Chapitre 4 :

Partage de chaleur

Après leur premier vol ensemble et leur discussion sur la manière de Nefrea de voir les éléments et de les traiter, les choses ne firent que s'améliorer entre lui et Smaug. Les discussions sérieuses sur la Terre du Milieu ou l'ancien monde du mage étaient entrecoupées d'autres plus légères et simples. Smaug aimait visiblement qu'il lui raconte des histoires de son monde qu'elles soient fictives ou réelle. Il avait donc sortis les livres de contes et d'histoire qu'il avait pour le satisfaire. Puis il avait réclamé ses propres histoires et Smaug s'était mis à raconter en se basant sur l'histoire réelle de ce monde. Régulièrement, ils allaient voler la nuit, s'amusant follement avec cela. Smaug semblait ravi de pouvoir se dégourdir les ailes quand bon lui semblait et Nefrea assouvissait ses envie de cabrioles autant qu'il découvrait et savourait les jeux aériens avec son comparse. Voler à deux était encore mieux.

Ils revenaient justement d'une nuit de vol ce matin là. Ils étaient maintenant au cœur de l'hiver. Il neigeait et faisait particulièrement froid, glacial dehors. Bien sûr, les deux dragons de feu n'était pas dérangé par cela. Pourtant, Nefrea le supportait mal. le froid physique n'était pas un réel problème mais il détestait tellement ce froid qui lui rappelait nombres de mauvais souvenirs. Physiquement, il allait bien mais mentalement, la sensation était amplifiée par son dégoût de la chose et les souffrances que cela ravivait. Il réalisait que sa perception du froid était biaisée, plus forte qu'elle ne l'était réellement mais il ne supportait plus d'avoir froid. Il voulait avoir chaud, avoir cette sensation de confort et paix, de foyer et de sécurité que cela lui inspirait. Il se secoua en entrant dans la montagne avec Smaug. La porte se referma et maintenant que l'euphorie du vol se dissipait, il frissonnait, inconfortable.

- Viens, ordonna la voix grave et profonde de Smaug.

Il releva la tête vers lui pour voir qu'il s'était allongé un peu plus loin au sol. Il le regardait, l'une de ses ailes relevée en une invitation que le dragon de mithril comprit sur le champs. Il sourit, sa tête expressive lui permettant quelques petites choses. Il s'avança heureux ému. Délicatement, il vint prendre place, s'allongeant contre Smaug, se blottissant timidement contre lui. La grande aile rouge sombre se posa sur lui et le ramena même un peu plus contre l'imposante chaleur de l'autre dragon. Enivré, il gronda de plaisir, se calant confortablement contre lui, se gorgeant de sa chaleur incroyable. C'était tellement agréable et confortable. Cela lui donnait l'impression d'être roulé en boule dans un bon fauteuil au coin de la cheminée, l'aile chaude sur lui faisant office de couverture. Il se colla contre Smaug heureux de pouvoir enfin être tout contre cet être flamboyant qu'il avait vu de loin et qui l'avait attiré. Découvrir Smaug n'avait que renforcer sa première impression et il était très heureux d'être venu.

Il soupira de bonheur une fois bien installé, captant un éclair de tendresse dans l'aura de Smaug. Il ne fit aucune remarque, souriant intérieurement. Smaug le regarda avec une sorte de sourire arrogant et fier de lui, l'amusant. Il alla ensuite poser sa tête au sol pour se reposer et il en fit de même, allongeant son cou contre le sien. Mais il était moins long que Smaug qu'il ne put rejoindre, se contentant donc de poser sa tête contre lui. Pourtant, Smaug bougea à nouveau, relevant la tête pour venir la glisser sous la sienne. Curieux, Nefrea se laissa faire. Smaug arqua le cou, faisant glisser sa tête pour qu'elle repose juste derrière sa nuque et bien entendu, protégé par sa très résistante peau draconienne, Nefrea ne fut pas blessé par ses pics. Il était même très agréable de les sentir, comme si quelqu'un aurait baladé ses ongles sur sa peau en une douce caresse. Cela faisait le même effet. Smaug reposa sa tête au sol pour ne plus bouger, le laissant ainsi poser la sienne sur son cou et tout en lui ronronnait de bonheur. Jamais il n'avait senti sa part de dragon aussi heureuse. Mais il fallait dire qu'il n'avait jamais pu rencontrer de dragon avec son niveau d'intelligence, sa taille et avec lequel il s'entendait très bien, de mieux en mieux. Ça faisait du bien et il soupira profondément de bien-être.

- Merci de me laisser rester avec toi, fit doucement Nefrea. Jamais je n'avais été aussi bien qu'ici et jamais je n'avais pu passer du temps avec un autre dragon. J'aime ça.

- Les dragons de ton ancien monde n'étaient que des mouches, grommela-t-il en le faisant sourire.

Smaug semblait toujours un peu vexé que dans cet autre monde, les dragons étaient des animaux sans parole, petit et avec une intelligence limité.

- C'est vrai, s'amusa-t-il. Tu es mieux qu'un feu de camps c'est certain.

- Tu es le seul dragon de feu que j'ai jamais rencontré à avoir froid, ricana-t-il.

- Je n'ai pas réellement froid honnêtement. Mais rien que la sensation de froid sur ma peau, qu'il fait froid, me répugne. J'ai horreur du froid. Trop de mauvaises choses, de mauvais souvenirs d'avoir été frigorifié dans ma forme primordiale. Je n'aime pas le froid, bredouilla-t-il.

- Je n'ai jamais eu froid, mais je n'aimerai pas ça non plus si ça devait arriver.

Nefrea sourit, percevant un peu de soutient, de compassion et de compréhension en lui. Il soupira, profitant de la chaleur de Smaug qui l'englobait agréablement, profitant de son contact. C'était apaisant et sécurisant. Près de lui, il ressentait exactement ce qu'il avait imaginé en voyant son aura au loin et depuis en le regardant. Il ferma les yeux pour en profiter, détendu, plus au chaud qu'il ne l'avait été depuis une éternité. Il ne fut pas conscient du moment où il s'endormit, paisiblement et lorsqu'il se réveilla, il n'aurait su dire combien de temps avait passé. Mais il était tellement bien. Il prit son temps pour sortir du sommeil, captant la lente et profonde respiration de Smaug près de lui. Il avait un peu bougé en dormant. Il s'était un peu plus blottit contre le dragon rouge et était allé cacher sa tête sous la grande aile qui le couvrait toujours. Smaug aussi avait remué, son cou et sa tête venus l'entourer pour rejoindre la sienne sous l'aile. Smaug le cachait presque tout entier et il se sentait en sécurité ainsi. Il ne bougea donc pas, profitant de ce moment, se demandant si cela se reproduirait. Il avait tellement bien dormi. Mieux que jamais.

Ce fut un peu plus tard que Smaug commença à s'éveiller paresseusement, se resserrant autour de lui instinctivement. Nefrea pétilla un peu plus intérieurement, la sensation de protection encore plus forte avec cela. Il laissa le maître de la montagne se réveiller tranquillement, le bien-être et le confort dans son aura ainsi que la satisfaction prouvant qu'il était bien lui aussi. Il ne bougea pas tout de suite, ouvrant simplement les yeux pour trouver les siens non loin.

- Es-tu réveillé depuis longtemps ? demanda-t-il.

- Non, répondit-il. Je pourrais dormir là toute ma vie, soupira-t-il avec envie.

- Les dragons dorment beaucoup, sur de longues périodes parfois. Nous avons dormis plusieurs jours, remarqua-t-il en le surprenant.

- Vraiment ? Je ne l'avais pas remarqué. Mais comme je prend le métabolisme des dragons quand je prend ma forme élémentaire, c'est compréhensible.

- Tu peux vivre exactement comme un dragon si tu es dans ce corps ?

- Oui.

- Alors reste comme ça.

- Je ne peux pas, s'amusa-t-il. Je dois avoir les deux pour mon équilibre. Et puis ma magie est limitée dans cette forme. Je l'aime trop pour ne plus en faire. C'est aussi plus facile de lire et d'écrire avec des mains comme pour beaucoup d'autres choses. J'adore être un dragon mais je ne suis pas qu'un dragon.

Smaug grommela, le faisant rire doucement.

- Smaug ? Est-ce que ça te dérangerait si je créai un jardin dehors, près de la montagne ?

- Pourquoi faire ?

- Mes vivres diminuent et il faudra bien que je mange. J'aimerai faire pousser ce qu'il me faut et ça va prendre un peu de temps alors il faudrait que je m'y mette.

- Je n'ai pas mangé depuis des lustres, remarqua-t-il.

- C'est vrai que je n'ai pas faim non plus même si ça fait plusieurs jours qu'on dort, releva-t-il.

- Les dragons n'ont pas besoin de manger beaucoup surtout si nous dormons dans un lieu approprié sur de très longues périodes. Notre métabolisme ralentir considérablement en sommeil profond. Je l'ai fait longtemps. Je n'ai pas mangé depuis que je suis ici et ça fait presque un siècle.

- Impressionnant. Je ne vais pas pouvoir en faire autant. Il va falloir que je reprenne ma forme primordiale régulièrement et la faim va revenir au galop quand je le ferai, comme la soif si je n'ai rien mangé ou bu depuis longtemps en tant que dragon.

- Pourquoi tu ne vas pas simplement chasser plutôt que de te fatiguer avec une culture ? Il y a des terres et des montagnes au nord où il y a du gibier. En volant, tu y serais en un instant.

- Je ne peux pas chasser, répondit-il doucement.

- Pourquoi ? Tu es un dragon. Les dragons chassent. Tuer te dérange ? Manger de la viande te dérange ?

- Non et j'ai déjà tué plus d'une fois dans le passé. Seulement, ma nature est spéciale. Les conditions de ma vie précédente étaient particulières. L'être que je suis obéis à des lois qui dépassent ce mondes et tout les mondes. Je peux renaître et me souvenir de tout de mes vies précédentes, des mondes précédents. Je traverse la mort comme personne. Je suis plus immortel que n'importe qui. Mais avoir ce pouvoir de braver la mort engendre des contraintes. Il y a une contre partie. Dans ma précédente vie, cette contrainte a été levé en raison de conditions particulières mais elle est bien là dans cette vie. Il m'est interdis de tuer volontairement ou d'avoir un geste dont je sais qu'il risque de tuer, de blesser mortellement. Je n'ai pas le droit et cette magie est très puissante.

- Que se passe-t-il si tu essaie ?

- Je me retrouve complètement paralysé avant d'avoir pu tuer et je ne retrouve ma liberté qu'une fois que j'abandonne cette volonté de tuer. Rien ne peut passer cet interdit. C'est comme une loi de l'univers pour moi qui va avec ma magie. Alors, je ne peux pas chasser même si ça ne m'aurait pas déplus. Mes instincts de dragon sont plutôt frustrés sur ce point.

- Mais tu peux manger de la viande n'est-ce pas ?

- Oui bien sûr. Si ce n'est pas moi qui tue l'animal.

- Je comprend. Fais ton jardin si tu veux mais nous irons chasser ensemble. Je les attraperai pour toi, assura-t-il avec suffisance. Je suis un excellent chasseur.

- Vraiment ? Merci, fit-il en venant spontanément frotter sa tête contre la sienne.

Smaug gronda de satisfaction et lui rendit le geste. Ils passèrent ainsi un moment paisible à se réveiller avant de se redresser vraiment, Nefrea grommelant à la perte de la chaleur de Smaug qui ricana, s'en amusant. Ce fut sur le champs que Smaug l'emmena chasser, l'air d'en avoir envie aussi maintenant qu'ils en avaient parlé. Et il fallait dire qu'il faisait bien plus d'exercice et qu'il dormait moins depuis l'arrivée de l'istar. Un bon repas faisait bien envie. Ils partirent donc en chasse vers le nord dans la nuit tombante et leurs ailes puissantes ne tardèrent pas à les mener loin au dessus de zone sauvage. Nefrea proposa son aide pour localiser rapidement des proies et Smaug approuva. À eux deux, ils eurent tôt fait d'avoir un vrai festin. Nefrea était ravi, ses instincts de chasseurs moins frustrés après avoir pu activement participer à la traque. Et Smaug était fier de lui, ayant plus que prouvé qu'il était un bon chasseur alors que pas une proie ne lui avait échappé, attrapée du premier coup, parfois à deux dans une même attaque, s'il y avait plusieurs proies au même endroit. Ils avaient fait un repas de roi, Smaug lui offrant volontiers des prises sans aucune réticence, gonflé d'orgueil devant sa capacité à les nourrir tout les deux. Puis ils étaient rentrés et s'étaient réinstallés l'un contre l'autre pour dormir.

Il en fut souvent ainsi ensuite. Smaug le laissait dormir contre lui après un vol dans le froid d'hiver. Les contacts physiques se multipliaient dans des instincts purement draconiens. Ils passaient de plus en plus de temps ensemble pour aller volet, pour parler ou même pour dormir, leur relation détendu malgré qu'il reste des points de crispation que Nefrea ne comprenait pas encore. Mais cela ne tarderait pas. Le printemps revint et ils en avaient profiter pour retourner chasser et faire un festin pour la seconde fois. Nefrea avait commencé un jardin à l'extérieur dans un creux de roche caché. Il l'avait entièrement façonné avec sa magie, créé un microclimat et des protections pour s'assurer que cela pousserait bien malgré les aléas du temps et de la terre endormi, alimentant l'endroit de sa magie. Et les protections, tiendraient les chapardeurs à l'écart. Il planta ensuite quelques graines alors qu'il en avait en pagaille dans ses réserves. Sa magie naturelle pouvait lui permettre avec assez de force, et de puissance, de faire pousser une plante très vite. C'était épuisant mais s'il manquait de nourriture, pouvoir la faire pousser en quelques instant était salvateur alors il avait pris cette précaution. Les vivres avaient toujours été un soucis central. Il pouvait se passer de beaucoup de choses mais pas de manger et de boire, surtout quand il usait de puissantes magies. Ses réserves n'étaient pas encore au bout mais elles baissaient et il n'y avait rien à cueillir dans la région autour de la montagne. Mieux valait donc prévoir.

Il revenait d'un moment a avoir entretenu son jardin cette après-midi là. Et il était heureux. Sa vie lui plaisait. Il avait rencontré un être incroyable qui l'attirait et avec qui il était bien, qu'il aimait de plus en plus et avec lequel il avait une relation de plus en plus douce et paisible, sincère. Il avait la paix, il avait la liberté, il avait le temps… Il pouvait faire ce qui lui plaisait sans pression, sans exigence. Il pouvait simplement flâner si cela lui plaisait. Il avait tout son temps pour lire, faire de la magie. Une magie qui ne cessait de s'améliorer alors qu'il y travaillait chaque jour. Sa magie élémentaire était bien plus forte et fine qu'avant alors qu'il avait le temps de se concentrer sur les éléments et la nature qui étaient en plus particulièrement vifs et énergiques, éveillés en ce monde. Cela faisait deux ans qu'il était né en Terre du Milieu et sa magie avait fait des bonds considérable maintenant qu'il pouvait se consacrer à elle. Mais il n'en n'avait jamais assez en magie. Sa vie actuelle pourrait durer une éternité qu'il en serait enchanté. Il était bien, rien ne le pressait ou ne l'oppressait, plus de guerre, plus personne pour le traquer, l'attaquer et lui faire du mal dans tout les sens du terme. Il avait même le temps de jardiner et cela l'avait amusé. Jamais il n'aurait cru qu'il aurait le temps de faire ce genre de chose un jour. Il l'avait dans cette nouvelle vie et pouvoir faire tout ce qui l'attirait lui plaisant. Une vie libre et paisible. Il ne voulait que ça.

Smaug le regarda apparaître dans son camps. L'istar était un peu sale, taché de terre mais un vague geste de son bâton fit disparaître tout cela bien vite, remettant de l'ordre dans sa tenue et ses longs cheveux de mithril qui sentaient si bon. L'istar était un vrai trésor sur patte à ses yeux avec tout ce mithril et ce profond lien aux éléments, à la nature. Il était d'autant plus un trésor depuis qu'il avait découvert qu'il était aussi un dragon, un dragon de feu et de mithril. Cela faisait des siècles qu'il n'avait pas vu l'un des siens et il mentirait s'il disait que cela ne lui avait pas fait du bien. Les dragons étaient un peuples même si, avec le temps, ils avaient été moins nombreux et s'étaient séparés pour leur sécurité et pour continuer à assurer leur mission première. Retrouver l'un des siens était salvateur.

Au début, il avait eu du mal à voir Nefrea comme un vrai dragon avec cette double nature mais il avait été rapidement convaincu. Il avait l'odeur d'un dragon même s'il fallait y ajouter celle du mithril avec puissance. Il avait tout les comportements d'un dragon, la façon de bouger d'un dragon, de voler, de manger quand ils chassaient… Il décryptait très naturellement son comportement, ses gestes, ses bruits parce qu'il parlait cette langue aussi. Il avait le feu. Il avait tout d'un dragon et il appréciait de plus en plus sa présence auprès de lui, leurs discussions, leurs sorties, leurs chasses, leurs siestes… Le fait qu'il soit un dragon, et maintenant qu'il le connaissait bien lui et sa manière de voir les éléments et la nature, de les traiter, le rendait d'autant plus attrayant. Et il fallait dire que c'était un magnifique dragon aussi puissant et dangereux que doux et calme. L'avoir avec lui comblait un trou dans son existence.

Seulement, il y avait une chose chez lui qui était radicalement différente des autres dragons de la Terre du Milieu. Une chose qui était pourtant dans leur nature profonde, une chose qui les avait construis, qui était née avec eux. Peut-être était-ce parce qu'il était né magicien avant de devenir dragon ? Il semblait avoir une partie de cette spécificité ou il l'avait complètement d'une manière différente. Il avait d'abord cru qu'il cherchait à la cacher mais il avait fini par admettre qu'il ne l'avait pas, ou pas de manière attendu. Pourtant, il y avait aussi ces choses qui faisaient penser qu'il l'avait. C'était troublant, très troublant et il avait décidé de tirer ça au clair. Il ne l'avait pas fait jusqu'ici parce qu'on ne parlait pas de ça en général. Pour les dragons d'ici, c'était inutile, ils savaient et pour les autres… Aucune autre espèce n'était capable de les comprendre ou de soupçonner cela. Ils ne voudraient même pas l'entendre. Nefrea en revanche, était tout disposé à entendre et comprendre, le réclamant même. Il était un dragon, il pouvait savoir, il comprendrait et il voulait mettre la chose au clair. Il voulait garder Nefrea ici avec lui mais avant de le faire, il fallait s'assurer qu'il le pouvait sans risque.

Ce jour là, il avait donc empli sa gueule d'or, amenant le tas dans le grand hall à l'entrée. Il l'avait déposé au sol alors que l'istar était dehors pour son jardin. Il l'avait caché d'une aile et avait attendu qu'il rentre. Cela n'avait pas tardé et après avoir remis de l'ordre dans sa tenue, il avait pris son apparence de dragon tellement beau, sachant qu'il la préférait. Sa rien dire, il avait relever son aile pour dévoiler l'or lorsqu'il s'était tourné vers lui. Puis il avait observé sa réaction, avide et tendu, se demandant si cela allait mener au résultat qu'il espérait : garder Nefrea à Erebor sans que cela ne pose aucun problème. Le dragon de mithril baissa les yeux vers ce qu'il révélait, regardant une seconde avant de relever le regard vers le sien, interrogatif et perdu. C'était alors évident : Nefrea n'avait pas la soif d'or et de richesse dévorante et obsessionnelle des dragons. Jamais il n'aurait réagis ainsi si cela n'avait pas été le cas. Un autre dragon aurait tenté de se jeter sur l'or d'instinct sur le champs. Même s'il avait pu se retenir, cela se serait vu dans son attitude, dans sa magie, dans son énergie. Il n'aurait pu quitter l'or des yeux. Aucun dragon n'était indifférent à l'or, surtout à l'or d'ici. Pourtant Nefrea n'avait aucune réaction, parfaitement paisible et sans attrait pour le petit trésor devant lui.

- Sais-tu ce que c'est ? demanda Smaug.

- De l'or, répondit-il.

- Tu es un étrange dragon, s'amusa Smaug en s'installant confortablement.

Il releva une aile et il vit la joie pure et l'envie de Nefrea s'allumer dans ses yeux avec passion. Il vint volontiers s'allonger à ses côtés et se blottir contre lui, grondant de plaisir. Une chose était certaine, il aimait sa chaleur autant qu'il l'avait avancé. Il déposa son aile sur lui et Nefrea releva la tête vers lui :

- De quelle étrangeté parles-tu exactement ? Ce n'est pas cela qui manque chez moi, sourit-il en le faisant ricaner.

- Qu'est-ce que cet or t'évoque ?

- Rien. Pourquoi ?

- N'importe quel autre dragon se serait jeté sur cet or sans même s'en rendre compte, expliqua-t-il. Les dragons sont obsédés par l'or et les richesses issues de la terre, de manière viscérale et profonde, instinctive. Ils gardent farouchement leur trésor. Nous sommes attirés par l'or de manière irrésistible. Nous pouvons le sentir de très loin. C'est une chose fondamentale pour nous.

- Je vois. Pas pour moi. L'or ne m'attire pas plus que tout autre chose. Enfin, sauf la magie. C'est elle mon trésor.

- Je le sais, je voulais voir si tu ne l'avais vraiment pas.

- Est-ce un problème à tes yeux ? s'inquiéta Nefrea.

- Non, répondit-il en effleurant sa tête de la sienne avec délicatesse.

- C'est ton trésor ? demanda-t-il en regardant le petit tas d'or.

- Une partie, sourit-il. Cette soif d'or est ce qui fait que les autres peuples nous détestent parce qu'ils craignent que nous venions à eux pour leurs richesses.

- Pourquoi est-ce si important pour vous ? demanda-t-il avec curiosité. Si c'est ainsi inscrit dans vos instincts primaires, j'imagine que c'est vital ou au moins de grande valeur pour vous.

- En effet. Mais l'or et les joyaux sont à nos yeux bien différents de ce qu'ils sont pour les autres. Les dragons amassent l'or et les richesses pour une bonne raison. Nous n'en n'avons bien entendu pas une utilité de commerce ou de pouvoir comme les autres. Nous le faisons pour la terre.

- Pour la terre ?

- Oui. Les dragon ont été créé il y a bien longtemps de cela par Morgoth ou Melkor. Comme ton protecteur, il était un Vala. L'un des plus puissants. Mais il s'est rebellé. Il voulait ce monde pour lui seul, créer ses propres choses, les régenter, les dominer… Il voulait être le maître. Alors qu'il s'est rebellé contre son créateur et ses semblables. Il fut le premier Seigneurs des Ténèbres de ce monde et il est la source primordial du mal véritable.

- Il y en a toujours, remarqua-t-il doucement avec tristesse.

- Malheureusement. Melkor a déclaré la guerre et pour la mener, il a créé ou amené à lui tout un tas de créatures. Ungoliant, l'araignée géante née des ténèbres, les Balrog qui étaient des Maiar qu'il a perverti, Thuringwethil la vampire, des hommes l'ont rejoint, des elfes ont trahis pour lui… Il a créé des monstres de toutes sortes, les Ùvanimor. Les trolls, les gobelins, les ogres… tous en font parti. Il a créé les orcs en capturant des elfes qu'il a atrocement torturés et pervertis avec son abominable magie malsaine et vicieuse.

- Où est Melkor aujourd'hui ?

- Il a été totalement vaincu et banni dans le vide intemporel au-delà du monde. Mais il a semé les graines de la discorde et de la cruauté, du mal et de la perversion en ce monde. Plusieurs de ses suivants et de ses partisans sont toujours là quel que part, comme ces créatures.

- Et c'est lui qui a créé les dragons ? demanda-t-il très curieux sur cette histoire.

- C'est ce que tous croient. Tous en sont persuadés. Seuls les Valar savent peut-être la vérité. Les Valar et les dragons bien sûr. La vérité est autre. Nous sommes en réalité né de la terre. Seulement, Melkor nous a trouvé avant que notre création ne soit achevée. Il cherchait toute créature puissante pour son armée et il ne laissait pas le choix à beaucoup. La terre était en train de nous donner naissance lorsqu'il nous a découvert et il a immédiatement compris quel était notre potentiel. Il n'a pas manqué l'occasion. Il n'a pu réellement influencé notre essence mais il a incrusté sa magie en nous pour pouvoir nous contrôler, forcer notre obéissance, siffla-t-il avec fureur. Alors nous avons combattu avec lui sans que personne ne sache jamais. Beaucoup des nôtres sont morts dans ces guerres qui n'étaient pas les nôtres.

- Je suis désolé, fit-il doucement avec une réelle tristesse alors qu'il frottait sa tête contre la sienne avec réconfort. Est-ce pour cela que vous avez été affilié au mal ici ?

- Oui et si Melkor n'est plus, il reste en nous une incrustation de cette magie répugnante. Mais à l'origine, nous n'étions pas nés pour cela. La terre nous a donné naissance pour la défendre des autres.

- Pour la défendre ?

- Oui. Notre avidité pour l'or, les métaux précieux, les pierres précieuses… Notre obsessions pour les fruits de la terre a sa raison d'être. Elle nous a envoyé les récupérer. Les peuples de ce monde fracassent la roche pour la plier à leurs envies, creusent la terre pour lui arracher ses étoiles et son sang. Ils en tirent tout ce qui leur plaît sans aucun égard pour elle et ses cris de douleur. En la creusant ainsi, en lui volant ses métaux et ses pierres, ils la blessent, la saignent, la tuent… Ils altèrent sa magie, son énergie, son âme comme s'ils enfonçaient une épée dans une créature vivante pour arracher des parties d'elle. Cela sans même s'en rendre compte juste par soif de richesse, pour satisfaire leur avidité et leur cupidité. Les dragons sont attirés par ses richesses parce que notre raison d'être est de les récupérer pour les rendre à la terre. Nous couvons nos trésors pour y répandre notre magie. Une magie qui permet à ce qui a été pris de renouer avec la terre pour la soigner, la guérir et l'apaiser. Les autres peuples disent que nos trésors sont maudits et c'est vrai pour eux. La magie des dragons qui se répend dans nos trésors lui permet de se défendre ensuite contre ceux qui le convoiterait encore, qui voudraient une nouvelle fois les substituer à la terre. Elle les rend fous et les conduit à leur perte en punition.

- Un juste retour des choses, acquiesça-t-il sérieusement en s'attirant un petit sourire approbateur. Dans mon ancien monde, ils ont tellement exploité et éventré la terre qu'ils l'ont tué, s'attrista-t-il.

- Nous sommes là pour empêcher ça ici, répondit Smaug. Nous sommes nés de la colère et de la souffrance de la terre, de son désespoir et de sa tristesse, de sa fureur envers ceux qui la blessent. C'est pourquoi les autres peuples sont de la vermine pour nous, tout ceux qui blessent la terre. C'est pourquoi nous sommes ce que nous sommes. Nous ne sommes pas nés d'amour. Nous sommes nés de souffrance.

- Mais ça ne fait pas de vous des êtres mauvais. Cela fait de vous les gardiens et les protecteurs de la terre, ses enfants, sourit-il.

- Tu seras le seul en ce monde à le voir ainsi, s'amusa-t-il.

- Cela fait des autres des imbéciles, ricana-t-il. Tu as dit que la Montagne t'avait fait venir ?

- Oui. Cette montagne est extrêmement puissante. On peut trouver ici un nombre incalculable de fruits de la terre différents, en grande quantité. De l'or, des joyaux, des métaux précieux… Cette montagne est comme le cœur de la Terre du Milieu pour cet élément. Les maudits nains l'ont trouvé et ont immédiatement commencé à l'exploiter en bâtissant cette chose, dit-il en regardant autour de lui. Ils ont arrachés à la Montagne plus de trésors que jamais ailleurs et les ont entassé ou s'en sont servis pour leur prospérité. Les hommes qui vivaient là dehors en profitaient comme bien d'autres. Ils tuaient la Montagne et la terre. Alors je suis venu la prendre, je couve son trésor pour la soigner et je la protégerai jusqu'à la fin. Plus personne ne tirera une poussière ce cette montagne. Elle s'est endormie pour se reposer depuis mon arrivée et je veille sur elle. Un jour, elle se réveillera et la nature prospérera à nouveau.

- Je comprend maintenant pourquoi elle t'est si précieuse, pourquoi tu la protèges avec tant de force. Sache que jamais je n'irai contre cela. Je serai plus un dragon qu'un autre dans ce point de vu. Je n'ai pas soif d'or mais moi non plus je ne supporte pas que l'on fasse du mal à la terre, à la nature, aux éléments.

- Tu me l'as prouvé et ta magie qui chante avec eux est belle à voir. Toi tu ne blesses pas la terre, tu es son amie, tu travailles avec elle et tu la soignes. Je sais que tu ne lui feras pas de mal.

- Si tu le permets, je peux aider à essayer de guérir la montagne. Et je te jure que jamais, jamais je ne lui prendrai quoi que ce soit si elle ne me l'offre pas ou que tu ne l'autorises pas. Je le jure sur ma magie.

Immédiatement, et même dans cette apparence, le serment prit forme, le liant à la Montagne et à Smaug qui le ressentit et comprit instinctivement à quel point cette promesse était forte et incontournable.

- Qu'était-ce ? demanda-t-il.

- Un serment magique. Une promesse faîte par magie qui ne peut être brisée. Pour les autres magicien, la rompre signifierai la mort immédiate. Pour moi qui suis immortel, cela signifierait une immense souffrance et la perte de ma magie en plus d'un bannissement du monde dans lequel j'avais fait la promesse. Toi seul et la Montagne pourrons décider de me laisser prendre quelque chose ici, même une poussière, ou de lever ce serment.

Smaug vint frotter sa tête contre la sienne, doux alors que Nefrea percevait son respect et son soulagement d'avoir eu cette promesse incassable.

- Pensais-tu que je venais pour ton trésor au début ? demanda-t-il.

Cela semblait logique, comme l'extrême instinct protecteur et possessif obsessionnel que Smaug montrait pour son domaine et ses biens. C'était largement compréhensible et normal maintenant qu'il savait tout cela. C'était sa raison de vivre naturelle. Cela expliquait pourquoi il avait été dubitatif sur la raison de sa venue. Si la présence d'un trésor ici se savait, bien des intéressés devaient être tentés.

- Oui, confirma-t-il. Ceux qui ont pour projet de venir ici viennent pour l'or, cupides et avides qu'ils sont. Aucun n'a osé venir depuis que je suis là mais ils finiront par essayer. L'attrait de la richesse est irrésistible pour eux et pas pour les mêmes raisons que les dragons. Ces vermines naines veulent reprendre la Montagne je le sais. Je ne les laisserai pas faire.

- Je pourrai t'aider à la défendre, proposa-t-il.

- Ce n'est pas nécessaire pour le moment. Et si les nains ou d'autres viennent, je me chargerai de leur rappeler pourquoi je suis crains depuis des siècles, susurra-t-il avec supériorité et orgueil en l'amusant.

- J'imagine que c'est parce que je ne suis pas né de la terre de ce monde à l'origine que je ne ressens pas spontanément ce devoir, remarqua-t-il. Il n'empêche que c'est un devoir que je prendrai volontairement avec joie.

- Je le sais. Viens, je vais te montrer.

Il se releva et Nefrea en fit de même, boudant comme à chaque fois qu'il perdait sa chaleur. Il ne pouvait pas s'en empêcher. Qui ne bouderait pas en perdant la meilleur sensation de confort et de bien-être qu'il n'avait jamais connu ? Cela amusait Smaug à chaque fois. Le dragon tenta de reprendre son or mais cela était difficile avec le tas de petite pièce éparpillées. Aussi, l'istar proposa de s'en charger et de tout faire léviter pour le remettre où il voudrait. Smaug approuva et le regarda prendre sa forme primordiale, avec son bâton dont la pierre reluis lorsqu'il fit léviter le trésor, l'or les suivant gentiment lorsqu'ils se mirent en route.

Devant ses petites jambes, le maître de la montagne le fit grimper sur son dos, l'emmenant ensuite vers le cœur de son domaine. Ils traversèrent la gigantesque salle parsemée d'immenses piliers bien alignés. C'était un hall d'entrée aux proportions titanesques. Nefrea regarda autour de lui, discernant à plusieurs endroits d'autres corridors de géants menant ailleurs. Smaug passa dans l'un d'eux marchant tranquillement et malgré sa taille, et donc celle de ses pas, il fallut un moment pour arriver dans ce que Nefrea pensait être son nid. C'était toujours dans cette zone de la montagne qu'il percevait sa présence quand il s'en allait dormir un moment. Et il resta totalement stupéfait lorsqu'ils entrèrent. Là, il y avait une salle plus colossale encore et elle était littéralement remplie d'or et de richesses en tout genre. Jamais il n'aurait pu imaginer cela, dans de telles proportions. Une telle quantité d'or était totalement incroyable. Même Smaug paraissait minuscule devant l'immensité du trésor et cela lui faisait comprendre à quel point les nains avaient pillés la terre ici. Pas étonnant qu'elle soit dans un tel état.

- C'est incroyable, murmura-t-il. Et effroyable à voir lorsque l'on sait ce que cela signifie, fit-il en serrant les dents les larmes aux yeux. Ce serait comme voir un champ de cadavres pour les êtres vivants.

- Oui, fit sombrement Smaug en le laissant descendre. Ce trésor déplacerait des armées et des peuples entiers. Je dois le défendre lui et la Montagne.

- Jamais je ne ferai quoi que ce soit qui puisse les mettre en danger, assura-t-il an s'avançant vers sa tête. Où veux-tu que je dépose cela ? demanda-t-il pour le tas d'or lévitant après eux.

- Où tu veux, répondit-il en le regardant poser délicatement son chargement avec le reste. Viens dormir avec moi, dit-il ensuite.

Nefrea le regarda avancer et il se transforma pour le suivre, un peu subjugué de sentir à quel point le pouvoir de Smaug baignait les lieux, chaque petite pièce d'or. Sa présence était absolument partout dans le trésor et cela avait vraiment l'apparence d'un nid à ses yeux. Smaug choisit un endroit où le mont d'or était particulièrement conséquent. Il y plongea directement et Nefrea le suivit, un peu amusé de faire cela. Ce n'était pas tout les jours qu'on plongeait dans un tas d'or même s'il aurait pu le faire avec l'or qu'il possédait lui même. Smaug l'accueillit près de lui, sous son aile comme à l'habitude et il se blottit joyeusement contre lui. Il n'avait aucune convoitise pour l'or de Smaug mais en sachant ce que cela impliquait, il était près à l'aider à le protéger. Ils s'installèrent pour dormir et entre le puissant pouvoir de Smaug présent partout et sa chaleur, Nefrea aurait pu jurer qu'il était au paradis.

Blottis dans l'or, ils dormirent plusieurs jours d'affilés, ne bougeant que pour se serrer un peu plus l'un contre l'autre. Et il en fut souvent ainsi dans les temps suivant. Ils coulèrent, les deux dragons indifférents au temps passant. Ils dormaient beaucoup, serrés comme pour ne former qu'un seul être. Ils dormaient, ils sortaient voler et chasser et ils continuaient à discuter. Le trésor révélé, Smaug lui avait fait visiter sa montagne. Les nains avaient vraiment vu grandiose et stupéfiant, à croire qu'ils avaient quel que chose à compenser. Smaug le croyait aussi et cela les amusait.

Dés lors, il lui fut permis de vagabonder dans la montagne comme bon lui semblait, Smaug le laissant y répandre sa magie pour mieux la voir. En voyant la titanesque salle du trône et tout le reste, Nefrea ne pouvait s'empêcher de se dire que les nains devaient être arrogant. Vouloir à tout prix faire preuve d'une telle grandeur démesuré, en imposer autant. Il était évident que les visiteur de la salle du trône et du reste ne pouvaient qu'être impressionné par un tel endroit, écrasé par le pouvoir illustré par le peuple vivant là, accablé par un sentiment de domination. Il le ressentait en y marchant avec Smaug. C'était presque comme si ceux qui avaient bâtis ça se prenait pour les rois de la Terre du Milieu. Mais cela les avait aussi mené à laisser un dragon entrer chez eux et se promener là sans problème. Un retour de flammes s'il en était.

Tout visiter lui prit des mois tellement cela était grand. Visiter les lieux accessibles à un dragon était assez simple mais il y avait aussi tout ce qui ne l'était pas et où il avait dû utiliser ses deux jambes. Il avait trouvé de nombreux cadavres de nains anciens dans ces salles. Ils avaient dû se réfugier là lorsque Smaug avait prit la montagne, et y mourir. Cela ne lui fit ni chaud ni froid, comme pour ce qu'il s'était passé à Dale, la ville à l'extérieur. Smaug avait eu raison d'être en rage, poussé par ses instincts et sa raison de vivre, sa nature profonde ressentant la souffrance de la terre à cause d'eux. Les nains, et ceux qui en avaient profité, avaient exploité, blessé et torturé la montagne. Ils avaient subi les conséquences de leurs actes. Avec la permission de Smaug, il avait tout de même tenu à rendre ces corps à la terre respectueusement, usant de sa magie d'enfant de la mort pour le faire. Il s'était ainsi occupé de tout les cadavres de la montagne qui avaient comme simplement disparus sous sa magie.

Il avait fini par trouver une immense bibliothèque et là encore Smaug l'avait autorisé à en prendre possession. Tout ce qui s'y trouvait était rongé par le temps mais heureusement, tout avait été protégé de l'humidité et des éléments ici. Il fut donc facile de tout restaurer entièrement avec sa magie et il se retrouva avec une myriade de livres sur ce monde. Il se mit à lire pour apprendre, heureux d'avoir le don innée de comprendre, lire, écrire et parler les langues de ce monde. Ainsi pas un ouvrage ne lui était inaccessible. Il venait lire pendant que Smaug dormait, observant les cartes et les fresques, lisant l'Histoire et il put en apprendre plus que jamais sur ce monde, voir des illustration, se faire une idée de la géographie de la Terre du Milieu… Il se plongea dedans, se gorgeant de tout cela avec passion et curiosité.

Il n'y avait rien sur la magie ou très peu en revanche, le décevant. Mais ici, la magie semblait être une chose relativement secrète dans son savoir bien que tous reconnaissaient son existence sans aucun doute. Elle était très bien vu du moment où elle n'était pas sombre ou plutôt jugé comme telle. La différence était immense et il le savait bien. Les elfes semblaient doué de magie à divers niveau, rares étant ceux qui étaient réellement puissants. Il y avait les cinq istari, six avec lui maintenant qui seul semblaient être de vrais magiciens. Des magiciens envoyés par les Valar pour guider et protéger les peuples avec interdiction formelle de les dominer ou d'user de magie viciée pervertie. S'ils enfreignaient ces règles, ils perdaient leur magie et déclinaient jusqu'à la mort.

La magie était présente partout ici et tous pouvaient en user de diverse manière même si cela semblait extrêmement rare. Il y avait des objets et des constructions magiques plus ou moins puissantes. La magie ici était courante et présente en tout lieux mais elle était aussi bien plus subtile et moins franche d'après ce qu'il comprit. Smaug disait qu'il dépassait les autres magiciens. Il avait pris cela avec prudence au début, Smaug plutôt partial dans ses propos lorsqu'il jugeait les autres. Mais avec ses lectures et ses études, il commençait à comprendre que c'était probablement le cas. Il semblait y avoir des magies merveilleuse ici mais les magie vives, franches, impactantes, fluides, précises et d'ampleur étaient une chose beaucoup plus rare. Assurément, une bonne part de sa magie était comme personne ici n'en faisait. Cela lui offrait un avantage rassurant pour rester en sécurité et protéger ce qu'il voulait protéger.

Il put en découvrir plus sur les Valar et sur Ilùvatar, le créateur de ce monde et son dieu suprême pour ainsi dire. Ce n'était pourtant pas comme un dieu à proprement parler qu'il agissait. Il avait créé et régenté un peu les choses, veillant mais il n'exigeait rien, ne se faisait pas vénérer ou toutes ces choses propres aux dieux. Il avait donné naissance aux Valar qui avaient chanté avec lui pour continuer la création du monde. Eä était le nom de leur univers, Arda celui de ce monde. Il se trouvait en Terre du Milieu qui portait bien son nom. Loin à l'ouest par delà la mer, il y avait Aman, les Terres Immortelles avec Valinor ou résidaient les Valar. Au sud est, il y avait encore la mer et la Terre des Ténèbres et à l'est, la Terre du soleil.

Il s'intéressa aux Valar. Ils étaient quatorze. Manwë était leur roi, seigneur des vents, et leur reine, son épouse, Varda, reine des étoiles. Il y avait aussi Ulmo, seigneur de l'eau, Aulë le forgeron maître de la terre avec sa dame Yavanna. Oromë le cavalier chasseur seigneur des forêts époux de Vana. Venait ensuite Irmo le maître des rêves, des visions et des désirs lié à la dame de la guérison et du repos, Estë. Il y avait aussi Tulkas le combattant et sa compagne Nessa la danseuse. S'ajoutaient Nienna, dame de la miséricorde, la tisserande Vairë qui était l'épouse de son protecteur, Mandos ou Namo, le juge des morts. Ils étaient chargés d'administrer Arda, de veiller sur le monde mais ils n'intervenaient que très rarement directement. Les Maiar, les esprits primordiaux, étaient juste sous eux, les servant, chacun d'entre eux affilié à un Vala.

Avec cela, il put mieux comprendre l'organisation de ce monde et son fonctionnement, lisant les légendes des naissances des peuples. Puis il y avait eu les récits de Melkor et de sa traîtrise dans sa quête de pouvoir absolu, comment il avait semé le mal en Arda. Il lut les guerres que cela avait engendré jusqu'à la plus récente : celle qui avait vu la perte de Sauron, vassale de Melkor vu comme une sorte d'héritier.

L'histoire de la Terre du Milieu était digne des plus grands romans d'aventure magique, incroyable. Elle était pleine de magie, de lutte du bien contre le mal, de chevaliers, de seigneurs des ténèbres… Cela aurait peut-être pu être absolument passionnant si Nefrea ne saisissait pas toute l'ampleur des choses, de ce que tout cela impliquait, des masses de morts et de combats qu'il y avait eu. Malgré tout, ce monde lui plaisait. Il y avait du bon et du mauvais. Et bien qu'il semble qu'ici aussi on catégorise un peu trop vite le bien et le mal, c'était très différent de ce qu'il avait connu. Les peuples libres chérissaient de belles valeurs encourageantes. On était encore très loin du monde pollué et vicié en tout point. Il put confirmer que l'ambiance était médiévale même si l'excellence de l'artisanat, des savoirs de guérisons, de construction, de cultures… Donnait un résultat bien meilleurs ici. On était pourtant toujours dans un relatif respect de la nature même si des histoires comme celle d'Erebor prouvait que les peuples n'avaient pas encore appris tout ce qu'il devait sur ce qui était vivant ou non, sur les conséquences de leurs actes. Mais rien n'était perdu ici loin de là.

Ce monde était beau et très attrayant pour lui. Il avait de vastes étendues sauvages, des villes incroyables à en juger par les illustrations qu'il vit. Des villes qui n'étaient pas si nombreuses, la terre dominant pour son grand plaisir. C'était pour cela qu'il n'avait pas croisé tant de monde sur sa route, il n'y avait pas tant de monde comparé à sa première vie où les population étouffaient la Terre. Ce monde était incroyable et il était heureux d'être là. Elle avait eu raison : cela lui plaisait.

Tout le temps qu'il ne passait pas avec Smaug, il le passait dans la bibliothèque à lire et il y en avait probablement pour des années d'occupation. Il avait le temps et l'envie alors ce n'était pas un problème. Il discutait parfois de certaines choses avec Smaug qui lui répondait toujours, les dernières tensions entre eux évaporés depuis leur discussion sur l'origine des dragons, sa promesses et la découverte du trésor monumental. Une chose était certaine : Smuag avait raison sur le fait que les autres ne savaient pas grand-chose des dragons. Lorsqu'il en trouvait des allusions dans les livres, ce n'était que pour parler d'une malfaisance qui n'existait pas réellement, de quelques individus, de leurs faits d'armes et des quelques petites choses que l'on savait sur eux : presque rien. Nefrea avait compris d'où venait se point néfaste qu'il avait perçu en Smaug : ce n'était pas lui, c'était l'emprunte forcée de Melkor. Smaug avait expliqué que Seul Melkor aurait pu le forcer à obéir mais personne d'autre. Si les dragons aujourd'hui venaient à se battre pour l'ennemi, se serait sur leur volonté et probablement par colère envers les peuples ravageant la terre. Mais comme l'ennemi la ravageait tout autant, ils auraient pu faire l'inverse, se battre contre les deux ou personne.

- Tu sais, fit Nefrea blottit contre lui dans l'or en tant que dragon, je peux briser et effacer la marque de Melkor en toi, proposa-t-il doucement. Mandos m'a offert ce don à ma renaissance. Si tu le souhaites, je pourrai l'enlever complètement pour que tu sois libéré de cette blessure. Cela ne changera rien en toi mais plus rien ne pourra t'influencer.

- Tu peux réellement faire cela? demanda Smaug dont-il sentait le choc dans son aura.

- Je le peux. Je ne mentirai pas sur une telle chose. Si tu le souhaites, il te suffit de me le dire et je le ferai avec joie.

Pour toute réponse, Smaug avait resserré son aile sur lui, le rapprochant un plus de son corps avec protection. Nefrea n'avait rien dit, percevant le fait que cette possibilité le chamboulait un peu mais il avait aussi senti l'éclat d'espoir en lui. Il savait donc qu'il demanderait mais qu'il lui fallait un moment pour traiter l'information. Smaug avait demandé quelques temps plus tard et Nefrea, en forme primordiale, avait pris son bâton en souriant avec douceur et réconfort au dragon. Il était venu poser la pierre de son outil sur son front aux écailles rouges sombres, fermant les yeux. Elle s'était illuminée et Smaug avait senti le pouvoir prodigieux de l'istar couler en lui. C'était chaud comme le plus pur des feux, chantant comme l'eau et le vent, solide et fort comme la terre. C'était chatoyant de vie telle la nature libre et sauvage. C'était respectueux et doux, délicat, raffiné et élégant, tellement précautionneux et attentif. Il s'était détendu comme jamais, fermant les yeux à son tour pour profiter. La magie de Nefrea avait empli son être à la recherche de cette détestable chaîne néfaste et pervertie en lui. Il l'avait trouvé et désintégré en un instant comme une bougie soufflée dans une tempête, comme si ce n'était rien, sa puissance indiscutable. Puis il avait soigné ce qui avait été abîmé par cette chose et il s'était retiré à l'image d'une caresse.

Smaug avait retrouvé son sourire doux en ouvrant les yeux et il n'avait pas manqué son air fatigué après cette libération. Alors il avait relevé son aile pour l'inviter à venir se reposer et Nefrea ne s'était pas fait prier. Il avait repris sa forme draconnienne et s'était logé contre lui dans l'or, bien heureux. Smaug l'avait couvert de son aile, venant le câliner un moment de sa tête contre la sienne en remerciement. Il l'avait serré contre lui avec une protection et une possessivité qui ne cessait de grandir et ils s'étaient endormis.

Souvent, ils parlaient des dragons. Smaug lui racontait leur histoire, les grands noms de leur peuple. Il lui expliquait comment fonctionnait leur espèce, leur société, leur hiérarchie. Il lui parlait du métabolisme de leur corps différent de son ancien monde et qu'il avait pris en renaissant. Les comportements étaient inutiles. Soit il les avait déjà, soit il les comprenait instinctivement dans l'instant quand il y avait quel que chose de nouveau.

- Y-a-t-il des dragonnes ? demanda Nefrea. Sont-elles différentes ? Dans mon ancien monde, les dragonnes étaient plus grandes.

Comme souvent désormais, lorsqu'ils étaient ensemble dans la montagne, ils étaient dans le nid, le trésor, cachés dans l'or, serrés l'un contre l'autre, l'istar en dragon. Smaug rit doucement à sa question.

- Tu es mignon, fit-il. Il n'y a pas de dragonnes. La terre n'a pas de genre alors nous n'en n'avons pas. Les dragons sont hermaphrodites. Sais-tu de quoi il s'agit ?

- Oui, c'est lorsqu'on est à la fois mâle et femelle.

- C'est exact. Nous sommes ainsi.

- Pratique. C'est bien plus simple comme ça, sourit-il. Je me demande si je l'ai eu aussi en venant ici.

- Tu l'es, assura Smaug. Tes phéromones sont des deux, comme n'importe quel dragon.

Il n'avait pas fait attention à ça avec Smaug. Bien sûr, il savait ce qu'était les phéromones. Lorsqu'il était dragon, il pouvait les sentir. Son odorat de dragon était beaucoup plus précis et développé. Celui de sa forme primordiale sentait les odeurs de loin et les identifiait sans mal mais il ne percevait pas les choses plus subtiles comme les phéromones. Le dragon le pouvait. Il savait faire la différence entre mâle et femelle avec ça, il connaissait. Il n'avait pas fait attention avec Smaug mais en réfléchissant c'était vrai. Il avait à la fois l'odeur mâle et femelle. C'était une information amusante qui expliquait que Smaug puisse lui témoigner naturellement une tendresse grandissante même s'il était mâle. Il n'était pas que cela et cela faisait que le genre n'existait pas entre dragon. C'était une idée assez plaisante. Le sujet dériva sur les dragonneaux très rares chez eux et sur la famille, le sujet léger les ravissant tout deux.

Le temps continuait à passer et avec lui, la relation entre Smaug et Nefrea se renforçait toujours plus, toujours plus tendre et douce, affectueuse. Smaug s'était fait aussi protecteur et possessif pour lui que pour son trésor. Lorsqu'ils chassaient, il était toujours fier de pouvoir le faire pour deux, semblant prendre à cœur le devoir qu'il avait saisit consistant à prendre soin de lui. Et Nefrea adorait ça, trouvant enfin la relation protectrice, chaude, paisible et aimante qu'il avait toujours cherché.

Après des mois et des mois passé à dormir dans le trésor, Nefrea avait cependant commencé à percevoir de plus en plus quelque chose. Smaug le laissait user de sa magie comme il voulait dans la montagne désormais mais il avait été perplexe lorsqu'il n'était pas parvenue à localiser l'ancre de l'âme de la montagne. C'était brouillé mais il fallait dire que l'immense trésor chargé du pouvoir de Smaug ne facilitait pas les chose lorsqu'il le regardait. Et l'ancrage d'âme semblait être dans le trésor, bien caché. Cela ne cessait pourtant de revenir à son esprit, l'âme de la montagne résonnant avec sa magie d'enfant de la Mort. Et puis un jour, alors qu'il jouait gaiement dans l'or avec Smaug, elle apparut. C'était une pierre blanche splendide dans laquelle une nébuleuse spatiale claire dansait. Elle irradiait d'une très puissante magie. Mais elle était de toute évidence blessée, malade, en peine et en souffrance. Il sut immédiatement ce qu'elle était.

- Smaug ? Cette pierre, c'est l'âme de la Montagne, remarqua-t-il.

- C'est l'Arkenstone. Ce qu'ils appellent le joyaux du roi. C'est le Cœur de la Montagne. Elle est le plus grand trésor aux yeux des maudits nains. Elle est plus touchée que le reste, la guérir prendra des siècles.

- Puis-je la toucher ?

Smaug approuva et il reprit forme de magicien pour venir la prendre dans ses mains avec une extrême délicatesse. Il s'assit dans l'or, Smaug le rejoignant, posant sa tête près de lui.

- Ils lui ont fait du mal, remarqua-t-il la voix douloureuse alors qu'il caressait le joyaux. Elle a mal. Ils l'ont… taillé physiquement aussi n'est-ce pas ?

- Oui. Ils n'ont jamais su voir la beauté des choses telles qu'elles sont. Ils faut toujours qu'ils les torturent pour les plier à leur volonté et à leur définition de la beauté.

- Je suis capable de soigner les âmes avec ma magie, expliqua-t-il. Ma magie d'âme est extrêmement puissante et plus pure que toute autre. C'est pour ça que j'ai pu distinguer ton âme de si loin et que je vois celles de toutes choses. Me laisserais tu m'occuper d'elle ? S'il te plaît. Elle pleure et mon pouvoir pleur pour elle. La soigner sera long quand même mais je devrai pouvoir l'aider à se remettre bien plus vite. J'aimerai m'occuper d'elle.

Il ne faisait jamais rien dans la montagne sans lui demander sa permission, surtout pas lorsqu'il s'agissait du trésor. Il était à Smaug et il respectait cela profondément. Il ne faisait donc rien sans sa permission mais tout en lui tirait pour qu'il aide cette âme de la nature.

- Prend soin d'elle, approuva-t-il. Mais il faut la garder en sécurité. Elle est assurément ce qui est le plus convoité ici.

- Alors mettons là où personne ne la trouvera de si tôt.

Il se leva et se tourna vers l'or, usant de sa magie pour qu'il s'écarte et qu'il puisse s'enfoncer tout au fond des monts dorés. Smaug le suivis, curieux. Il alla au plus profond du trésor, dans un coin reculé caché sous ses tonnes et des tonnes d'or et de pierres précieuses. Là, il créa une petite bulle magique de quelques mètres pour dégager un espace ensevelit dans le trésor. Il était sur le sol de pierre de la salle, dans un angle de mur le plus reculé. Même si quelqu'un arrivait à entrer dans la montagne, il n'était pas près de tomber sur la pierre ici. Il demanda à la roche de façonner un petit piédestal sur lequel il déposa le joyau avec précaution. Puis il insuffla sa magie dans sa bulle avec puissance, usant de ses pouvoir pour créer un cocon protecteur et guérisseur pour lui. Il y resterait lié en permanence et il faudrait longtemps pour la soigner mais il y arriverait. Smaug était venu observer cela, ne manquant pas le petit éclat de l'Akenstone lorsque le lien se fit et que les soins commencèrent. Nefrea le rejoignit, l'air plus paisible après la tristesse qui l'avait pris en trouvant le cœur.

- Cela prendra du temps mais elle guérira. Personne ne la trouvera ici et elle sera protégé. Je resterai lié à cette bulle pour lui transmettre la magie en permanence et m'occuper d'elle.

- C'est bien. Cela ne risque-t-il pas de t'épuiser ? Soigner l'âme de la montagne n'est pas une petite chose.

- Je vais être un peu plus faible mais ça en vaut la peine. Je mangerai plus et je dormirai plus mais nous avons une vie tranquille ici alors il n'y aura pas de problème. Je ferai juste un peu moins de magie. Je préfère m'occuper d'elle d'abord. Mon amusement peu attendre mais l'âme de la montagne a besoin d'être soigné.

- Très bien. Elle est en sécurité ici. Viens, allons dormir.

Nefrea sourit joyeusement à cette proposition, retournant dans les monts d'or en dragon pour rejoindre Smaug plus loin et se caler contre lui pour se reposer.