Finalement, Yuji avait continué à dormir toute la fin de journée, ainsi que la soirée, l'épuisement physique et psychologique qu'il avait accumulé ces derniers jours l'ayant terrassé. Kali était plusieurs fois retournée fureter vers sa chambre en tendant l'oreille mais seule le silence avait répondu à sa curiosité, la faisant rebrousser chemin. S'il avait autant besoin de repos, il fallait absolument qu'elle le respecte et le laisse se reposer...
La nuit tombée, Kali erra dans le refuge, ses scellés retirés, esseulée, grignotant des mikados en pianotant sur son téléphone, se renseignant sur le festival dont elle avait entendu parler plus tôt, la confortant dans l'idée que Yuji et elle devaient absolument s'y rendre.
Rien que l'histoire de cette fête était un régal à elle toute seule, ravissant la jeune femme qui parcourait, un sourire aux lèvres, les nombreuses pages y étant consacrées, étant retournée s'installer dans sa chambre.
Le Tanabata, autrement appelée la fête des étoiles, célébrait une ancienne légende d'un amour impossible entre Orihime, une déesse tisserande vivant sur la voie lactée, et Hikoboshi, un bouvier du monde humain. Les deux jeunes gens tombèrent éperdument amoureux l'un de l'autre au premier regard et la déesse décida de quitter les cieux pour épouser l'homme qu'elle aimait. Hélas, négligeant son travail de tisserande, Orihime s'attira les foudres de ses parents divins qui décidèrent de séparer par le ciel les amants. Les autres dieux et déesses, sensibles à la beauté de cet amour et à la peine des deux êtres épris, décidèrent de leur accorder une nuit par an durant laquelle, si le ciel était clair, un pont s'étirerait entre leurs deux mondes, leur permettant de se retrouver quelques heures...
C'était à la fois triste et romantique...
Depuis, le 7ème jour du 7ème mois de l'année, le Japon célébrait cet amour bravant tous les obstacles par une journée et une nuit de célébrations festives. Apparemment, il était traditionnel d'accrocher des vœux en haut de longues tiges de bambous (expliquant toute la verdure que Touya-san et ses homologues transportaient plus tôt), ainsi que des origamis qui étaient censés porter chance... Lors de la fête, les gens revêtaient habituellement des Yukata, des kimonos légers d'été, et mangeaient des udons, une sorte particulière de nouilles... Tout ça avait l'air... terriblement distrayant !
Elle ouvrit ensuite quelques onglets de recherches concernant les fameux habits aux couleurs estivales, faisant instantanément pétiller ses yeux félins. Elle n'en avait jamais porté... Elle n'avait jamais vu Yuji dans un tel accoutrement non plus... L'européenne fit défiler les tenues, s'imaginant à quoi ils pourraient bien ressembler ainsi fagotés, la faisant sourire. L'adolescent serait assurément des plus adorables, elle n'en doutait pas une seule seconde... Qu'est ce pourrait bien lui aller le mieux ? De l'unis, sobre et viril ? Des motifs ? Des teintes sombres ou colorés ? Qu'aurait-il préféré ? Et pour elle-même... Plutôt des fleurs ou des formes abstraites ? Des papillons peut-être ? Il y avait là tant de possibilités … C'était difficile de choisir !
Allongée sur le ventre, battant doucement des jambes dans le vide, Kali continua à faire défiler les boutiques virtuelles devant ses yeux, ajoutant çà et là des articles dans son panier, fredonnant doucement dans la nuit silencieuse, guillerette. Elle avait tellement hâte de retrouver son colocataire en pleine forme, demain matin, pour voir son minois éberlué face à la surprise qu'elle lui réservait ! Il allait adorer, elle en était certaine... Ils se ressemblaient par tellement d'aspects, tous les deux …
Finalement, la demoiselle s'endormit, le téléphone à la main, rêvant à de multitudes de bouts de papier colorés flottant doucement au bout de hauts bambous au vert tendre dans une nuit étoilée fantasmagorique. Il lui semblait entendre un rire éclatant teinté de bonheur sortir de sa gorge alors qu'elle s'avançait sur un chemin de terre, chacune de ses mains tenue par une douce étreinte, un regard noisette se posant avec bienveillance sur elle d'un côté alors que de l'autre des rubis la fixaient, une leur insaisissable les animant...
Elle sourit dans son sommeil, enfonçant doucement son minois dans son oreiller, soupirant de bien-être.
"Crevette... hé, crevette !"
Une voix résonnait tout près d'elle, la faisant se rouler un peu plus sur elle-même, tâchant de demeurer endormie. Elle ne voulait absolument pas sortir de son songe si doux... Pourtant, insciemment, il lui sembla reconnaitre ... la voix de Sukuna ? Vraiment, il commençait à l'obnubiler, cet homme-là...
"Crevette, allez... Débout !"
La demoiselle sentit comme des gouttes d'eau lui tomber sur le visage, la faisant bougonner et tenter de s'enfuir de l'autre côté du matelas, fuyant son attaquant invisible. Il ne fallait pas qu'il pleuve... Sinon les amants célestes ne pourraient pas se rencontrer, se serait tellement triste...
D'un coup se fut une quantité beaucoup plus importante de liquide froid qui lui tomba dessus, la faisant sursauter, l'extirpant sans ménagement du sommeil et de son rêve, la faisant se redresser sur son matelas dans un bond.
"Qu... Qu'est-ce que …?" bégaya-t-elle, rejetant ses cheveux trempés en arrière, perdue, découvrant la haute silhouette du roi des démons debout à côté de son lit, le verre qu'elle avait déposé avant de s'endormir sur sa table de chevet vide dans sa main. Le... La calamité !
"Sukuna-san ? Mais ça va pas de réveiller les gens comme ça ?" s'offusqua l'hybride en s'essuyant le visage d'un revers de main, le fusillant du regard.
Il haussa les épaules, visiblement fier comme un paon de son forfait, un sourire mauvais aux lèvres. "Tu n'avais qu'à te réveiller plus vite, crevette ! Quelle idée d'avoir le sommeil aussi lourd …"
"Qu... Qu'est-ce qui vous arrive ?" finit-elle par bougonner, se doutant qu'il était inutile d'essayer de le raisonner, cherchant au milieu des draps son portable.
"J'ai faim." lâcha-t-il d'un ton plat, faisant se décrocher la mâchoire de Kali, qui venait de retrouver son téléphone, découvrant l'heure indue qu'il était.
"Il est TROIS HEURES DU MATIN, Sukuna-san..." siffla-t-elle en tendant vers lui son mobile, l'heure s'affichant en grand sur l'écran lumineux, ne touchant absolument pas l'intéressé qui n'y accorda même pas un regard.
"Il n'y a pas d'heure pour manger." éluda-t-il, un rien gamin, encrant son double regard amusé dans celui un peu courroucé de sa vis-à-vis. "Allez, debout !"
En disant cela il vint se saisir du drap mouillé recouvrant encore partiellement le corps de l'hybride, le jetant au pied du lit sans ménagement aucun. "Je veux gouter le Funazushi que tu m'as acheté !"
"Vous voulez manger du poisson fermenté à trois heures du mat ?" s'étonna-t-elle, effarée. "Vous ne préfèreriez pas une pizza, comme tout le monde ?" maugréa-t-elle de mauvaise grâce en passant ses jambes au bord de son lit, un peu de mauvais poil.
Lassé d'attendre, l'homme tatoué vint se saisir du poignet fin de Kali, l'entrainant sans plus attendre à sa suite hors de sa chambre, lui répondant par-dessus son épaule. "Je ne suis tout le monde, impertinente."
Ils traversèrent à pas de course les couloirs déserts du sanctuaire et arrivèrent rapidement à la cuisine. Sukuna lui lâcha alors le poignet, se retournant pour lui faire face, une lueur un rien enfantine animant son regard rubis.
"Alors ? Où est-il ?" trépigna le fléau, amusant malgré elle Kali, effaçant déjà les griefs dont elle aurait pu lui tenir rigueur après le réveil qu'il lui avait réservé.
"là..." Soupira-t-elle, venant allumer la lumière de la pièce. Elle chercha ensuite la fameuse jarre dont elle avait fait l'acquisition quelques heures plus tôt dans un placard, venant la tendre à son vis-à-vis qui vint s'en saisir s'en attendre, en scrutant le moindre détail.
L'hybride croisa les bras sur son ventre, couvrant l'homme tatoué d'un regard un rien attendri en l'observant faire, se disant que ça devait malgré tout lui faire quelque chose de trouver un met qui lui était familier au milieu de ce monde moderne. "J'espère pour vous qu'il n'y a pas besoin de cuisine, car je ne sais absolument pas comment ça se prépare... Le vendeur m'a juste dit de ne pas jeter le riz car il pouvait se manger..."
"Oh ? Maintenant le riz se peut être consommé ?" commenta Ryomen, lisant avec curiosité toutes les étiquettes couvrant le pot hermétiquement fermé, y découvrant des détails de préparation remontant effectivement à la période Heian. "En mon temps, on le jetait... La recette doit être un peu différente alors..."
"Différente ne veut pas toujours dire moins bonne." répliqua doucement l'européenne, s'attirant un regard moyennement convaincu de roi millénaire.
"On ne va pas tarder à le savoir... Donne-moi un couteau et un plat large, crevette." ordonna-t-il en allant poser le réceptacle sur la table, tendant une main vers elle.
"Je suppose qu'il est inutile de vous demander le mot magique..." soupira Kali, levant un peu les yeux au ciel, re commençant à fouiller les placards.
"Tu parles de 'plus vite que ça' ?" ironisa-t-il, lui arrachant un léger rire. Elle s'en serait doutée...
La demoiselle lui apporta l'assiette la plus grande qu'elle eut trouvé avant d'ouvrir les tiroirs à la recherche d'un couteau.
"Vous voulez un couteau qui coupe ou un qui coupe pas ?"
A cette question, Sukuna fronça les sourcils, allant se planter à côté d'elle pour observer les objets qui s'étalaient devant elle, dubitatif.
"A quoi diable pourrait bien servir un couteau qui ne coupe pas, crevette ?" questionna-t-il, les bras croiser sur le ventre, la dévisageant avec une curiosité moqueuse.
"Bah à couper des choses... molles ?" répondit faiblement Kali en venant soutenir son regard, lui tendant justement un de ces fameux couteaux émoussés qu'on trouvait dieu seul savait pourquoi dans absolument toutes les cuisines du monde.
Immédiatement le roi des malédictions vint s'en saisir, scrutant douloureusement l'objet inutile, passant même la pulpe de son pouce dessus avec force pour constater l'absence totale de tranchant. Lui qui était le maître incontestable des attaques de lames, justement, cela lui faisait presque mal au cœur de voir ça...
"Monde de fou..." maugréa-t-il comme pour lui-même, rendant le bout de métal à son interlocutrice amusée, lui glissant un regard un peu blasé. "Un couteau qui coupe, crevette. Je veux un couteau qui fasse son boulot et qui coupe..."
"Comme celui-là ?" Elle lui tendit alors un couteau de cuisine à lame courte et large que Sukuna reconnut immédiatement, venant le soupeser dans sa main.
"On dirait... Un Deba... Il a l'air de pas trop mauvaise qualité..." comment a-t-il inconsciemment.
"Un quoi ?" interrogea Kali, suivant le démon qui était retourné vers la table sans attendre, arrachant les étiquettes protégeant le bouchon hermétique de la jarre, le regard brillant d'anticipation.
"Un couteau à poisson, inculte... " éluda l'homme, comme il avait s'agit d'une évidence. "Mais bon, ils sont assez polyvalents en règle générale, il fera largement l'affaire..."
Sukuna glissa la lame entre le bouchon et la terre cuite du bocal, y appliquant une pression sèche et précise d'un mouvement de poignet. Il recommença cela sur toute la circonférence de l'ouverture, sous le regard fasciné de l'européenne. Incontestablement, il semblait savoir s'y prendre... Finalement, il porta un dernier coup, le couvercle se soulevant dans un bruit de vide s'échappant, libérant instantanément une odeur violente qui vint sauter à la gorge la demoiselle, lui coupant le souffle.
"Mais qu'est-ce que c'est que ça ?" s'horrifia Kali, venant plaquer ses mains sur son nez alors que son interlocuteur, un sourire aux lèvres, reposait le bouchon sur la table, absolument pas gêné par le parfum abominable se répandant dans toute la pièce.
"C'est assez ressemblant au plat de mon époque..." soupira le fléau, allant se saisir du plat afin d'y verser le contenu du pot, faisant encore s'amplifier l'horrible fragrance. "Tu as eu la main heureuse, crevette !"
"QUOI ?" s'étrangla l'européenne, au bord de l'asphyxie."... Sukuna-nan... Mais vous ne pouvez pas manger ça... Vous sentez bien que c'est pas comestible !"
L'intéressé se redressa vers elle, visiblement perplexe, les sourcils haussés. "Balivernes, crevette. C'est l'odeur tout à fait habituelle de ce plat... Le poisson mariné, ça sent fort, arrête de faire ta princesse..."
"Je fais pas ma..." Commença-t-elle avant de se raviser, changeant de stratégie, se doutant que celle-ci ne mènerait à rien. "Sukuna-san... ça sent le cadavre en putréfaction à marée basse, ce truc ! C'est pas comestible, c'est avarié !"
"Tu exagères, crevette …" Ignora magistralement le tatoué, séparant de gestes précis le riz du poisson, créant une sorte de couronne gluante et grisâtre tout le tour de l'assiette avant de commencer à trancher le poisson entier, révulsant la jeune femme. "Tu vas gouter et tu vas voir que le gout est bien meilleur que l'odeur. Un peu comme le natto."
"Que je... Ah non !" s'offusqua-t-elle immédiatement, secouant la tête de façon négative.
Elle s'éloigna du démon concentré, venant se réfugier de l'autre côté de la table, se pinçant le nez.
"Et je vous préviens, si vous mangez ça, vous ne m'approcherez plus !" menaça-t-elle faiblement, horrifiée à la simple idée que l'on puisse ne serait-ce qu'imaginer manger cette infection.
Ryomen ricana, terminant de détailler la bestiole morte et macérée, le présentant rapidement avec des gestes habituels. Il alla ensuite déposer son couteau dans l'évier avant de se saisir d'une paire de baguettes dans l'égouttoir. Il revint avec entrain à côté de la table, posant nonchalamment une main à côté du plat maudit, venant jouer du bout de ses baguettes avec les tranches de viande fermentée, visiblement ravis de ce qu'il voyait, un large sourire se dessinant sur son visage.
"Arrête de faire l'enfant et viens gouter, ignare." S'amusa-t-il en se redressant, fixant son interlocutrice qui se tenait à distance, sur ses gardes.
"NAN !" lâcha-t-elle avec fermeté, une lueur vive et courageuse animant ses prunelles inhumaines. Elle refusait d'avaler cette... chose !
Il pouffa de rire, venant saisir entre ses baguettes un morceau de poisson, fixant avec une intensité terriblement joueuse et peu rassurante la jeune femme qui fit un pas de plus en arrière. A son grand désespoir, la seule porte de sortie se trouvait dans le dos de l'homme, mettant à mal toutes ses idées de fuite. Il ne la laisserait certainement pas filer aussi facilement...
"Je vois pas pourquoi je devrais manger ce truc... En plus vous l'avez même pas gouté, c'est louche !" tenta-t-elle de se défendre, pointant un doigt accusateur vers le roi des fléaux qui haussa un sourcil, amusé.
"Oh ? Si ce n'est que ça..." Dit-il avant de rapprocher dangereusement sa main vers sa bouche, terrifiant Kali. Il comptait réellement manger ce plat avarié ? Il allait tuer Yuji, elle en était sûr !
Sans réfléchir, poussée par une peur viscérale, l'européenne bondit aux côtés du tatoué, lui attrapant à deux mains son poignet pour l'empêcher de terminer son geste, le surprenant.
"Mais mangez pas ça, vous allez vous empoisonner ! Reposez ce truc, c'est au moins une arme chimique !"
Il éclata de rire, venant capturer la taille de la jeune femme de son bras libre, la plaquant contre son torse. Il s'amusait terriblement. "Tu t'inquiètes pour moi, crevette ? Je te rappelle que je suis le maitre des poisons... Je sais les reconnaitre quand je les vois... Et ceci..." Il vint approcher de son visage l'objet de discorde, faisant se débattre comme un beau diable Kali contre lui. "N'en est pas un."
Sur ce mot il vient enfourner l'odorante bouchée, un sourire satisfait aux lèvres, alors que la jeune femme le fixait, complètement horrifiée.
"Oh mon dieu... Vous l'avez mangé..."murmura-t-elle, effarée, les yeux écarquillés.
"Bien sûr, et c'est excellent... Allez, à ton tour, crevette …" Il se pencha nonchalamment, prenant visiblement beaucoup de plaisir à la situation, attrapant un nouveau bout de poisson qu'il destinait visiblement à sa captive dont le consentement laissait largement à désirer.
"NAAAN !"se débâtit-elle violemment, se tortillant dans tous les sens, ne pouvant hélas rien contre la force herculéenne du fléau.
"Ce n'est pas une crevette que tu es, finalement... C'est une anguille !" Ironisa son bourreau, venant attraper d'un geste à la rapidité surhumaine les poignets de la jeune femme de sa main libre, les levant au-dessus de sa tête pour la déstabiliser. Il la poussa d'un mouvement rapide vers la table, la faisant se tourner vers lui pour qu'elle puisse lui faire face, ramenant ses bras entre eux deux, ses fesses contre le plan de bois. Il affichait un air complexe à la fois prédateur et enfantin, des étincelles de profond amusement enflammant le sang de ses yeux, intimidant malgré elle l'hybride.
Il ne faisait que jouer et il la dominait déjà complètement... Elle ne put s'empêcher de sentir une légère rougeur lui monter aux joues, se détestant pour ça.
"Allez, crevette..." reprit le démon, approchant dangereusement ses baguettes armées du poisson macéré des lèvres de sa vis-à-vis qu'elle maintenait fermement closes, tournant obstinément la tête sur le côté. "Soit gentille et ouvre la bouche..."
Elle le fusilla du regard, secouant vigoureusement la tête, allant emmêler ses cheveux d'automnes, lui donnant un air sauvage qui ravit particulièrement Sukuna. C'était qu'elle avait du répondant, la petite...Cependant, elle pouvait bien se débattre, pour ceci comme pour tout le reste, il finissait toujours par sortir vainqueur. D'un coup elle plaqua ses mains contre son torse, cherchant à le repousser de toutes ses forces, se penchant vainement en arrière, lui arrachant un éclat de rire.
"Qu'est-ce que tu essaies de faire, crevette ? Tu crois vraiment pouvoir m'échapper ?" susurra-t-il, savourant la sensation de puissance que lui donnait la domination qu'il avait sur la demoiselle. Il resserra un peu plus sa prise sur ses poignets délicats, lui arrachant une légère grimace, avant de les faire repasser au-dessus de sa tête, la forçant à s'allonger sur la table, la plaquant contre son bois rugueux, coulant son corps contre le sien.
Il glissa son visage dans son cou, s'enivrant de son parfum, perdant un bref instant le fil de ses pensées, oubliant presque son objectif principal. Il alla murmurer prêt de son oreille, sentant contre son torse puissant les battements de cœur affolés de sa captive, l'enchantant tout entier. "Tu n'y couperas pas, tu en es bien consciente, non ?"
Il jeta les baguettes au sol en se redressant un peu, décidant qu'il ferait mieux de simplement se servir de ses doigts pour la forcer à avaler un bout de carpe. Vu comment la jeune femme, qui le foudroyait toujours de son regard d'or et d'améthyste, se débattait, il allait finir par lui crever un œil, s'il continuait comme ça ! Ça aurait été plutôt dommage...
Il vint se saisir d'un bout de poisson sur le plat se trouvant un peu plus loin sur la table, diabolique, avant de se retourner vers elle, la dévorant du regard.
"Sukuna-san... Lâchez-moi !" maugréa-t-elle, s'agitant vainement contre sa main implacable.
"Pas avant que tu ne m'ais sagement obéit, petite sauvageonne …"
Il finit par relâcher ses poignets, sachant pertinemment qu'il pouvait la maintenant captive sans cela. Il vint capturer son menton d'une main, tendant son visage vers lui. S'il avait eu ses quatre bras, cela aurait été tellement plus facile !
Il grimpa d'un bond souple sur la table, plaçant ses genoux de part et autre de la poitrine de la demoiselle, bloquant son bras gauche sous son tibia, lui en laissant un libre afin de savourer ses inutiles tentatives de luttes.
Gigotant autant qu'elle le pouvait, essayant à échapper à cette poigne puissante qui la maintenait coller à la table, Kali chercha à tâtons de sa main laissée libre quelque chose, n'importe quoi pour se défendre. Mais tout ce qu'elle parvint à atteindre était le plat de ce maudit poisson, ses doigts s'enfonçant dans le riz gluant qui l'entourait... Quelle poisse...
D'un coup Sukuna vient lui boucher le nez, la prenant de court, voulant visiblement la forcer à ouvrir la bouche en la privant d'oxygène, vicieux. Il était réellement prêt à tout pour atteindre son objectif, il n'avait pas menti !
Elle gigota de plus belle, cherchant une ultime idée de génie, attrapant inconsciemment une poignée de riz qu'elle alla ensuite jeter sans réfléchir au visage du démon qui ne s'y attendait absolument pas, le prenant par surprise. Il se redressa d'un coup, comme électrisé, relâchant sa prise sur le minois de Kali qui aspira une grande goulée d'air, le scrutant avec un peu d'angoisse.
Le fléau porta une main à sa joue où collaient encore quelques grains de riz, fixant de son regard étonné la petite chose entre ses jambes qui avait osé s'attaquer à lui de la sorte. Elle venait... de lui balancer de la nourriture fermentée à la figure ? A lui, le roi des malédictions ?
Kali fut incapable de comprendre la lueur complexe traversant les yeux rubis de son bourreau, sentant son aura devenir instantanément plus lourde, coulant sur son corps comme du plomb. Elle venait de dépasser les bornes, elle le sentait... Il allait la massacrer...
Elle lui adressa alors un petit sourire innocent, se redressant un peu, ne sachant pas trop comment agir face au terrible silence du démon millénaire qui réfléchissait très certainement à la meilleure manière de la découper en morceaux.
"Euh... ooop...sie ?" murmura-t-elle d'une petite voix.
C'était censé être … des excuses ? Elle n'attendait rien pour attendre, l'impertinente petite inconsciente...
D'un coup Sukuna vint se saisir à deux mains du plat de Funazushi, l'amenant au-dessus du corps de Kali qui n'eut pas le temps de réagir alors qu'il le retournait d'un geste brusque, venant renverser l'intégralité de son contenu sur son buste et son visage, la prenant de court.
"Raaaaah !" laissa échapper la demoiselle en se retrouvant couverte de l'intégralité du plat odorant, tentant de se s'en débarrasser le visage.
Ca sentait tellement mauvais... ça lui coupait le souffle ! L'européenne passa ses mains sur son visage, cherchant à se libérer les yeux, le nez et la bouche, partiellement dégoutée. Quand elle parvint à ouvrir à nouveau les paupières, le souffle coupé par cette affreuse odeur nauséabonde, elle découvrit Ryomen qui s'était penché vers elle, le visage à seulement quelques centimètres du sien, un sourire terriblement aux lèvres.
"oopsie..." murmura-t-il dans un souffle, narquois au dernier degré, faisant s'écarquiller les prunelles d'or de sa vis-à-vis.
Elle demeura muette une poignée de seconde avant d'éclater de rire, la tension l'ayant habité disparaissant instantanément, surprenant un peu le démon par son inconscience, parvenant même à lui arracher un léger sourire. Était-elle seulement dotée d'un instinct de survie, cette gamine ?
"Vous êtes terrible, Sukuna-san..." s'amusa-t-elle, tentant sans grand succès de se nettoyer un peu pour se débarrasser de cette horrible fragrance.
"Tu n'avais qu'à être obéissante..." Laissa tomber d'un ton très sérieux qu'elle ne releva cependant pas son interlocuteur qui la dévisageait toujours, une lueur complexe animant ses prunelles sanglantes.
"Je vais devoir prendre un millier de douches pour retirer l'odeur de ma peau." soupira Kali, jouant un peu avec ses cheveux souillés, une moue boudeuse aux lèvres.
"Un millier, c'est si tu as de la chance..." Ironisa le démon, venant récupérer avec décontraction un bout de poisson sur le front de l'hybride, le jetant au loin d'une pichenette.
"Quel gâchis, quand même..."
La remarque fit tiquer le fléau millénaire qui la fixant quelques secondes, un feu machiavélique embrasant ses prunelles. " Du gâchis... Mais pourquoi diable dis-tu ça ?"
Sans lui laisser le temps de réagir, Sukuna se saisit de son menton entre ses doigts, et vint lécher sa joue, juste à la commissure de ses lèvres, récoltant de sa langue vorace un peu de riz, l'embrasant totalement. "C'est même encore meilleur ainsi, je trouve..." ronronna-t-il contre sa peau de sa voix profonde, faisant frissonner la demoiselle qui le fixait, ses yeux d'or légèrement écarquillés.
Il passa alors ses mains sous le large t shirt qu'elle revêtait pour enserrer sa taille marquée, savourant la tendresse de sa peau sous ses doigts, alors qu'il fondait dans son cou, se nourrissant littéralement à même sa peau, profitant de chaque bouchée pour griffer du bout des dents son épiderme au parfum si complexe. Il laissa échapper un grognement appréciateur contre la jugulaire de la jeune hybride, incapable de s'arrêter, se plaquant encore un peu plus contre elle, pire qu'un drogué retouchant pour la première fois à l'objet de son addiction. De mémoire de fléau millénaire, jamais Kunazushi n'avait été meilleur que celui-ci !
Il allait peut-être se contenter de la bouffer, ici et maintenant, en fin de compte...
Kali de son côté laissa échapper de faibles soupires, sentant son corps s'embraser sous l'emprise implacable du roi des malédictions, venant poser ses mains sur ses puissantes épaules, enserrant inconsciemment le détestable tissu qui l'empêchait de sentir elle aussi sa peau sous ses doigts. Son esprit semblait s'embrumer, saturé de la sensation improbablement exquise des lèvres avides de Sukuna contre elle qui enflammait tout son être.
Il aurait bien pu littéralement la dévorer, là, sur cette table, qu'elle aurait été la plus consentante du monde... Elle voulait tellement plus de lui, de son aura écrasante sur sa peau, de ses mains possessives griffant ses hanches, de ses lèvres et de sa langue voraces parcourant chaque parcelle de son cou...
Inconsciemment, elle priait en secret pour que le démon n'eut pas la terrible idée de lui reparlait du pacte en cet instant précis... Car... Elle devait se l'avouer, elle aurait été complètement capable de l'accepter sans réfléchir, juste pour ne pas le contrarier et qu'il continue à lui infliger cette douce torture.
C'était... incontestablement... improbablement... sexy à se damner...
Au bout de quelques minutes le tatoué, repu, se redressa un peu, venant encrer ses prunelles rubis dans celles de sa vis-à-vis, brillantes d'un feu qu'il ne connaissait que trop bien, le charmant un peu plus encore. Elle était vraiment... à part.… cette gamine...
Lentement, il vint glisser une main le long de sa mâchoire, joueur, caressant lentement de son pouce sa lèvre inférieure rebondie, observant le dessin délicat de sa bouche entre ouverte.
"Sukuna... san..." chuchota dans un souffle l'hybride, complètement hypnotisée par le charisme ravageur de son bourreau.
"Chut... crevette..." lui susurra-t-il en se penchant un peu plus vers elle, sa bouche souriante seulement à quelques centimètres de la sienne, faisant s'emballer son cœur dans sa poitrine.
D'un coup, le fléau vint plaquer sa main libre sur les lèvres entrouvertes de la jeune femme, la faisant sursauter alors qu'elle sentait un bout de quelque chose glisser contre sa langue, imprégnant instantanément la totalité de son palais d'un gout rance absolument atroce. Oh le... Il avait osé !
Elle ferma fermement les yeux et tenta vainement de se débattre, cherchant à cracher l'horrible bout de poisson qu'il lui avait imposé, mais Ryomen la plaqua sans ménagement contre le pan de bois, sa main emprisonnant fermement ses lèvres contre sa paume.
"Allez, crevette... Avale... je t'avais bien dit que tu n'y couperais pas..." il la fixait, une lueur victorieuse et sadique embrasant son double regard, faisant courir de l'électricité dans les veines de sa victime. C'était vraiment un coup bas !
"Va-t-il vraiment me falloir à nouveau t'asphyxier... ? Sois raisonnable, sauvageonne, et accepte ta défaite..."
Il le ferait... Kali le dévisagea, un peu perdue entre les émotions qu'elle avait pu ressentir quelques instants plutôt et la vive envie de rébellion qui l'étranglait alors, et pu lire sur son visage qu'il n'hésiterait pas à lui couper la respiration pour la forcer à faire ce qu'il attendait d'elle, incapable de supporter le moindre refus. Il était donc bien là, ce fameux aspect capricieux et terrifiant contre lequel Yuji et tous les autres l'avaient toujours mise en garde. Il était plutôt... effrayant, voir monstrueux, il lui fallait le reconnaitre. Il était assurément... dangereux...
L'hybride sentait dans ses tripes qu'elle n'avait pas d'autre choix que d'obéir, ayant déjà grillé son joker de patience millénaire tout à l'heure avec l'attaque de riz.
A contre cœur, le foudroyant de son regard félin étrécis, refusant de baisser les yeux devant lui, la jeune femme finit par avaler la bouchée infernale d'un mouvement, faisant naitre un sourire des plus carnaciers sur le visage de son interlocuteur extatique.
"Tu vois que tu peux être obéissante, quand tu veux, crevette..." soupira-t-il, satisfait, en se redressant, la libérant non sans venir lui donner une pichenette condescendante au milieu du front, faisant se demander à Kali combien de secondes elle tiendrait en combat face à lui et si elle pourrait au moins, avant de mourir, lui mettre une droite...
Il se releva complètement, faisant quelques pas avant de retirer d'un mouvement ample son t-shirt souillé de nourriture, le jetant à même le sol. Il ne regrettait pas sa soirée, franchement !
Il allait retourner dans la chambre du gamin à présent, largement satisfait.
"Eh, crevette, je te laisse gérer to..." Il se tourna vers elle, laissant mourir sa phrase quand il découvrit la gamine qui s'était juste rassise sur la table, la tête basse, les poings serrés, un très léger frisson secouant son corps, faisant un peu retomber son euphorie.
Et merde... il avait peut-être été un peu fort sur ce coup-là, abattant mal ses cartes en se montrant trop sous son vrai jour...ça n'allait certainement pas plaider en sa faveur pour le pacte, cette histoire...
Il soupira profondément, levant les yeux au ciel avant d'aller se planter devant l'hybride, les bras croisés sur ses puissants abdos. Les femmes, franchement...
"Eh, crevette... regarde moi."
Instantanément, malgré une tension presque visible traversant son corps à l'amour propre profondément malmené, l'intéressée releva la tête vers lui, encrant avec une sorte de courage teinté de colère sourde son regard d'or dans le sien, les mâchoires serrées. En cet instant précis, avec ses cheveux en désordre, ses yeux furieux et couverte des restes du Funazushi, plaquant son t-shirt contre ses formes généreuses, elle était l'incarnation même de la petite sauvageonne impertinente qu'il prendrait tant de plaisir à dresser... Un jouet idéal...
Il vint se saisit de son menton, l'empêchant ainsi de détourner son visage alors qu'il se penchait vers elle, plongeant son double regard de feu dans l'or cerclé d'améthyste furieux du sien, lui murmurant de sa voix lourde de baryton.
"Ne soit pas fâchée, crevette... Tu viens simplement d'apprendre à tes dépends que je gagne toujours... Tâche juste de t'en souvenir..."
"Vous êtes... terrible..." souffla-t-elle tout bas, après quelques secondes de silence, de discrètes larmes contenues à grande peine faisant griller ses prunelles. Le mot, entre ses lèvres, prit une toute autre connotation que les fois précédentes, lui arrachant un sourire narquois et un imperceptible pincement à l'âme, qu'il refoula instinctivement.
"Je le suis toujours, crevette..."
Sans crier gare, il vint poser furtivement ses lèvres contre son front qu'il avait malmené un peu plus tôt, se redressant presque immédiatement, surprenant Kali qui le regarda, décontenancée. "Je l'ai toujours été."
Il la couvrit d'un regard complexe qu'elle ne parvint pas à déchiffrer, son sourire moqueur ayant perdu imperceptiblement de son éclat, avant de relâcher sa prise et de s'en aller sans plus ajouter un mot, laissant seule la demoiselle complètement chamboulée.
Kali demeura quelques instants comme statufiée, fixant l'encadrement sombre de la porte, un peu sous le choc. D'un coup elle vint taper violemment des poings contre la table, faisant trembler le pan de bois sur lequel elle reposée, brulant d'une brusque colère furibonde contre elle-même. Elle avait été tellement naïve de croire qu'elle pouvait parler d'égal à égal avec cet homme !
Tout le monde l'avait mise en garde... TOUT. LE. MONDE !
Mais elle, elle s'était crue plus maligne que les autres, ou juste était-elle plus idiote et naïve pour avoir voulu voir en Sukuna quelque chose qui n'existait pas...
Pourtant... pourtant il lui semblait réellement avoir perçu une étincelle en lui, un petit rien au milieu du torrent d'égocentrisme, de sadisme et de violence dont il semblait être fait, un éclat brillant tout au fond de cette noirceur qu'il portait fièrement en étendard... Ou s'était-elle simplement racontée des histoires, comme la gamine qu'elle était manifestement... ?
Peut-être n'était-elle juste pas de taille à lutter face à lui, finalement...
Au milieu du champs de bataille qu'était devenue la cuisine du sanctuaire, Kali, toujours sur la table, vaincue, ramena ses genoux contre sa poitrine, les enserrant fermement de ses bras, laissant échapper finalement un sanglot qu'elle retenait depuis un moment déjà.
Si tous les autres fléaux supérieurs étaient comme lui, orbe complète ou pas, elle allait certainement se faire bouffer toute crue...
Pour la première fois depuis son réveil, la jeune femme regrettait profondément de ne pas avoir la possibilité de redevenir une simple humaine, échappant à cet univers qui lui paraissait brusquement des plus effrayants ...
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Mot de l'auteur :
M, horripilée : VOUS Y AVEZ CRU AU BAISER ? ET BIEN MOI AUSSI ! SUKUNA, T'ES QU'UN BOULET, AU PIQUET !
Sukuna, boudeur : Roh, ça va, c'était qu'un bout de poisson...
M : Non, c'est pas qu'un bout de poisson... T'as raté un coche là... Et je peux te le dire, tu vas devoir ramer, mon gars, pour rattraper ça...
Sukuna, croisant les bras sur son torse : Je n'ai jamais caché qui j'étais... Vous vous attendiez à quoi ? Que je sorte les violons et pousse la chansonnette ? Elle m'avait manqué de respect et pas obéit...
M : Tu sais que dans la loi on parle de réponse proportionnée ? Kali t'envoie 3 grains de riz dans la face, pour se défendre de ton attaque d'ailleurs, et toi tu essaies de la noyer dans le plat ?
Sukuna, de plus en plus de mauvais poil : Personne ne relève, apparemment, qu'en temps normal j'en ai tué pour bien moins que ça...
M : Moué... c'est sur que ça pardonne tout...
Yuji, dans un coin de la salle, un bazouka armé sur l'épaule, visant en silence le roi des fléaux, dangereusement silencieux.
M : Pour le coup je ferai rien pour l'en empêcher, vous savez quoi...
Sinon, hello tout le monde ! Nouveau chapitre, qui s'est un peu construit malgré moi, Sukuna a fait N'IMPORTE QUOI... J'avais pensé qu'on allait passer directement au tanabata mais je sais pas pourquoi je suis partie du cadeau de Kali et voilà où on finit... Bon, tout le monde sait que Sukuna n'est pas un enfant de cœur et qu'il est un tantinet sadique, mais là, il a brillé ! On est dans Jujutsu Kaisen, ça peut pas être joyeux à tous les chapitres, hein...
Mais ne vous inquiétez pas, Kali est pleine de ressources, Yuji est là et Sukuna va sortir les rames...
Merci vous tous pour vos lectures, on a dépassé le millier, c'est complètement hallucinant ! Merci pour tous vos votes et vos commentaires, ça fait chaud au cœur ! Par rapport au rythme de publication, je profite de mes vacances pour avancer l'histoire, je serai bientôt obligée de ralentir un peu, j'espère que vous m'en excuserai.
D'ici au prochain chapitre, portez-vous bien, des bisous !
