CHAPITRE 19 : Confrontation et Récupération

Hermione passa les jours suivants, après son réveil et ses retrouvailles avec Drago, à dériver entre la conscience et l'inconscience alors que son corps reprenait lentement des forces. Parfois, quand elle se réveillait, Drago était là. D'autres fois non. Ses périodes de conscience étaient brèves et floues, à tel point qu'elle se demandait parfois s'il ne s'agissait pas en fait de simples rêves.

Elle se réveillait parfois pour trouver Pinky assise sur la chaise à côté du lit, tricotant tranquillement ce qui semblait être une énorme écharpe rose qui s'allongeait régulièrement, au moins trois fois plus longue que l'elfe était grande… et il y a eu une occasion où elle ouvrit les yeux pour trouver Rogue dans ce qu'elle en était venue à considérer comme étant la chaise de Pinky, penché en avant sur le bord du siège, les coudes sur les genoux et les longs doigts entrelacés sous son menton, la regardant attentivement à travers ses yeux sombres. Avant qu'elle puisse trouver les mots pour exprimer sa surprise, les ténèbres descendirent comme un voile et la recouvrirent à nouveau.

La plus surréaliste de ces expériences fut lorsqu'elle se réveilla pour trouver la chaise occupée par Ron. Il faisait presque, mais pas entièrement, sombre à ce moment-là. La faible lumière grisée brillant à travers la fenêtre, indiquait que ce devait être l'aube ou le crépuscule. Hermione ne pouvait pas dire lequel. Son horloge interne avait cessé de fonctionner depuis longtemps. Ron était légèrement rétroéclairé là où il était affalé dans le fauteuil, somnolent, tandis qu'Hermione cligna des yeux avec surprise. Puis, elle cligna à nouveau, plus fort, s'attendant à ce qu'il soit parti lorsqu'elle rouvrirait les yeux. Mais il n'était pas parti… il était toujours là, aussi solide et en bonne santé que jamais. Elle aurait souri s'il n'avait pas eu l'air si hagard. Ses taches de rousseur contrastaient avec une peau trop pâle pour être saine, avec des cernes de fatigue sous les yeux. Depuis combien de temps n'avait-il pas dormi correctement, se demandait-elle. Elle ne parlait pas de cette somnolence intermittente dont elle était témoin, mais avait-il réellement dormi, allongé dans un lit ?

S'appuyant sur un coude, elle tendit la main pour toucher son bras, juste un bref et léger effleurement du bout des doigts avant, toujours faible, menaçant de s'effondrer sur le lit. C'était assez. Les yeux cobalt de Ron s'ouvrirent et se posèrent sur elle.

L'expression sur son visage à ce moment était… troublante, c'est le moins qu'on puisse dire. Il avait l'air d'avoir du mal à décider s'il devait la serrer dans ses bras ou la frapper.

— Ron ? demanda-t-elle d'une voix hésitante.

Puis il se leva de sa chaise comme un ressort, et fit instantanément les cent pas, arpentant la pièce.

Malgré la difficulté que cela lui présentait, Hermione lutta pour se remettre sur ses coudes.

— Ron, répéta-t-elle, les sourcils froncés d'anxiété.

Il s'arrêta près de la porte et se tourna pour lui faire face, levant brusquement une main et la passant dans ses cheveux cuivrés, qui semblaient aujourd'hui avoir pris une qualité négligée qui était plus caractéristique de Harry que de Ron.

Il ouvrit la bouche et la ferma. Secoua la tête, d'un mouvement saccadé et agité. Il ouvrit à nouveau la bouche.

— C'est vrai ? éclata-t-il enfin. « Ce que j'ai entendu à propos de toi et Malefoy ? Il me l'a dit lui-même et je n'ai pas cru à ces conneries de sale menteur, pas une seconde, mais ensuite Rogue et… et maintenant même Dumbledore… » Il leva les mains en l'air. « Hermione, ça ne peut pas être vrai ! »

Hermione prit une profonde inspiration, ses yeux scrutant rapidement la pièce à la recherche de Drago, partagée entre souhaiter qu'il soit là et se sentir soulagée qu'il ne le soit pas. Le comportement de Ron était… eh bien, inquiétant. La pièce semblait faire une légère embardée sous elle et elle crut sentir l'obscurité l'envahir depuis les coins de la pièce, mais elle la combattit avec une détermination acharnée. Elle ne voulait pas retomber dans l'oubli pour le moment. Il fallait s'attaquer à cette question de front.

Elle déglutit difficilement. Durant ses brèves périodes d'éveil, ses pensées et ses sentiments à propos de Drago avaient été contradictoires. Et bien non. Ce n'était pas tout à fait exact. Ses pensées avaient été contradictoires, d'accord – et quand Harry faisait son entrée dans ses pensées, elle était carrément angoissée – mais ses sentiments… pour être parfaitement honnête, ses sentiments n'avaient jamais pas changé depuis le premier instant où elle avait ouvert les yeux pour se retrouver seule dans la chambre bleu et argent.

Elle avait alors voulu Drago, désespérément. Elle l'avait désiré si urgemment que son besoin l'avait crié sur toute la distance entre Pré-au-Lard et Londres, des centaines de kilomètres, et l'avait poussé à courir.

Et elle voulait Drago maintenant.

Ses réflexions sur le sujet, lorsqu'elle essayait de penser logiquement, étaient, bien sûr, un peu plus complexes. Mais il y avait une chose dont elle était sûre, elle voulait que Drago soit sain et sauf, elle ne voulait pas qu'il soit blessé, et à en juger par l'apparence de Ron en ce moment, comme s'il était capable de lui faire du mal, l'un de ses amis les plus anciens et les plus aimés, il devenait une menace pour Drago en ce moment. Elle devait donc en discuter avec lui, tout de suite.

Mais le problème était qu'elle ne savait absolument pas quoi dire, comment s'expliquer à son meilleur ami.

Elle prit une profonde inspiration. Inspire… Expire.

— Ron, balbutia-t-elle, je…

C'est tout ce qu'elle réussit à dore avant de voir Ron réaliser. Il donnait l'impression qu'il allait s'effondrer à tout instant. Elle avait pensé qu'il avait l'air pâle auparavant, quand il somnolait dans la chaise de chevet, mais il était devenu blanc comme un drap maintenant, terriblement blanc.

— Merlin, alors c'est vrai, souffla-t-il. « Hermione, comment as-tu pu faire ça ? Comment as-tu pu faire ça à Harry ? »

— Je suis désolée, croassa-t-elle, « ce n'était pas prévu, c'est juste... arrivé… »

— Comment, Hermione ? Cria Ron. « Comment diable est-ce qu'entre toi et Malefoy, ça ait pu JUSTE ARRIVE ? Comment quelqu'un d'aussi intelligente que toi, a-t-il pu faire quelque chose d'aussi stupide ? Depuis combien il te retient en otage ? Parce que c'est tout ce que c'est, n'est-ce ? Tu dois le savoir. Tu ne pas être aussi aveugle que ça et réellement croire que Drago Malefoy a des sentiments pour toi ? Allez, Hermione, il t'a utilisée pour éviter une peine de prison, c'est là toute la mesure de son intérêt pour toi ! REVEILLE-TOI ! »

— Tu ne comprends pas ! Hermione éclata, « Ce n'est pas une chose nouvelle, Ron ! Drago et moi étions ensemble à Poudlard, nous… » elle s'interrompit brusquement tandis que le visage de Ron passait en un clin d'œil du blanc au violet. Maintenant, il avait l'air franchement apoplectique. Elle le connaissait suffisamment bien pour anticiper l'explosion qui allait se produire, et eut un bref instant pour souhaiter ardemment qu'elle n'ait pas simplement laissé échapper ce fait particulier à ce moment précis.

Et puis l'explosion eu lieu.

— QU'EST-CE QUE TU Viens de dire ? Toi et ce salaud de Mangemort, c'était quoi ? Quand diable étiez-vous ensemble à Poudlard ? Était-ce à l'époque où il te traitait de sale petite sang de bourbe. Oh attends, je pense que ça a dû être le cas, depuis la première année, il te traite comme ça ! Alors, était-ce avant ou après qu'il ait dit qu'il espérait que l'héritier de Serpentard te tuerait en premier, hein ? Ou était-ce plus proche du moment où il a dit que dès que « son seigneur » arrivera au pouvoir, les Sang-de-Bourbe comprendraient ce qui leur arrivait, à commencer par toi ? Peut-être que c'était plus proche de la fois où nous l'avons rencontré dans les bois le soir de la Coupe du Monde de Quidditch, lorsque cette pauvre famille moldus a été torturée ? Ou quand il t'a demandé comme tu allais depuis en-dessous et qu'il pouvait ta petite culotte exposée, c'est ça Hermione ? C'est à ce moment-là que tu as décidé de… de vous mettre ensemble, comme tu dis ? A quoi pensais-tu putain ? Et qu'en est-il de HARRY ? Si toi … toi et Malefoy étiez… étiez ensemble alors que tu sortais avec Harry, pourquoi as-tu accepté de te marier avec lui. Pour l'amour de Merlin, comment as-tu pu jouer avec lui comme ça ? Il t'AIME, Hermione, tu es la seule raison pour laquelle il est VIVANT en ce moment ! Et toi… mon Dieu… tu…

Il s'interrompit finalement, haletant après sa tirade, laissant une Hermione choquée et lui murmurer :

— Ron… je… sui désolé… je ne l'ai pas fait….

Ron se laissa tomber sur le bord du lit, près des pieds d'Hermione, et laissa tomber sa tête dans ses mains. Lorsqu'il reprit la parole, sa voix était étouffée.

— Harry ne m'a pas laissé être avec lui à la fin. Pas pour la confrontation finale. Je sais que tu étais en colère qu'il t'ait laissé derrière, Hermione, mais à la fin il m'a quitté aussi. C'était quelque chose qu'il devait affronter seul, c'est ce qu'il a dit. J'ai dû rester là et le regarder s'éloigner et la prochaine fois que je l'ai vu, il était au sol, il était… mutilé. Mon Dieu, je n'oublierai jamais ça. Je ne voulais plus le quitter, les médicomages ont essayé de me jeter dehors et je leur ai dit d'aller se faire voir. Je suis resté là avec lui tout le temps qu'ils travaillaient sur lui et… Hermione, je le jure… il y a eu un moment où il a arrêté de respirer, et ils ont dit qu'il était parti. Je savais alors ce que je devais faire, la raison pour laquelle j'étais resté. Je me suis penché et je lui ai murmuré ton nom à l'oreille, juste ton nom, c'est tout, et quand rien ne s'est passé, je l'ai murmuré à nouveau, puis il a respiré, Hermione. Il est revenu pour toi. Pour toi.

Il releva alors la tête et la regarda avec des yeux hantés et injectés de sang.

— Et maintenant, je découvre que tu as cette… cette histoire avec Drago Malefoy que tu n'as jamais jugé bon de confier à aucun de nous… Je pensais que nous étions censés être tes meilleurs amis, Hermione. Je pensais que les meilleurs amis se disaient des choses comme ça ! Et je… je sais que tu as failli mourir aussi et je sais que Malefoy t'a sauvé, et je suppose que je devrais lui en être reconnaissant parce que je... je t'aime toujours, Hermione, et si tu étais morte, ça aurait… Mais je ne peux pas… je n'arrive tout simplement pas à comprendre ce que tu as fait à Harry… comment tu l'as trahi.

Soupirant profondément, il se leva et s'approcha d'Hermione où elle est était resté assise sur ses coudes, les yeux écarquillés, rendue complètement sans voix par la révélation de Ron sur le contact d'Harry avec la mort et sa motivation à vivre.

Debout au-dessus d'elle, il lui caressa la joue avec une douceur surprenante.

— Je suis content que tu sois en sécurité, dit-il doucement, « et je t'aime toujours, Hermione. Mais Merlin, aide-moi, je ne t'apprécie pas beaucoup en ce moment, alors… donc je dois aller. »

Il se pencha, déposa un baiser sur son front, tourna les talons et partit.

Le premier sanglot prit Hermione par surprise. Il n'y avait eu aucun signal avant-coureur. Tout d'un coup, c'était juste là, déchirant son corps faible et fatigué. Et d'autres ont suivi, et encore plus, jusqu'à ce qu'elle s'effondre sur le côté, se recroqueville en boule, un bras traînant sur le bord du lit, et pleure. Elle ne pouvait pas dire exactement quand Drago était arrivé. Le temps avait cessé d'avoir beaucoup d'importance pour elle à ce moment-là. Un instant, elle sanglotait seule et l'instant d'après, il était juste là, la prenant dans ses bras alors qu'elle était rouge, fiévreuse et moite d'avoir pleuré. Il l'a berça pour la calmer tout en lui caressant les cheveux.

Il lui demanda à plusieurs reprises ce qui se passait, mais elle pleurait trop fort pour obtenir une réponse intelligible. À la fin, il la tint simplement dans ses bras jusqu'à ce qu'elle s'endorme, le visage pressé dans le creux où son épaule rencontrait sa gorge. Puis, il exécuta un sort de réduction de température suivi d'un sort de sommeil sans rêves et tira les couvertures jusqu'à son menton, et descendit demander à Pinky si quelqu'un était là pendant qu'il rendait visite à sa mère. Ce n'est que lorsque Pinky a mentionné le nom de « Ron Weasley » que Drago s'est lui aussi laissé aller à un petit effondrement, criant et donnant des coups de pied aux meubles (ce qui a simplement amené Pinky à rouler des yeux et à se retirer dans sa chambre jusqu'à ce que la tempête soit passée) - et puis finalement il travailla sur les protections qui gardaient la maison. Ils avaient auparavant autorisé l'entrée à toute personne qui s'approchait sans mauvaise intention. Mais maintenant Drago, tout en marmonnant furieusement tout le temps, s'arrêtant de temps en temps pour repousser violemment des mèches de cheveux blancs comme du sucre hors de ses yeux, modifiait les sorts à la fois rapidement et avec compétence pour ne plus permettre à un certain Ronald Weasley d'accéder au cottage, point final.

Le lendemain, Hermione fut capable de quitter le lit pour la première fois depuis la bataille. Elle se dirigea vers la fenêtre de la pièce où elle passa plusieurs heures à regarder la lumière changer sur le lac de Poudlard, et les lumières s'allumer dans le château, une par une à l'approche de la tombée de la nuit. Elle y dîna avec Drago, et finit par s'endormir là, se penchant en arrière contre lui, son dos contre sa poitrine et ses bras lâchement serrés autour de sa taille par derrière.

Drago resta assis là avec elle dans ses bras pendant un long moment, observant la progression de la lune sur le lac et respirant l'odeur de ses cheveux, avant de finalement se lever et de porter son poids chaud et endormi à travers la pièce jusqu'au lit.

Le lendemain matin, Hermione descendit les escaliers et le soir, elle se promenait dans le jardin, profitant de la brise dans ses cheveux et du parfum des roses qui, grâce à leurs protections magiques, étaient en pleine floraison malgré la neige. Elle était incroyablement protégée contre le froid, en grande partie grâce à Pinky. Elle portait l'écharpe sur laquelle l'elfe avait travaillé ces derniers jours, qui, bien qu'enroulée plusieurs fois autour de son cou, parvenait toujours à traîner sur le sol enneigé derrière elle. Pourtant, même toute cette protection contre le froid n'empêchait pas Drago de devenir fou lorsqu'il revenait d'une visite de quarante minutes avec sa mère pour la retrouver dehors.

Elle n'a pas résisté à ses soins alors qu'il la ramenait à l'intérieur, mais elle n'était pas non plus du tout intimidée par son mécontentement évident de la trouver si exposée aux éléments. Tout ce qu'elle fit, tandis que Drago se frottait et soufflait dans ses mains, fut de l'informer calmement et avec une détermination de fer qu'elle avait l'intention de l'accompagner à Sainte Mangouste le lendemain. Il était grand temps, avait-elle décidé, de rendre visite à Harry.

Drago leva les yeux vers elle, ses mains toujours coincées entre les siennes, ses yeux plissés, l'expression de son visage un étrange mélange de suspicion et d'inquiétude.

— Hermione, je ne pense vraiment pas …

Mais avant qu'il ait pu terminer sa phrase (et probablement déclencher une énorme dispute), ils furent tous les deux surpris par un grand hibou à l'air hautain, immédiatement identifiable comme appartenant au Ministère de la Magie, entrant par la porte arrière, que Drago avait laissé entrouverte dans sa hâte de faire rentrer Hermione pour la protéger du froid.

Le hibou atterrit sur la table basse juste en face de l'endroit où le jeune couple était assis sur le canapé, et tendit une patte vers Drago, faisant claquer son méchant petit bec d'impatience. A peine Drago eut-il détaché le parchemin qu'il portait, que la créature laissa échapper un son qui était aussi proche d'un grognement de dédain que n'importe quel son qu'un hibou pourrait pouvoir émettre. Puis a repris son envol et est parti.

— Quel oiseau absolument méchant, pensa Hermione, alors que Drago déchirait la lettre. « Je n'aurais jamais cru qu'ils pouvaient être si… Drago ? Drago, qu'est-ce qu'il y a ? »

Ayant fini de parcourir la lettre, il avait levé vers elle des yeux alarmants, pâles et choqués.

Hermione savait qu'elle était la seule personne au monde, à l'exception peut-être de Severus Rogue, à qui Drago permettrait de le voir dans un tel moment de peur.

— Drago, tu me fais peur, dit-elle, attrapant le papier qu'il tenait toujours dans ses mains qui semblaient devenues raides et en bois. « Drago… » et sa voix montait régulièrement vers la panique, elle ne pouvait pas s'en empêcher. « Qu'est-ce qu'il se passe ? »

— Severus avait tort, dit Drago d'un ton sourd alors qu'elle lui retirait le papier des doigts. « Même Dumbledore avait tort. Le Ministère, ils vont me juger après tout."

— Te juger ? Avec quelles accusations ?

Mais il ne répondit pas, ce n'était pas nécessaire. En tournant son attention vers le parchemin dans ses mains, elle pouvait voir assez bien par elle-même. La majeure partie de la lettre était écrite en noir, mais les accusations ressortaient avec une encre rouge vif, une encre comme du sang.

Trahison.

Crimes de guerre.

Meurtre.