Titre : Le pouvoir des mots

Auteur : Lady Zalia

Warning : Une grosse scène de suspense / angoisse en fin de chapitre. Si vous ne vous sentez pas le cœur de la lire, elle sera signalée par des ¤¤¤ ANGST ¤¤¤ pour vous permettre de la passer. 😘


Chapitre 8

Voldemort transplana dans le jardin du manoir Malefoy comme s'il était chez lui et de fait, les portes s'ouvrirent sur son passage sans même qu'il n'ait à faire le moindre geste. Il connaissait les lieux par cœur et se dirigea directement vers le bureau de Lucius, y pénétrant dans la foulée.

Son Mangemort était installé derrière son bureau, en pleine séance de travail, sans doute en train de consulter une proposition de loi ou d'écrire un pamphlet assassin envers un quelconque opposant. Le sorcier avait sursauté à son entrée et s'était empressé de se lever et s'agenouiller devant lui tandis qu'il s'installait dans le fauteuil le plus proche.

- Maître ! En quoi puis-je vous être utile ?

- Lucius, mon ami. Tout d'abord, j'ai besoin d'un bestiaire le plus exhaustif possible des créatures fantastiques.

- J'ai le Vie et habitat des animaux fantastiques de Norbert Dragonneau et je sais que Narcissa a un livre intitulé Créatures et parasites magiques des jardins britanniques, mais je crains n'avoir rien de plus.

- Je vais déjà feuilleter ces deux-là. Je suis parvenu à rallier Harry Potter et la traduction avance bien. Il a presque terminé la partie en français mais les premières… manifestations ont commencé et j'ai dû faire face cette nuit à une créature dont j'ignorais même l'existence.

Le regard de son Mangemort témoigna de son incompréhension.

- Des manifestations, mon seigneur ?

- Une tempête, la sensation d'être affamé, et cette nuit un monstre en est sorti. Quadrupède, 1,70m au garrot, capable de se téléporter à travers les murs. Je l'ai éliminé mais son corps est tombé en poussière à sa mort.

Il déposa la fiole contenant les résidus noirs sur le bureau de son bras droit qui se contenta de le suivre du regard.

- Je vais tâcher d'en apprendre davantage, maître.

- Par ailleurs, la créature a tué mon elfe de maison. J'aimerais que tu m'en procure un nouveau. Lorsque le libraire traduit le livre, il perd toute conscience de son environnement, je suis obligé de le protéger en permanence, donc je ne peux plus m'absenter n'importe quand. Je compte sur toi pour gérer les affaires en souffrances. Que devient notre circuit d'approvisionnement de venin d'Accromentule ?

- Severus se charge de vérifier la qualité de la marchandise et d'élaborer une contrefaçon suffisamment convaincante dont nous pourrons bientôt inonder le marché.

- Bien. Et cette nouvelle drogue dont Thorfinn m'a parlé ?

- Les tests sont concluants. Elle est particulièrement addictive, et bien entendu, nous avons mis au point un antidote. Cela nous permettra de faire chanter des familles à moindre coût et bien plus discrètement qu'avec Greyback. Cet animal était bien trop aléatoire. Bientôt tous ceux qui nous résistent encore vivront dans la crainte de voir leur fils ou leur fille y succomber.

- Puisque nous parlons d'animaux, qu'en est-il du vampire que nous avons recruté ? Il s'était montré efficace sur l'élimination des cibles…

- En effet, mais j'attends de voir quels seront les résultats de cette mission que vous lui avez confiée il y a quelque temps. Ces créatures ne sont pas réputées pour leur subtilité.

Voldemort sourit face à la remarque de son bras droit. Lui-même méprisait les vampires pour leur dépendance au sang et leur vulnérabilité face au feu, mais Lucius les haïssait tout bonnement. Il en ignorait la raison, car contrairement à Fenrir Greyback et ses répugnantes habitudes, le vampire qu'il avait recruté s'était montré courtois et rien ne laissait deviner en lui sa nature monstrueuse.

- Nous verrons bien. Pour finir, j'ai quatre dossiers à te confier. Pour l'instant, il ne s'agit que de collecte d'information, rien de plus. Luna Lovegood, Hermione Granger, Neville Londubat et Lily Potter. Ce sont les trois plus proches amis et la mère de Harry Potter. Je veux savoir quelles sont leurs faiblesses et leurs éventuels moyens de pression. Ils pourraient faire hésiter notre libraire au moment opportun et je ne veux pas prendre le risque qu'ils l'éloignent de moi. Drago saura sans doute capable de remplir cette tâche pour ce qui est de ses anciens camarades, mais trouve tout ce que tu peux sur la mère.

- Bien maître. Je ferai en sorte de vous satisfaire.

- Continue ainsi, Lucius. Tu es un bras droit efficace. Je te tiendrais au courant de la suite des opérations.

Le mage noir se leva et prit congé sans attendre. Il avait quitté sa demeure en fin de matinée et avait pris le temps de voir ses différents lieutenants, mais il n'était certainement pas aussi occupé qu'il l'avait prétendu. Ce n'était encore que le début de la soirée et malgré son désir de solitude, il transplana jusqu'à chez lui. Il avait beau avoir donné son adresse au libraire, il n'aimait pas l'idée qu'une personne rode chez lui en son absence. Harry Potter semblait une personne bien élevée, mais le risque était trop grand qu'il fouille un placard au hasard et tombe sur quelque chose qu'il avait voulu dissimuler.

Lorsqu'il arriva, il trouva son amant au salon, confortablement installé devant la cheminée et occupé à lire un épais grimoire. Une tasse de thé était posée à proximité et Nagini était roulée en boule non loin, comme si elle avait voulu le surveiller.

Il avait immédiatement relevé la tête en l'entendant arriver et un large sourire avait illuminé son visage, provoquant un bref sentiment de stupeur chez Voldemort. Bien entendu, il avait œuvré en ce sens, mais il était si peu habitué à recevoir ce genre de réaction qu'il n'avait pu s'empêcher de se stopper une seconde avant de reprendre ses esprits.

- Bonsoir William ! Tu as passé une bonne journée ? Tu n'es pas trop fatigué de la nuit dernière ?

Il s'était redressé et avait poussé ses affaires le temps de l'embrasser, et le mage noir ne tenta cette fois même pas de prendre l'ascendant, profitant un instant de la douceur du moment avant de s'asseoir à son tour.

- Il en faut beaucoup pour m'épuiser, rassure-toi. Ma journée a été chargée mais j'ai pu rentrer plus tôt que prévu. Et toi ?

- Une bonne journée. J'ai eu des clients.

Harry s'était remis à lire et sa réponse laconique irrita Voldemort qui se pencha sur le grimoire. Il était vieux et lui était familier, mais il ne venait pas de sa bibliothèque et il ne parvenait plus à se souvenir où il l'avait déjà vu.

- Tu lis quoi ? Tu ne travailles pas sur un conte pour une fois ?

Le Gryffondor souleva brièvement le livre pour lui montrer la couverture. Il s'agit de « Histoire de la Roumanie ».

- Non, je voulais faire quelques recherches, mais il n'y a aucune trace de ce Paul de Tudèle…

- D'où vient ce livre ?

- De Poudlard. J'ai envoyé un hibou au professeur McGonagall pour savoir si je pouvais aller à la bibliothèque en début de soirée et elle a accepté. Elle a l'habitude que je fasse ça, elle ne pose jamais aucune question.

Son amant était toujours penché sur le livre, cependant ses yeux restaient immobiles et le mage noir comprit qu'il ne lisait pas mais esquivait son regard. Perdant patience, il posa brusquement sa main au milieu des pages, faisant sursauter le libraire.

- Harry, je t'avais dit que cette traduction était censée rester secrète ! Qu'est-ce que tu ne me dis pas ?!

- Je ne comptais rien dire mais Dumbledore a débarqué et il m'a demandé sur quoi je travaillais. J'étais en train de consulter le livre sur les sorciers et sorcières célèbres et j'ai prononcé le nom de Paul de Tudèle, rien de plus. J'ai inventé un prétexte bidon, je voulais qu'il me foute la paix. Mais il m'a dit que je ne trouverai rien car ce sorcier avait été effacé de l'histoire à cause de savoirs interdits. William, sur quoi porte ton rituel ?

Voldemort serra les poings et soupira. Il était encore trop tôt, il ne pouvait pas se passer du libraire alors que la traduction n'en était encore qu'à ses débuts... Il allait devoir l'amadouer pour le convaincre du bien-fondé de sa recherche.

- Harry, je n'en sais pas beaucoup plus que toi, mais j'aimerais que tu me fasses confiance et surtout que tu ne laisses plus ce vieux fou t'approcher. C'est un puissant Legilimens, tu sais ?! Il est capable de fouiller dans tes pensées si tu n'y prends pas garde.

- Je ne l'ai pas regardé dans les yeux, si c'est ce que tu crains. Je suis désolé d'avoir dévoilé le nom de Paul de Tudèle. Je ne pensais pas qu'il serait si… connoté.

- Paul de Tudèle était un alchimiste, tout comme Nicolas Flamel et moi-même. Et s'il y a bien quelque chose que Dumbledore et Flamel ont en commun, c'est qu'ils ne supportent pas la concurrence. Pourquoi crois-tu que Tudèle ait dissimulé ses travaux dans ce grimoire aussi bien protégé ? C'est justement pour éviter que Flamel ne les lui vole ! Et si Tudèle avait découvert la recette de la pierre philosophale avant Flamel ? Et si Flamel avait décidé de faire disparaître Tudèle de l'histoire pour s'accaparer cette découverte ? En traduisant ce grimoire, on pourrait rétablir la vérité et enfin rendre hommage à Paul de Tudèle. Mais pour cela, il faut absolument empêcher quiconque de savoir ce que nous faisons, tu comprends, Harry ?

Il n'était pas surpris que le vieux directeur sache qui était Paul de Tudèle. Nul n'ignorait qu'il était ami avec Nicolas Flamel, et c'était précisément dans sa collection qu'il avait dérobé la première partie du grimoire.

Face à la cohérence de son explication, le regard du libraire s'était écarquillé avant de soudain afficher un intense soulagement.

- Je comprends mieux maintenant. Merci de m'avoir expliqué cela. Je t'avoue que pendant un instant, j'ai cru qu'il s'agissait d'un rituel de magie noire… Raaah, ce sale… Dumbledore m'a embrouillé l'esprit et à cause de lui j'ai douté de toi ! Je m'en veux, j'ai été stupide. Je suis désolé. Ce que je peux le détester… Et dire que la plupart de mes amis continuent bêtement de l'idolâtrer ! J'ai hâte de terminer cette traduction pour que tu puisses publier tes travaux, et alors je leur mettrai dans la tronche.

Cette fois, Voldemort ne put s'empêcher d'éclater de rire face à l'ironie de la situation.

- Hahaha, j'espère moi aussi. Mais n'oublie pas que nous ne savons encore rien de ce fameux rituel. Ne sois pas trop déçu si ce n'est pas exactement la recette de la pierre philosophale.

- Qu'importe ce que c'est, si ça peut énerver Dumbledore, je serais heureux.

Harry avait maintenant un air espiègle au visage, et le mage noir tendit le bras pour l'inciter à venir jusqu'à lui. C'était si simple de mentir… Jouer sur ses sentiments, trouver les bons mots… Il avait toujours été doué pour cela. Et aujourd'hui, c'était d'autant plus jouissif que c'était Harry Potter, un homme qui aurait toutes les raisons de le haïr. Mais au lieu de ça, il l'aidait et lui offrait son corps !

Harry s'était empressé de poser le livre par terre avant de joindre ses bras avec un ravissement manifeste.

Voldemort pilla ses lèvres de ses baisers affamés, laissant sa main vagabonder sous la chemise de sa victime. Il se laissait faire, tremblant sous ses attouchements fugaces, puis soudain, ce fut comme si un sort lui avait été lancé. Il s'était relevé et s'était agenouillé sur le sol devant lui, son beau visage empreint de sensualité.

- William… J'ai envie… J'aimerais beaucoup te sucer.

Le mage noir se sentit instantanément durcir face à cette vision érotique. Sans le quitter des yeux, il se débarrassa de ses bottes, chaussettes, pantalon et caleçon avant de se rasseoir sur le bord de son fauteuil, cuisses largement écartées.

- Oh Harry, tu vas me rendre fou…

Malgré sa volonté de l'observer, il renversa bientôt la tête en arrière, transporté par le plaisir intense que lui offrait cette caresse humide sur sa verge. Le libraire avait manifestement une certaine maîtrise de la chose, car il sentit bientôt son précieux sang-froid se fissurer sous la violence de ces sensations. Il laissa échapper des gémissements lascifs qu'il ne se souvenait pas avoir un jour émis et finit par empoigner les cheveux de son amant, non pour l'inciter à aller plus vite mais pour le stopper.

Il n'avait plus ressenti une telle perte de contrôle depuis bien longtemps et cette sensation l'angoissa tellement qu'il repoussa le libraire un peu brutalement avant de se lever pour faire quelques pas.

- Je t'ai fait mal ? J'ai fait quelque chose qu'il ne fallait pas ?

- Non. C'était très bien mais… pas ce soir. Je vais prendre l'air, tu devrais aller te coucher.

Sans une explication supplémentaire, il attira ses vêtements jusqu'à lui et transplana jusqu'à sa salle de bain pour se passer la tête sous l'eau froide.

Perdre la maîtrise de soi était une angoisse profonde, presque aussi puissante que sa peur de la mort, mais elle était associée à des souvenirs d'enfance qu'il pensait avoir enfouis tout au fond de sa mémoire. Avant qu'il n'apprenne qu'il était un sorcier, avant qu'il ne maîtrise ses pouvoirs… Quand il n'était qu'un petit garçon terrifié dans un orphelinat pauvre. Miss Cole était seule pour surveiller plusieurs dizaines d'enfants et elle consacrait presque tout son temps aux bébés, laissant les plus âgés s'occuper des plus jeunes. Un jour, deux grands l'avaient attrapé et s'étaient amusés avec lui…

La nausée et la rage envahirent son esprit alors que les images lui revenaient en tête. Il fallait qu'il parte, sinon il allait tuer le libraire, et il ne voulait pas faire de chose qu'il regretterait par la suite…

***/+/***

Harry était resté un moment perplexe avant de finalement rejoindre le grand lit vide, déçu et un peu déprimé par l'évolution de la soirée. Alors qu'il s'attendait à une partie de jambes en l'air torride, son amant l'avait tout d'un coup repoussé avant de disparaître, sans même une explication. Manifestement, il avait fait quelque chose que William n'avait pas apprécié, mais il avait beau se repasser l'acte en tête, il ne voyait pas à quel moment il avait pu lui faire mal.

Il eut du mal à trouver le sommeil et lorsqu'il se réveilla le lendemain matin, il savait que son amant ne l'avait pas rejoint de toute la nuit.

La veille, il avait ramené suffisamment de provisions pour pouvoir déjeuner et dîner pendant plusieurs jours, et il s'installa dans la cuisine avec son thé et ses tartines tout en laissant son esprit vagabonder. Maintenant qu'il habitait plus ou moins chez William, il comprenait pourquoi les riches avaient des elfes de maison. Toutes les pièces étaient immenses et il ne s'imaginait pas devoir transporter lui-même son petit déjeuner jusqu'à la salle à manger pour ensuite ramener sa vaisselle sale en cuisine… Son déjeuner ingurgité, il parcourut les différentes pièces de la maison à la recherche de son amant mais faute de le trouver où que ce soit, il transplana jusqu'à sa boutique.

Il était d'humeur morose et ne pensait pas le voir de la journée, mais lorsque son amant passa la porte de sa librairie en début d'après-midi, il sentit son rythme cardiaque accélérer brutalement. Même s'il ne voyait pas ce qu'il avait pu faire pour provoquer l'ire de son petit-ami, il ne pouvait s'empêcher de craindre qu'il veuille mettre fin à leur relation.

- Bonjour William !

Lorsque ce dernier regagna l'arrière-boutique sans même un sourire, il eut l'impression que ses craintes étaient confirmées et il le rejoignit la mort dans l'âme. Heureusement, il n'eut même pas le temps d'avancer le moindre argument que ce dernier le plaqua contre le mur pour le faire taire d'un baiser.

- Je ne veux pas qu'on en parle mais tu n'y es pour rien.

Il l'avait gardé contre lui, et Harry respira longuement son odeur avant de lever sur lui des yeux empreints d'espoir.

- Tu ne sors pas avec moi juste pour la traduction, n'est-ce pas ?

- Non, bien sûr que non. Harry, tu n'as rien à te reprocher. Je n'étais simplement pas d'humeur. Oublie ça, tu veux ?!

Ce n'était pas vraiment une question, mais le libraire fit la moue, se contentant de rester dans ses bras.

- Je tiens à notre relation, je ne veux pas qu'elle se termine. Alors si je fais quelque chose qui ne te convient pas, s'il te plait, n'hésite pas à me le dire. Je voudrais te rendre heureux.

L'alchimiste resta un instant muet, comme s'il n'en revenait pas d'entendre de tels propos, puis il saisit à nouveau son visage pour l'embrasser.

- Tu as de la chance que nous soyons dans ta boutique. Sinon je me ferais un plaisir de te montrer à quel point je te désire.

Le Gryffondor poussa un profond soupir, se sentant soulagé pour la première fois depuis la veille. Il retourna à sa chaise et prit une profonde gorgée de thé avant d'étirer ses bras et sa nuque.

- Bon, je suppose que je suis reparti pour une plongée dans l'horreur…

- Je te sortirai de là si je vois que tu paniques et je resterais à tes côtés dans la boutique. Tu n'as rien à craindre.

- J'ai confiance en toi. À tout à l'heure.

Il n'y avait plus nulle trace de Marc et Antonin mais il n'était pas difficile de supposer qu'ils étaient morts, cependant l'absence de leur cadavre allait être difficile à expliquer aux non-sorciers qui composaient notre caravane. Hésitant quelques secondes, je décidai de récupérer la baguette de Xavier et de faire disparaître son corps. Il serait plus plausible de faire croire qu'ils s'étaient tous enfuis…

Me remettant péniblement de ma rencontre avec le monstre, je rejoignis le cœur du campement. Par chance, personne ne m'avait suivi ni n'avait entendu la boule de feu que j'avais invoquée…

- Xavier, Marc et Antonin ne sont plus là. J'ignore où ils sont partis, mais il n'y a plus aucune trace d'eux et la grotte touche à sa fin, il n'y a aucune issue.

Mon annonce provoqua un remous parmi les gens restants.

- Monsieur, qu'est-ce que vous nous cachez ! Pourquoi se seraient-ils enfuis en pleine nuit et par ce temps ?! C'est invraisemblable !

- Je l'ignore, peut-être ont-ils essayé de se procurer à manger. Je n'ai pas plus d'information que vous, je vous l'assure ! Il faut alterner les gardes jusqu'à demain. Nous partirons dès le lever du jour. Nous allons forcément tomber sur un village.

- Je refuse d'avancer. S'enfoncer dans ce pays maudit nous mènera tous à la mort. Je retournerai à la frontière. Et ceux qui pensent comme moi n'auront qu'à me suivre.

Je fusillai mon cartographe du regard.

- Très bien, je ne vous forcerai pas. Mais ne venez pas me réclamer votre solde, Venceslas. Les déserteurs n'auront rien !

- Je préfère encore rentrer la queue entre les jambes mais vivant, que mort et loin de ma famille !

Sur les 15 membres de l'expédition, 5 décidèrent de faire marche arrière et sur les 3 mercenaires restants, un seul accepta de les suivre. J'acceptai de leur confier une caravane vide de bonne grâce, car nous n'étions de toute façon plus assez nombreux pour toutes les emporter, mais je craignais réellement pour l'avenir de notre entreprise.

Peut-être que si j'avais été moins fier j'aurais fait demi-tour. Je savais que sans mon cartographe, la moitié de mon objectif était désormais irréalisable, cependant j'étais jeune et ambitieux. Les caravanes restantes comportaient encore plusieurs caisses de biens destinés au commerce, des biens que j'avais acheté sur mes fonds propres et que j'étais censé vendre, de préférence au double de leur valeur, chose impensable en France.

J'avais tout de même avoué la vérité à Bérénice, par acquis de conscience, heureusement elle avait décidé de rester à mes côtés, et j'étais rassurée de la présence d'une condisciple, presque plus que par celle des deux mercenaires.

Aucune créature n'était réapparue ni aucune nouvelle disparition n'avait eu lieu jusqu'au lever du jour, mais le manque de sommeil et de nourriture rendait tout le monde nerveux, et nous nous séparâmes sans même un aurevoir.

L'humidité ambiante avait formé une brume opaque qui flottait au-dessus du sol, nous empêchant de voir nos pieds. Les chevaux eux-mêmes en étaient perturbés, au point qu'il fallut les fouetter pour qu'ils acceptent d'avancer. Le chemin était bordé par des rangées d'arbres touffus, ce qui nous évitait le risque de nous en éloigner, mais nous empêchait aussi de voir ce qui s'y cachait et le convoi chemina plusieurs heures dans un silence pesant, uniquement troublé par le bruit des sabots sur le sol.

Puisque nous étions 12, nous n'avions pris que 3 caravanes, et je menais la marche en feignant une assurance que je ne possédais guère. Bérénice était avec moi en compagnie d'un marchand et d'un factotum tandis que l'un des derniers mercenaires se trouvait dans la seconde caravane en compagnie d'un émissaire, d'une interprète et d'un autre marchand. Enfin la dernière caravane comportait un commis de cuisine, un maréchal-ferrant, le second mercenaire et un médecin. Les fonctions primordiales de notre convoi étaient conservées, me laissant tout de même espérer que la mission n'était pas encore un échec.

En milieu de journée, nous nous étions arrêtés pour permettre aux chevaux de se reposer. La pluie avait entre-temps cessé et nous avions tous accueilli cette accalmie avec soulagement. Un soleil timide nous surplombait et j'avais profité que Bérénice et son commis fassent à manger pour vérifier l'état de nos calèches, usant de la magie pour les réparer si besoin.

L'après-midi semblait se dérouler sous de meilleurs augures, mais soudain nos montures se mirent brusquement à hennir et à piaffer sans que nous puissions en percevoir la raison. Je raccourcis la bride et ordonnai de presser le pas, cependant les deux chevaux qui tractaient ma calèche se mirent tout d'un coup à galoper droit devant, comme si une menace terrifiante les talonnait. Le marchand se mit à hurler tandis que je tirai sur les rênes de toutes mes forces, mais je me retrouvai impuissant, alors que le paysage défilait sous nos yeux.

Ils continuèrent leur course effrénée sur près d'une dizaine de kilomètres avant que je parvienne à les stopper. Leurs yeux étaient exorbités, leur bouche écumante de bave et leurs naseaux fumants. Par chance, la calèche avait tenu bon, mais nous avions distancé le reste de la caravane, et nous attendîmes plusieurs minutes dans un sentiment d'angoisse pesant. Nous n'étions plus que 4, isolés du reste du groupe, et les arbres étaient si hauts que le soleil en était partiellement masqué, nous donnant l'impression que le crépuscule était proche.

Finalement, au bout d'un temps qui me sembla interminable, le bruit rassurant d'une calèche nous parvint bientôt, mais ce sentiment se mua bientôt en inquiétude en constatant qu'ils étaient seuls.

- Messieurs, où se trouve la 3e calèche ?

Ce fut le marchant, un homme vif du nom de Pierre, qui me répondit.

- Nous l'avons perdu, monsieur. Nous avons attendu, puis essayé de faire demi-tour, mais les chevaux n'ont rien voulu savoir. J'ai fait quelques pas à pied avec Amaury mais nous n'avons retrouvé aucune trace d'eux. C'est comme s'ils s'étaient volatilisés.

Je fermai les yeux un instant. Au loin, un drapeau jaune flottait dans l'air, nous signalant qu'un village était proche.

- Il n'y a qu'une seule route, ils ne peuvent tout de même pas s'être engagés dans la forêt ! J'ignore ce qui a pu provoquer la panique des chevaux, mais nous devons regagner le village avant la tombée de la nuit. Il faut se présenter au chef local, demander le gîte et expliquer la situation. Laissons un message sur un arbre, ils finiront sans doute par nous rejoindre.

Je voulais faire preuve d'un optimisme forcené et refusais d'envisager le pire. Nous avions déjà perdu presque la moitié de notre compagnie et il allait être compliqué de continuer si nous n'étions plus que 8.

Nous accrochâmes un message bien en évidence sur un arbre bordant le chemin, puis continuâmes notre route comme je l'avais annoncé. Moins d'une heure plus tard, nous arrivâmes à un village, encadré d'une haute palissade de bois. J'avais appris le roumain, mais ma maîtrise restait imparfaite et les habitants parlaient avec un lourd accent qui pénalisait ma compréhension.

Ils nous laissèrent cependant entrer, et la première chose qui me marqua fut la couleur jaune. Elle était omniprésente. Sur des brassards, des capuches, des capes. Des étoffes jaunes étaient accrochées aux fenêtres, des marques jaunes étaient peintes sur les portes… Mais ce n'était pas un jaune lumineux et solaire, c'était un jaune moutarde et terreux, presque ocre, et le plus perturbant fut de le voir sur des banderoles de part et d'autre d'un pilori où un homme pendu se balançait encore, ses orbites déjà dévorés par les corbeaux.

À cette vue, je sentis l'un des marchands tressaillir et marmonner que nous étions arrivés dans une tribu barbare, cependant je lui intimai de se taire. La nuit était proche, et il était impensable de ressortir maintenant sans froisser nos hôtes…

Le grimoire d'Eldritch fut soudainement refermé devant lui et Harry sursauta violemment. Il serait sans doute tombé de sa chaise si William ne l'avait pas maintenu contre lui.

Il porta instinctivement sa main à sa poitrine pour tenter d'apaiser son rythme cardiaque alors que son amant lui caressait doucement les cheveux.

- Comment te sens-tu ? Tu m'as semblé moins terrifié que la dernière fois donc je n'ai pas songé à t'en sortir avant l'heure de fermeture.

Le libraire hocha la tête, peinant à reprendre pleinement contact avec la réalité. Il était assoiffé, avait envie d'aller aux toilettes et surtout de s'allonger devant un grand feu de cheminée dans les bras de son petit ami.

- Il se passe encore des choses étranges. Des membres de la caravane ont encore disparu et ils sont arrivés dans un village… Mais je n'ai pas croisé de monstre donc avec un peu de chance on devrait passer une nuit tranquille.

Il se releva péniblement tandis que l'alchimiste emballait précautionneusement le grimoire et la traduction dans sa sacoche.

- En tout cas, tu m'as vraiment impressionné. Tu as attaqué la partie en allemand sans la moindre hésitation et avec un tel débit d'écriture ! On dirait que le livre te plonge dans une sorte de transe.

Harry se frotta la nuque, inconfortable à l'idée de voir sa conscience être totalement supplantée par la magie du libre.

- L'autre jour, tu as émis l'hypothèse que cet enchantement était une protection pour empêcher les secrets du livre d'être dévoilés, mais moi j'ai l'impression que c'est le contraire. C'est comme si le grimoire voulait être traduit. Il… C'est comme s'il emprisonnait les lecteurs dans son histoire. Je ne pourrais même pas dire que je le traduis en fait, je ne cherche pas mes mots, leur sens me vient naturellement, comme si c'était moi qui écrivais dans un journal et que je le faisais dans ma langue natale.

- Je vois. Je n'ai pas encore pu me procurer d'elfe mais je suis allé acheter de la nourriture que j'ai mise sous stase. Tu veux passer chez toi ou je nous fais transplaner tout de suite ?

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Voldemort avait passé l'après-midi à observer le libraire perdu dans la traduction du grimoire, et il était on-ne-peut plus satisfait de la progression. Il sentait petit à petit son objectif approcher et il avait hâte de pouvoir enfin mettre la main sur ce fameux rituel. Il avait lu par-dessus les épaules du Gryffondor et il n'avait encore vu aucune formule ou liste d'ingrédients, cependant il était certain de ce qu'il avançait.

Le fait que le grimoire ait été scindé en quatre parties chacune dans une langue différente était à lui-seul suffisamment révélateur, mais les surveillances d'Albus Dumbledore et de Nicolas Flamel avaient été une confirmation supplémentaire. On voulait l'empêcher d'obtenir le pouvoir enfermé au sein du grimoire, et il jubilait d'avance à l'idée de voir son plan se concrétiser.

Lorsqu'ils étaient sortis, la nuit était tombée et il avait bien remarqué le brouillard opaque et les rues inexplicablement désertes, mais cela ne l'avait pas préoccupé plus que cela. Il se fichait bien que les monstres du grimoire se manifestent en plein milieu de Godric's Hollow. Le seul qui lui importait était Harry Potter.

En revanche, lorsqu'ils étaient apparus au Manoir Ophidien, il n'avait pu réprimer une grimace en constatant que le paysage était similaire. Bien entendu, il était normal que son domaine soit vide, car ses Inferi étaient rangés à la cave dans une cellule enchantée, pour être certain que son amant ne tombe jamais dessus par hasard. Mais la nappe de brume épaisse l'avait mis inexplicablement mal à l'aise et il avait resserré son emprise sur le poignet du Gryffondor pour l'inciter à entrer.

La soirée s'était déroulée sans incident particulier, ils avaient dîné, s'étaient détendus avec quelques bons livres, puis Voldemort s'était appliqué à faire oublier à son amant la soirée de la veille. À présent, Harry était profondément endormi dans son lit, protégé par Nagini, un bouclier et un sortilège de silence. Lui-même s'était rhabillé et désillusionné, prêt à prendre un potentiel ennemi par surprise.

À l'extérieur, le brouillard n'avait pas baissé en intensité mais tout était calme, lorsque soudain un inexplicable sentiment d'effroi le traversa. C'était une sensation qu'il n'avait que rarement ressentie, et il fronça immédiatement les sourcils. Quelque chose venait de pénétrer sur son domaine, mais cet intrus semblait partout et nulle part à la fois…

Sans attendre, il transplana à l'extérieur pour avoir une vue d'ensemble, mais il eut beau parcourir le parc du regard, rien ne semblait bouger. Il jeta un Hominum Revelio sans plus de succès, et il allait revenir dans sa chambre lorsqu'un concert de râles lui fit brusquement localiser la menace : le sous-sol.

Il atterrit brutalement, baguette à la main, prêt à réduire en cendre la créature qui avait osé pénétrer chez lui. Manifestement, à défaut de pouvoir s'attaquer au libraire, les monstres du livre s'étaient cette fois attaqués aux Inferi enfermés dans la cave.

Sans doute que d'un point de vue magique, ces créatures étaient considérées comme inconscientes, puisqu'elles restaient en sommeil en l'absence d'ordre. Cependant les morts vivants étaient bien moins vulnérables qu'un elfe de maison…

Il ouvrit grand la porte, persuadé d'y trouver une créature déchiquetée, mais quelle ne fut pas sa stupeur d'y découvrir ses trois Inferi méticuleusement démembrés ! Sa cave était envahie par une brume blanche semblable à celle qui se trouvait dans son jardin, cependant il n'y avait nulle trace d'un quelconque assaillant.

Le mage noir lança un Lumos Solem qui dissipa légèrement la fumée, mais il devait se rendre à l'évidence, la cave était désormais vide de la moindre présence.

Manifestement, les monstres du grimoire d'Eldritch n'hésitaient pas à s'attaquer à toute chose se trouvant sur le territoire où ils se manifestaient, y compris des créatures à priori mortes comme des Inferi… Cette constatation ne le rassurait guère, et il s'empressa de transplaner jusqu'à sa chambre.

Harry dormait à poings fermés et Voldemort s'assit sur le lit aux côtés de son familier.

- Nagini, lorsqu'il fait nuit, tu ne dois plus sortir, tu m'entends ? C'est trop dangereux. Les Inferi ont été tués et je n'ai pas trouvé la créature qui avait fait ça. Ça s'est passé en quelques secondes et je n'ai aucune idée de ce dont il s'agit. Je te donnerai à manger durant la journée.

- Oui, Maître.

Le mage noir s'allongea sur le lit, laissant son esprit vagabonder tout en restant conscient. Il n'était plus question de dormir, pas tant que Harry Potter était sous sa protection…

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Lorsque Harry se réveilla, le lendemain matin, il pouvait voir le ciel depuis les volets ouverts, et le temps était sec et lumineux, ce qui le mit de bonne humeur. Une fois n'est pas coutume, son amant était encore allongé sur le lit à ses côtés, yeux fermés, et il le crut tout d'abord endormi. Cependant, à peine s'était-il redressé que l'alchimiste avait ouvert les yeux, et Harry ne put s'empêcher de lui sourire.

- Bonjour William. J'ai passé une excellente nuit, et toi ?

- Une bonne nuit parfaitement normale. Et rien ne vaut d'avoir un éphèbe nu sous ses yeux au réveil.

Le libraire rougit furieusement et s'empressa d'empoigner ses vêtements pour se rendre dans la salle de bain. Une fois lavé et habillé, il alla dans la cuisine de son amant pour déjeuner, et encore une fois ce dernier le surprit en l'y rejoignant.

- Tu déjeunes avec moi aujourd'hui ?

- Une simple tasse de thé. Mais c'est aussi une excuse pour profiter de ta présence.

- Aujourd'hui, pas de grimoire d'Eldritch, n'est-ce pas ? Je voudrais continuer mon recueil de contes norvégiens, ça me permettra de me changer les idées.

- En effet, je te laisse te reposer. Inutile que je vienne te chercher ce soir, maintenant tu connais mon adresse.

- Je te rejoindrai ici en milieu de soirée. Je vais voir mes amis après le travail mais je ne rentrerai pas tard.

Immédiatement, cette réponse sembla interpeller son amant qui plissa les yeux, tout sourire disparu.

- Où comptez-vous aller ?

- Ben chez moi, ou peut-être dans un pub à Londres, je ne sais pas encore. Pourquoi, tu voudrais venir ?

- Non. Mais je n'aime pas te savoir loin de moi à la nuit tombée.

- Quand bien même il nous arriverait quoi que ce soit, je sais me défendre, tu m'as déjà vu me battre ! Mais je ferais attention, promis ! Je serai de retour pour 22 heures au plus tard.

L'alchimiste hocha la tête avec un air absent et Harry en profita pour déposer un baiser sur sa joue, puis il quitta la demeure d'un pas allègre avant de transplaner.

La journée se passa tranquillement, il vendit quelques livres mais il eut aussi beaucoup de temps pour avancer dans son recueil et cela le satisfit. Avec l'intensité des émotions que lui faisait ressentir le grimoire d'Eldritch, il se fit la réflexion que sa journée était un peu ennuyeuse, mais quelque part c'était reposant. Après tout, s'il avait voulu de l'action, il aurait choisi un autre métier.

Hermione l'avait prévenu au cours de la journée qu'elle comptait venir le chercher à sa boutique à l'heure de fermeture, et il avait bloqué la porte grande ouverte alors qu'il terminait son rangement. Il avait envoyé la semaine précédente un nouveau recueil à son imprimeur et celui-ci lui avait fait parvenir le jour-même une caisse entière d'exemplaires prêts à être vendus à des moldus comme à des sorciers.

Alors qu'il était dans son arrière-boutique, un bruit de chuchotement indéfinissable l'incita à repasser de l'autre côté. Il pensait qu'il s'agissait de quelques clients qui devaient discuter entre eux, mais lorsqu'il s'aventura entre les étagères, il ne vit personne.

Perplexe, il haussa les épaules et se repencha dans son travail, mais à nouveau le même bruit lui parvint depuis la mezzanine.

- La boutique va bientôt fermer ! Si vous voulez acheter quelque chose, vous pouvez passer à la caisse s'il vous plaît. Sinon vous pourrez revenir demain.

Pas un bruit ne lui répondit, mais alors qu'il allait monter les marches pour vérifier, la voix de sa meilleure amie retentit juste derrière lui.

- Bonsoir Harry ! Et bien, tu parles tout seul maintenant ?

- Hermione ! C'est que, j'étais persuadé d'avoir entendu des chuchotements à l'instant…

Avec un sourire amusé, son ancienne camarade jeta un Hominum Revelio qui se révéla négatif.

- Il n'y a que nous. Ton cher alchimiste t'empêche donc de dormir à ce point ?

Le libraire secoua la tête avec amusement.

- Non, figure-toi qu'il est adorable et très prévenant. Il est plutôt du genre couche-tard mais il ne fait jamais le moindre bruit quand il me rejoint dans le lit, et il insiste toujours pour que je me montre raisonnable. J'ai tellement de choses à vous raconter !

- J'ai donné rendez-vous à Neville et Luna au Winchester. Ils y sont sans doute déjà. C'est un pub moldu qui fait aussi brasserie. On y sera tranquille pour discuter et on pourra manger en même temps !

Harry termina son rangement de quelques discrets coups de baguette et descendit les rideaux de fer qui protégeaient ses vitrines durant la nuit. Mais alors qu'il se retournait pour parler à Hermione, il eut un violent sursaut en voyant une silhouette encapuchonnée d'une longue cape jaune, de l'autre côté de la rue.

Son amie se tourna immédiatement pour voir ce qui avait attiré son attention mais au même moment, l'être mystérieux avait disparu, comme s'il avait transplané.

- Que se passe-t-il, Harry ? On aurait dit que tu avais vu un fantôme !

- Euh non, c'est juste… J'ai cru voir un truc étrange, mais c'est sans importance. Tu nous emmènes ?

Ils regagnèrent la ruelle de derrière pour pouvoir transplaner à l'abri des regards indiscrets et réapparaître dans un lieu similaire. Hermione semblait connaître l'endroit, car elle l'entraîna immédiatement à sa suite, et ils débouchèrent bientôt sur une avenue en plein milieu du Londres moldu. Quelques piétons déambulaient sur le trottoir, et une mélodie de vieux rock s'échappait d'un bar à proximité.

Comme la plupart des pubs londoniens, il prenait place sur deux étages et proposait de nombreux recoins pour discuter entre amis. Le volume sonore était suffisamment élevé pour garantir un minimum d'intimité sans être désagréable, et un écran de télévision accroché au-dessus du bar diffusait un quelconque match de football.

Neville et Luna étaient déjà installés et ils leur firent signe dès qu'ils les virent. Manifestement ils n'étaient arrivés que depuis peu de temps car leur verre était presque plein. Harry se prit une pinte de Guinness et Hermione commanda un cidre et une planche de saucisson puis ils se faufilèrent jusqu'à la table occupée par leurs deux amis.

Harry s'empressa de saluer ses anciens camarades en les serrant dans ses bras.

- Ça fait plaisir de vous voir. Comment allez-vous ?

Ce fut Luna qui répondit en premier, levant son verre de diabolo-kiwi pour trinquer.

- Merveilleusement bien ! Rolf s'est vu offrir un poste de magizoologiste consultant pour la Gazette du Sorcier ! Cela va nous permettre de financer notre voyage en Patagonie !

La jeune femme était radieuse et parlait avec animation. Hermione, Neville et Harry la félicitèrent pour cette bonne nouvelle. Les conversations se dirigèrent ensuite vers Neville et son futur poste de Professeur de Botanique, et bien entendu Harry et son nouveau petit ami. Ce fut Hermione qui l'attaqua en premier, après que Neville lui eut demandé si elle avait quelqu'un dans sa vie.

- J'ai bien trop de travail pour avoir le temps de faire une rencontre en ce moment. Quand je quitte l'hôpital, je suis tellement fatiguée que je ne rêve que d'un plaid et un canapé. Mais parle-nous plutôt de ton nouveau petit-ami, Harry ! Luna et moi l'avons brièvement rencontré mais ce que nous attendons tous, c'est que tu nous le présentes officiellement !

Le libraire fit la moue, imaginant assez peu le guindé William Peverell au milieu de ses turbulents amis.

- Je ne sais pas… Il m'a déjà dit qu'il n'aimait pas se donner en spectacle, je crois qu'il est un peu timide. Mais maintenant je dors presque tous les soirs chez lui et je crois que je suis heureux. On peut passer des soirées entières à lire et ça ne le dérange pas, on est sur les mêmes longueurs d'onde. Je n'ai pas besoin de me forcer à faire des choses pour paraître "cool".

Il se souvenait encore d'un de ses précédents petits-amis qui l'avait traité de rat-de-bibliothèque. Neville et Luna eurent un sourire entendu mais Hermione semblait toujours méfiante.

- Il est timide ou il a quelque chose à cacher ? Tu comptes t'installer avec lui ?

- Hermione ! Je ne sais pas encore, mais quoi qu'il arrive je garderais mon appartement. William est persuadé que des gens vont essayer de lui voler ses travaux et il a mis sa maison sous Fidelitas. Il m'a dit que j'étais la première personne qu'il emmenait chez lui.

- Tu sais sur quoi il travaille ?

- Je ne sais pas et je ne veux pas le savoir. Il m'a demandé mon aide pour traduire un grimoire et je suis flatté de la confiance qu'il me porte. Hermione, j'ai enfin trouvé quelqu'un qui a les mêmes centres d'intérêts que moi, qui est cultivé et se montre gentil et attentionné avec moi. Je ne veux pas tout gâcher avec une curiosité mal placée.

La Gryffondor soupira et prit une longue gorgée de cidre tandis que Luna prenait la parole.

- Dès que je vous ai vu, j'ai senti qu'il y avait une forte attirance entre vous deux. Déjà ce jour-là, il te regardait comme s'il voulait te dévorer. Je crois que je vais repasser à ta boutique à l'occasion…

Neville hocha la tête à son tour.

- Et moi donc ! Je ne l'ai jamais vu alors que je suis ton meilleur ami. Est-ce qu'il vient tous les jours à ta boutique ?

- Non, ça dépend de son travail. Il sera peut-être présent demain après-midi, mais je n'ai aucune certitude et j'imagine que tu as ta propre boutique à gérer.

- Hum, j'essaierai tout de même de me libérer à l'occasion. Je veux voir de mes yeux à quoi il ressemble ! Et pourquoi pas lui poser quelques questions…

Harry secoua la tête et leva les yeux au ciel.

- Non mais vraiment, vous vous prenez pour des Aurors, ou quoi ? En parlant d'Auror, je ne vous ai pas dit. Venusia Wilkins m'accuse d'avoir assassiné plusieurs braconniers. C'est du délire !

Hermione reposa brutalement son verre.

- Quoi ! Mais pourquoi te soupçonne-t-elle ?

- Ces braconniers font partie du clan de polonais qui étaient venus me menacer juste avant Noël. Je vous en avais parlé vite fait… Apparemment, leur campement a été incendié avec un Feudeymon, et elle a trouvé des preuves qu'ils en avaient après moi. Maintenant elle est persuadée que j'ai voulu me venger. Je trouve ça complètement absurde.

- C'est étrange, l'Auror Wilkins a toujours bien fait son travail. C'est une sorcière consciencieuse, mais tu sais combien ils doivent lui mettre la pression depuis que Corban Yaxley est chef du département de la justice.

- J'en avais aucune idée, tu sais combien je me fiche de la politique ! Je connaissais même pas le nom de son chef avant de le rencontrer.

- Tu as rencontré le directeur du département de la justice magique ?!

Sa voix avait pris un accent hystérique et Harry se contenta de hausser les épaules.

- Venusia voulait m'interroger mais il lui a ordonné de me libérer immédiatement. Je sais pas pourquoi. Tu penses qu'il aurait pu faire ça juste pour l'embêter ?

- Je l'ignore, mais je trouve ça louche. Je serais curieuse de savoir exactement quelles sont ses preuves. Je connais quelqu'un au département de la justice… Je vais lui demander s'il en sait plus.

Elle avait baissé la voix et ses joues avaient légèrement rosi à cette évocation, faisant ricaner Neville et écarquiller les yeux de Harry. Le botaniste fut le premier à réagir.

- Tu CONNAIS ou tu FRÉQUENTES ?

La médicomage agita sa main pour les enjoindre à changer de sujet.

- Pour l'instant, on essaye, on verra où ça nous mène. Savoir qu'il fréquente une née-moldue serait mauvais pour sa carrière, donc on se contente de quelques rendez-vous dans des lieux peu fréquentés. Je sais ce que vous allez vous dire, mais c'est encore nouveau et je ne peux pas lui demander de mettre sa vie entre parenthèses pour moi.

Harry posa une main apaisante sur celle de sa meilleure amie.

- Je ne jugerai pas. Mais quel âge a-t-il ? Est-ce qu'on lui a déjà parlé à Poudlard ? Dans quelle maison était-il ? Est-ce qu'il sait jouer au Quidditch ?

- N'insistez pas, je ne vous dirais même pas son nom.

- Oh Hermione, après toutes les questions que tu m'as posées, tu abuses !

- Bon, très bien… Il a notre âge. Et avant que vous ne me posiez la question, j'ai vérifié qu'il n'était pas un sympathisant de Vous-Savez-Qui ! Il est sensible et… il a vraiment évolué depuis Poudlard. Il s'intéresse au droit sorcier, et a même étudié le droit moldu pour s'en inspirer. Il veut changer les choses de l'intérieur, et j'y crois. Mais pour l'instant, vous ne saurez rien de plus. Bref, Harry, je vais essayer de récupérer une copie du dossier d'enquête de l'Auror Wilkins, et je te tiendrai au courant.

La Gryffondor refusa obstinément de répondre à la moindre question supplémentaire, et ils finirent par changer de sujet, parlant de tout et de rien jusqu'à une heure relativement avancée. Soudain, Harry sursauta en prenant conscience du temps passé.

- Zut, j'avais dit à William que je ne rentrerais pas très tard ! J'espère qu'il ne s'est pas inquiété. Il faut que j'y aille !

Il étreignit brièvement ses trois amis et alla jusqu'au comptoir pour payer avant de sortir. Dehors, le contact avec l'air frais lui fit du bien, et il marcha sans se presser jusqu'à la ruelle où Hermione les avait fait apparaître. Quelques fumeurs traînaient sur le trottoir, et il décida de s'enfoncer plus profondément pour être certain d'être hors de vue. La ruelle tournait, sans doute pour mener à une impasse ou une voie privée, et il n'y avait aucun lampadaire pour éclairer les lieux.
Harry n'avait pas peur. Il avait toujours voyagé seul et les ténèbres ne l'avaient jamais effrayé. Pourtant, lorsqu'il entendit le bruit familier d'une cape traînant sur le sol, il sursauta si violemment que sa baguette lui échappa des mains.

¤¤¤ ANGST ¤¤¤

Il se baissa immédiatement pour la ramasser mais se figea au son de chuchotements à sa gauche. Un frisson remonta le long de sa colonne alors qu'il sentait les poils de ses bras se redresser. La gorge nouée, il se releva, centimètre par centimètre, le cœur cognant sourdement contre ses côtes, ses yeux écarquillés pour tenter de distinguer ce qui lui était invisible. Au moins une personne se trouvait tout proche, mais il faisait tellement sombre qu'il voyait à peine à quelques mètres !

Le Gryffondor se maudit pour sa stupidité. Il avait pris à la légère les mises en garde de son compagnon, pourtant il avait bien vu la créature qui s'était manifestée dans sa chambre quelques nuits plus tôt ! L'estomac noué par l'angoisse et à défaut de trouver une meilleure idée, il se plaqua contre le mur le plus proche. Si la peur était bien une émotion suffisamment forte pour lui permettre d'utiliser la magie sans baguette, il était temps d'essayer de l'exploiter en conditions réelles.

- Lumos !

Il avait murmuré le mot, la voix légèrement étranglée à cause de la boule dans sa gorge. Immédiatement, un orbe lumineux apparut au-dessus de lui, révélant non seulement l'emplacement de sa baguette, mais aussi la source des chuchotements entendus plus tôt : Là… Juste là. Une silhouette humaine se trouvait juste devant lui, le visage masqué par une longue cape à capuche de couleur jaune, aux manches bien trop longues pour appartenir à un humain normal...

Son instinct lui hurlait de s'enfuir au plus vite, tout son corps se tendant, sa respiration s'emballant et le sang rugissant dans ses veines. Et pour une fois, il l'écouta. En une fraction de seconde, il se jeta sur sa baguette et se concentra pour transplaner. Il allait y arriver. Il devait y arriver.

Priant intérieurement, suppliant Merlin, Morgane, Godric ou Salazar de lui venir en aide, et heureusement la magie répondit à son appel. Mais alors que le sol se dérobait sous ses pieds, il sentit avec effroi quelque chose s'accrocher à sa jambe. De long doigts fins et osseux s'enfoncer dans sa chair, griffer sa peau. Quelque chose qui, définitivement, n'était pas une main humaine.

Gémissant de douleur, il imagina une seconde cette chose chez William et chercha à se délivrer de sa prise en vain. Non. Non, non, non ! Il ne pouvait pas la ramener avec lui ! Et puis la douleur éclata dans son corps et prit le pas sur toute autre pensée cohérente. Cela l'empêcha de se concentrer sur son transplanage, le faisant réapparaître au beau milieu d'une plaine herbeuse en bordure de falaise, peut-être à des dizaines de kilomètres de son but originel.

Le soulagement de ne pas mettre son amant en danger dura à peine une fraction de seconde... Jusqu'à ce qu'une violente vague de nausée accompagnée d'une douleur sans nom ne le transpercent. Il s'était désartibulé et la souffrance le fit hurler alors qu'il tombait lourdement sur le sol, privé d'un morceau de son pied gauche.

Roulant sur lui-même, hoquetant et haletant, cherchant sa baguette, les mains tremblantes, il avisa la silhouette encapuchonnée qui semblait quelque peu désorientée par la téléportation. Elle était juste là, à quelques pas de lui, immobile, le visage penché sur sa cheville blessée, manifestement prête à le dévorer. Harry ne lui laissa pas le temps de reprendre ses esprits. Heureusement, il avait conservé suffisamment de maîtrise de lui-même pour se défendre, et il jeta un puissant Expulso qui la frappa de plein fouet. Son assaillant fut projeté à plusieurs mètres de lui, comme s'il ne pesait rien de plus lourd qu'une vulgaire étoffe, et le libraire lâcha un halètement pathétique, partagé entre soulagement et effroi.

Il rampa péniblement pour s'éloigner de la menace, mais il abandonna bientôt. Il se sentait incapable de se lever à cause de la douleur, sans compter qu'il se trouvait en pleine campagne, dans une zone dépourvue du moindre éclairage public. Il ne parvenait pas à voir où avait atterri son adversaire, et cette constatation amplifia son angoisse.

Le cœur au bord des lèvres, il chercha à rassembler ses pensées, paniqué. Il devait se sortir de là. Il devait trouver une solution. Il n'avait pas le choix. D'une formule hurlée avec l'énergie du désespoir, il fit apparaître un cercle de feu autour de lui pour s'éclairer et se défendre, la magie le vidant un peu plus de ses forces. Il était blessé, il avait froid et si l'adrénaline lui avait permis de tenir jusqu'alors, il savait qu'il risquait de s'évanouir d'un moment à l'autre tant la tête lui tournait.

¤¤¤ FIN ANGST ¤¤¤

Prenant une grande inspiration, il ferma les yeux pour se remémorer les souvenirs les plus heureux de son existence. Il devait se concentrer, ignorer la peur et la douleur pour réussir son sort. Envoyer un Patronus à William semblait être la seule solution, mais quand bien même il y parvenait, y avait-il seulement une chance qu'il le retrouve à temps ?

De toute manière, s'il ne faisait rien, il était mort.


Fin du chapitre 8

TADAM ! Un grand merci à Sayaka-san22 / SayaCreativ pour son aide dans la dernière partie. Cette femme est la reine du suspense et elle m'a aidé à donner la dimension que je voulais à ce passage. Un grand merci aussi à notre Licorne Psychopathe pour m'avoir motivée et accompagnée lors des rush ! C'est grace à elle que le chapitre est arrivé aussi vite ! J'ai réussi à terminer le chapitre en seulement 3 jours ! Je suis fière de moi ! Alors certes, ça veut dire que je ne fais pas grand-chose d'autre de mes journées, mais mine de rien je m'éclate, donc c'est plutôt une bonne chose ! 😅👍

J'espère que vous avez aimé ! Rassurez-vous, je ne tue jamais mes personnages principaux et je n'écris que des happy-ends ! 😁 Mais vivant ne veut pas dire entier / émotionnellement intact… 😏😈

Ekateri : Coucou ! Merci pour ta review et ton enthousiasme ! Héhéhé Harry et Voldy sont mon couple fétiche. J'adore jouer avec leurs sentiments pour les faire tomber amoureux. Merci pour ton souhait de rétablissement. Bises !