima un sourire victorieux alors que le Gryffondor s'installait à son bureau, une feuille de parchemin vierge devant lui et une plume entre les doigts.
Il avait lui-même insisté pour se lancer dans la traduction et le mage noir avait fait mine d'hésiter avant de finalement accepter. Tout se passait exactement comme il l'avait prévu et il se gargarisa intérieurement de la facilité avec laquelle il était parvenu à mener le libraire dans ses filets.
Le grimoire d'Eldritch ne révélait ses secrets qu'à l'érudit capable de le comprendre parfaitement, et il écarquilla des yeux alors que son sens caché se dévoilait sous la plume du jeune sorcier.
Il s'était installé juste derrière lui de manière à pouvoir lire par-dessus son épaule, et il sentit un mélange de joie et d'excitation à l'idée de découvrir enfin ce qui lui était resté inaccessible jusqu'alors. La première partie du livre était écrite en français, mais le vocabulaire était si archaïque qu'il n'était même pas parvenu à comprendre un mot sur deux.
Il était rédigé comme un journal, similaire à ceux que remplissaient les explorateurs au temps du moyen-âge, et il commençait ainsi.
Je suis Paul de Tudèle, sorcier et explorateur, et j'ai entrepris mon périple en l'an de grâce 1330 du calendrier chrétien. On m'avait confié une caravane de trente hommes pour explorer les terres situées à l'est du royaume de Hongrie, avec pour consigne de cartographier précisément la région et trouver si possible de nouvelles routes commerciales vers le nord de l'Empire Byzantin. Au fur et à mesure que nous progressions vers l'Est, les villes proches de la frontière hongroise nous avaient déjà semblé étrangement inhospitalières, et ce sentiment de défiance envers les étrangers trouva son paroxysme une fois arrivés en Transylvanie. La destruction du royaume bulgare par Byzance avait laissé ce territoire dans une espèce d'anarchie où seules quelques villes fortifiées étaient encore gouvernées par des seigneurs locaux. Le reste était redevenu sauvage, par endroits occupé par des tribus barbares guidées par d'étranges coutumes païennes. On m'avait alloué une compagnie de mercenaires pour assurer notre protection, mais même ces hommes pourtant rompus aux combats se mettaient à prier une fois le soleil couché. Nous avions pris pour habitude de mettre les voitures en cercle pour la nuit, les chevaux à l'intérieur pour les protéger des loups. La caravane était composée de 6 voitures et les mercenaires avaient pour consigne de former 4 bivouacs autour de celles-ci. Les feux étaient entretenus tout au long de la nuit, mais plus nous avancions vers l'Est et plus il fut compliqué de les allumer. Depuis que nous étions entrés en terre transylvanienne, une pluie surnaturelle s'était mise à tomber, venant même à bout de nos toiles enchantées et détruisant nos réserves de nourriture. Après trois jours de ce traitement, les hommes étaient affamés, leurs montures épuisées et les mercenaires commençaient à murmurer qu'ils n'étaient pas assez bien payés pour un tel périple. Le paysage alternait entre forêts denses et falaises escarpées, par chance nous trouvâmes une grotte suffisamment vaste pour y accueillir notre convoi, et je décidai d'y faire une halte le temps que la tempête cesse. Le vent qui s'engouffrait entre les saillies de pierre produisait un mugissement effroyable, mais au moins nous étions à l'abri de la colère du ciel. J'avais ordonné à cinq hommes d'aller chasser du gibier pour nous nourrir, et je croyais naïvement que ce n'était qu'une question de jours avant le retour du beau temps. Le ciel ne pouvait pas avoir tant d'eau à donner… Si j'avais pu savoir ce qui allait se passer ensuite, je ne me serais pas privé de tels gaillards…
Voldemort releva les yeux du récit, alors qu'un éclair zébrait le ciel. Une véritable tempête s'était déclenchée au-dessus de son domaine, et même Harry en fut arraché de sa lecture.
Le vent tambourinait aux fenêtres et la pluie tombait en cascades, inondant son jardin avec un débit stupéfiant.
Le libraire fronça les sourcils.
- C'est étrange, j'étais persuadé qu'il faisait beau il n'y a même pas une heure…
Il s'étira brièvement, et le mage noir fut malgré tout impressionné de la facilité avec laquelle il avait traduit le début de l'histoire.
- C'est un bon début. Il t'a fallu moins de deux heures pour avancer plus que je ne l'avais fait en une semaine.
- Ah, c'est parce que j'ai l'habitude ! Je crois que si je me retrouvais téléporté dans le passé, je n'aurais aucun mal à communiquer tant ces vieilles langues sont devenues courantes pour moi. Maintenant, je suis moi aussi très intrigué par le sort de cette fameuse caravane. Le narrateur était un sorcier, pourtant il semblait démuni face aux éléments. Il y avait quelque chose de mystérieux avec cette pluie qui n'en finissait pas, tu ne penses pas ?
- Je l'ignore, mais ce qui est certain, c'est qu'il a dissimulé un rituel dans ce grimoire, et son importance est capitale pour mes travaux. Ça me gêne de te demander ça, mais est-ce que tu voudrais bien m'aider pour cette traduction ? Je n'ai personne d'autre vers qui me tourner et bien entendu je te rémunèrerai pour cela…
Le Gryffondor lui offrit immédiatement un sourire espiègle.
- Je crois que je n'ai pas le choix si je veux voir mon petit-ami plus que deux fois par semaine… Et quelque part, c'est un peu comme un conte, c'est nettement plus intéressant qu'un fichu grimoire de potion ou de médicomagie. Par contre, j'irai bien manger un morceau avant. Tout à l'heure je n'avais pas faim, mais tout d'un coup j'ai l'impression de n'avoir rien mangé depuis plusieurs jours. Tu penses que ton elfe pourrait nous préparer quelque chose ?
Il claqua des doigts et l'elfe de maison apparut instantanément.
- Dana ! Prépare un repas pour mon invité. Que veux-tu manger, Harry ?
Immédiatement, la petite créature saisit ses longues oreilles pour se les tirer, le visage tordu par une expression de terreur.
- Dana est sincèrement désolée, maître, mais il n'y a pas de quoi préparer un repas. Le maître avait donné pour consigne à Dana de préparer un dîner et comme le maître ne mange pas, Dana n'a pas jugé nécessaire d'acheter davantage de nourriture. Il reste des scones, de la marmelade, du café et du thé. Uniquement le nécessaire pour que l'invité du maître puisse déjeuner.
Voldemort ferma brièvement les yeux. Il ne pouvait légitimement céder à la fureur et jeter un Doloris sur son elfe devant le libraire. Il avait aussi l'habitude de se servir chez les Malefoy en cas de besoin, mais ordonner à son elfe de s'y rendre ne manquerait pas de surprendre Harry.
- Je suis navré… Je mange très peu quand je suis absorbé par mes recherches et je n'ai pas pensé…
- Oh ne t'inquiètes pas, ce n'est pas très grave. Habituellement je me lève tard le dimanche matin et je prends un brunch sur le pouce. Je crois que c'est le fait de lire cette histoire de gens affamés qui m'a donné faim. Est-ce que tu veux venir déjeuner chez moi ? Je ne cuisine sans doute pas aussi bien que ton elfe mais ce ne serait que te rendre la pareille avec l'excellent dîner que tu m'as offert hier ! Et je pourrais continuer la traduction ensuite…
Le mage noir observa pendant quelques secondes le ciel se déchaîner derrière les fenêtres de son manoir. Il y avait quelque chose dans cette tempête qui n'était pas naturel et il avait besoin de faire des expériences loin de la présence du libraire.
- Inutile de se donner cette peine, je n'ai vraiment pas faim. Par ailleurs, je préfère que le grimoire reste avec moi. Ce n'est pas que je ne te fasse pas confiance, mais malgré son apparence anodine, il m'a été extrêmement compliqué de le récupérer et je ne voudrai pas qu'il lui arrive quelque chose en mon absence. Je viendrais à ta boutique demain matin pour te permettre de travailler dessus, et je repartirai avec le soir. Est-ce que cela te convient ?
- Ça marche ! Je vais me reposer cet après-midi pour être en pleine forme demain. Merci pour cet excellent week-end, William. J'ai passé un très bon moment.
Il s'approcha de lui pour l'embrasser et Voldemort savoura le contact. Harry Potter était un amant délicieux et il comptait tout faire pour préserver cette situation. Il voulait profiter de son corps à nouveau et pourquoi pas l'aliéner peu à peu pour lui faire rejoindre sa cause. C'était comme un challenge à ses yeux, et il n'avait jamais reculé face à une difficulté.
- Je trouve que le temps que nous passons ensemble est toujours très agréable, mais cette nuit, c'était absolument exquis. À demain, très cher. Ne t'envole pas avant de transplaner.
Harry grimaça en voyant les trombes d'eau qui tombaient à l'extérieur, néanmoins il rassembla ses affaires avant de se diriger vers la porte d'entrée avec résolution. Un dernier sortilège d'imperméabilisation sur sa veste et il se précipita sous l'averse avant de transplaner.
Une fois l'autre sorcier disparu, Voldemort s'entoura d'un bouclier et sortit à son tour. Il s'envola, insensible à la foudre qui continuait de se déchaîner autour de lui, jusqu'à atteindre les nuages qu'il traversa sans sourciller.
Ce ne fut qu'une fois suffisamment haut dans le ciel qu'il s'arrêta, et regarda en contrebas pour avoir une vue d'ensemble. Comme il s'en était douté, la tempête était uniquement située au-dessus de son manoir. Cela aurait pu être une énorme coïncidence, mais il n'y croyait guère. Il y avait de grandes chances pour que cela soit une conséquence directe de la traduction du grimoire. Et si ce n'était que le début, il allait devoir se montrer particulièrement vigilant par la suite…
Il redescendit jusqu'au sol avant de tenter un charme atmosphérique sur la tempête, mais rien n'y fit. L'eau se déversait continuellement sur son domaine avec le débit d'une douche ouverte au maximum. Ses Inferi jardiniers allaient avoir du travail…
Il avait dit au libraire qu'il ne le reverrait pas avant le lendemain et heureusement. S'il était revenu durant l'après-midi, il se serait sans doute étonné de ce microclimat. De retour dans sa demeure, il alla se pencher sur le grimoire. Par mesure de sûreté, il allait devoir le garder soigneusement enfermé chaque fois qu'il s'en éloignait. Il ne connaissait pas l'histoire, mais si le sorcier qui l'avait écrit avait inventé un rituel pour devenir le maître du temps, il préférait parer à toute éventualité.
***/+/***
De retour chez lui, Harry s'était précipité dans sa cuisine, prêt à engloutir toute la nourriture qui traînait dans son frigo. Il avait parfois connu la faim lors de ses voyages, mais il s'était rarement sentit aussi affamé, et cela le mit mal à l'aise.
En arrivant à Godric's Hollow, il avait eu la surprise de constater la différence de météo. Il ignorait où se trouvait le domaine de William, mais généralement une tempête quelque part au Royaume Uni se répercutait sur tout le pays, or son village bénéficiait d'un beau soleil hivernal, sans le moindre nuage à l'horizon.
Un plantureux plateau-repas sur les genoux, il s'installa devant la TV pour chercher un bulletin météo. L'écosse était sous la pluie, comme souvent, mais aucune alerte climatique sévère n'était annoncée. Il bailla longuement et passa les heures suivantes à grignoter, vautré devant son poste à regarder des téléfilms moldus. Il avait bien besoin de se changer les idées et cela parvint à le divertir efficacement jusqu'au soir, mais au moment de dormir, il ne put s'empêcher de repenser à cette caravane d'explorateurs, perdus au milieu des Carpates. Puisqu'il s'agissait d'un journal et non d'un conte, c'est donc que ces hommes avaient existé. Paul de Tudèle s'était présenté comme un sorcier français, vivant au XIVe siècle, il avait donc probablement fréquenté l'académie de Beauxbâtons… Harry n'avait jamais été très attentif en Histoire de la Magie, mais il savait qu'à cette époque, les conflits entre sorciers et moldus étaient fréquents. C'était bien avant la rédaction du Code International du Secret Magique…
Il cogita presque toute la nuit, se demandant quels étaient les sorts connus par le narrateur, et quel était ce fameux rituel alchimique recherché par William. Il s'interrogea quant à la présence d'autres sorciers au sein de la caravane et dans le cas contraire, de la possibilité pour Paul de faire de la magie devant ses hommes… Il était particulièrement impatient de connaître la réponse à toutes ces questions et lorsque le jour se leva, il avait peu dormi.
Il décida de se brasser une potion d'énergie qu'il avala avec son petit déjeuner, et descendit à sa boutique une trentaine de minutes en avance. Il avait hâte que son petit-ami arrive avec le fameux grimoire, presque davantage pour connaître la suite de l'histoire que pour le voir !
Lorsque l'alchimiste passa le pas de la porte, il avait profité de son énergie excédentaire pour épousseter chacune des étagères de sa boutique.
- William ! J'avais hâte que tu arrives. Je dois t'avouer que j'ai beaucoup pensé à ton grimoire. Il y a quelque chose d'excitant à découvrir le destin de ces explorateurs, tu ne trouves pas ? Je suis impatient de connaître la suite.
Il s'était pressé contre lui dans l'espoir de l'embrasser, mais comme toujours l'autre sorcier l'entraîna à l'écart avant d'accepter tout rapprochement.
- Harry. Ton enthousiasme ferait presque peur à voir. Est-ce ma présence ou le grimoire que tu attendais le plus ?
Le libraire rougit brièvement.
- Toi, bien sûr ! Ou peut-être le deux… Tu veux t'asseoir ici ?
- À vrai dire, je préfère m'installer en haut pour lire pendant que tu traduis. Je ne serais pas loin, mais c'est un peu inconfortable pour moi de déchiffrer par-dessus ton épaule en attendant que tu termines la phrase. Il me sera plus agréable de tout lire d'une traite une fois le passage terminé.
- Très bien. Je suppose en effet que c'est assez frustrant de me voir chercher mes mots. Je t'en prie, installe-toi. N'hésite pas à te servir dans l'arrière-boutique si tu veux une tasse de thé. Tu commences à connaître les lieux.
L'alchimiste déballa le grimoire qu'il transportait dans une sacoche et le posa sur le bureau avec le début de la traduction. Harry s'étira brièvement avant de prendre sa plume préférée et continuer le récit :
Sur les trente hommes que comportait la caravane, seuls trois étaient des sorciers, tandis que les autres étaient des humains sans pouvoir, fervents catholiques pour la plupart. J'avais recruté douze mercenaires sur les conseils d'un ami. Ils étaient bourrus et grossiers mais ils savaient se battre et c'était tout ce qu'on leur demandait. Ils étaient équipés de gabardine en cuir et savaient manier l'arc et l'épée, je les pensais donc capables de chasser un sanglier malgré l'averse.
La nuit n'était pas encore tombée mais le ciel était si obscur qu'on y voyait guère à plus de dix mètres, et dans la grotte, nous avions allumé plusieurs feux pour sécher ce qui pouvait l'être et nous réchauffer. Nous avions beau n'être qu'au début de l'automne, la pluie et le vent nous avaient glacé. Les chevaux se pressaient les uns contre les autres et les hommes et les femmes contre les feux, leurs couvertures portées en capes comme si c'était là leur plus grand trésor.
J'avais profité de leur inattention pour faire un peu de magie, à l'abri derrière une toile de tente, mais dans la situation où nous étions, mes possibilités étaient limitées. Je pouvais multiplier les rondins de bois, allumer un feu, créer de l'eau potable et sécher des couvertures, cependant je me refusais d'en faire davantage, sans quoi ma nature risquait d'être découverte.
L'un de mes condisciples se nommait Xavier. Il était plus jeune que moi et j'avais promis à sa famille de l'emmener voir le monde. Il avait abandonné ses études et ses capacités magiques étaient limitées, mais il était curieux et débrouillard. Quant au troisième, il s'agissait d'une femme nommée Bérénice et qui avait été ma camarade à l'académie de Beauxbâtons. Elle connaissait de nombreux enchantements et sous couvert de sa qualité de domestique, elle permettait à notre compagnie de rester propre et en bonne santé. Elle était capable de confectionner des potions pour nous prémunir de certaines pestilences et savait de surcroît cuisiner de délicieux ragoûts.
Notre cartographe n'avait aucun pouvoir, mais un sens de l'orientation et de l'observation aigu. Il avait déjà participé à quelques expéditions par le passé, et alors que la fin de la journée approchait, son air sombre m'alerta.
- Les chasseurs ne sont pas revenus. Je crains qu'ils ne soient de retour à temps pour la nuit. Les hommes crient famine et j'ai peur que les mercenaires ne nous abandonnent s'ils n'ont pas leur ration de viande quotidienne.
- Nous sommes en plein milieu de la Transylvanie, ils ne parlent pas la langue et ne toucheront leur prime qu'une fois rentrés en France. S'ils partent maintenant, ils auront travaillé une semaine gratuitement. Je doute qu'ils y renoncent si facilement. Cependant je m'inquiète de ce qui aurait pu causer leur disparition. Se seraient-ils perdus ?
- Tous les cinq ? Cela me semble peu plausible. Mais j'ai entendu d'étranges hurlements hier et je me demande à quel genre de créature cela pouvait bien appartenir. Cela ne ressemblait pas à des loups.
Je connaissais l'existence des lycanthropes mais la pleine lune était encore loin et je n'avais vu aucune trace de dragon ou de wyverne. Depuis que nous avions passé la frontière, nous suivions une vieille route à travers les bois et les traces semblaient suggérer que des carrioles l'empruntaient régulièrement. Nous avions croisé quelques hameaux et nous savions qu'un village se trouvait à quelques heures d'ici, il n'y avait donc que peu de chance que des créatures monstrueuses rodent dans les environs. Pourtant, la remarque de mon cartographe m'avait arraché un frisson d'effroi, comme si mon instinct voulait me prévenir de quelque chose.
Bientôt, la nuit tomba, sans qu'aucun des mercenaires ne refasse son apparition…
- Harry ! HARRY !
Le libraire releva brusquement la tête et plissa les yeux, ébloui par la lumière environnante. Il aurait juré quelques secondes plus tôt qu'il se trouvait dans l'obscurité, uniquement éclairé par un feu, mais il faisait bel et bien jour, et William était à ses côtés, sourcils froncés. Il avait manifestement eu du mal à lui faire reprendre contact avec la réalité, car il avait empoigné sa chemise pour le secouer, et ses doigts étaient encore resserrés sur ses vêtements.
- Pardon, j'ai été… totalement absorbé par la traduction…
L'alchimiste le relâcha enfin et s'éloigna d'un pas, désignant l'autre côté du comptoir.
- On a vu, oui. Il y a quelqu'un pour toi. Tu ne répondais pas, comme si tu ne nous entendais plus…
Devant son bureau se tenait l'Auror Venusia Wilkins et Harry fronça les sourcils.
- Euh bonjour… Est-ce que tu viens en tant que Venusia ou en tant qu'Auror Wilkins, cette fois ?
- Bonjour, Harry. Je suis en service actuellement et je n'ai pas abandonné l'enquête, figure-toi. Tu as beau avoir été mis hors de cause pour une raison que j'ignore, je suis persuadé que tu y es lié.
Il soupira et roula des yeux.
- Tiens ! William, tu étais là ce jour-là. Peux-tu confirmer que les braconniers polonais qui m'ont attaqué sont repartis sans même une blessure.
- Je confirme. Que se passe-t-il ?
- Monsieur, pourriez-vous me décliner votre identité ? Je mène l'enquête suite à la destruction d'un camp de braconniers polonais à l'aide d'un Feudeymon.
- Je suis William Peverell, alchimiste. J'ignorais que nos impôts servaient à protéger les braconniers.
Venusia sembla choquée par les propos de William, car elle resta un instant bouche ouverte avant de secouer la tête, joues rouges et poings serrés.
- Mais enfin monsieur, il s'agit de plusieurs homicides ! Même les criminels ont droit à une justice, et le Feudeymon est un sortilège de magie noire !
Harry ne put retenir un éclat de rire face au ton scandalisé de l'Auror. Il leva les deux mains en l'air pour se dédouaner.
- Moi en tout cas, je ne sais pas le lancer. Je ne connais même pas la formule.
Venusia le fusilla du regard avant de se tourner vers William.
- Monsieur Peverell, quelles sont vos relations avec monsieur Potter ?
- Purement professionnelles. Je lui ai commandé un recueil de contes, rien de plus. En revanche, pardonnez-moi de vous détromper, mais avez-vous retrouvé le moindre corps sur place ?
- Bien sûr que non, puisqu'un Feudeymon était à l'œuvre !
- Dans ce cas, il me semble quelque peu surinterprété de dire qu'il s'agit de plusieurs homicides. Peut-être le camp était-il vide, tout simplement. Rassurez-moi, le braconnage est toujours illégal au Royaume-Uni, n'est-il pas ? Peut-être qu'ils se sont tout simplement enfuis et ont brûlé toutes les preuves permettant de remonter jusqu'à eux ?
Venusia devint rouge écarlate et Harry se mordit la lèvre.
- Les petites tentes voisines contenaient encore des effets personnels et même de l'or. Ces malfrats ne seraient pas partis sans cela ! Quoi qu'il en soit, je suis persuadé que le coupable a voulu supprimer les braconniers pour une raison précise et je finirai bien par le découvrir. Je reviendrai. Monsieur Potter. Monsieur Peverell.
Elle quitta la boutique sans un regard en arrière et le libraire soupira.
- Et dire qu'avant elle m'appelait par mon prénom… C'est une amie de ma mère, elle me connaît et malgré tout elle me suspecte ! Comme si j'étais capable de faire de la magie noire, moi ! La dernière fois, elle voulait même m'interroger sous Veritaserum. Mais quand il m'a vu, son patron a ordonné ma libération immédiate ! C'était vraiment bizarre, en y repensant. Je ne sais même plus son nom… Yaley ? Yaccey ? J'espère vraiment que ma mère n'en entendra jamais parler…
- Corban Yaxley, le chef du Département de la Justice.
- Tu le connais ?
- Tout le monde le connait, c'est un membre important de notre gouvernement.
Harry se sentit honteux pour sa méconnaissance. Il avait cessé de s'intéresser à la politique depuis bien longtemps et était à peine capable de nommer le Ministre de la Magie…
- Ah, je suppose oui… Pourquoi tu as menti à l'Auror au fait ? J'espère que tu n'as pas honte de sortir avec un simple libraire !
- Bien sûr que non, mais ma vie privée ne concerne que moi, tout simplement. Et puis, si je lui avais avoué notre relation, elle en aurait tiré des conclusions et m'aurait suspecté. Crois-moi, je nous ai simplement fait gagner du temps à tous les deux. D'ailleurs, j'ai des choses à faire cet après-midi. Tu as encore bien avancé.
Le libraire se tourna vers ses notes et fronça les sourcils. Il avait écrit des heures durant, sans même relever les yeux une seule fois, comme si le grimoire l'avait hypnotisé. Mais plus troublant, il se souvenait de la scène dans les moindres détails, avec la même précision que s'il l'avait lui-même vécu. L'odeur dans la grotte, le bruit de la pluie à l'extérieur, les conversations des hommes aux alentours, le craquement des bûches… Bien que ce ne soit indiqué nulle part dans le texte, il aurait été capable de décrire le cartographe physiquement, y compris jusqu'au son de sa voix.
Il avait toujours fait preuve d'une grande imagination lorsqu'il lisait des œuvres de fiction, et il avait commencé très tôt à dessiner les personnages de contes tels qu'il se les représentait. Cependant cette fois c'était différent, et cette impression le troubla.
- Ce grimoire a quelque chose de vraiment fascinant. Je crois qu'il faut mieux en effet que tu l'emportes, sinon je serais tenté de tout traduire d'une traite.
- Je reviendrai demain matin. Bonne journée, Harry.
Il l'embrassa avant de disparaître, et le Gryffondor ferma boutique. Il était déjà l'heure du déjeuner, et à nouveau il se sentait affamé. Il monta quatre à quatre jusqu'à son appartement et se fit un rapide sandwich, mais alors qu'il mangeait, il ressentit un besoin presque irrépressible de se mettre à dessiner.
Il n'avait pas rêvé, ce n'était pas seulement son imagination. Il avait vécu l'histoire du grimoire…
À l'aide de crayons, il reproduisit le visage du cartographe. Ses cheveux châtain mi-longs, ses yeux verts… Il devait être un peu plus âgé que lui, 35 ans tout au plus. Il se souvenait de sa tunique beige, son caftan brodé en feutre, sa cape en laine bouillie… Il avait une ceinture en cuir avec plusieurs petites sacoches, un collier comportant une médaille chrétienne.
Il consacra toute sa pause à esquisser ses traits, et continua ensuite son dessin tandis qu'il tenait sa boutique. Une fois son œuvre achevée, il ressentit un étrange mélange de soulagement et d'angoisse. Le portrait qu'il avait fait était très réaliste… Mais cela soulevait désormais de nouvelles questions, et il n'était pas totalement certain de vouloir en connaître les réponses.
***/+/***
Voldemort transplana immédiatement jusqu'à sa résidence secondaire, relativement courroucé par ce qu'il venait d'apprendre. Une fois installé sur son trône, il fit une arabesque dans l'air de la pointe de sa baguette, se concentrant pour appeler un Mangemort en particulier : Corban Yaxley.
Heureusement pour lui, le sorcier ne le fit guère attendre, et il arriva bientôt devant lui avant de s'incliner.
- Maître.
- Corban. J'ai rencontré l'une de tes Aurors ce matin… À la boutique de Harry Potter.
Comprenant immédiatement à qui il faisait référence, Yaxley se jeta à genoux.
- Mai… Maître… Je…
- Endoloris. Cette Venusia Wilkins. Dis-moi ce que tu sais sur elle.
Le Mangemort gémit et se tordit de douleur sur le sol durant quelques longues secondes, cependant il finit par reprendre son souffle.
- Elle… C'est l'u… l'une des rares Aurors qui résiste… à toute ten… tentative de corruption… ou de manipulation. Je pen… pensais lui donner un os à ron… ronger en lui confiant l'enquête sur ce campe… campement incendié à Authorpe… mais elle est parvenue à remonter la trace… je-ne-sais comment… jusqu'au libraire de Godric's Hollow.
- C'est MOI qui ai décimé ces braconniers, car Harry Potter était leur cible ! Et comme tu le sais le libraire doit accomplir une tâche POUR MOI, chose qu'il lui sera bien plus compliqué de faire s'il se retrouve constamment poursuivi par la justice !
Il se retint de lui jeter un second maléfice alors que le sorcier était encore secoué de tremblements.
- Je vous prie de bien vouloir m'excuser. Dès que j'ai compris l'identité du sorcier arrêté par Wilkins, je lui ai ordonné de le libérer !
- Mais elle continue à fouiner. Et bien entendu, tu n'as pas jugé utile de m'en parler, parce que… ?
- Je suis… Je suis sincèrement désolé, maître. Je pensais… que c'était sans importance !
- ENDOLORIS ! La prochaine fois, Yaxley, tu ferais mieux de réfléchir un peu mieux. Ton comportement a rendu Harry Potter encore plus suspect aux yeux de cette Auror trop zélée. Maintenant, tu vas devoir t'arranger pour la faire taire, quitte à la faire disparaître définitivement.
- Bien maître, oui maître…
Voldemort repensa soudain au libraire. Il avait précisé que l'Auror était une amie de Lily Potter. Si elle disparaissait soudainement, il y avait de grandes chances pour que Harry l'apprenne et ne fasse le rapprochement avec lui.
- Attends ! Fais en sorte que cela ne ressemble pas à un vulgaire assassinat, cette fois, car cette nouvelle coincidence pourrait alerter l'attention de Harry Potter. Accident, faux-souvenirs ou Imperium… Il vaut mieux pour toi que tu n'échoues pas, où le département de la justice magique va devoir se trouver un nouveau directeur.
Yaxley blêmit un peu plus et s'inclina une nouvelle fois avant de s'éclipser à reculons. Son Mangemort était suffisamment intelligent pour mener à bien sa mission, cependant il allait devoir surveiller les fréquentations de Harry Potter. Leur relation était encore trop jeune pour laisser des détails semer le doute dans son esprit.
Une fois l'autre sorcier reparti, le mage noir se perdit un instant dans ses pensées. Encore une fois, le libraire avait semblé possédé lors de la traduction. Il l'avait observé attentivement durant toute la matinée et il n'avait pas levé la tête une seule fois, pas bu une seule gorgée de thé ni ne lui avait offert le moindre sourire.
Soudain, il repensa à la tempête qui s'était déchaînée au-dessus de sa demeure dimanche, et il se précipita jusqu'à son bureau pour lire la traduction du libraire. Il avait besoin de savoir exactement ce que contenait le passage pour éventuellement intervenir en cas de danger. Il ignorait encore jusqu'où pouvait aller le grimoire pour empêcher sa traduction, mais il devait être prudent.
Il s'installa plus confortablement et admira l'écriture élégante du jeune sorcier. Ses lettres étaient bien formées et agréables à lire, de sorte qu'il n'eut aucun mal à se plonger dans le récit. Il avait bien progressé mais il semblait qu'il avait été interrompu à temps. Il s'inquiétait un peu de ces étranges "hurlements" dont faisait mention le cartographe. À l'avenir, il allait vraiment devoir s'assurer que le libraire ne resterait jamais seul en présence du grimoire, voir l'inciter à venir vivre dans sa demeure pour assurer lui-même sa sécurité. Harry Potter avait beau être un Gryffondor, il ne voulait pas prendre le risque qu'il prenne peur face aux terrifiantes aberrations générées par le grimoire d'Eldritch, sans quoi il risquait de refuser de traduire la suite.
Il allait devoir mener un double jeu en utilisant tous les moyens à sa disposition pour éloigner son esprit de toutes les questions qu'il ne voulait surtout pas voir poser. Par chance, il avait déjà repéré quelques leviers intéressants…
Fin du chapitre 6
Alors alors, qu'est-ce que vous en avez pensé ? Êtes-vous intrigués ? Effrayés ? Excités ? Ennuyés ? (J'espère pas !) Ou autre chose ? Connaissiez-vous déjà un peu l'univers ? Est-ce que ce petit avant-goût vous a donné envie d'en lire plus ? Bon dans ce chapitre, je suis restée gentille. Notre courageux Gryffondor et ce très cher Seigneur des Ténèbres seront confrontés à la source de ces mystérieux hurlements dès le chapitre suivant, et ce ne sera que le début ! 😏😈
Moi je suis hypée de fou ! (Oui, ça ne fait pas très humble, mais comment vous dire que l'écriture représente ma principale activité à cause de ma cheville de merde, DONC il vaut mieux que je m'enthousiasme si je veux pas déprimer !)
Ekateri, merci pour ta review ! 😘 J'espère que ce chapitre a été à la hauteur de ton attente ! ^^
