Ouiiiiiiiii ! J'ai gagné quelqu'un ! * danse de la joie *
Journal des reviewers :
Seulie : Mdr il l'a fait et il a complètement assumé en plus de se rincer l'œil (tant qu'à faire) XD Mdr, si tu aimes l'image d'Astarion avec une paille, je te conseille, si tu l'as pas déjà vue, la vidéo qui s'appelle « Baldur's Gate 3 : Launch Party – An animated Short » (doublée par le casting original en plus). Ça devrait te faire marrer, surtout la fin. Gayle ne reçoit pas assez d'amour alors qu'il en véhicule tellement. Justice for Gayle !
Jennalocked : Mdr, à mon sens, ce n'est pas la meilleure réplique d'Astarion mais si celle-ci t'a fait rire, je ne m'inquiète pas pour la suite XD
RingoLemonadeCandy : C'est tellement ça. Astarion est quand même quelqu'un d'assez fier et là, il a une challengeuse, et il s'amuse autant à la séduire qu'à la faire tourner en bourrique XD Tu as raison pour Gayle, c'est vrai que c'est un peu-beaucoup la voix de la raison (en même temps, c'est le plus âgé, ça a du sens) et il a bien compris que Silesta pouvait être une cible facile. Et comme c'est une bonne âme comme lui, il veille sur elle.
Enfin, je trouve que tu as complètement cerné ce que je voulais faire de Silesta, je suis trop contente! Je voulais véhiculer l'idée de quelqu'un d'un côté de très « candide » du fait qu'elle n'a aucun souvenir pour l'influencer mais en même temps, un peu rigolo et avec beaucoup d'énergie grâce à son envie d'avancer, histoire contrebalancer le tout.
Daidai : Bon retour parmi nous et merci pour ton petit mot, j'espère te revoir par la suite !
Liline37 : Oooooooh ! Quelqu'un d'autre est arrivé ! Coucou et bienvenue à bord ! Ravie de te compter parmi mes quelques lecteurs(trices) ! Merci beaucoup beaucoup d'avoir pris le temps de mettre un petit mot et encore plus avec autant de gentilles choses, j'espère que tu ne regretteras pas le voyage. Je suis comme toi niveau obsession, j'oscille dangereusement entre jouer BG3/écrire BG3/me gaver de vidéos sur Astarion pour m'aider (et pour le plaisir)/me gaver de vidéos sur Neil Newbon et tout ce qui touche le casting de la VA. J'en ai des spirales dans les yeux !
Oui, tout le monde aura sa voix au chapitre, même si je reconnais que Lae'zel sera la moins intervenante. Pas évident de jongler avec tout ce petit monde et encore plus avec touuuuut ce que je dois leur faire vivre, même si ce sont Astarion et Silesta les stars. Contente de voir que ma gentille Tav te plaise, j'avais peur que le côté trop Goody Two Shoes comme disent les anglophones ne plaise pas, mais je reste convaincue qu'une bonne âme peut faire grand bien à notre Astarion. Il faut juste bien doser.
Je ne connais rien du tout à la saga des Divinity (même si j'en ai beaucoup entendu la mention quand BG3 est sorti), j'espère vraiment que l'histoire de Silesta ne sera pas trop proche du perso dont tu me parles, ce serait ballot lol. Dans tous les cas, ravie de te savoir parmi nous et au plaisir de te lire à nouveau !
On est week-end, chapitre ! Petit chapitre transitoire mais qui fait avancer un peu les choses.
CHAPITRE VIII – MYSTÉRIEUSES MAGIES
Suite à sa conversation avec Gayle et à la demande de celui-ci, Silesta garderait pour elle la teneur de leur échange quant à sa situation, du moins pour le moment. Le magicien lui avait réclamé encore du temps avant de se risquer à mettre les autres dans la confidence ; il n'y avait pas lieu de s'inquiéter outre mesure et ils devaient garder leur énergie pour leur quête d'un remède.
La jeune femme alla se coucher juste après, bien assez remuée par la journée et la soirée. Sa nuit fut hélas loin d'être douce. La lueur bleu pâle qui tapissait ses songes jusqu'ici n'était pas là ce soir elle avait laissé place à une fièvre dévorante doublée de picotements partout dans le corps. Aucune position ne soulageait le mal pas plus que cette lourdeur en elle qui lui retournait les entrailles. Aurait-elle pris froid suite à son bain prolongé ? Non, cela la prenait bien plus aux tripes qu'un simple contrecoup thermique. Sa respiration se faisait sifflante, son front ruisselait de sueur glacée et sa tête allait imploser dans les ténèbres les plus obscures que son esprit avait à lui offrir. Alors que des mains invisibles et sinueuses commençaient à l'attirer plus loin dans les abîmes, tout disparut comme l'ombre était chassée par le soleil.
« J'arrive à temps. Tu étais en train de te transformer. »
Silesta ouvrit les yeux à cette voix féminine inconnue. Au-dessus d'elle était penchée une splendide jeune femme à l'interminable chevelure cendrée et aux yeux vert forêt profonds qui lui souriait avec douceur. Grande et élancée, elle portait une sorte de toge légère au drapé vaporeux et des bracelets d'or aux poignets et aux bras qui ressortaient sur sa peau dorée. Au premier coup d'œil, elle était une parfaite inconnue pour Silesta jusqu'à ce qu'une image n'apparût dans un flash de son esprit. Ce visage, elle l'avait déjà vu... par delà la capsule qui la retenait prisonnière dans le vaisseau illithid.
La saltimbanque se redressa sur son séant, ébahie.
« Je... Je vous ai vue. Le vaisseau...
_ En effet. Je t'ai déjà secourue auparavant. »
Sa voix lui raviva une nouvelle vision : lors du crash, après être tombée par-dessus bord, la chute dans le vide interminable et à l'issue inextricable... qui s'interrompait tout à coup, retenue par une force invisible.
L'inconnue lut la peur sur ses traits et se remit debout pour ne pas la brusquer.
« Ne crains rien. Je ne te veux aucun mal, bien au contraire. Tu ne deviendras pas un flagelleur mental, pas tant que je serai là. Je te protège. »
Elle lui tendit une main amicale. Silesta remonta de la main à la peau dorée vers l'inconnue. Il émanait d'elle une telle aura de force et de douceur à la fois. Elle prit sa main sans plus réfléchir et se releva sans la quitter des yeux. La femme lui sourit et se détourna pour faire quelque pas.
Ce ne fut qu'à ce moment que la saltimbanque découvrit ce qui l'entourait. Le décor était irréel. Des colonnades usées par le temps entourant des ruines perdues dans la nature semblaient se dresser depuis un morceau de roche perdu dans l'infinité d'une dimension qui n'appartenait à aucun monde. Le ciel étoilé était un mélange de gris et de parme, traversé de rais de lumière ou de rochers en gravité provenant d'on ne sait où.
« Le temps presse, lui dit l'inconnue. Le parasite dans ta tête est une source d'inquiétude pour toi et je le comprends. Mais il représente surtout un immense potentiel pour toi. Tu as déjà eu un aperçu de ses pouvoirs. Bien que ton instinct te dicte le contraire, tu dois les accepter et les faire croître pour notre bien à tous. »
Arrivée au bord du morceau de terre flottant, la femme lui enjoignit d'un geste de la main à voir par-delà le vide. Le cœur de Silesta manqua un battement. Au loin dans le néant, un gigantesque crâne noir plus grand que cinq maisons se délitait tandis que des silhouettes de lumière flottant autour de lui s'adonnaient à un combat éthéré.
« Une guerre est à l'œuvre pour le destin de Faerûn. Tu peux faire pencher la balance en notre faveur si tu embrasses ton pouvoir. »
La jeune femme rousse à ses côtés entendait ce qu'elle disait mais c'était comme si les mots devenaient vapeur dans son esprit. Tout ceci était trop pour elle. Elle ne récupéra sa faculté de raisonner que lorsqu'elle sentit le sol trembler sous ses pieds et entendit son interlocutrice annoncer qu'elle devait vite repartir.
« Attendez ! Dites-moi, est-ce que je vous connais ? »
À la terre qui vibrait s'ajouta une immense onde de lumière aveuglante qui allait les engloutir. L'inconnue fit bouclier, une main devant elle, et l'onde de choc la fit vaciller. Elle tendit l'autre main vers Silesta qui se sentit tout à coup partir dans les profondeurs. Le décor tourbillonna autour d'elle et il ne resta qu'un écho à ses oreilles.
« Va. Ça va aller, je te le promets. »
Ses paupières s'ouvrirent d'un coup sec. Le corps de Silesta était parfaitement immobile et raide comme un piquet mais son cœur martelait si fort qu'elle se sentait presque tressauter sur sa paillasse. Elle respira profondément un moment avant de se redresser. Plus de fièvre, plus de douleur dans le corps ni de bile âcre dans l'estomac. Hormis sa nervosité, elle se sentait parfaitement bien.
Un coup d'œil autour d'elle lui indiqua qu'elle était la première réveillée ses compagnons dormaient encore comme des enfants. La jeune femme décida d'en profiter et commença à rassembler quelques vivres pour le petit-déjeuner. Cela lui changerait les idées.
Du moins c'était ce qu'elle avait espéré. Qui était cette femme ? Elle avait beau forcer sur son esprit, son visage ne lui disait rien et pourtant, cette inconnue était si resplendissante qu'il aurait été impossible de l'oublier si elle l'avait connue. Au-delà de son apparence, ce fut surtout son discours qui était intrigant. Accepter les pouvoirs de la larve ?
Silesta n'eut pas à réveiller les autres qui émergèrent peu de temps après. Sans vouloir les déranger dans leur phase de réveil, la saltimbanque les observa discrètement du coin de l'œil et lut en chacun d'eux une vague incertitude plus ou moins bien dissimulée. Elle n'en revint pas. Les mots coururent plus vite sur sa bouche que ses pensées :
« Vous aussi, vous avez vu quelqu'un dans vos rêves ? »
Quatre visages stupéfaits se tournèrent vers elle dans un parfait synchronisme.
« En effet. J'étais d'abord prisonnier de la nudité d'une nymphe des eaux avant de rencontrer une apparition plus fabuleuse encore, dit Astarion avec un faux air rêveur et un sourire très entendu à la concernée.
_ Elle m'a parlé de ma larve... continua Ombrecoeur d'une voix lente.
_ Que Faerûn était en danger, murmura Gayle tout aussi incrédule.
_ Et qu'il fallait accepter les pouvoirs de ce parasite. T'chaki ! », pesta Lae'zel avec colère.
Alors ils avaient vécu le même phénomène. Silesta leur demanda à quoi ressemblait leur visiteur mystère et fut fort étonnée de la diversité des réponses : Astarion avait rencontré une elfe aux yeux de glace et à la beauté dangereuse, Gayle avait conversé avec une femme d'apparence humaine voilée de mystère et irradiant de puissance, Ombrecoeur avait trouvé dans les traits de cette femme brune et austère à l'aura sombre une personnification réaliste de Shar et enfin Lae'zel était la seule à avoir croisé un githyanki à la prestance écrasante de courage, le modèle qu'elle souhaitait atteindre. Personne n'avait eu la même image et ignorait de surcroît de qui il s'agissait. Le mystère s'épaississait davantage.
Silesta devinait que le trouble devait être le même chez ses compagnons, aussi les invita-t-elle à manger un peu pour prendre des forces avant de repartir. Ils auraient bien assez de la route pour discuter de tout cela. Elle apporta un peu de pain et de viande séchée à chacun en terminant par Astarion. Il ne méritait pas sa gentillesse mais faire preuve de rancune serait donner trop d'importance à sa petite bassesse de la veille. La jeune femme remarqua que contrairement aux autres, le vampire paraissait moins perturbé par son rêve.
« Vous semblez drôlement serein. Cette vision vous a-t-elle donc fait une si forte impression ?
_ Quoi donc ? La mystérieuse inconnue ou votre affolante chute de reins ? »
Elle ferma les yeux avec un sourire pincé, bonne perdante. Si elle lui tendait des perches...
« Il m'a semblé comprendre que cette entité nous protégeait de la transformation en poulpe répugnant et que nous appuyer sur les pouvoirs de notre parasite ne ferait que nous renforcer, poursuivit-il. Ma foi, présenté ainsi, le calcul est vite fait.
_ Comment ? Vous accepteriez de vous en remettre comme ça à cette chose qui grouille dans votre tête ? Nous ne savons rien de qui est cette personne ni...
_ Pour ma part, je sais surtout que depuis que j'ai ce parasite, nombreuses chaînes de ma condition de rejeton de vampire ont cédé, la coupa Astarion avec véhémence. Après deux cent ans de muselière, ma sangle s'est rompue. Vous n'avez aucune idée de ce que ça fait, entrevoir enfin un point de lumière dans les ténèbres. »
En effet, elle ne pouvait pas savoir pour la simple raison qu'elle ne savait rien de ce qu'il avait vécu pour être au point de s'en remettre à cette solution désespérée. Jusqu'ici, Astarion n'avait que très peu parlé de sa vie de vampire mais chaque occurrence s'était accompagnée de hargne défensive. Silesta voyait un chat acculé qui courbait l'échine et feulait, prêt à griffer. Elle se sentit se renfermer. Elle aurait aimé comprendre, elle voulait comprendre. Qu'est-ce qui justifiait pour lui de se risquer à aggraver le risque que cette larve représentait ?
« Vous avez raison, dit-elle simplement. J'aurais aimé être d'accord avec vous, mais nous aurions tous les deux tort. »
Elle tourna les talons et s'en retourna pour ranger sa paillasse. Il était inutile d'insister, Astarion ne se braquerait que davantage et elle-même n'avait pas les leviers pour tenter de lui faire entendre son point de vue. En se rapprochant de ses autres compagnons, Silesta put avoir un aperçu de ce qu'ils pensaient de l'étrange proposition du visiteur nocturne. Sans aucune surprise, Lae'zel était viscéralement contre : elle préférerait s'éventrer sur le champ que de s'appuyer sur les pouvoirs de ce qu'elle abhorrait le plus au monde. Gayle et Ombrecoeur étaient plus sur la réserve et invoquaient la prudence ; il y avait beaucoup trop d'inconnues dans l'équation. Tant qu'ils n'en sauraient pas davantage sur cette affaire, mieux valait ne pas trop s'en préoccuper. Ils avaient déjà leur objectif actuel : trouver Halsin.
Le groupe d'aventuriers se remit rapidement en route une fois le camp levé. Ils espéraient atteindre le village abandonné les séparant du camp gobelin avant la fin de la journée. Avec un peu de chance, ils pourraient trouver des choses utiles avant d'aller se frotter à toute une armada d'ennemis. Silesta pensa aussi à Gayle. Elle se promit d'essayer de se garder discrètement un artefact magique si l'occasion se présentait. Elle n'aimait pas cacher des choses à ses compagnons mais elle avait juré de préserver le secret.
Durant leur marche, le magicien était plongé dans la lecture d'un parchemin et les plis de son front laissaient entendre que ce qu'il lisait avait capté toute son attention.
« Une nouvelle formule magique ? lui demanda Silesta qui marchait à ses côtés.
_ Loin de là, j'en ai peur. C'est une missive gobeline que j'ai trouvée sur l'un des gnolls de la veille. Un ancien butin, je suppose.
_ Et que dit-elle ?
_ De ce j'en comprends, les gobelins auraient commencé à désavouer leur dieu primaire, Maglubiyet, pour se rassembler sous l'égide d'une nouvelle divinité se faisant appeler l'Absolue. Cette missive enjoint toute âme éveillée ou quiconque d'autre d'apporter sa contribution au culte et pour se faire, il faut se faire connaître auprès des âmes éveillées qui sont rassemblées au campement principal.
_ Les gobelins sont loin de briller par leur intellect, c'est certain, mais pour qu'ils se détournent ainsi de leur panthéon, c'est qu'ils ont été approchés par quelque chose de plus grand, intervint Astarion avec dédain.
_ Qu'est-ce qu'une âme éveillée ? demanda Lae'zel.
_ Je l'ignore. Je suppose qu'il doit s'agir d'une sorte de supérieur hiérarchique. »
Silesta écoutait d'une oreille distraite, plus attentive à surveiller les environs. Le chemin devant eux se refermait sur la route pavée d'un pont de pierre et de l'autre côté, une arche se découpait dans un mur de fortification, laissant deviner un village par-delà. Ce devait être le village abandonné en question, si l'on en jugeait la carcasse de charrette en travers du pont ainsi que les divers débris en tout genre. La saltimbanque commença à s'avancer mais fut vite retenue par une forte poigne autour de son bras.
« Je doute que ce village soit si abandonné. Prudence », lui enjoignit Lae'zel.
Le groupe franchit prudemment le pont, aux aguets. La hauteur du mur d'enceinte et le nivellement du terrain ne leur permirent pas de voir si les toitures des maisons les plus proches étaient occupées. Ils avançaient donc à l'aveugle. La porte passée, ils découvrirent un hameau fantôme qui tombait petit à petit en ruine. Des bâtiments éventrés dans leurs murs ou leur toit voire à demi détruits, des planches placardées en travers des fenêtres à la végétation rampante qui enlaçait de ses branches et feuillages façades et autres éléments laissés à l'abandon. Tout laissait à croire que les habitants avaient fui en laissant tout derrière eux, ou au contraire n'avaient eu le temps de se rendre compte de ce qui leur était tombé dessus. Le temps avaient suspendu son cours.
Une flèche vint se planter dans le sol juste à leurs pieds, arrêtant net leur progression.
« Tiens, tiens, tiens, on a de la visite », railla une voix rauque au-dessus de leur tête.
Une créature se tenait dans l'embrasure ombrée de l'ouverture d'une grange. À en juger les ornementations de plumes sur ses épaulières et son casque, cette gobeline au teint aussi maladif que si elle avait eu la jaunisse devait être le chef de la demi-douzaine d'autres qui sortirent de leur cachette. En plus du leader, trois autres archers se tenaient sur les toits de deux maisons en face et le reste bloquait toute tentative de passage en force droit devant. La situation déraperait au moindre mouvement.
« Z'êtes perdus, mes mignons ? C'est pas poli d'entrer sans frapper, se moqua la chef avant de se montrer plus menaçante. Vous avez trente secondes pour me persuader de ne pas vous planter comme des lapins. »
Silesta jeta un coup d'œil furtif tout autour. Aucun avantage pour eux, la force brute ne leur causerait que du dégât. Soudain, un tiraillement frémit dans son crâne ; sa larve se rappelait à son bon souvenir. La douleur passée, elle se sentit investie d'une remarquable confiance en elle.
« Je baisserais mes armes, si j'étais vous. Tuer une âme éveillée, ça ne va pas plaire à vos supérieurs chez vous. »
Elle percevait les regards de ses compagnons sur elle mais n'en avait cure. Ses synapses fonctionnaient à mille à l'heure. Encore mieux, la gobeline avait accroché à son discours.
« Une âme éveillée ? Toi, tête d'argile ?
_ Moi ? Oh non, loin de là. C'est de mon maître ici présent dont on parle, corrigea-t-elle en désignant Gayle d'une élégante révérence. Moi, je ne suis que sa domestique.
_ Et les autres ?
_ Mais sa garde personnelle pour l'escorter à bon port, pardi. Rien de tel que deux impétueuses guerrières pour dissuader les opportuns ainsi qu'un agile assassin des ombres pour surveiller nos arrières. »
Silesta se sentait comme le barde qui contait des histoires extraordinaires à une foule un jour de marché. Ses mots venaient tout seuls avec la même facilité grandiloquente qu'Astarion. Elle ne laissa pas la gobeline trop tergiverser et lui assura que son maître avait audience au camp. L'archère emplumée fronça les sourcils.
« Ah oui ? Avec qui ? La drow ? Ou peut-être Haruspia ? Dror Ragzlin ? »
La jeune femme réfléchit à toute vitesse ; ce bref silence après l'évocation d'une drow plus le fait de l'avoir mentionnée en premier laissait supposer une certaine importance. Elle roula ostensiblement des yeux comme si on lui avait demandé si un plus un faisaient bien deux.
« La drow, évidemment ! On dira ce que l'on voudra, mais on sait que c'est elle qui commande. Écoutez, nous avons encore de la route et nous avons besoin de ravitaillement pour la suite.
_ Ma domestique vous a tout dit, intervint Gayle paré de sa plus belle assurance. Laissez-nous vaquer à notre guise et j'en toucherai un mot à mes homologues une fois rencontrés. Gloire à l'Absolue !
_ Gloire à l'Absolue ! répondit la gobeline avec ferveur. Très bien, mes gars vont passer le mot. Vous pouvez entrer. »
Sur ces mots, les membres de sa bande se dispersèrent, non sans rechigner la perte d'une bonne petite séance d'amusement. Une fois qu'ils furent tous éloignés, Silesta crut sortir d'un rêve éveillé.
« Quel sens de la filouterie ! Vous me plaisez de plus en plus, très chère, s'amusa Astarion comme un père féliciterait son enfant. Bonne fille.
_ C'était intelligent, appuya Gayle. De plus, nous avons obtenu les noms des chefs, c'est un outil de crédibilité très précieux. Cela nous aidera à nous infiltrer. »
La saltimbanque n'osa pas leur avouer que son parasite y était pour quelque chose étant donné les dialogues houleux du matin sur le sujet. Elle préféra se dire qu'elle leur avait évité un combat difficile et que c'était le principal.
À présent qu'ils étaient libres de leurs mouvements, les aventuriers se répartirent dans le village pour récupérer tout ce qui pourrait leur être utile. Étant donné l'état avancé de déliquescence des habitations, ils n'espéraient pas grand chose mais tout serait bon à prendre.
Le hasard mena les pas de Silesta dans ce qui lui apparut être la maison d'un ancien apothicaire. L'échoppe croulait de paniers, de petits casiers, d'étalages de flacons et de séchoirs accrochés au plafond. Un vague reste de parfum de plantes embaumait encore le bois des meubles. Quelle chance ! Des plantes médicinales seraient toujours utiles. La jeune femme n'était pas médecin, certes, mais comme tout le monde, elle connaissait les plantes principales qui serviraient à coup sûr aussi fouilla-t-elle le moindre conteneur et rangea ses quelques trouvailles dans son sac. Le dernier meuble à inspecter était celui qui servait de comptoir.
« Il y aura peut-être un livre sur des décoctions utiles. »
Elle passa derrière le comptoir et son pied marqua une pression étrange dans le sol. Ça s'enfonçait. Silesta s'arrêta et ancra bien son appui sur le plancher avant de pousser sur ses jambes. Un craquement retentissant, un cri, le vide.
« Silesta ? Silesta, rien de cassé ? »
Étendue de tout son long sur un sol poussiéreux et le dos en miettes, l'infortunée curieuse remua lentement la tête en rouvrant les paupières. Au-dessus des ténèbres qui l'entouraient une grande ouverture de lumière laissait apparaître le visage de ses compagnons. Elle opina de la tête comme elle put et roula sur le côté.
« Ça va, j'ai juste présumé de la résistance d'un plancher vermoulu. Hurgh...
_ Il s'agirait plutôt d'une trappe qui ne tenait plus que par un fil, corrigea Ombrecoeur.
_ Est-ce que le plongeon en valait la peine où vous abandonne-t-on dans les oubliettes ? » se moqua Astarion avec un sourire désolé.
Silesta scanna les alentours, pensant avoir atterri dans une cave à vin mais il n'en fut rien. Elle invita les autres à la suivre et se releva pour leur laisser la place de descendre.
Sous le sol de l'apothicaire ne se trouvait pas une cave ni un quelconque entrepôt. Un fiat lux incanté par Gayle imprégna de lumière des torches accrochées aux murs et révélèrent une vaste salle aux longues étagères bardées de livres le long des murs ; des tables en bois couvertes de poussière accueillaient un matériel de distillation opaque couvert de toiles d'araignée, des ossements et divers instruments étranges et un autel en pierre imposant trônait tout au fond, décoré de bougies de cire noire. Le groupe avança prudemment et remarqua qu'une autre salle se profilait après celle-ci. Bien plus vaste et plus sombre, il régnait en cet endroit une atmosphère lugubre et étouffante. Était-ce davantage dû à cet autel sacrificiel teinté d'éclaboussures carmines imprégnées dans la pierre, les divers symboles gravés dans le sol autour de celui-ci ou encore la pile de squelettes entassés dans un coin ?
« Je doute que l'on s'adonnait à la préparation de tisanes pour le sommeil, murmura Gayle en prenant un livre d'une étagère pour le feuilleter.
_ Pour un sommeil éternel seulement, précisa Ombrecoeur en fronçant les sourcils. Cet endroit empeste la magie noire. De la nécromancie. »
Silesta marchait de sorte à ne rien côtoyer de trop près. Cet endroit distillait en elle une angoisse grandissante. Son pied se heurta contre quelque chose. Elle baissa les yeux et vit un crâne qui roulait suite à son coup. Elle sursauta et se heurta contre une grille qui fit résonner un bruit métallique dans le silence.
« Vous avez peur juste pour ça ? admonesta Lae'zel.
_ J'ai été surprise, d'accord ? Et puis il y a quelque chose dans cet endroit qui me... »
Elle se tut en promenant ses yeux par-delà la grille. Dans une alcôve sombre se trouvait un autre autel de pierre avec quelque chose posé dessus mais la pénombre de lui permettait pas de deviner quoi. Elle tira sur un barreau, ébranlant la porte qui ne s'ouvrit pas. Fermée.
« Laissez faire l'expert, la pria Astarion en la poussant un peu. Nous avons déjà eu un aperçu de votre méthode. Tout est une question de légèreté. »
Il sortit de sa poche une petite tige de fer et s'affaira à passer la serrure à la question. Silesta l'observa faire, captivée par l'aisance avec laquelle le roublard faisait chanter le mécanisme avec délicatesse. Quelques secondes après, un petit clic retentit. Le voleur fut satisfait de son entreprise et encore plus de voir qu'il avait une spectatrice.
« Ne soyez pas jalouse. Je me ferai un plaisir de vous montrer tout ce que je peux faire d'autre avec mes mains. »
L'humaine rousse l'ignora et ouvrit la grille. En s'approchant, elle entrevit enfin l'objet exposé : un livre. Une grille juste pour un livre ? Il devait être drôlement spécial. Elle fut prête à tendre la main vers l'autel mais on lui retint le poignet. Astarion secoua lentement la tête avec sérieux et pointa quelque chose : une étrange plaque en fer était située entre le livre et l'autel de pierre.
« Un piège. Et je n'ai pas d'outil pour m'aider à le désamorcer. »
Gayle jeta un coup d'œil dans l'alcôve et plissa les yeux.
« Je sens une puissance forme de magie émaner de cet ouvrage. »
À ces mots, le sang de Silesta ne fit qu'un tour. Il fallait qu'elle récupère ce livre pour le magicien, cela l'aiderait probablement pour son problème de consommation de Trame. Elle analysa à son tour le mécanisme puis détailla longuement le livre et une idée germa dans son esprit. Elle retourna dans la pièce précédente et scanna des yeux tous les ouvrages qui passaient à sa portée. Elle finit par en attraper un à la lourde couverture de cuir noir et le soupesa. Cela devrait suffire. Elle revint donc dans la salle de l'alcôve et posa la main sur le livre présenté.
« Mais qu'est-ce que vous faites ? s'exclama Astarion en la voyant faire. Vous allez nous faire... ! »
D'un geste précis et rapide, Silesta extirpa le livre du présentoir tout en glissant à sa place celui qu'elle avait récupéré. La plaque de fer ondula faiblement puis se remit parfaitement à plat une fois le nouveau livre installé. La crispation anxieuse qui flottait autour de la scène s'évapora doucement dans un soupir général.
« Tout est une question de pression, sourit la jeune femme avec fierté à Astarion. Ne soyez pas jaloux. »
Le vampire lui accorda un soupir de bon perdant quoiqu'il fut un peu admiratif. Un coup de chance.
Silesta se tourna vers le magicien.
« Je crois que ceci vous correspondrait plus qu'à m... »
Alors qu'elle lui tendait le livre, ses yeux s'étaient hasardés dessus. Nécromancie de Thay. L'ouvrage était grand et lourd en dépit de son épaisseur commune. Les bords étaient ferrés de métal orné dans les coins et le cuir de la couverture n'était pas ordinaire : c'était de la peau humaine. De la peau humaine séchée et rance qui définissait un visage dans le relief de la couverture. Des yeux mauves et luisants perçaient de leur regard mort celle qui les contemplait et une bouche béante sertie de dents noircies criait une souffrance muette. C'était comme si un fantôme avait tenté de fuir les pages du livre et s'était retrouvé entravé dans cette peau asséchée.
Plus elle fixait ces yeux, plus Silesta se sentait partir dans un précipice glacé et sombre. Son pouls s'accéléra dans une course folle et son esprit s'emplit de sons sinistres et lugubres. Des hurlements déchiraient ses tympans d'une supplique atroce. Sa propre voix.
« Prenez garde. » La voix de Gayle la ramena à elle quand il lui prit le livre des mains. « La magie nécromantique est la plus pernicieuse. »
Silesta papillonna des paupières et une goutte de sueur froide roula sur sa tempe. Elle n'avait pas bougé d'un cheveu et pourtant son corps était engourdi et fatigué comme si elle avait couru pendant des heures sans s'arrêter.
« Vous pouvez en tirer quelque chose ? questionna Ombrecoeur à l'attention du mage qui détaillait à son tour le livre.
_ Encore faudrait-il l'ouvrir. Nous ne pouvons rien en faire pour l'instant. » Il le retourna et montra les loquets qui scellaient la couverture.
_ Je peux vous en défaire dans ce cas, proposa le vampire, mine de rien.
_ Détruisons-le, ordonna Lae'zel avec méfiance. Ce type de magie ne peut que nous apporter du malheur. Celui qui s'exposera à ses noirceurs l'aura bien mérité.
_ Non, intervint aussitôt Silesta avant de se tempérer. Je veux dire, Gayle est un grand magicien et toute magie sera bonne à prendre pour notre quête. Mettons ça de côté et espérons que l'on trouvera un moyen d'ouvrir ce livre plus tard. »
L'humaine fut heureuse de constater que le regard qu'elle soutenait à l'intéressé fut correctement interprété. Gayle lui fit un clin d'œil subreptice et rangea le livre en assurant qu'il garderait un œil ouvert sur toute éventualité. D'un côté, Silesta était satisfaite mais de l'autre, une part d'elle n'était pas sereine. Cette magie ne pressentait rien de bon du tout, elle en avait encore les mains un peu tremblantes. Astarion, lui, avait l'air frustré. De toute évidence, il aurait apprécié garder le livre pour lui.
Le reste de l'inspection de la cave du nécromancien leur permit de mettre la main sur quelques autres objets pratiques, notamment des parchemins contenant diverses formules de charme et autres contrôles mentaux jusqu'à même des sorts à retourner contre les morts-vivants et les aberrations.
Ombrecoeur était justement plongée dans un de ces écrits qui détaillait des sorts anti-nécromancie issus de rites sélunites quand elle s'interrompit, étouffant une exclamation de souffrance.
« Ombrecoeur, ça va ? la héla Silesta qui était restée en retrait.
_ Oui, ce n'est rien. »
La prêtresse secoua un peu sa main en écartant et refermant ses doigts. Sa comparse ne fut pas dupe, le timbre de sa voix la trahissait.
« Votre main droite ne semble pas de cet avis. »
Ombrecoeur lui retourna une moue empreinte d'un certain ressentiment. Visiblement, elle n'appréciait pas que l'on pose trop de questions mais Silesta n'en avait cure. L'humaine tenta un sourire engageant ; y avait-il quelque chose qu'elle pouvait faire ?
« Non, se rasséréna la demi-elfe d'une voix terne. Cette blessure n'a jamais guéri complètement et me provoque une vive douleur de temps à autre. C'est mon fardeau laissé par Dame Shar. »
Silesta se souvint du discours tenu concernant Shar et la souffrance. Embrasser les ténèbres ne représentait déjà rien de réjouissant alors la douleur...
« Pourquoi votre déesse vous infligerait-elle cela ? »
Elle entendit en fond Astarion marmonner quelque chose concernant « le sadisme de ceux qui ont l'ascendant ».
« Je l'ignore, du moins ce dont je souviens. Je me suis volontairement fait effacer une partie de ma mémoire avant d'avoir été envoyée en mission pour ma déesse. Je ne remettrai pas en cause sa volonté ni ses motivations. » Sa détermination se renforça, galvanisée par la foi qui l'habitait. « La souffrance est sacrée pour les acolytes de la Dame de l'Égarement. Elle est la clé vers son infinie obscurité. Nous pouvons endurer beaucoup tant que nous savons le pourquoi.
_ Avez-vous déterminé la cause de ces douleurs ? Autant vous éviter ce désagrément, interrogea Gayle en désignant la main de la jeune femme.
_ Je ne saurais dire. Cela peut autant être pour me guider, me punir ou même tester ma foi. J'aime à penser que ma Dame me révélera le sens de tout cela le moment venu. D'ici là, je serrerai les dents. Ne vous en faites pas pour moi si cela me reprend. »
Silesta n'insista pas car elle avait compris qu'Ombrecoeur s'était déjà bien assez confiée. La prêtresse cultivait le goût du secret comme son culte le lui imposait et le but n'était pas de la braquer.
« Sur ce, si les rats de bibliothèques ont terminé leur lecture, peut-être pourrait-on regagner la surface ? » proposa Lae'zel pour qui la paperasse n'était pas un moyen de s'enrichir.
Le groupe approuva et retourna sur ses pas. En les suivant, Silesta ne put s'empêcher de remarquer la drôle de tête que faisait Astarion en direction d'Ombrecoeur. Il avait l'air irrité.
« Accepter de son plein gré de souffrir. J'avoue ne pas saisir. »
Elle laissa le roublard la doubler et le suivit sans rien dire. Son ressentiment était contagieux, elle sentit son cœur se plomber. Et lui, de quelles ténèbres était-il l'obligé ?
On en saura plus au prochain chapitre, ne t'en fais pas. On rencontrera un certain quelqu'un qui va le contraindre à se mettre à table. Pas littéralement. On sait qui est son Capri Sun attitré. XD
Vous aurez remarqué quelques raccourcis scénaristiques et ce ne seront pas les seuls, bien évidemment. Tant que la pirouette passe niveau crédibilité et cohérence du scénario, c'est le principal.
