— Elle est toujours dans les vapes ?
— Oui, mais elle va bien, ne vous en faites pas, répondit Oaken. C'était simplement un peu trop pour elle à encaisser... On va la laisser dormir un moment.
— Je vais la veiller, se proposa Sebastian. Quand elle reviendra à elle, nous aurons à parler, elle et moi.
— Par pitié, ne la mettez pas en colère, dit alors Oaken en joignant ses mains. Je tiens à ma boutique...

Sebastian esquissa un rictus puis entra dans la chambre à l'étage de la boutique et s'assit sur un tabouret près du lit en posant son bâton contre le mur. Étrangement, Elsa n'avait pas besoin d'un canalisateur pour contrôler ses pouvoirs, mais à ce qu'il avait vu, ses émotions étaient le catalyseur de sa magie, et plus elle était furieuse, plus ses pouvoirs se déchainaient...

Dire que cette fille l'intriguait était un euphémisme. Outre le fait que c'était la première fois qu'il rencontrait un autre Magiker, Sebastian était vraiment curieux d'en apprendre plus sur elle, même si Anna lui en avait raconté une bonne partie pendant le voyage jusqu'ici.

— Bash... ?

Sebastian pivota et Friskette se dandina jusqu'au lit.

— Elle est belle, dit le bonhomme de neige.
— Je suis forcé de le reconnaître, répondit Sebastian avec un sourire. Mais elle excite ma curiosité, Fris ! C'est la première fois que je vois quelqu'un d'autre que moi qui possède la même magie, et... et c'est une Reine ! Elle... elle est la Reine d'Arendelle alors que moi, j'ai été évincé du trône, et confiné pendant treize ans dans une grotte à entendre que je n'étais pas normal et que je ne ferais jamais rien de bien dans ma vie !

Friskette regarda Sebastian d'un air triste et posa sa main de bois sur le bras du jeune homme.

— Tu es une amie si fidèle... soupira-t-il.
— Quand le froid règne, oui ! répondit le bonhomme de neige en souriant. Elle va se réveiller quand ? demanda-t-elle alors en se hissant sur le lit.

Elle observa Elsa un moment, en penchant la tête, puis s'assit au bout du lit et croisa les bras.

— Tu devrais te marier avec elle.

Sebastian s'étrangla avec son air. Friskette le regarda d'un œil critique.

— Tu es sérieuse ? demanda-t-il. Mais enfin, Fris, je ne la connais même pas... Et puis, j'ai très bien retenu les histoires de sa sœur, hein... Cette fille ne veut pas se marier, elle a peur de tout et de tout le monde et elle préfère rester cloîtrée chez elle comme une lâche...
— Redis encore une fois que je suis lâche, et j'en ferais passer l'envie... marmonna alors Elsa en remuant. Bon sang, j'ai mal partout...
— Coupable, dit Sebastian en levant la main. Mais si je n'étais pas intervenu, tu aurais tué Hans...
— Pas une grande perte... souffla Elsa.

Elle se redressa contre ses oreillers et découvrit Friskette au bout de lit.

— Elle ressemble tellement à Olaf... dit-elle.
— Olaf ? demanda Friskette. C'est qui ?
— C'est un bonhomme de neige, comme toi, et c'est mon meilleur ami, répondit Elsa. Et le seul, malheureusement.
— Fris est ma meilleure amie, avoua alors Sebastian en regardant le bonhomme de neige. Elle m'a été d'un précieux secours pendant les treize ans que j'ai passés seul dans ma grotte...

Elsa resta silencieuse. Elle regarda alors le jeune homme, puis leva les yeux sur le bâton et Sebastian le prit pour le lui tendre.

— Tu l'as fait toi-même ? demanda la jeune femme.
— Oui... Le cristal est un morceau de glace dans lequel j'ai concentré une grande partie de mes pouvoirs.
— Pourquoi ? Tu ne sais pas les contrôler sans ? railla Elsa avec un rictus.
— Celui des deux qui ne sait pas contrôler ses pouvoirs ici, c'est vous, Altesse, rétorqua Sebastian.

Elsa prit un air choqué et voulut répondre, mais Friskette secoua la tête et la jeune femme la regarda.

— Quoi ? lui demanda-t-elle.
— Bash a raison, répondit le bonhomme de neige. Vous ne savez pas contrôler vos pouvoirs, la preuve, vous ne seriez pas tombée dans les pommes, sinon...
— Bash ? demanda Elsa en regardant Sebastian. Quel étrange nom...
— C'est un diminutif, répondit celui-ci. Je m'appelle Sebastian, et je suis le fils de la Reine Kristina des Îles du Nord.
— Un Prince ? grimaça Elsa.

Sebastian releva le menton.

— Non. Je suis né d'un premier mariage et quand mon père a trouvé la mort en mer, ma mère s'est remariée. Le Roi Georg est ensuite monté sur le trône, mais il ne voulait pas d'un bâtard pour fils, alors j'ai été écarté du trône, puis du palais quand ils ont découvert mes pouvoirs.

Elsa haussa un sourcil puis tourna la tête.

— La Princesse Anna m'a raconté votre histoire, Altesse, dit alors Sebastian. Et je suis très étonné que vous soyez montée sur le trône malgré vos pouvoirs.
— Avais-je le choix ? grinça Elsa. Non. Et je ne l'ai toujours pas. Maintenant, laissez-moi, je vous prie.

Sebastian souffla et n'insista pas. Il prit Friskette sur son dos, son bâton, puis quitta la chambre en fermant la porte.

.

Elsa rentra en ville comme elle en était partie, sans aucune vague, et regagna le château sans même s'arrêter chez sa sœur alors qu'elle était au départ sortie pour lui parler...

De son côté, Anna ne sut rien de l'escapade de sa sœur chez Oaken, ni de sa rencontre mouvementée avec Sebastian. Cloîtrée chez elle, elle attendait que Kristof rentre de son périple dans le nord afin qu'ils aient une longue et sérieuse discussion sur l'avenir de leur mariage.

Cela lui brisait le cœur de devoir lui annoncer qu'elle ne pourrait pas continuer ainsi à se voiler la face en prétendant que tout allait bien alors que son cœur était déchiré entre deux hommes. Oui, elle aimait Kristof et il la rendait heureuse, et si Hans n'était pas revenu dans sa vie, elle aurait très certainement pu s'habituer à vivre avec lui, à être une bonne maîtresse de maison, devenir mère aussi, pourquoi pas, mais les choses n'avaient pas été ainsi et malgré les mois écoulés, elle s'était rendu compte que Hans n'avait jamais quitté ses pensées et encore moins son cœur malgré le mal qu'il avait fait...

Le bruit du traineau sur les pavés devant la maison, attira l'oreille d'Anna comme si on l'avait appelée haut et fort, et elle sentit immédiatement sa poitrine se compresser et son cœur accélérer.

Je ne vais pas pouvoir le faire, je ne vais pas...

— Enfin à la maison ! Anna, tu es là, j'ai vu le bateau royal...

La jeune femme, assise à la table de la pièce à vivre, se redressa et sourit à son mari. Elle se leva pour l'enlacer et il l'embrassa solidement, ravi de la revoir après des semaines d'absence.

Je dois le faire !

— Chéri, tu... tu peux t'asseoir un moment, j'ai quelque chose à te dire...

Étonné, Kristof, la joie de retrouver sa femme envolée, hocha lentement la tête et s'assit près d'Ana qui lui prit la main dans les siennes et commença par raconter ce qu'il s'était passé pendant son voyage dans les Îles du Nord.