- Il avait l'air contrarié ? se renseigna Ron, sourcils froncés.

- Non, je ne crois pas, marmonna Harry, mal à l'aise. Il a souri.

- Alors qu'est-ce qui te fait peur ?

Harry grimaça avant d'aviser la porte de la chambre. Ron et lui étaient seuls, raison pour laquelle Harry s'était permis de parler de ce détail.

- Si j'avais fait quelque chose du genre avec mon... avec le professeur Rogue..., commença-t-il sans oser terminer sa phrase.

Ron tiqua sans chercher à être discret.

- Quel enfoiré.

Harry renvoya à son meilleur ami un regard horrifié.

- Pardon, bredouilla Ron.

- Ce n'est rien, chuchota Harry en frottant machinalement son bras.

Ron ne pouvait pas le savoir, mais la dernière fois que le mot "enfoiré" avait été associé à Severus Rogue, cela avait été dans l'un des courriers qu'Harry avait rédigé en secret lors de ses débuts de disciple. Et il se souvenait avec précision de la morsure de la cravache une fois ces lettres découvertes.

- C'est le professeur Lupin, rappela Ronald sur le ton de l'évidence. Et dans les faits il n'était même pas ton Maître quand on a écouté. T'en fais pas, d'accord ? Tu n'as rien à craindre.

Harry se força à sourire. Il avait hâte de discuter avec le professeur Lupin, afin de définir les choses entre eux.

À l'heure du déjeuner, lorsqu'Harry se rendit à la cuisine, il aperçut tout de suite son nouveau Maître. Et il n'avait aucune idée de la manière dont il devait se comporter. Remus discutait avec Tonks et n'accorda qu'un coup d'œil à son disciple. Harry se positionna derrière sa chaise, mais demeura debout, comme il l'aurait fait avec son ancien Maître. Hermione lui fit signe de s'asseoir et Harry hocha la tête sans bouger ni parler. Son ancien Maître ne lui avait jamais permis de parler lors des repas. Au moment où Remus s'avança vers la table, une éternité plus tard. Il sembla constater qu'Harry était debout à attendre. Il lui fit signe de prendre place alors que lui même n'était pas assis, ce qui ne parut pas vraiment naturel au jeune sorcier. Toutefois, il pris place, l'estomac tellement noué qu'il n'était pas certain de parvenir à avaler quoi que ce fut.

Le déjeuner fut plutôt calme, du moins en apparence. Dans la poitrine du disciple, les choses étaient beaucoup plus agitées. Ses amis lui parlaient et lui était partagé entre le silence qu'il s'imaginait devoir tenir et l'impossibilité pour lui de formuler à haute voix à ses amis un : "désolé, je ne suis pas certain d'avoir la permission de parler à table." Il en rougissait bêtement d'avance. Alors il répondait seulement lorsqu'il était sollicité et dans un murmure bref, discret. Au point que ses amis finirent par le laisser tranquille vers le milieu du déjeuner.

La fin du repas prise en silence, sans se soucier de ce qui se racontait à table, le regard uniquement tourné vers son déjeuner, rappela à Harry nombre de souvenirs.

- Qu'est-ce que tu fais exactement ?

Harry releva les yeux sur un Severus Rogue qui lui renvoyait une expression étrange. Un peu comme s'il venait de voir à sa table une énorme araignée répugnante.

Surpris, Harry se redressa un peu mieux sur sa chaise avant de hausser les épaules.

- Je m'installe pour le déjeuner ? suggéra-t-il en se retenant à peine de lever les yeux au ciel.

Rogue replaça sèchement la chaise dont sa main n'avait pas quitté le dossier depuis une bonne trentaine de secondes sous la table. Une pointe d'angoisse titilla la poitrine du jeune sorcier, qui avait déjà pris sa première gifle alors qu'il n'était disciple que depuis quelques heures.

Lorsque le Maître s'approcha, Harry se releva par réflexe. Rogue le saisit rudement par le bras, arrachant un gémissement à son élève.

- La prochaine fois que tu me parles en me manquant de respect, je te ferai regretter d'être venu au monde, c'est clair ? tempêta-t-il en raffermissant sa poigne.

Harry serra les dents avant de réaliser que le sorcier accentuait encore la pression. Il comprit subitement ce qui était attendu de sa part.

- Oui, d'accord, expira-t-il sous la douleur. Maître. Je suis désolé, Maître. Je vais m'améliorer.

Rogue le relâcha si sèchement qu'Harry se rattrapa les deux mains à plat sur la table. Sans masquer son agacement, Rogue repoussa rudement la chaise de son disciple sous la table avant de reprendre ce dernier par le bras et de le pousser à se tenir derrière.

- Tu ne t'assois que quand je t'y invite, espèce de petit mal élevé.

Le professeur Rogue retourna vers sa propre place et Harry profita qu'il fut dos à lui pour lui lancer un regard noir.

On a pas idée d'être aussi con, songea Harry en frottant son bras endolori.

Le sorcier s'installa, pris sa serviette d'un geste sec, et entama son repas sous le regard effaré de son disciple. Entre deux bouchées, Rogue braqua son attention sur Harry.

- Si tu ne veux pas m'énerver, je te conseille vivement de te tenir mieux que ça et de regarder ton assiette vide.

Sans masquer son soupir, Harry se redressa un peu et plaça ses mains dans son dos avant de laisser son regard courir sur la table en bois. Severus termina sa bouchée, posa sa serviette et se leva. Harry avisa l'homme du coin de l'œil, un peu nerveux. Il avait bien compris que son désormais Maître prenait son rôle extrêmement au sérieux. Sans surprise, Rogue s'approcha, puis, il saisit son disciple par les cheveux, à l'arrière de la tête et tira sèchement vers lui. Harry résista et chercha à se débattre. Il n'était pas question qu'il se laisse traiter comme un chien si facilement. Rogue raffermit sa poigne et finit par pousser Harry à plat ventre contre la table afin de l'immobiliser.

- Lâchez-moi ! hurla Harry en jouant au maximum des épaules.

La poigne du professeur Rogue s'intensifia alors que l'une de ses mains maintenait la tête de son disciple contre la table et l'autre appuyait sur le bas de son dos pour le contraindre à l'immobilité.

- Lâchez-moi ! répéta Harry. Vous n'avez pas le droit !

- Oh que si j'en ai le droit, vociféra Rogue. Tu es mon serviteur.

- Non, se débâtit Harry. Vous êtes un menteur !

La pression qu'exerçait Rogue sur son disciple se relâcha subtilement et Harry en profita pour essayer de se relever, mais Rogue réagit dans la seconde en le plaquant rudement sur la table. Le disciple gémit lorsque sa tête cogna contre le bois.

- Un menteur pour quoi ? clama Rogue.

- Vous aviez dit que si je devenais disciple, vous alliez m'apprendre la magie et à devenir un Animagus. Je vois pas le rapport avec tout ça.

- Tu t'imagines que je vais juste t'apprendre tout ce dont tu as besoin et te renvoyer dans ton temps faire ce qui te chante de MES connaissances? Je suis ton Maître et je vais m'employer à t'éduquer comme il se doit. Et cela commence ici, dans le respect envers le seul sorcier qui aura le courage de se farcir un impertinent comme toi. Et je te l'ai dit : tu dois m'appeler "Maître" !

Harry se débattit malgré tout, mais la force du sorcier était supérieure à la sienne. Il finit par cesser de gigoter.

- Alors maintenant répètes après moi : Maitre, je suis votre serviteur et je vous respecte.

- Allez vous faire voir, marmonna Harry en s'agitant à nouveau, mais sans succès.

Soudain, sans qu'Harry n'imagine une seule seconde qu'une chose pareille aurait pu lui arriver, Rogue abattit sa main sur ses fesses. Une fois, deux fois, trois fois. Les joues du disciple s'empourprèrent comme jamais lorsqu'il comprit qu'il était en train de recevoir des fessées.

Une série de claques tomba et il s'immobilisa pour de bon, non pas endolori, mais mortifié. Lorsque Rogue s'arrêta, il tira les cheveux de son disciple en arrière afin d'attirer son attention.

- Comporte toi comme un bébé et je te traiterai comme tel, asséna-t-il froidement. Est-ce que je dois baisser ton pantalon et ton sous-vêtements pour terminer cette punition ou est-ce que tu as compris ?

Tétanisé, Harry sentit une panique peu commune l'envahir. Jamais il ne s'en remettrait si le sorcier lui faisait quelque chose d'aussi humiliant. Il posa les mains à plat sur la table sans plus chercher à résister et, les larmes aux yeux, il secoua doucement la tête de droite à gauche.

- J'ai rien entendu ! tempêta Rogue en agrippant de sa main libre le haut du pantalon du jeune homme.

- Non, souffla-t-il d'une voix serrée sous l'émotion. Maître, je suis désolé, ne faites pas ça, s'il vous plaît.

- Maintenant que j'ai ton attention, j'attends la suite, ajouta Rogue.

La respiration hachée, Harry mit quelques secondes à comprendre ce que le sorcier attendait de lui. Il ravala ses larmes.

- Je suis votre serviteur, Maître, et je vous respecte.

D'un mouvement sec Rogue lâcha les cheveux de son disciple pour agripper son col et le redresser. Honteux comme jamais, Harry ne releva pas les yeux.

- Maintenant tu te places derrière ta chaise, mains derrière le dos, les yeux baissés et tu attends que je t'invite à t'installer pour manger.

Humilié, Harry obéit sans discuter.

- Harry ? Harry ?

Le susnommé releva un regard troublé vers son meilleur ami.

- Est-ce que ça va ? lui murmura-t-il avec sollicitude. Tu as l'air effrayé.

Chassant ses souvenirs d'un mouvement de tête, Harry plaqua un sourire poli sur son visage avant de chuchoter que tout allait bien.

À la fin du déjeuner, Harry aida comme toujours la maîtresse de maison à débarrasser et ranger la cuisine. Il aimait bien passer ce moment avec Molly qui s'extasiait de sa gentillesse, surtout quand ses enfants étaient à proximité (mais cela ne semblait pas produire l'effet escompté).

- Merci mon chéri, le gratifia-t-elle une fois les corvées terminées.

Elle caressa sa joue et lui sourit. Les enfants Weasley et Hermione étaient à l'étage, sans doute occupés à faire une partie de cartes ou autre, comme souvent après déjeuner. C'était un moment qu'Harry trouvait également agréable, mais il ignorait s'il aurait de nouveau le droit d'en profiter. Son regard tomba sur son Maître, assis à table à discuter avec Tonks et monsieur Weasley tranquillement. Encore une fois, Harry n'avait pas la moindre idée de ce qu'il devait faire ou de la manière dont il devait se comporter. Avait-il droit de quitter la pièce ? Lorsque son ancien Maître était ainsi posé au calme et qu'Harry avait envie de profiter de sa compagnie, il s'agenouillait près de lui. Cela était une habitude qu'il avait pris avec le temps et qu'il appréciait même souvent. Et là, en jetant un regard sur la table, il songea tout de suite qu'il serait mortifié à l'idée de se mettre à genoux aux pieds de Remus Lupin et en présence de tous ces sorciers qu'il connaissait et appréciait. Être disciple devant ses proches allait être abominable comme épreuve, il en prenait subitement la mesure.

- Harry, est-ce que ça va ? s'enquit subitement Lupin. Tu es pâle comme tout.

Surpris, Harry plaça ses mains dans son dos avant de bredouiller :

- Tout va bien, je... Est-ce que je... Voulez-vous que je...

Remus se leva et Harry tressaillit, ce qui ne sembla pas échapper à ceux qui observaient la scène.

- Il faut que l'on discute tous les deux, suis-moi s'il te plaît.

Remus ouvrit ses bras, un en direction d'Harry, l'autre vers la porte de sortie. Le disciple obéit, dans un état un peu second. Son Maître venait-il vraiment de lui dire "s'il te plaît" ?

Le professeur Lupin conduisit Harry au troisième étage, à sa propre chambre. Harry y était monté une fois pour lui faire cadeau du sang de Lyro, mais il découvrit réellement la pièce seulement là, car ce coup-ci, elle était baignée de lumière. La chambre était simple et propre, pas vraiment chaleureuse, mais comparativement à celle de son parrain, Harry la préférait largement. Il y avait un lit et juste à côté un bureau. Lunard s'assit sur le bord du lit.

- Je voulais un endroit calme pour que nous discutions en privé. Cela ne te dérange pas d'être ici ?

Estomaqué, Harry secoua la tête avant de se reprendre.

- Non, Maître, bien sûr.

Gêné, Harry s'approcha et s'agenouilla devant le sorcier, mais à sa grande surprise, Remus se releva et lui pris le bras, d'un geste a priori doux.

- Relève-toi, souffla-t-il avec gentillesse.

Harry obéit, surpris, alors que son Maître tirait la chaise du bureau.

- Assis-toi ici, d'accord ?

Le disciple s'exécuta, aussi perplexe que déstabilisé. Lupin s'assit de nouveau sur son lit.

- Est-ce que j'ai mal agi ? Je..., balbutia Harry, les joues rosies.

Remus lui renvoya un sourire doux.

- Tu n'as pas besoin de faire ça avec moi, Harry, précisa-t-il. Si tu en ressens l'envie, si c'est important pour toi en tant que disciple, tu peux, mais sinon ce n'est vraiment pas nécessaire.

Harry jeta un regard incertain à son Maître.

- Te mettre à genoux devant moi, développa Lupin qui réalisait que son disciple était perdu dans ses propos.

- C'est entendu, Maître, acquiesça Harry à demi mot.

- Dans quelles circonstances te mettais-tu à genoux avec Severus ?

Mal à l'aise, Harry se mordit la lèvre.

- Eh bien...

Il se redressa un peu sur sa chaise, à la recherche des bons mots.

- Si je faisais une bêtise et que je voulais me confesser ou si je voulais demander pardon après une punition aussi.

Lupin hocha de la tête d'un air sérieux.

- Et là tu te sentais avec moi dans l'une de ces situations ?

Harry secoua la tête avant de fixer ses doigts avec exagération.

- Non, Maître.

À sa grande surprise, la main de Remus se glissa sous le menton de son disciple pour lui faire relever la tête.

- Écoute, je sais que ce n'est pas une discussion facile et je te promets que quoi que tu dises, je ne porterai aucun jugement envers ton précédent maître d'une part, et, d'autre part, tout ce que tu diras restera entre nous. D'accord ? L'ordre du phénix me demande des comptes sur tes pouvoirs, tes connaissances et capacités, mais en dehors de cela je n'ai de compte à rendre à personne.

Il lança un regard insistant à Harry qui l'écoutait avec attention.

- J'ai besoin de savoir comment ça se passait avec mon prédécesseur. Que je sache sur quelle base je pars et que l'on rectifie ce qui doit l'être. Tu comprends ?

- Oui, je comprends, Maitre, acquiesça Harry, le

cœur battant.

Il se racla la gorge avant de reprendre.

- Dans des moments hors de nos entraînements, lorsque mon Maitre... lorsque le professeur Rogue...

Harry avisa Lupin afin de voir s'il avait raison de nommer ainsi son ancien Maître. Lunard hocha la tête avec entendement.

- Lorsque le professeur Rogue était installé au calme et que j'avais envie de passer un moment avec lui, pour discuter ou lire la plupart du temps, je me mettais comme ça.

Les joues rosies, il eut du mal à maintenir le regard levé.

- Je vois, lâcha-t-il avec sérieux. J'imagine que ce midi il s'est passé quelque chose aussi. J'ai bien vu que ça n'allait pas. Au début je pensais que tu étais mal à l'aise de notre nouvelle condition, mais je commence à entrevoir les choses différemment.

- Normalement je n'ai pas le droit de parler à table, alors... mais j'étais gêné de le dire aux autres et... je vous demande pardon, je suis désolé, je sais que je ne devrais pas avoir honte, je... Je vous demande pardon.

Les muscles du Survivant se contractèrent, habitué dans ce genre de situation à ressentir une douleur peu de temps après.

- Harry, c'est normal que tu sois mal à l'aise face à tes amis, assura Lupin. Ils n'ont aucune idée, mais alors vraiment aucune idée de ce que tu as l'habitude de vivre au quotidien en tant que disciple. Et je vois que Severus a été traditionaliste à l'extrême.

Il leva brièvement les yeux au ciel en secouant la tête. Harry, surpris, l'observa sans oser formuler un mot.

- Je vais être plus clair, précise Lupin avec douceur. Même si tu étais dans le futur, clairement ton Maître n'a pas été particulièrement moderne dans sa manière de traiter sa relation maitre / disciple avec toi. Il a sans aucun doute eu ses raisons. Comme tu m'as certainement entendu le dire à la réunion de l'Ordre, je pense qu'en ayant connu la version de toi au service du Mal et ayant vécu la fin du monde libre, il ne pouvait être que d'une sévérité hors norme. Il a certainement craint qu'il te donne de grands pouvoirs et que l'histoire se répète derrière.

Harry, qui écoutait avec attention les propos de son Maître, devait bien s'avouer à lui-même qu'il n'avait jamais envisagé les choses sous cet angle. À ses débuts de disciple, il avait juste pensé que Rogue prenait son pied à le soumettre et le torturer. Puis, une fois qu'il eut lâché prise et rendu les armes, il avait seulement accepté, et puis c'était tout.

- Je ne compte absolument pas me comporter de la sorte avec toi, conclut-il sous le regard effaré de son disciple. Alors voilà comment je perçois les choses : je préfère que tu m'appelles "Maître", mais je tolérerais un "monsieur" en présence d'autres sorciers si tu te sens mal à l'aise. J'apprécie que tu t'inclines, idem devant les autres sorciers adultes. C'est une pratique que l'on devrait mettre en place pour tous les jeunes, si tu veux mon avis. Les bonnes manières se perdent depuis longtemps.

Il sourit mais Harry fut incapable de lui renvoyer la pareille. Son estomac était noué à l'extrême.

- Tu n'as pas besoin de t'agenouiller devant moi, comme je te le disais, ni besoin de ma permission pour manger ou t'installer à table. Tant que tu es respectueux et poli, c'est OK pour moi. De la même manière, tu peux parler comme tu veux, à table comme ailleurs, tant que tu ne manques pas de respect aux autres et que tu laisses en premier lieu place à la parole des adultes. Et la mienne, cela va sans dire.

Les deux sorciers se fixèrent quelques secondes et Remus finit par hausser les épaules.

- Tu as l'air perplexe, constata le Maître. Tu es déçu de ce que je te propose ?

Un vent de panique chatouilla les tripes du Survivant.

- Non, Maître, non, bien sûr que non. Je suis désolé, je ne voulais pas paraître... Je... Je vous demande pardon. Je ne voulais pas...

Remus leva une main en signe de silence et Harry y obéit dans la seconde.

- Je t'en prie, ne sois pas si effrayé par moi, le pria-t-il. Je suis ton Maître, j'en conviens, mais j'espère davantage du respect que de la crainte, de la confiance plus que de l'obéissance aveugle.

- Pardonnez-moi, mais... ce n'est pas ce que l'on m'a appris.

- Je sais, murmura-t-il du bout des lèvres. On va prendre le temps de travailler sur tout ça, d'accord ?

- Oui, Maître.

Remus observa son disciple quelques secondes avant de reprendre :

- Sur un plan purement éducatif, je n'ai aucun doute sur la sévérité de mon prédécesseur, mais je tiens à en savoir davantage. Je pense au collier notamment. Utilisait-il couramment la magie pour te punir ? Quel genre de sortilège ?

- Le collier est une exception, avoua Harry. Mon Maître... Je veux dire, le professeur Rogue, n'avait pas d'autre moyen pour me priver de la transformation et des dons de Lyro sur plusieurs heures ou jours. En dehors de ça, il n'a jamais usé de magie sur moi, il disait qu'il ne voulait pas que je la craigne elle, mais seulement son autorité à lui.

- Je comprends le raisonnement, admit Lupin. Il te punissait donc de sa main, je présume ?

Harry se mordit l'intérieur de la joue avant d'acquiescer sans se sentir capable d'en dire davantage.

- Lui est-il arrivé de te gifler par exemple ?

- En guise d'avertissement, oui, murmura Harry.

- Un avertissement avant une punition ?

Harry acquiesça, conscient que le sorcier allait lui en demander davantage. Il tripota un peu plus ses doigts sans oser relever la tête, quand soudain la main de son Maître se posa dessus. Leur regard s'accrocha quelques secondes.

- Avec sa ceinture, confessa Harry dans un souffle.

La main de Lupin se crispa très légèrement avant qu'il ne la retire de celles de son disciple.

- Je vois, murmura-t-il. Ça doit être vraiment très douloureux.

Harry acquiesça, prétendre l'inverse serait un mensonge.

- Où te les donnait-il ces coups ? Sur le dos ? Les jambes ? Les fesses ?

Harry rougit et baissa tout de suite la tête.

- Les fesses, d'accord, conclut Lupin. Avec ou sans pantalon ?

Harry garda les yeux baissés.

- D'accord, je comprends.

- En vérité, c'était les deux, selon sa colère à mon encontre, précisa malgré tout Harry.

- Entendu. Et... est-ce qu'il y avait d'autres types de punitions ? Ou forcément si tu dépassais les bornes tu savais ce qui t'attendait ?

- Eh bien... En fait, la ceinture c'était pour les bêtises... vous savez... quand je faisais quelque chose de mal, que mon Maître était contrarié de mon insolence ou de mon manque de travail. Si je dépassais vraiment les bornes...

Harry rentra brièvement la tête dans les épaules.

- Il avait une cravache.

Le regarde de Lupin s'écarquilla avec démesure quelques secondes avant qu'il ne se reprennne et affiche une expression plus neutre. Toutefois, il garde le silence de longues secondes.

- Sur les fesses aussi ? demanda-t-il d'une voix plus tendue.

Harry acquiesça.

- Il ne te déshabillait tout de même pas ?

- C'est arrivé... une seule fois.

Lupin passa ses doigts sur ses lèvres d'un geste qu'Harry qualifia d'embêté. Sans doute était-il en train de réaliser que son disciple était insupportable finalement et que son prédécesseur avait été obligé d'opérer avec les grands moyens pour en tirer quelque chose.

- Tu as dû être en sang, souffla-t-il, interdit.

- Oui..., je n'ai pas pu marcher pendant deux jours et pas pu m'asseoir pendant une dizaine de jours.

L'ancien professeur de Poudlard inspira à fond en hochant la tête cinq ou six fois de suite. Il paraissait terriblement songeur.

- Autre chose en terme de punition ? finit-il par demander, l'air presque inquiet.

- Eh bien... à quelques reprises, il m'a... il... je...

Terriblement mal à l'aise, Harry montra le plat de sa main que son Maître fixa sans comprendre.

- Il lui est arrivé de me mettre des fessées, lâcha-t-il d'une traite, mortifié.

Le silence que renvoya son Maître lui serra la gorge.

- Souvent ?

- Non, expira Harry. C'est arrivé peut être quatre ou cinq fois... quand je faisais quelque chose qu'il considérait comme un caprice.

Un nouveau silence s'instaura.

- Je suis désolé, Maître.

- Pour quoi tu t'excuses ?

- Vous devez penser que je suis un disciple affreux pour avoir de tels punitions.

- Ce que je pense, surtout, c'est que tu as été...

Il marqua un temps d'arrêt.

- J'ai dit que je n'omettrais aucun jugement envers Severus, alors disons seulement que je suis attristé que tu aies subi des corrections si violentes.

Harry releva une regard réservé vers son Maître, mais porteur d'un espoir que le susnommé semblait avoir saisi à la volée.

- Je ne pense pas avoir besoin d'user de méthodes si sévères avec toi, Harry.

- Pas de cravache ? Osa-t-il demande dans un murmure à peine audible.

- Je n'ai pas ça chez moi, non. Et je ne compte pas en acquérir une si jamais tu te poses la question.

Les yeux d'Harry s'embuèrent sans qu'il ne puisse le masquer. Il détourna rapidement la tête et souffla avant de s'excuser pour sa réaction.

- Je suis certain que nous pouvons très bien avancer dans cette nouvelle relation sans que je sois obligé d'employer de telles méthodes. Je l'espère en tout cas.

Il se pencha en avant, l'air sérieux.

- Jouons cartes sur table, d'accord ? Je ne me serais jamais vu faire ça, devenir ton Maître, j'entends. Mais je ne voulais pas que Severus ait main mise sur toi du peu que j'avais vu depuis ton retour. Et cette conversation ne fait que me conforter dans mon choix. Que tu m'offres une forme de guérison de mon état a énormément pesé dans la balance, car c'était mon plus gros problème. Je savais déjà qu'on allait me refuser ce rôle, car je n'aurais pas pu assurer plusieurs jours par mois. Autant dire que le timing de ton sauvetage aura été parfait et, en dehors de ça, je n'ai pas encore pris vraiment le temps de te remercier et d'exprimer ma gratitude, mais... chaque chose en son temps.

Le sorcier marqua un temps d'arrêt, l'air très sérieux.

- Maintenant que je me suis engagé à être ton Maître, je prends mon rôle vraiment au sérieux. Dès demain, et quotidiennement, nous travaillerons. Je ne veux pas que tu perdes tout ce que tu as appris de ton premier Maître et je suis certain qu'il te reste encore des choses à apprendre. Je te protègerai et je veillerai sur toi. J'envisage de déclarer au ministère notre situation, afin que légalement je sois ton unique tuteur, mais nous verrons cela en temps et en heure également. Il faut d'abord que je réfléchisse à comment te faire revenir dans le monde des sorciers, puisque tu es porté disparu et présumé mort. Et je dois aussi veiller à ton retour à Poudlard.

- Je vais retourner à l'école ? murmura Harry, le cœur battant.

Sa première année de disciple, il avait pensé à son école et combien elle lui manquait tous les jours.

- L'école est obligatoire jusqu'à tes dix-sept ans, donc la question ne se posera pas, précisa le sorcier. Juste, je ne sais pas si tu pourras faire ta rentrée avec tout le monde. Mais promis, dès que j'en saurais plus, que les choses commencerons à s'éclaircir, tu seras informé de suite.

- Bien Maître, opina Harry.

- Donc comme je te disais, je compte bien jouer mon rôle aussi bien que possible, mais je compte sur toi pour être aussi dans les clous, Harry. Surtout si tu es officiellement mon disciple au yeux du monde des sorciers. Obéissant et respect seront la clé de voûte de ton parcours. Tout ce qui m'inquiète, c'est que si tu ne fais pas les choses correctement et que je dois te sanctionner, te priver de Quidditch ou te consigner dans ta chambre ne va te faire ni chaud ni froid comparativement à ce que tu connais.

Harry se mordit la lèvre sans savoir quoi répliquer.

- Soyons donc au clair sur le fait que si tu me pousses à bout, si tu te moques de mon autorité et / ou de ma position de Maître, je ferai en sorte de te recadrer. Et si tu m'y forces, j'en passerai par des corrections bien plus sévères qu'une privation de loisir ou des lignes à copier. J'espère que tu ne nous conduiras pas sur cette voie... Je peux compter sur toi ?

Harry songea un instant à son ancien Maître qui, moins d'une semaine avant de le renvoyer dans son temps, hurlait encore que son disciple était un incorrigible impertinent.

Nerveux, Harry inspira à fond avant d'incliner la tête vers son Maître.

- Je ne vous décevrai pas, Maître.