— Je le sens pas.
— Nous non plus, mais si on veut se débarrasser de lui, alors tu dois le rencontrer. Ne t'en fais pas, tu ne seras pas seul, Derek, Scott et moi, on sera là.

Stiles était assis au bout du canapé de cuir blanc. Derek était affalé dans le même canapé, à sa droite, et en face, dans un second canapé, Jared était nerveux.

— Je suis un miraculé, dit-il en se tordant les doigts. J'ai été tué il y a six mois, pourtant je suis devant vous et je n'ai aucune putain d'idée de comment c'est possible...
— On pense à un esprit surnaturel quelconque, répondit Derek en se redressant. Mais pour savoir lequel, on aura besoin de Lydia, je pense.

Stiles secoua aussitôt la tête.

— Pas moyen... On trouvera une autre Banshee.
— Stiles...

Le plus jeune laissa tomber sa tête en avant et soupira avant de se lever.

— Très bien, Lydia...

Il se dirigea vers la cuisine et prit une bière dans le frigo. Il en ramena deux autres, mais demeura debout, pensif.

— Il y a un truc auquel on n'a pas pensé, dit-il soudain.
— Quoi donc ?
— Il est où cet esprit, maintenant ?

Derek et Jared échangèrent un regard.

— Bonne question, mais je pense que si quelqu'un agit bizarrement dans les prochaines semaines, on aura notre réponse, répondit le loup.

Stiles demeura silencieux et, sa bouteille à la main, se détourna soudain en tirant son téléphone de sa poche.

— Il y a un souci entre cette Lydia et lui ? demanda alors Jared.
— Ils étaient ensemble depuis cinq ans avant qu'ils ne se séparent, il y a six mois. Ils avaient fait le tour de leur couple et installé une routine métro boulot dodo.
— Je vois... Elle serait pas plutôt partie parce qu'elle savait qu'il était amoureux de toi, par hasard ?

Derek haussa un sourcil.

— C'est-à-dire ?
— C'est une Banshee et depuis que je suis ici, j'ai fait mes devoirs, j'ai lu le Bestiaire dans ta bibliothèque et cette fille a sans doute été amoureuse de ton mec, mais lui, il pensait à toi au fond de lui.

Le loup demeura silencieux et jeta un coup d'œil vers Stiles, dans le couloir menant aux chambres, en train de parler au téléphone.

— Tu crois qu'elle l'aurait senti ?
— C'est une hypothèse, mais s'ils se sont séparés sans cris ni vaisselle brisée, c'est qu'un truc n'allait pas entre eux, répondit Jared en haussant les épaules.
— Et ce truc, c'était moi, tu penses ?

Jared haussa les épaules. Stiles revint alors et se laissa tomber près de Derek qui passa son bras autour de ses épaules.

— Alors ?
— Elle a dit oui, mais elle ne pourra pas venir avant dimanche, elle est en mission pour le DPCS. Une couverture dans un gang de shamans...
— Des shamans ?
— Des sortes de druides, mais avec des pouvoirs, expliqua Stiles en se redressant.

Il se frotta le visage et Derek lui caressa le dos. Il croisa alors le regard de Jared qui s'excusa soudain en annonçant aller pisser. Une fois qu'il fut enfermé dans la salle de bains, Derek se propulsa sur la table basse pour faire face à son compagnon.

— Dis... J'ai une question qui va peut-être sembler bizarre.
— Mais encore ?
— Quand tu étais au téléphone avec Lydia, Jared m'a demandé si ce qui vous a séparés, elle et toi, ça ne serait pas moi.

Stiles haussa un sourcil.

— Comment ça ? Je ne savais pas que je t'aimais avant de te revoir...
— Jared pense que si, répondit Derek en secouant la tête. Il m'a dit que Lydia le savait certainement et qu'elle a fait contre mauvaise fortune bon cœur pendant toutes ces années avant de décider que ça suffisait.
— Elle m'en aurait parlé, assura Stiles.
— Tu la connais bien mieux que moi, répondit Derek. À vrai dire, ce que dit Jared fait sens dans ma tête. Je veux dire, quand tu es revenu à Beacon Hills, c'était pour ton père, et tu t'es dit que plus il y a de loups, mieux c'est...
— Ouais et ?
— Et là, tu fais des recherches, tu ne trouves rien sur Peter et Malia, mais tu découvres qu'il y a un mandat d'arrêt international contre moi. Pis encore, tu apprends que je suis retenu captif dans la Zone 51.
— Je ne vois pas où tu veux en venir...
— C'est simple, Stiles... Tu m'aimes depuis notre première rencontre, dans les bois, mais tu ne l'as jamais accepté, répondit le loup avec un mince sourire en lui prenant les mains. Jusqu'à ce que tu me découvres à moitié découpé dans une salle de tortures officielle du gouvernement, dix ans plus tard...

Le jeune homme se mordit la lèvre et Derek posa son front contre le sien. Stiles laissa échapper un soupir saccadé avant de lancer ses bras autour de Derek qui l'étreignit solidement. Il croisa alors le regard de Jared, appuyé de l'épaule contre le mur du couloir, et la panthère lui fit un clin d'œil.
Stiles recula et Derek lui sourit.

— On a perdu cinq ans, dit-il.
— On a gagné cinq ans, rectifia Stiles en secouant la tête. Je n'étais pas prêt à l'époque et je n'aurais jamais pu supporter une relation avec un gars comme toi.
— Tu penses ?

Stiles opina. Jared se racla alors la gorge et s'approcha.

— J'aurais jamais pensé que je trouverai deux mecs ensemble mignons. Pourtant, je suis forcé de l'avouer, dit-il en posant ses mains sur les épaules de Derek. Surtout quand j'ai vécu pendant trois ans avec l'un d'eux...

Derek posa une main sur la sienne en lui souriant puis il retourna sur le canapé et la panthère les observa un moment.

— Sinon, elle vient quand, alors, cette Lydia ?
— Dimanche, au plus tôt, répondit Stiles. Du moins, c'est ce qu'elle a dit.
— La confiance règne, je vois...

Stiles serra les lèvres et préféra boire une gorgée de bière au lieu de répondre. Jared n'insista pas. Derek lui jeta un regard lourd de sens et la panthère feula en croisant les bras.

— Faudra que je la rencontre, lâcha-t-il alors. Si elle a été capable d'aimer une allumette brûlée comme toi, alors...

Stiles s'étouffa avec sa bière et Derek se mit à rire tout en tapotant dans le dos de son compagnon.

— Ceci dit, il n'a pas tort, comparé à nous deux, tu es... mince, dit-il.
— Enfonce encore un peu le clou, je t'en prie ! rétorqua Stiles.
— On te taquine, répondit Jared en s'asseyant.

Il récupéra sa bière, en but une gorgée et ajouta :

— Mais je veux quand même la rencontrer ta Lydia. Les femmes avec du caractère, ça me plaît.

Derek ne put que confirmer et s'adossa au canapé en soupirant. L'interphone retentit soudain et le loup haussa un sourcil. Il croisa le regard de Stiles qui se leva pour aller répondre.

— Oh... dit-il. Les gars, ce sont les soldats de James...

Jared se redressa, prêt à fuir et Stiles hésita.

— On leur doit des explications, dit-il.
— Comment ils ont trouvé cette adresse ? demanda Derek.
— Ce sont des militaires...
— Je le sens pas...
— Ils sont en civil, répondit alors Stiles.
— Et tu crois vraiment qu'ils prendraient le risque de venir dans la tanière d'un Alpha Supérieur sans armes ? demanda Derek.
— Ils savent que toi et moi on est ensemble, Derek, il y a donc de grandes probabilités pour que je sois chez toi... et moi je suis armé.

Derek serra les mâchoires. Un silence s'installa puis Stiles appuya sur l'ouverture de la porte et sortit ensuite dans le couloir. Lorsque l'ascenseur s'ouvrit, les quatre hommes se firent face.

— Tu vois, je te l'avais dit, dit Boyd.
— Vous venez pour vos réponses ? demanda Stiles avec un bref sourire.
— Agent Stilinski, nous savons pertinemment que beaucoup de choses nous échappent dans ce monde, nous avons été recrutés pour...
— Rentrons, le coupa Stiles. Avant, je dois savoir si vous êtes armés.
— Non, répondit Boyd en levant les mains. Nous n'avons aucune arme, même si nous savons que cet appartement n'est pas un appartement classique.
— En vrai si, répondit Stiles. Ce sont ses habitants qui ne sont pas classiques. De toute manière, même armés, vous avez peu de chances face à un loup et une panthère...

Les trois hommes grimacèrent puis sortirent de l'ascenseur et Stiles retourna vers la porte de l'appartement restée entrouverte. Il la poussa et les soldats le suivirent en silence. Un feulement se fit aussitôt entendre et Stiles tourna la tête.

— Du calme, dit-il. Ils ne sont pas armés.

Jared, qui se tenait dans la cuisine, serra les mâchoires. Stiles le regarda fixement et la panthère se redressa en soufflant par le nez.

— Tu es garant d'eux, Stiles, lâcha-t-il.
— Jared, ça suffit, intervint alors une voix grave.

Stiles eut un frisson. Il tourna la tête vers le salon et, depuis le corridor menant aux chambres, Derek apparut. Ses yeux rougirent un instant puis il s'approcha.

— J'ignore la raison de votre visite chez moi, dit-il. Mais cela a plutôt intérêt à valoir la peine. Et, si vous tentez que ce soit, le trottoir en bas de l'immeuble se fera une joie de vous recevoir.

Stiles soupira.

— Il n'y en a pas un pour rattraper l'autre... Ces gars sont là pour avoir des réponses que je leur ai promis, dit-il. Vous restez ou vous partez, mais ils ont le droit de savoir.

Jared renifla. Boyd tourna la tête vers lui et hésita.

— Vous êtes le jeune homme dont tout le Canada recherche le corps, c'est ça ? demanda-t-il. Comment avez-vous fait pour...

Jared ferma les yeux un instant puis les rouvrit et ses pupilles avaient changé, fines et allongées comme celles d'un chat et d'un jaune vif.

— Jared est une panthère-garou, expliqua alors Stiles. Même si nous ignorons encore comment il a fait pour s'enfuir de la morgue d'Oshawa, il a été mordu par une panthère-garou il y a six mois et il a été transformé.
— Et je l'ai tué.

Stiles jeta un coup d'œil à son compagnon.

— Vous connaissez Derek Hale, dit-il en indiquant le canapé.
— Le loup que le Colonel James a capturé ici, à Beacon Hills, oui, répondit Boyd. Celui « qu'on n'aurait pas dû toucher ».

Stiles esquissa un sourire.

— Je répondrais volontiers à toutes vos questions, dit-il. D'abord, je dois savoir ce que vous savez, et surtout, si vous êtes encore du côté du Colonel.

Les trois soldats se jetèrent un regard avant de secouer la tête.

— Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, nous ne l'avons suivi que parce que nous avons une famille à nourrir, répondit Boyd. J'ai une femme et quatre enfants, Nathan a deux filles, et Martin gère une association de réinsertion pour handicapés mentaux léger. Notre paie de soldats d'élite nous permettait de vivre décemment, mais avec les conneries de James, nous avons perdu ce statut. Le laboratoire a été fermé et tout le monde a été réaffecté bien en dessous de son grade en guise de punition...
— Lorsqu'il nous a contactés pour nous proposer un travail pas tout à fait légal mais ultra bien payé, nous avons accepté, répondit le dénommé Martin. Nous en avions besoin...
—Cet après-midi, je vous ai entendus parler de nous, intervint Nathan. Quand nous sommes partis, alors que nous sortions du bâtiment, je vous ai entendu parler à ce garçon...
— Isaac ? demanda Stiles. Qu'avez-vous entendu ?
— Que nous pourrions éventuellement travailler pour l'Alpha, répondit Boyd.

Derek grogna et Jared souffla.

— Ça suffit, tous les deux... marmonna Stiles. Et oui, j'ai émis cette hypothèse, et si vous êtes ici, c'est que vous y avez réfléchi, je me trompe ?
— En effet. Cela nous obligerait à quitter Colorado Springs, mais nous sommes des militaires, nous pouvons être mutés n'importe où dans le pays sans que cela paraisse suspect, répondit Boyd. Pour ne rien vous cacher, j'ai détesté travailler pour le Colonel... Le Docteur Lambert m'a demandé à plusieurs reprises de l'aide pour vous libérer, Monsieur Hale, mais j'avais les mains liées, si je faisais quoi que ce soit, je serais considéré comme un traître et renvoyé de l'armée avec déshonneur, et je n'en ai pas besoin.
— Il n'y a pas de base militaire de l'US Air Force à Beacon Hills, répondit Stiles. Cependant, nous avons un Shérif pleinement compétent et son équipe serait sans doute très contente de récupérer trois anciens soldats d'élite.

Les trois concernés se regardèrent et Boyd plissa un œil.

— Une équipe... surnaturelle ? demanda-t-il.

Stiles esquissa un sourire et s'adossa au canapé en croisant les bras. Jared renifla et s'éloigna vers la cuisine pour récupérer des bières, pressentant la longue discussion...