texte : tiré du texte original de JK. Rowling
playing Harry
Une ombre se dégagea de l'obscurité de l'allée.
– Tu sais, tu vas avoir des problèmes à cause des sorts qu'il a lancé, fit-elle.
L'autre, un jeune homme dans la vingtaine, haussa les épaules.
– Certainement, répondit-il. Mais même si c'est le cas, s'en occuper sera un jeu d'enfant.
– Sa…
– C'est « Harry » à partir de maintenant, le corrigea-t-il en attirant à lui la paire de lunettes oubliée sur le sol. Tu devras t'y faire.
– Je doute que nous soyons amenés à discuter en public.
– Alors, fais-le pour moi. Je vais devoir apprendre à répondre à ce prénom, à présent.
– J'entends bien. Mais je ne saisis toujours pas l'intérêt de faire disparaître le garçon. Ce n'était qu'un enfant... Pourquoi prendre le temps d'en finir avec lui ?
– C'est ainsi que cela doit se passer, Reg. Il n'aurait pas pu survivre à cette nuit. Il n'a jamais été des survivants.
– Ça, c'est ce que toi tu dis. Possèdes-tu le troisième œil pour en être si certain ?
L'autre haussa un sourcil.
– En aucun cas, lui répondit « Harry », mais j'ai appris il y a fort longtemps que certaines choses devaient rester telles qu'elles sont. J'ai essayé. J'ai tant essayé de sauver le garçon avant ce jour, et j'en ai été incapable. Je ne suis pas même parvenu à trouver l'endroit de sa résidence, bien qu'en théorie, j'en connaisse déjà l'emplacement. Cela n'a jamais suffi. C'est ainsi. Je n'ai pas pu sauver les autres non plus, et pourtant, crois-moi, j'ai essayé… à de nombreuses reprises…
L'autre homme resta silencieux et « Harry » laissa son regard glisser vers l'endroit où s'était tenu le corps du garçon - le premier Harry Potter - quelques minutes plus tôt.
– Je serais Harry maintenant, dit-il finalement. C'était ce que je prévoyais depuis le début, de toute manière.
– Es-tu es certain d'en être capable ? l'interrogea Reg. Ce ne sera pas une tâche facile. Tu dois te comporter exactement comme lui… et, tu sais bien… tu es plus vieux que lui…
– Ce ne sera pas un problème, répondit l'autre avant de fermer les yeux, un air concentré sculptant ses traits.
Une minute plus tard, il avait rajeuni d'un peu plus de cinq ans et avait perdu quelques centimètres.
– Voilà, fit-il en ramassant la baguette du garçon.
Il apposa un glamour sur sa longue chevelure et ses vêtements avec sa propre baguette. Il remplaça ensuite ses lentilles par les épais verres qui tenaient lieu de lunettes.
– Bien, dit-il en posant les lunettes nouvellement acquises sur son nez. De quoi ai-je l'air ?
– Tu lui ressembles, lui accorda Reg sans relâcher son expression perplexe. Tu es sûr d'être capable d'agir exactement comme Harry ?
– Sans aucun doute.
– Dans ce cas, il te faudra perdre ton accent, termina Reg. Personne ne croira que tu es Harry Potter si tu gardes cet accent étranger.
« Harry » poussa un soupir.
– Je le perdrai, affirma-t-il. Il y a bien longtemps que je n'ai pas parlé l'anglais. Et il va me falloir aussi quelques temps avant d'arriver à penser dans cette langue…
– Tu…
Quoi qu'il s'apprêtât à dire, il fut interrompu avant de pouvoir terminer.
– Va-t'en ! Quelqu'un arrive !
Reg réagit instantanément. Un instant, il était encore là, le suivant, un minuscule chat noir s'enfuyait dans l'obscurité. L'autre se tourna vers l'entrée de l'allée et pointa la baguette de Harry en direction de la nouvelle venue. C'était Mrs. Figg, l'ancienne baby-sitter de Harry. À la hâte, « Harry » esquissa un geste pour mettre sa baguette hors de vue.
– Ne la range surtout pas, espèce d'idiot ! s'écria Mrs Figg d'une voix perçante. S'il y en avait d'autres ! Oh, ce Mondingus Fletcher, je vais le tuer !
Ainsi, elle était l'un d'entre eux - un des hommes de Dumbledore. Reg et lui avaient eu beaucoup de chance qu'elle ne les ait pas surpris ensemble. « Harry » n'avait jamais été aussi reconnaissant envers le sort de dissimulation placé sur les robes de Reg qui avait permis à l'homme de rester dans l'ombre suffisamment longtemps pour que « Harry » remarque Mrs. Figg avant qu'elle ne se rende compte de la présence d'une personne de trop.
« Harry » repoussa ces pensées. Ce n'était vraiment pas le moment ; il avait bien d'autres choses à considérer.
Il était Harry Potter, à présent - un jeune garçon de quinze ans sans grande instruction et connaissances du monde magique. Il devrait remettre ces réflexions à plus tard.
Il prit une profonde inspiration et ferma brièvement les yeux.
Il était temps. C'était à son tour de jouer sa partie…
– Quoi ? demanda Harry en tentant de paraître perdu.
– Il est parti ! s'exclama Mrs Figg en se tordant les mains. Parti voir quelqu'un à propos d'un lot de chaudrons…, divagua-t-elle sans qu'il ne prenne la peine de lui prêter attention.
À la place, il essaya de se glisser dans la peau de Harry. C'était à lui d'être Harry maintenant. Il devait répondre à ce nom, penser à lui-même comme étant Harry… Il devait tout simplement être Harry. Ce ne serait pas simple, mais il n'avait pas d'autres choix…
Il la laissa délirer de son côté, posant tout de même de temps à autre des questions que Harry poserait à sa place, tels que : « Ce Mondingus me suivait ? » et « Vous connaissez Dumbledore ? ».
Il la laissa finalement de son côté et s'approcha de Dudley pour essayer de le soulever.
Elle se pencha, saisit un des gros bras de Dudley dans sa main ratatinée et tira.
Il perçut son désespoir et sa peur lorsqu'elle tenta vainement de soulever le poids lourd qu'était « son » cousin.
– Lève-toi, espèce de gros tas de mou, lève-toi !
Mais Dudley ne pouvait ou ne voulait pas bouger. Harry lui assura qu'il allait s'en sortir tout seul et le releva. Il était lourd, mais pas autant que d'autre chose qu'il avait autrefois dû porter. Bien sûr, il ne pouvait pas se permettre de montrer qu'il était plus fort que le vrai Harry ; il tenta donc de paraître peiner sous l'effort.
– Allez, vite ! s'écria Mrs Figg d'une voix hystérique.
Elle commençait à paniquer ; la situation devait complètement la dépasser.
« Harry » aurait bien pu la rassurer, mais le jeune homme qu'il prétendait être n'aurait pas perçu ce qu'il voyait lui, donc il n'en fit rien.
« Harry » prit sa suite, la laissant librement jeter des coups d'œil furtifs à chaque coin de rue, parfaitement conscient que quelque part dans l'obscurité, un chat se riait de lui.
– Garde ta baguette à la main !
Il fit exactement ce qu'elle lui disait de faire, ne s'embêtant pas à lui indiquer que les Détraqueurs n'étaient pas prêts de revenir. Même eux n'étaient pas assez bêtes pour faire une nouvelle tentative pour le moment. Un Détraqueur-né comme l'était « Harry » pouvait sans effort les tuer sans trop de peine. Ils ne se risqueraient donc certainement pas à le mettre en colère.
Il y avait maints dangers de par le monde, et les Détraqueurs faisaient partie des pires qu'on pouvait y trouver, mais même eux craignaient quelque chose.
Il la laissa le traîner derrière elle en tentant d'agir comme un adolescent de quinze ans, et cela, même lorsque Mondingus Fletcher fit son apparition et qu'il sentit poindre en lui l'envie de jeter un sort à cet immonde personnage - histoire de lui faire comprendre ce qu'il pensait de lui.
Ce ne fut pas facile. Il dut demander à Mrs Figg si elle voulait utiliser Hedwig pour envoyer un message à Dumbledore et ne pas paraître offensé lorsqu'elle lui assura qu'il « ne comprendrait pas de toute façon », quand, en réalité, il comprenait très bien ce qu'il se passait. Le Ministère voulait traîner son nom dans la boue et allait assurément tenter de le faire expulser de Poudlard - enfin, plutôt Harry. Ils allaient retourner le moindre de ses faux pas contre lui. Un Patronus, même incomplet, était une excuse suffisante pour eux, et ce, même s'ils ne savaient pas que le Patronus incomplet était sorti de la baguette de Harry et non de la sienne…
Ils arrivèrent finalement à proximité du numéro quatre de Privet Drive. Jouant le rôle du garçon mal informé qu'il n'était pas, il demanda pourquoi il avait été suivi et la pria d'attendre avant de s'en aller - parce qu'il avait encore tant de questions sans réponses à lui poser : quelle était sa place dans le monde magique ou encore, à propos de Dumbledore…
Heureusement, Mrs. Figg n'interrompit pas sa retraite et s'en alla.
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« Harry » hésita un moment tout en rajustant sa prise sur Dudley, avant de s'avancer vers la maison. Il rangea finalement sa baguette, et se prépara mentalement à rencontrer « sa » tante. Il expira, puis passa le pas de la porte, n'ayant aucun intérêt à retarder la confrontation.
« Sa » tante était tout sauf ravie. Elle se précipita sur son fils, gémissant « Diddy, Diddy, Diddy ! » à répétition, et « Harry » se contanta de contempler la scène jusqu'à ce que, subitement, Dudley l'accuse des récents événements. Il sut à ce moment-là que la soirée risquait d'être aussi longue que fatigante.
– Qu'as-tu fait à mon fils ? cracha « son » oncle.
– Rien, répondit « Harry » qui savait parfaitement que l'oncle Vernon ne le croirait pas.
– Que t'a-t-il fait Diddy ? demanda la tante Pétunia d'une voix chevrotante en épongeant le blouson en cuir de son fils sur lequel il avait vomi. Est-ce que… est-ce qu'il s'agit de tu-sais-quoi, mon chéri ? Est-ce qu'il s'est servi de sa... chose ?
Dudley répondit par l'affirmative en hochant lentement sa tête qui tremblotait.
Harry protesta. Puis vint l'arrivée des hiboux. Le premier s'engouffra par la fenêtre de la cuisine. De fureur, l'oncle Vernon la referma violemment pendant que « Harry » ouvrait l'enveloppe et prenait connaissance de la missive.
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Cher Mr Potter,
Nous avons reçu des informations selon lesquelles vous auriez exécuté le sortilège du Patronus ce soir à neuf heures vingt-trois, dans une zone habitée par des Moldus et en présence de l'un d'eux.
La gravité de cette violation du décret sur la Restriction de l'usage de la magie chez les sorciers de premier cycle entraîne d'office votre expulsion de l'école de sorcellerie Poudlard.
Des représentants du Ministère se présenteront à votre domicile dans les plus brefs délais afin de procéder à la destruction de votre baguette magique.
Étant entendu que vous avez déjà reçu un avertissement officiel pour une précédente infraction à l'article 13 du Code du secret établi par la Confédération internationale des sorciers, nous avons le regret de vous informer que votre présence sera requise lors d'une audience disciplinaire qui aura lieu au Ministère de la Magie le 12 août prochain à neuf heures précises.
Vous espérant en bonne santé, je vous prie d'agréer, cher Mr Potter, l'expression de mes sentiments distingués.
Mafalda Hopkrik
Service des usages abusifs de la magie
Ministère de la Magie
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Harry parcourut par deux fois la lettre, d'un bout à l'autre, n'osant pas y croire. Il était certain d'avoir mal compris, mais la lettre ne changea ni après la seconde ni après la troisième lecture. Il continuait à lire « expulsion de l'école de sorcellerie Poudlard » et « Des représentants… se présenteront… dans les plus brefs délais afin de procéder à la destruction de votre baguette magique ». Ils n'avaient pas fait ça, ils ne pouvaient pas…
Une nouvelle fois.
« Harry » dut lire la lettre une cinquième fois pour finalement parvenir à y croire. Ils l'avaient fait.
Mon expulsion, songea-t-il. Et ils comptent détruire ma baguette ?
Et ce fut à ce moment-là qu'il craqua. Il tenta de se retenir, tenta de rester dans son personnage devant les membres de « sa » famille. Mais il ne put le contenir plus longtemps, tant cela devenait incontrôlable.
« Harry » avait envie de rire, il voulait rire jusqu'à en pleurer. Le Ministère était si avide de trouver un moyen de le faire renvoyer, tellement avide de jeter la disgrâce sur son nom, si avide de le détruire !
Un Gryffondor terrifié, âgé de quinze ans à peine, aurait certainement été incapable de correctement évaluer la situation, mais il n'avait plus quinze ans - et il n'avait rien d'un Gryffondor. Il n'avait pas peur d'eux. Il leur riait au nez, riait leur stupide soif de vouloir le punir pour « ses » crimes…
Et finalement, il ne put plus se retenir : il pouffa.
– Que se passe-t-il, maintenant, garçon ? se moqua l'oncle Vernon.
– Ils viennent pour détruire ma baguette, répéta-t-il, sans cesser de pouffer.
– Et tu trouves ça drôle ?
Son oncle le dévisageait comme s'il avait perdu la tête… mais peut-être que ce fut ce à quoi cela ressembla.
– Absolument, répondit-il, ne se souciant pas du retour soudain de son accent. Je trouve cela tout bonnement risible.
– Qu'ils détruisent ta… chose… ne signifie pas qu'ils te renvoient ? demanda l'oncle Vernon d'un air suspicieux.
– Oui ! Oui, c'est exactement ça !
« Harry » tenta de reprendre le contrôle, mais il savait déjà cette tâche vaine.
– Et, toi, tu penses qu'il est drôle qu'ils te mettent à la porte ?
« Harry » pouffa une nouvelle fois.
– Tu ne comprends pas assez bien comment fonctionne le monde magique, oncle Vernon, rétorqua-t-il. Et il semblerait que tu ne sois pas le seul. Ils ne peuvent pas me renvoyer, même si cela leur plairait de le faire.
– Je vois : tu te crois même supérieur à ta propre espèce, alors, termina l'oncle Vernon, et Harry pouffa.
– Pas du tout.
Son visage se fendit d'un large sourire, adressé à « son » oncle.
– Mais eux se pensent certainement au-dessus de tous à chacun. Et ils vont payer pour ça.
L'oncle Vernon ouvra la bouche pour répliquer lorsque le second hibou s'écrasa sur la fenêtre de la cuisine.
– Des hiboux ! rugit l'oncle Vernon alors que Harry s'empressa d'aller ouvrir ladite fenêtre.
Il libéra l'oiseau de son fardeau ; c'était une nouvelle lettre.
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Harry,
Dumbledore vient d'arriver au Ministère pour essayer d'éclaircir les choses. NE QUITTE SURTOUT PAS LA MAISON DE TA TANTE ET DE TON ONCLE. NE FAIS PLUS USAGE DE LA MAGIE ET NE RENDS PAS TA BAGUETTE.
Arthur Weasley
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Harry riait maintenant sans retenue. Dumbledore allait « éclaircir les choses » ? Oh, bien sûr qu'il le ferait. Il ne risquerait pas de perdre l'un de ses pions. Pauvre Dumbledore, qui ne savait pas que son précieux soldat était mort le soir même.
Pauvre, pauvre Dumbledore…
« Harry » éclata d'un rire dément.
Pauvre, pauvre vieil imbécile de Dumbledore…
– Que dit celle-ci ? brailla l'oncle Vernon, faisant sourire Harry.
– Un rappel me priant de rester ici. Le tout-puissant Dumbledore va tenter « d'éclaircir les choses », apparemment.
– Et tu ne t'inquiètes toujours pas, souligna l'oncle Vernon.
Harry haussa les épaules en prenant de profondes inspirations et expirations. Son envie de rire s'évanouit doucement.
– Je ne vois pas pourquoi je devrais, déclara-t-il, plus calmement qu'auparavant.
– Et pourquoi donc ne t'inquiéterais-tu pas lorsqu'ils viennent pour détruire ta chose ? Après tout, s'ils décident de faire quelque chose comme ça, c'est que tu dois l'avoir mérité.
– Oh, oui, confirma Harry. J'ai bien utilisé la magie.
– Aha ! gronda l'oncle Vernon en abattant son poing massif sur le réfrigérateur qui s'ouvrit sous le choc - divers aliments basses calories réservées à Dudley tombèrent en s'écrasant sur le sol. Donc, tu avoues ! Qu'as-tu fait à Dudley ?
– Rien.
Ce ne fut pas suffisant. Dudley l'accusa une nouvelle fois, or il savait que son oncle et sa tante ne remettaient jamais en doute la parole de Dudley contre la sienne.
Il laissa donc Dudley décrire l'attaque des Détraqueurs, scrutant minutieusement « sa » tante qui était livide jusqu'à ce que son cousin ne trouve plus ses mots et, là, il ajouta :
– Comme si tu ne pourrais plus jamais être heureux de ta vie.
– Oui, murmura Dudley, toujours tremblant.
Et les accusations à son encontre reprirent, mais il ne s'emporta pas et reprit calmement :
– Ce n'était pas moi. C'étaient deux Détraqueurs.
– Deux quoi ? Qu'est-ce que c'est que ces sornettes ?
C'était l'oncle Vernon cette fois. « Harry » répéta :
– Des Dé-tra-queurs, reprit-il avec lenteur, en détachant chaque syllabe. Ils étaient deux.
– Et qu'est-ce que c'est que ça, des Détraqueurs ?
– Ce sont les gardiens d'Azkaban, la prison des sorciers, dit la tante Pétunia.
Ses paroles laissèrent place à deux secondes d'un silence assourdissant, puis la tante Pétunia plaqua une main sur sa bouche, comme si elle venait de laisser échapper un juron obscène. L'oncle Vernon la dévisageait avec des yeux écarquillés.
Alors ça, c'était quelque chose que « Harry » n'avait pas vu venir. « Sa » tante connaissait Azkaban ?!
– Comment est-ce que tu sais ça ? demanda-t-il, abasourdi.
La tante Pétunia semblait consternée. Elle lança à l'oncle Vernon un regard d'excuse apeuré, puis baissa légèrement la main, découvrant ses dents-de-cheval.
– J'ai entendu… cet horrible garçon… il en parlait à… à elle… il y a des années…, dit-elle d'une voix hachée.
Soudain, il se souvint de qui elle parlait. Il ne put cependant pas s'empêcher d'ajouter quelque chose qu'il savait être totalement faux, juste pour voir sa réaction.
– Si tu fais allusion à maman et papa, pourquoi ne pas les appeler par leurs noms ?
À sa plus grande déception, elle ne répondit pas. À la place, il regarda d'un œil ennuyé l'échange entre l'oncle Vernon et sa femme concernant l'existence maintenant confirmée des Détraqueurs.
Ce fut à ce moment que le hibou suivant pointa le bout de son bec. Une fois de plus, l'oncle Vernon referma à la hâte la fenêtre et Harry ouvrit la lettre.
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Cher Mr Potter,
Suite à notre lettre d'il y a approximativement vingt-deux minutes, le Ministère de la Magie est revenu sur sa décision de procéder à la destruction immédiate de votre baguette magique. Vous pourrez donc la conserver jusqu'à votre audience disciplinaire du 12 août à l'issue de laquelle une décision officielle sera prise.
À la suite d'un entretien avec le directeur de l'école de sorcellerie Poudlard, le Ministère a bien voulu que la question de votre expulsion soit également examinée à cette date. Vous devrez par conséquent vous considérer comme simplement suspendu jusqu'à plus ample informé.
Je vous prie d'agréer, cher Mr Potter, l'expression de mes sentiments distingués.
Mafalda Hopkrik
Service des usages abusifs de la magie
Ministère de la Magie
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Cette nouvelle lettre menaça presque de le faire repartir dans une crise de fous rires. Donc, personne ne venait finalement ! Et il devait encore se considérer comme expulsé ? Le Ministère n'avait pas fini d'aller dans son sens en continuant d'agir ainsi !
Et bien sûr, il y avait aussi le pauvre, mais tout-puissant Dumbledore qui venait à sa rescousse…
Il est vrai que si « Harry » avait été un pion bien obéissant, il aurait été très reconnaissant envers Dumbledore pour l'aide qu'il lui apportait. Mais bien entendu, il ne l'était pas et tout ce qu'il pouvait faire était de tenter de retenir le rire qui lui chatouillait le palais. Ah ! Le tout-puissant Dumbledore avait empêché les Aurors de venir briser sa baguette magique ! Quelle bienveillante attention ! Il devrait se sentir si reconnaissant envers une assistance dont il n'avait guère besoin !
Évidemment, il n'était que le petit pion obéissant qui devait attendre d'être sauvé !
Tout-puissant Dumbledore, le pauvre Harry viendra se prosterner à tes pieds pour lécher tes bottes, tentant au mieux de te servir…
« Harry » explosa une nouvelle fois de rire. Oh, qu'il allait aimer ce jeu ! Qu'il aimerait s'incliner et tout déballer à la figure du vieux fou ! Et que dire de cette histoire avec le Ministère !
– Alors ? dit l'oncle Vernon, rappelant Harry à la réalité immédiate.
– Je suis convoqué à une audience disciplinaire, dit « Harry ».
– C'est là qu'ils te condamneront ?
– J'imagine.
– Alors, tout espoir n'est pas perdu, dit l'oncle Vernon avec méchanceté.
– Bon, si c'est terminé...
Bien entendu, ça ne l'était pas. Cela lui coûta une autre explication, puis une lettre de « son » parrain arriva, lui demandant de rester sagement à la maison, et enfin une Beuglante - à cause de laquelle l'oncle Vernon faillit le mettre dehors - avant que ça ne s'arrête enfin.
« Harry » était allongé dans son lit, soupirant. Quelle journée épouvantable pour commencer d'incarner Harry ! Il souhaita brusquement ne jamais avoir fait disparaître le garçon... mais ce n'était pas comme s'il avait eu le choix de toute façon…
Il était donc présentement allongé dans son lit, juste après avoir rédigé une lettre pour Ron, Hermione et Sirius. Il attendait qu'Hedwige revienne, en se répétant la même phrase, encore et toujours. Une phrase avec qu'il avait encore beaucoup de mal à intégrer. Mais il avait besoin de croire en cette phrase, car sa vie pourrait en dépendre un jour ou l'autre. Il devait y arriver !
Dans l'obscurité, il continua de la répéter encore et encore…
– Je suis Harry James Potter, fils de Lily et James Potter. Je suis Harry James Potter, fils de Lily et James Potter…
Ça semblait étranger, même à ses propres oreilles. Ça sonnait tout simplement tellement faux. C'était faux. Son nom n'était pas Harry James Potter, ça ne l'avait jamais été. Mais ça devait l'être, pour l'instant. Il avait fait disparaître l'autre garçon, avait décidé de prendre sa place et cela incluait de porter son nom !
– Je suis Harry James Potter. Je suis Harry James Potter.
Qu'est-ce qu'il pouvait détester ce nom ! Ce n'était même pas un nom correct pour un sorcier ! Peut-être passable pour un moldu, mais pour un sorcier, tout ce qui comptait étaient les origines, et le nom « Harry » était bien trop moderne pour montrer quelles qu'origines que ce soient.
C'était définitif, le nom « Harry » était vraiment tout ce qu'il y avait de plus inconvenant pour un sorcier…
Même les parents de Harry l'avaient su, le seul ayant été laissé dans l'ignorance avait été Harry lui-même…
– Je suis Harry James Potter, fils de Lily et James Potter. Je suis Harry James Potter, fils de Lily et James Potter… Mais je ne le suis pas ! cria-t-il vivement.
Il avait besoin d'entendre la vérité, juste pour cette fois.
– Peut-être devrais-je me nommer ainsi au cours des prochains mois, mais jamais je ne serais un idiot de Gryffondor comme toi ! Je ne suis pas Harry James Potter ! Et je déteste être appelé Harry !
Cela lui fit du bien de s'entendre le dire, même si ça ne l'avança à rien. Il devrait s'habituer à ce nom. Il ne pouvait pas reprendre celui qu'il avait laissé derrière en prenant celui de Harry.
J'ai planifié ça ces dix dernières années, se dit-il à lui-même. Je ne vais pas tout abandonner maintenant que j'ai presque atteint mon but ! Encore un peu de patience et la revanche sera enfin mienne, depuis le temps que j'attends ! Plus jamais ils n'oseront me confronter. Ce serait une revanche de douce-amertume lorsque leurs pions finiront l'un après l'autre par tomber.
Juste pour cela, il devait endurer le rôle de Harry pour le moment. Tout ça était pour le plus grand bien après tout. Un sourire fou tordit son visage à cette pensée. Il aurait grand plaisir à renvoyer cette phrase à son créateur…
Hedwige débarqua soudainement dans sa chambre et Harry arrêta de divaguer.
– Hé, bonjour toi, la salua-t-il, attendant, tendu, avant qu'elle ne le salue en retour comme un vieil ami. J'ai quelques lettres pour toi. Pourrais-tu les apporter à Ron, Hermione et Sirius ?
Elle mordit son doigt et « Harry » lui tendit les lettres. Il se rendit jusqu'à la fenêtre et suivit sa silhouette des yeux avant qu'elle ne disparaisse pleinement. Il tourna enfin son regard vers le sol là où un chat noir était assis et l'observait. Il lui fit un clin d'œil et reprit sa contemplation du paysage. Il attendit que le félin grimpe jusqu'à lui et lorsque celui-ci atteignit finalement le rebord de la fenêtre, il commença à le caresser.
Le félin le laissa faire quelques instants, avant de tenter de se dégager, mais « Harry » le tenait fermement entre ses mains.
– Ne t'en va pas, Reg, fit-il. Je suis certain d'avoir aperçu des gardes dans le jardin. Nous n'aimerions pas qu'ils nous soupçonnent, pas vrai ?
Le chat ronronna sous ses doigts.
– Ne t'inquiète pas. Ils vont venir pour me sortir d'ici de toute façon, dit-il en scrutant les étoiles. Ils seront là dans quelques jours. D'ici là, nous avons encore du temps. Et quand il sera l'heure, ils m'emmèneront à Grimmauld. Tu auras juste à rester caché jusqu'à ce que je puisse te faire entrer.
Le félin frotta sa tête contre sa paume.
– Je vais devoir te montrer le chemin, étant donné que tu seras incapable de le trouver par toi-même, mais tout devrait bien se passer. Je m'en occuperais dès que tout le monde sera endormi dès la première nuit, d'accord ? Le sortilège de Fidelitas t'empêche peut-être de la trouver et moi d'en parler, mais tu sais très bien où elle devrait être et je n'aurais pas à parler pour te laisser entrer. Sois prêt. Tu ne pourras pas me manquer de toute façon, il te faudra juste m'attendre, cette nuit-là.
Le chat ronronna de nouveau avant de se redresser et de filer comme il était arrivé. Harry sourit franchement. Le Ministère regretterait maintes choses lorsqu'il en aurait terminé avec eux. Ils seront des plus… des plus navrés...
