Harry soupira de dépit lorsque Draco évita son regard alors qu'il rentrait dans les vestiaires des Gryffondors au moment où le blond sortait de ceux des Serpentards. Dépité, le Survivant tenta de ne pas montrer ses sentiments à son meilleur ami qui babillait joyeusement à propos du match à venir.
Après la bataille de Poudlard, la plupart des septièmes années durent redoubler à cause de l'enseignement bâclé que les Mangemorts avaient mis en place pendant un an. Le fait que Harry, Ron et Hermione aient loupé une année entière pour rechercher les Horcruxes ne leur avait pas offert davantage d'options.
Harry avait trouvé ça étrange de revenir à l'école après ces mois de guerre et de fuite. Il se surprenait régulièrement à jeter des coups d'œil méfiant par-dessus son épaule. C'était comme s'il n'arrivait pas à croire qu'enfin, il pouvait vivre une année tranquillement. Il n'y avait pas de professeur essayant de l'assassiner, de monstre rodant dans les couloirs ou de criminel évadé d'Azkaban tentant de le tuer. Non, il n'y avait aucun danger et Harry avait beaucoup de mal à se faire à cette situation.
C'était lors d'une de ses nombreuses insomnies qu'il finit par longer le deuxième étage, passant devant les toilettes de Mimi Geignarde. Harry y était entré sans même le réaliser, ses pas le guidant par automatisme dans cette direction. Il ne savait pas ce qu'il essayait de se prouver en venant ici, mais il n'essaya pas de réfléchir à la question bien longtemps. C'était devenu comme une sorte d'habitude maintenant. Au milieu de la nuit, ses jambes finissaient immanquablement par se diriger vers les lieux qui hantaient ses cauchemars : la clairière où il avait vu horrifié Voldemort boire le sang d'une licorne dans la Forêt Interdite, le couloir abandonné du troisième étage qui avait accueillit Touffu, la Cabane Hurlante où il avait rencontré Sirius et où Peter Pettigrow avait pris la fuite, le carré d'herbe où après le Tournoi des Trois Sorciers il avait tenu le corps de Cédric, la Salle sur Demande où Crabbe s'était incendié lui-même avec un Feudeymon, la tour d'astronomie d'où Dumbledore avait chuté, la Grande Salle où George avait pleuré sur le corps inerte de Fred, ou encore, l'entrée de la Chambre des Secrets comme ce soir-là.
Parfois, Harry avait l'impression que le moindre recoin de Poudlard pouvait lui rappeler un mauvais souvenir, effaçant les six années d'amitié et de joie qu'il y avait partagé avec Ron et Hermione. Cette fois-ci, il se dit que plutôt de ressasser son malheur tout seul dans son coin, il allait essayer de se changer les idées.
Harry contourna le lavabo orné d'une sculpture de serpent et se dirigea plutôt vers les cabines. Il en ouvrit quelques-unes mais finit par soupirer, songeant que ce serait plus rapide d'appeler la personne, ou plutôt le fantôme, qu'il souhaitait voir.
« Mimi ! Tu es là ? » Harry grimaça lorsque sa voix envahit l'espace.
Il n'avait pas crié, mais avec le silence de la nuit, Harry pouvait parfaitement entendre son écho se perdre dans le couloir. Il n'avait pas pensé à refermer la porte derrière lui.
Une porte s'ouvrit et Harry perdit son sourire en faisant non pas face à Mimi Geignarde, mais à Draco Malefoy.
« Tu ne veux pas crier encore plus fort, Potter ? » chuchota-t-il furieusement. « Je te jure que si Rusard vient par ici, je t'étripe.
Harry se contenta de hausser les épaules. Il savait que Rusard ne venait plus par ici depuis que Mimi avait piqué une crise en le voyant ouvrir sa cabine. Le concierge avait pensé découvrir une étudiante s'étant enfuie de son dortoir pour pleurer dans les toilettes. À la place, le vieux Cracmols s'était fait arroser de la tête au pied et Miss Teigne avait faillit se noyer à cause de l'inondation soudaine de la pièce.
Face à l'absence de réponse de sa némésis, le blond fronça des sourcils en croisant ses bras sur son torse.
« Qu'est-ce que tu fais là ? » gronda Draco.
« Je te retourne la question. » Mais Malefoy ne semblait pas vouloir lui répondre. « Je voulais voir Mimi.
- Mimi Geignarde ? » se moqua le blond. « Alors c'est ça, ton type de fille ?
- Je n'aime pas les filles. » sourit-il victorieusement devant l'air choqué de Draco. Il était rare que le petit aristocrate perde son air guindé. « Pansy est morte ici, devant Mimi. Je crois que ça l'a encore plus choqué que de sa propre mort. » murmura Harry, retrouvant son sérieux. « C'est pour elle ? »
Harry pointa du doigt le petit bouquet de fleur blanche que le blond tenait dans sa main. Draco suivit son geste du regard et une profonde lassitude tira ses traits. Il ne voulait pas se battre avec Potter, pas ce soir. Habituellement, il aimait leurs échanges piquant dans les couloirs, c'était bien la seule constante dans sa vie. Que ce soit depuis leur première rencontre à aujourd'hui, leurs querelles étaient la seule chose qui n'avaient jamais changé entre eux deux. Mais ce soir, même cette constante rassurante n'était pas suffisante pour redonner un peu d'énergie à Draco.
Il ne répondit pas, se contentant de fixer le Survivant. La réponse était évidente. Malefoy fut surpris de le voir agiter sa baguette pour faire apparaître un vase joliment ornementé devant la petite plaque funéraire que Draco avait installé devant les lavabos avec quelques-uns de ses amis. Harry se contenta de le remplir à un robinet avant de le reposer par terre.
Il quitta les toilettes sans dire un mot, laissant Malefoy se recueillirent devant la stèle.
« Merci Potter. » chuchota le blond en s'agenouillant pour placer son bouquet dans le vase, alors que Harry passait le pas de la porte.
Harry ne se retourna pas, laissant ses pas le guider vers une autre destination qui lui rappellerait certaine tout autant de mauvais souvenirs. Une fois seul, Draco laissa les larmes couler sur son visage. C'était la première fois qu'il s'autorisait à craquer depuis la fin de la guerre.
Il avait dû encaisser tant de bouleversements que le blond n'avait jamais trouvé le temps pour se laisser aller. Il y avait eu l'emprisonnement de son père, l'assignation à domicile de sa mère, son nom traîné dans la boue par les journaux, la rénovation du manoir qui avait été saccagé par des sorciers voulant se venger de sa famille. Draco n'avait pas eu le temps de se reposer pendant les vacances.
Puis, il y avait eu Poudlard. Il avait dormi tout le long du trajet, bloquant la porte de son compartiment pour que personne ne puisse l'y rejoindre et tenter de l'attaquer. Durant le banquet, il avait senti les regards de ses camarades sur lui. Les sourires compatissants de ses amis, fils de Mangemorts eux aussi. Mais ces quelques gestes de soutiens n'étaient rien face à la haine de tous les autres.
Personne ne voulait d'un chien de Voldemort ici et les étudiants de Poudlard lui l'avaient bien fait comprendre. Etonnement, les seuls qui ne semblaient pas tenir compte de sa Marque des Ténèbres, c'était le trio d'or. Weasley continuait de lui chercher des noises entre deux cours, Granger le fixaient toujours avec son air réprobateur lorsqu'il bousculait Potter qui, lui, continuait de répondre à ses piques, comme d'habitude. Les trois Gryffondors ne l'aimaient pas, mais ça n'avait rien à voir avec la colère des autres étudiants. C'était juste la norme. Pour eux, tout semblait être comme avant.
Quelques semaines après la rentrée, Zabini et lui avaient retrouvé la petite plaque funéraire de Pansy recouverte de graffitis, de mots haineux, les fleurs piétinées et la pierre avait été brisée par un sortilège d'Expulsion. L'italien avait craqué, s'enfuissant en larmes alors que Draco tentait de le rattraper pour le soutenir. Le soir même, il était revenu pour nettoyer la plaque commémorative. Le blond fut surpris de la retrouver intacte, deux nouveaux bouquets encadrant la pierre qui était désormais protégée par quelques sortilèges.
Draco n'était pas bête. Il avait remarqué que le vase invoqué ce soir par Potter était le même que les deux placés par l'inconnu ayant réparé la stèle. Alors, Draco s'autorisa à craquer. Il pleura, longtemps. Malefoy ne savait même pas pourquoi exactement, mais tout ce dont il avait besoin à cet instant, c'était d'évacuer. Parce que sa vie était un enfer, il ne pourrait plus jamais voir son père, sa mère n'était plus que l'ombre d'elle-même, il ne se passait pas un jour sans qu'il ne se prenne un sortilège dans le dos et plus que tout, il n'était même pas autorisé à faire le deuil de sa meilleure amie en paix.
Mais Potter avait réparé son mémorial. Potter lui avait donné un vase. Potter l'autorisait à se recueillir. Le symbole de la lumière, celui qui avait plus de raisons que quiconque de le haïr, était la seule personne qui semblait le soutenir et le comprendre dans ce fichu château et cela brisait Draco.
Après ça, les deux némésis s'étaient retrouvés en soir au sommet de la tour d'Astronomie. Harry était assis sur le parapet de pierre, les pieds pendant dans le vide alors qu'il observait l'étoile de Sirius dans le ciel dégagé. Draco avait voulu faire demi-tour en le voyant. Mais Potter avait tourné la tête en l'entendant monter la dernière marche et avait tapoté distraitement le muret à ses côtés.
Alors, Draco avait dégluti et s'était assis à côté de lui. Suffisamment loin pour ne pas empiéter sur son espace personnel, mais assez proche pour ne pas avoir à hausser la voix. Et alors, il lui parla de Pansy. Il lui raconta qu'ils se connaissaient depuis qu'ils étaient bébés, leurs mères étant de bonnes amies. Draco parla de la passion de la Serpentard pour le Quidditch, qu'elle avait toujours voulu entrer dans l'équipe en tant que batteuse mais qu'elle n'y était jamais parvenue. Il raconta leurs longues discussions sur le canapé de leur salle commune alors que tout le monde dormait déjà.
Puis, la voix de Draco se brisa lorsqu'il vint à expliquer que le père de Pansy l'avait forcée à prendre la marque, qu'elle avait essayé de se lacérer le bras avec un couteau pour l'effacer. Il expliqua que lors de la bataille finale, elle s'était enfermée avec Daphné et Astoria Greengrass dans les toilettes pour échapper à la bataille, mais qu'un Auror les avait trouvés. Les deux autres filles avaient eu le temps de fuir, pas Pansy. Un sort de lacération l'avait touchée en plein dos, la faisant chuter au sol. La voix secouée de sanglot, Draco parla de la façon dont l'Auror avait fui en réalisant avoir tué une étudiante alors que Daphné tentait de réanimer son amie. Mais c'était trop tard, Pansy était morte en se vidant de son sang en une vitesse effroyable.
Potter ne parla pas, Draco ne sut même pas s'il l'avait réellement écouté. Mais il s'en fichait, il avait juste besoin de vider son sac. A ce stade, peu lui importait qui était en face de lui, tant qu'il y avait quelqu'un pour l'écouter.
Quelques nuits plus tard, Draco retourna à la tour et il se surprit à se sentir déçu en y trouvant pas Potter. Mais moins de dix minutes plus tard, le Gryffondor s'était installé à ses côtés, se contentant de fixer le ciel. Draco parla de son père cette nuit-là. La suivante, il partagea ses inquiétudes face à la profonde dépression dans laquelle sa mère s'enfonçait de plus en plus. Le quatrième soir, il avoua du bout des lèvres qu'il cauchemardait beaucoup à propos des tortures qui avaient eu lieu sous son toit, alors que le Seigneur des Ténèbres vivait dans son manoir.
A chaque fois que Draco se sentait submergé par ses émotions, il venait s'asseoir sur ce muret. Potter ne manqua jamais à l'appel, le rejoignant toujours dans les minutes qui suivaient. Il ignorait comment le Gryffondor faisait pour savoir qu'il était là, mais Draco n'avait pas besoin de savoir. C'était le cadet de ses soucis.
Harry écoutait toujours attentivement le blond. Découvrant des facettes de sa némésis qu'il n'avait jamais vu. Il savait que Draco n'avait rien d'un guerrier, contrairement à beaucoup de Mangemorts. Mais jamais, Harry n'aurait pu imaginer toute la souffrance qu'il gardait au fond de son cœur, ne s'autorisant à craquer devant personne. Personne sauf lui.
Harry avait l'impression de profiter de Malefoy. Il se sentait horrible à apprécier les moments privilégiés que lui offrait le blond, au sommet de cette tour. Mais il essayait de se rassurer en se répétant que ça faisait du bien à Draco, que s'il cessait de le rejoindre, alors Malefoy serait seul, encore.
Puis une nuit, Draco parla de son parrain. Pour la première fois, Harry détourna son regard du ciel pour l'observer. A la fin de son récit, Potter quitta son muret et se planta devant le blond. Dans un geste qui les surprit autant l'un que l'autre, il le prit dans ses bras, le serrant contre son torse.
Harry pouvait écouter le passé de Draco sans sourciller habituellement, parce qu'il n'aimait pas son père, sa mère, bien que l'ayant sauvé dans la Forêt Interdite, était une inconnue et il avait passé sept ans à détester Pansy Parkinson. Mais Rogue, c'était différent. Harry se sentait affreusement coupable pour le décès tragique de l'homme. Parce que s'il n'avait pas été le fils de Lily, Rogue n'aurait jamais trahit le Voldemort. L'homme n'aurait pas eu à tuer Dumbledore sous l'ordre de ce dernier et à le protéger pendant des années. Mais plus que tout, si Harry avait réussi à le sauver plutôt que de le laisser mourir dans ses bras, Draco n'aurait pas à pleurer la perte de son parrain.
Après cette nuit, Harry posait parfois sa main sur celle de Draco lorsqu'il commençait à pleurer. D'autre fois, il laissait le blond s'adosser à son épaule. Un soir, ce fut Malefoy lui-même qui se jeta dans ses bras alors qu'il avait apprit le matin même que sa mère s'était donnée la mort en avalant un mélange de plusieurs potions dangereuses. Narcissa n'avait pas réussi à surmonter le décès de sa sœur et l'emprisonnement à vie de son mari.
Cette fois-ci, Draco ne parla pas. Les nuits suivantes non plus. Il ne voulait pas parler de sa mère, parce qu'il était évident que son décès l'avait détruit encore plus qu'il ne l'était déjà. Il n'y avait rien à dire, Harry savait déjà tout. Draco avait simplement besoin d'avoir quelqu'un à ses côtés, parce qu'il ne voulait pas baisser les bras. Il ne voulait pas finir comme sa mère.
Quelques jours plus tard, Harry se plaça entre Draco et trois Serdaigle qui l'avaient acculé contre un mur. Habituellement, Malefoy savait se défendre seul. Mais il était évident qu'en ce moment, il n'était pas dans son état normal. Il suffisait de voir son regard morne qui se perdait dans le vide, alors que sa baguette était au sol, les autres garçons l'insultant.
Harry avait lancé un Expelliarmus à celui qui semblait être le chef du petit groupe, l'envoyant valser trois mètres plus loin sous la puissance du sort. Potter n'était pas particulièrement grand, ni très baraqué. Pourtant à cet instant, il était terrifiant, ses lunettes lançant des éclairs et la démarche raide. Même Draco eut un geste de recul, se plaquant un peu plus contre son mur alors que le Gryffondor passait à côté de lui. À cet instant, cela ne faisait aucun doute, c'était bien cet homme-là qui avait vaincu Voldemort.
Les trois Serdaigle prirent la fuite lorsque Harry leva une nouvelle fois sa baguette. Ils disparurent en un instant à l'autre bout du couloir, les laissant seuls, face à face. Potter ramassa la baguette de Malefoy avant d'attraper sa main. Il le traîna dans les couloirs du château, n'accordant aucune attention au regard surpris ses élèves qu'ils croisèrent sur leur chemin. C'était inattendu de voir ces deux sorciers ensembles si ce n'était pas pour se battre verbalement.
Draco se laissa faire, complètement perdu. C'était la première fois que Potter l'approchait en journée. Depuis qu'ils s'étaient rapprochés, le Gryffondor se contentait de l'ignorer la plupart du temps. Parfois, lorsque le blond avait besoin de se défouler, il rentrait dans son jeu et participait volontaire à ses joutes verbales. Dans ses moments, Draco aimait voir l'amusement pétiller dans le regard du brun. C'était incroyablement plaisant de connaître un secret sur le Survivant que même ses meilleurs amis ignoraient. Draco était le secret de Potter et il préférait ne pas se questionner pour l'instant sur la raison qui le rendait si fier de ce fait.
Malefoy ne revint à l'instant présent qu'au moment où la poigne de Potter lâcha sa main. Il n'eut même pas le temps de réaliser qu'il était assis sur un lit de l'infirmerie que déjà, Pomfresh le faisait se déshabiller pour ausculter la vilaine coupure qui entaillait sa clavicule. Draco jeta un coup d'œil par-dessus l'épaule de l'infirmière, mais Potter avait disparu. Il fronça des sourcils, ne comprenant rien au comportement du Survivant.
Par la suite, il ne fut pas rare de voir Potter s'interposer entre Draco et d'autres étudiants. Un jour, il prit même la défense de Blaise Zabini face à Ron alors que ce dernier allait définitivement trop loin dans ses propos. Le roux avait rougi en réalisant la gravité de ce qu'il venait de dire. À la surprise de tous, Weasley s'excusa immédiatement « Désolé, personne ne mérite d'aller à Azkaban. Personne ne mérite les Détraqueurs. » avait-il dit avant de taper amicalement sur l'épaule de Blaise avant de suivre son meilleur ami vers le réfectoire.
Blaise, Daphné et Draco, qui étaient ensemble à ce moment-là, se fixèrent d'un air éberlué. Ils en étaient certains maintenant, Weasley et Potter ne se disputaient avec eux que par habitude, pas parce qu'ils les haïssaient.
Puis, un jour, Hermione Granger s'installa face à Draco à la bibliothèque. « Harry dit que tu meilleur que moi en runes, pourrais-tu m'expliquer ce passage du manuel ? » s'était-elle expliquée rapidement en poussant son livre de cours vers Malefoy. Le blond jeta un regard surpris à Blaise avant de répondre à la Née-de-Moldue. Il était si choqué qu'il ne lui était même venu à l'esprit de refuser. Une dizaine de minutes plus tard, Potter s'installa à leurs côtés, se penchant sur son devoir de DCFM sans dire un mot. Comme si le fait d'être assis ici, face à deux anciens Mangemorts, étaient la chose la plus logique et naturelle au monde.
Petit à petit, il ne fut plus rare de voir Harry et Draco discuter dans un couloir ou s'asseoir ensemble en cours. Le brun aidait le blond pour la DCFM et inversement pour les potions. Et un jour, Draco s'assit sur le muret de la tour d'Astronomie en pleine journée.
Il savait que Harry avait classe de botanique à cette heure-là. Pourtant, le Survivant le rejoignit plus rapidement encore que lors de leurs rencontres nocturnes. Son visage affolé fit comprendre à Draco qu'il s'inquiétait réellement pour lui. Potter devait s'imaginer le pire pour que Malefoy n'attende même pas la nuit pour rejoindre leur cachette.
« Je voulais juste prendre l'air. » ricana Draco et Harry devint rouge cramoisi. « Si déjà tu es là, tu veux bien me tenir compagnie ? »
Potter hocha vivement de la tête et pour la première fois, il n'y eut pas de monologue de Draco sur ses malheurs. Ils discutèrent de Quidditch, des cours, des examens à venir, de leurs avenirs professionnels. Draco se surprit à penser que c'était la première fois que Potter lui parlait ici. Habituellement, il s'asseyait en silence, n'ouvrant la bouche que pour lui souffler un « bonne nuit » lorsque le blond décidait de rejoindre son dortoir. Malefoy se surpris à aimer discuter ainsi avec Potter, autrement qu'entre deux cours ou au milieu de la bibliothèque à côté de leurs amis.
« Moi non plus, je n'aime pas les filles. » lâcha une nuit Draco, alors que les deux garçons étaient assis en silence depuis plus d'une heure, observant simplement le ciel étoilé.
Draco avait pensé à la nuit qui avait engendré tous ces changements, lorsqu'il était tombé nez à nez avec Potter dans les toilettes des filles du deuxième étage. Potter lui avait sortit ça de nul part et le blond ne savait même pas si c'était vrai. Peut-être que le Survivant avait dit ça pour lui rabattre son caquet. Mais il savait que Potter connaissait suffisamment de chose sur lui désormais pour ne pas se détourner maintenant.
Pourtant, il craignait de lire du dégoût ou le rejet sur le visage du garçon qu'il considérait désormais comme son ami le plus proche. Alors Draco ne quitta pas des yeux le ciel.
« Pansy m'a surpris une fois en train d'embrasser un gars. Elle l'a dit à sa mère, parce qu'elles se disaient tout. » sourit-il nostalgiquement. « Sa mère l'a dit à la mienne, qui l'a dit à mon père. Il… Il pensait que c'était une tare. Il a dit qu'on trouverait quelque chose pour me soigner, que je devais fournir une descendance au Malefoy. Il m'a dit que … que… »
Mais Draco ne put jamais finir sa phrase, la gorge nouée. Des larmes silencieuses coulant sur ses joues. Il n'avait pas remarqué que Harry n'était plus assis à côté de lui et fut surpris lorsque qu'il l'attrapa par les épaules pour le faire se tourner vers lui. Lorsqu'ils furent face à face, Harry attrapa doucement son visage entre ses paumes, l'attirant à lui pour poser ses lèvres sur les siennes.
Ce fut un déclic pour Draco qui s'accrocha à l'uniforme du brun comme si sa vie en dépendait. Les mains de Harry glissèrent dans sa nuque, remontant dans ses cheveux avant de redescendre, encore et encore alors qu'ils s'embrassaient passionnément. Tout devint clair dans l'esprit du blond. Il était amoureux de Potter.
Les mois défilèrent, Harry et Draco se rapprochant de plus en plus sans que personne ne le sache. Ils s'étaient mis d'accord, personne ne devait le savoir. Malefoy refusait de se faire accuser, en plus de Mangemorisme, de détourner St-Potter du droit chemin. Harry, quant à lui, était déjà suffisamment épié par l'ensemble de l'école, il ne voulait pas rajouter en plus de cela des ragots sur son homosexualité. La situation leur convenait.
Draco aimait la façon dont Harry le regardait, comme s'il était la huitième merveille du monde. Il aimait sa façon de le tenir contre lui, lorsqu'il faisait des cauchemars. Il aimait entendre sa voix rauque lui chuchoter des paroles rassurantes à l'oreille. Il aimait la façon dont il abandonnait tout ce qu'il faisait dès qu'il lui demandait un peu d'attention. Il aimait se sentir protégé et choyé entre les bras d'Harry. Il aimait la façon dont il lui faisait oublier tous ses ennuis lors de leurs étreintes amoureuses. Draco aimait Harry et il savait que plus jamais il ne pourrait vivre sans le savoir à ses côtés.
Pourtant, Draco se retrouva à détester le caractère borné de son compagnon et sa peur du regard des autres. Parce qu'un jour, leur relation secrète ne lui suffit plus et Harry ne s'était jamais montré aussi fermé que lorsque Draco lui proposa de parler à leurs amis de leur relation, dans un premier temps. Et alors Draco eut peur, peur que Potter ne l'aimait peut-être pas autant que lui l'aimait. Pourquoi est-ce que ça ne faisait pas souffrir Harry autant que lui, de ne pas pouvoir lui tenir la main en public, de l'embrasser quand il le souhaitait ou de pouvoir dire au monde entier que son compagnon était pris et que oui mesdemoiselles en chaleur, il va falloir un jour arrêter de le draguer. Drago ne comprenait pas.
« Non, je t'ai déjà dit qu'on n'en parlera pas aux autres.
- Mais putain Harry, tu imagines vraiment qu'on pourra leur cacher pour toujours ? » s'énerva Draco.
Potter grimaça, ce n'était pas bon signe lorsque son amant commençait à jurer, lui qui était toujours si poli. Mais Draco se méprit sur la raison de cette grimace, pensant que Harry n'imaginait pas sa vie à ses côtés, qu'il était dégouté à l'idée de poursuivre cette relation après Poudlard.
« Je pensais que tu étais sérieux à propos de tout ça, de nous deux. » la voix de Draco flancha, brisant le cœur de Harry.
« Bien sûr que je suis sérieux. Mais tu ne te rends pas compte de notre situation. On va vivre l'enfer parce que tout le monde va forcément nous juger. Je suis le Survivant et personne n'acceptera que je ne sois pas normal. J'ai vécu toute ma vie en subissant le regard des autres, de l'avis des journalistes. Ils retournent tout le temps leurs vestes et je sais très bien qu'ils me haïront pour ça. Ils nous haïront. Je ne veux pas que tu subisses ça ! » s'était exclamé Harry, à bout de nerfs.
« Et tu crois que je ne le sais pas ? Je suis un Mangemort, mon nom a été traîné dans la boue et si tu ne l'as pas déjà remarqué, tout le monde me hait déjà. Je … Je t'aime putain et ça me détruit de devoir rester caché. » s'époumona Draco.
Harry le fixa longtemps, d'un air éberlué et la bouche entrouverte. C'était la première fois que son amant lui disait l'aimer et Harry n'était pas certain d'avoir voulu l'entendre dans cette situation. Ils ne s'étaient jamais dit ce genre de choses, vivant leur relation sans réellement mettre de termes dessus. Ils n'en avaient pas besoin. Ou plutôt, ils avaient pensé jusqu'à aujourd'hui qu'ils n'en avaient pas besoin.
Draco eut un geste de recul face au manque de réaction de Potter, réalisant enfin ce qu'il venait d'avouer sous le coup de la colère. Harry ne lui répondait pas. Est-ce que finalement, tout cela n'avait été qu'un jeu pour lui ?
« Tu as juste honte de moi. » souffla le blond, brisant le silence. « Tu ne veux pas perdre ta réputation. Je sais que je ne suis plus grand-chose depuis la guerre, mais je pensais qu'au moins… je ne sais pas. Je ne sais pas ce que je m'imaginais. J'aurai dû savoir que tu ne m'aimerais jamais. »
Draco tourna les talons, le visage en larmes. Il n'avait pas osé imaginer que Harry l'aimait réellement pendant des semaines, voir des mois. Mais après six mois de relation, il avait imaginé que peut-être, il y avait une chance. Mais visiblement, il s'était trompé.
Il entendit Harry crier son nom derrière lui, mais Draco ne ralentit pas, au contraire. Il entendait les pas de Potter se rapprocher de lui, mais ils étaient dans les cachots et il connaissait mieux les couloirs que lui ici. Drago accéléra sa course, ne souhaitant qu'une seule chose, rejoindre son dortoir. Lorsqu'il passa la porte de sa salle commune, Harry venait d'apparaître au bout du couloir. Mais c'était trop tard, Draco était hors de portée.
La semaine qui suivit, le blond passa ses journées à l'éviter, s'asseyant le plus loin possible de lui en classe et rejoignant immédiatement son dortoir dès que la sonnerie retentissait.
C'est ainsi que Harry se retrouvait en ce matin de match de Quidditch à essayer de capter le regard de son compagnon, en vain. Il avait merdé, il le savait. Mais il savait aussi comment se rattraper.
Lorsque tous les joueurs furent alignés sur le terrain, Harry s'approcha de son meilleur ami. Il lui fit signe de se baisser un peu pour pouvoir lui chuchoter quelques mots à l'oreille sans que les autres ne les entendent. Un peu plus loin, Ginny, qui avait repris son poste de capitaine, lui criait de rejoindre son poste.
« Je voulais juste te le dire avant que les autres ne soient au courant. Je sors avec Malefoy. »
Harry n'attendit pas de réponse avant d'obéir à sa capitaine. Ron le fixait comme s'il venait de lui pousser une deuxième tête. Il ne semblait pas dégouté ou en colère, Ron avait juste l'air terriblement surpris. Bien, cette réaction lui donnait un peu de courage et réussit même à lui redonner le sourire.
Bibine donna un coup de sifflet, Ron eut un petit temps de retard, ses camarades étaient déjà haut dans le ciel lorsqu'il se souvint qu'il devait enfourcher son balai. Harry s'envola au-dessus du reste de l'équipe, balayant distraitement du regard le ciel pour trouver le vif. Pourtant, à cet instant il n'en avait rien à faire de la petite balle dorée.
Discrètement, il s'approcha de l'attrapeur des Serpentards et lorsque Draco effectua un demi-tour pour surveiller une autre zone, il se retrouva nez-à-nez avec le Gryffondor. Harry lui offrit un sourire triomphant en attrapant le manche de son balai pour être sûr qu'il ne s'enfuisse pas.
« Lâche-moi, Potter. » gronda Draco.
« Non, je ne te lâcherai pas. Jamais. » le blond sembla se calmer un peu, comprenant le double sens de cette promesse. « Je suis désolé, je n'aurais pas dû agir comme je l'ai fait.
- Ça c'est certain. »
Harry retint une grimace, il allait devoir donner le paquet pour se faire pardonner.
« Je me suis mal exprimé, la dernière fois. J'ai parlé de moi, mais ce n'était pas pour me plaindre ou pour te dire que j'avais peur de ce qu'on pense de moi. Je voulais être certain que toi, tu saches dans quoi tu t'embarques. » Draco semblait près à le couper, mais Harry ne lui en laissa pas le temps. « Je sais que tu es fort Draco, plus que n'importe qui. Mais quand je suis allé au bal de Noël avec Parvati en quatrième année, elle a subi beaucoup de harcèlement, alors qu'on y est allé en simples amis. Pas mal de filles et même des garçons qui ne la trouvaient pas assez bien pour moi s'en sont pris à elle. Elle a même dû aller à l'infirmerie deux ou trois fois et ça ne s'est calmé que lorsque McGonagall est intervenu pour punir ses harceleurs. Mais même encore maintenant, les gens ne se souviennent pas d'elle pour son talent en métamorphose ou son humour vraiment tordant. Quand ils parlent d'elle, c'est pour dire qu'elle a eu la chance d'aller au bal avec le Survivant.
Je veux que tu réalises que si on officialise, tu vas te traîner ma réputation pendant longtemps, peut-être même des années. La situation s'est calmée, depuis que tu es mon ami et aussi celui de Ron et Hermione. Est-ce que tu es prêt à revenir des mois en arrière ? Je ne veux pas te revoir aussi détruit qu'à la fin de la guerre. Je ne veux pas te rendre malheureux. Je t'aime aussi Draco, je ne veux pas que tu en doutes. Je m'inquiète pour toi, parce que moi, ça fait longtemps que je n'en ai plus rien à foutre de ma réputation. »
Draco eut le souffle coupé, il n'espérait même plus que Harry lui retourne ses sentiments.
« Ce n'est pas l'heure du thé ! » signala Luna Lovegood dans le haut-parleur, elle était la commentatrice de ce match. « Hé messieurs les attrapeurs, vous devez chercher le vif d'or ! »
Mais ni Draco, ni Harry ne fit attention à ses propos ou à l'attention du public se portant sur eux. Ils étaient dans leur bulle.
« Tu n'es pas obligé de te forcer à me le dire parce que moi, je me suis déclaré. Je veux que ça soit sincère. »
Harry raffermit sa prise sur le manche du balai de son amant, le rapprochant en peu plus de lui pour être certain de croiser le regard de Draco.
« Ce ne sont pas des paroles en l'air. Je t'aime Draco depuis tellement longtemps. »
La voix de Harry était suppliante, il voulait à tout pris que le blond le crois.
« Depuis quand ? » osa demander Malefoy, succombant à sa curiosité.
« Depuis notre quatrième année, peut-être même avant. Mais il y a eu Voldemort, tu es devenu un Mangemort et je n'imaginais même pas que tu puisses être gay. Je me suis juste résolu à abandonner. Mais quand tu as commencé à t'ouvrir à moi, tout m'est juste revenu en pleine face. J'étais tellement heureux que tu me parles et en même temps, je me sentais horrible de profiter de ta peine pour essayer de me rapprocher de toi. J'étais prêt à n'être qu'un ami, à simplement t'aimer de loin tant que je pouvais te soulager un peu de toute ta tristesse et ta colère. Mais quand je t'ai embrassé et que tu ne m'as pas repoussé et j'étais tellement heureux. Je t'aime à la folie Draco Malefoy et maintenant que je t'ai, je ne te lâcherai plus. »
Le ton de Harry était terriblement sérieux et le Serpentard ne put s'empêcher de rougir jusqu'à la pointe de ses oreilles. Son père l'avait aimé, sa mère aussi, mais ce n'était pas quelque chose qui se disait dans les familles de Sang-Purs. On pouvait le montrer, mais jamais on ne mettait de mots dessus.
Il avait dit à Harry le premier « Je t'aime » de sa vie et il était fou de joie en réalisant que Potter était la première personne à le lui dire. C'était tellement plaisant à entendre, jamais Draco ne pourrait s'en lasser. Et ce regard, Harry le couvait de tant de douceur et d'affection, Draco se sentait chéri comme jamais il ne l'avait été. Potter ne réservait ce regard qu'à lui, parfois, à Ronald ou Hermione, mais jamais avec une telle intensité.
« Je suis sûr de moi Harry. Je ne veux plus me cacher, je veux pouvoir profiter de notre relation n'importe quand et n'importe où. Je ne veux plus avoir peur à l'idée de nous faire surprendre par nos amis. Je veux que tout le monde sache que tu es à moi.
- N'importe où et n'importe quand ? » releva Harry, un sourire lubrique au coin des lèvres qui ne dit rien qui vaille à Draco.
Harry tira d'un coup sec sur son balai, l'attirant à lui. Le Gryffondor lâcha le manche pour enrouler sa main entour de sa nuque et l'embrassa avec passion devant toute l'école.
« Le vif est juste derrière toi. » s'exclama Harry en relâchant sa prise et filant à toute vitesse pour le dépasser.
Le temps que Draco retrouve ses esprits, il était déjà trop tard. Harry était vingt mètres devant lui et moins d'une minute plus tard, le vif était entre ses doigts. Malefoy n'avait pas pu rattraper la distance. Pourtant, un sourire éblouissant comme on ne lui en avait jamais vu barrait son visage. Il était fou amoureux de Potter, il était désormais persuadé que c'était réciproque et que jamais ils ne pourront se passer l'un de l'autre.
