30) Mind games

"Monsieur McGarrett, installez-vous je vous en prie. Comment allez-vous ? Comment s'est passée la semaine ?"

Steve jugula la vague d'émotions et les images qui envahirent son esprit. Depuis six mois que l'attentat de l'aéroport de New York avait pris des centaines de vies, le militaire n'arrivait pas à reprendre une vie normale. Il était obsédé par ce qu'il avait vécu, par les regards des personnes qu'il avait abattu et par les conséquences que cette tragédie avait eu sur Danny. Steve avait été envoyé chez le médecin par le gouverneur et il avait été mis en arrêt pour une durée indéterminée. Depuis, il voyait un psy toutes les semaines, se noyait dans le sport et tentait de sauver son couple. Si les deux hommes s'aimaient toujours autant, ils s'éloignaient. Danny qui s'acclimatait plutôt bien à la prothèse, ne supportait plus la vue de son corps nu, ni le deuil de son activité professionnelle. Steve, lui, essayait de le soutenir autant qu'il le pouvait, de le pousser à envisager une nouvelle carrière et de lui montrer que son nouveau corps ne changeait rien à son amour ni à son attirance pour lui, mais ils n'avaient plus de contacts physiques plus approfondis que des baisers.

"On m'a permis de lire le rapport d'enquête sur les attentats.

- Qu'est-ce que ça vous a fait de le lire ?"

Steve prit quelques secondes pour repenser à ce qu'il avait appris et fut repris par ses émotions.

"De la colère.

- Qu'est-ce qui vous met en colère ?

- Ce gars, Mike, il a… Il a organisé tout ça par vengeance.

- Comment ça ?

- Il y a quinze ans, après avoir braqué un casino et volé dix millions de dollars, il a été assommé par ses coéquipiers et laissé pour mort dans leur planque en feu. Mike a survécu, il a remonté une équipe et organisé l'attentat que pour pouvoir éliminer ses anciens coéquipiers. Des centaines de vies gâchées pour prendre sa revanche sur douze gars !

- Quand avez-vous lu ce rapport ?

- Hier.

- Qu'avez-vous fait après l'avoir lu ?

- J'ai pris mon sac et je suis parti dans la montagne. J'ai marché pendant des heures et j'ai passé la nuit sur les sommets.

- Est-ce que ça vous a aidé ?

- Je suppose.

- Comment vous sentiez-vous en revenant ?

- En contrôle.

- Comment a réagi votre compagnon à votre absence ?

- Il m'a appelé, il m'a dit qu'il avait lu le rapport lui aussi et il m'a demandé comment j'allais.

- Et ?

- Et il m'a dit espérer que ça me ferait du bien d'être un peu seul et qu'il m'aimait.

- Vous l'avez vu depuis ?

- Non, je suis venu directement ici.

- Vous avez envie de le voir ?

- Oui, mais savoir pourquoi ce malade a fait ça ne fait pas revenir la jambe de Danny.

- Non, mais ça peut vous aider à ne plus culpabiliser. Steve, cet homme a déployé des moyens colossaux pour prendre sa vengeance. Il aurait trouvé quelqu'un pour la satisfaire, si ça n'avait pas été vous, ça aurait été quelqu'un d'autre."

Le militaire médita un instant sur ces paroles. Il savait que sa psy avait raison, mais il n'arrivait pas à accepter qu'il n'était pour rien dans la tragédie qui était arrivée ce jour-là. La discussion s'orienta sur ses réactions en cas de bruits forts ou de gestes brusques et la psy se montra plutôt satisfaite de ce qu'il lui disait, mais elle se montra réticente à l'idée qu'il reprenne sa place dans l'équipe du 5-0. Elle l'invita à réfléchir à une autre activité qu'il pourrait exercer et s'épanouir.

Ce fut la tête perdue dans ses pensées que Steve rentra chez lui, il fut accueillit par une délicieuse odeur de cuisine et la vue de Danny devant l'évier. Celui-ci ne portait pas sa prothèse et avait une béquille coincée sous le bras alors qu'il faisait la vaisselle.

"Si j'avais su que je devais mettre une pizza dans le four pour te faire revenir je l'aurais fait hier soir." déclara le cuisinier d'un ton amer, sans se retourner.

Steve sentit son estomac se serrer alors qu'il se demandait si son homme lui en voulait.

"Je n'aurais pas été de bonne compagnie hier soir, répondit-il, pas sûr de lui.

- Et maintenant ? demanda Danny en se retournant vers lui.

- Ça dépend ." déclara-t-il un demi-sourire aux lèvres.

Il craignait toujours un peu d'être repoussé par son homme, ce qui arrivait assez souvent, mais prit le risque d'essayer, encouragé par les étoiles dans ses yeux. Il s'approcha de lui jusqu'à le toucher, passa un bras autour de sa taille et posa son front sur le sien.

"De quoi ? chuchota Danny en enroulant ses bras autour de son cou

- De toi, est-ce que tu m'en veux ?

- T'es un idiot Steve, mais tu es mon idiot."

L'idiot en question se sentit fondre quand son partenaire leva son visage vers lui et l'embrassa. Il laissa sa main glisser sur les fesses qu'il ne touchait plus assez à son goût et arbora un grand sourire quand ils se séparèrent.

"Je t'aime Steve. C'est pas facile ces derniers temps, mais je ne te remercierai jamais assez d'être toujours à mes côtés, à me supporter.

- Je…

- Chut, dis rien. Et non, je ne t'en veux pas, au contraire, je suis content que tu prennes l'espace dont tu as besoin."

Cette fois, ce fut Steve qui fondit sur les lèvres face à lui et qui tenta d'exprimer tout son amour pour cet homme à travers ce contact. La sonnerie du four interrompit leur agréable échange buccal et ils se séparèrent. Le militaire se chargea de mettre la table sur la plage pendant que Danny découpait des tranches dans la pizza et ils s'installèrent pour manger face aux vagues tout en discutant de ce que le rapport leur avait appris.