Elle flottait...

Tout autour d'elle, elle pouvait voir l'immense parc de la propriété de son protecteur, ses hauts arbres centenaires, sa pelouse impeccablement entretenue, ses fontaines... Au bout se dressait l'imposante demeure à l'allure victorienne, avec ses 4 étages couverts de hautes fenêtres. Celles du bureau de Prasad, d'où elle avait pris son envol, étaient grandes ouvertes, lui laissant voir le vieil homme la fixait, stupéfait.

Il fallait dire qu'elle devait offrir un drôle de spectacle, ainsi suspendue dans les airs, habillée de son seul feu extraordinaire, un sourire euphorique aux lèvres.

La sensation de puissance qu'elle ressentait était extraordinaire... enivrante !

Elle en voulait plus... Elle en voulait tellement plus. Après avoir passé ce qui lui avait paru une éternité dans un état de demi-conscience, dans l'obscurité, le silence, le froid et l'oubli, elle voulait ressentir les choses dans toute leur intensité.

Elle relâcha un peu plus encore ses flammes, s'élevant plus haut dans le ciel.

Elle pouvait sentir son énergie occulte parcourir chaque parcelle de son corps, le saturant de puissance, le transcendant.

Elle s'entendait rire aux éclats alors qu'elle se transportait par ici et par là, dans un embrasement de flammes noires et violettes, complètement saturée de joie.

Libre, elle était libre !

Elle se sentait tellement vivante en cet instant... tellement heureuse !

Y avait-il une sensation plus exaltante que celle-ci ?

Si seulement cela pouvait ne jamais prendre fin...

« ...-sama... Kali-sama... Kali-sama ! »

Brusquement, l'image du parc s'évapora, laissant place à une lourde obscurité teintée de douleur. La jeune femme reprenait lentement et périlleusement conscience, son corps malmené se rappelant violemment à elle. Qu'est ce qui s'était passé ?

« Eh, Kali-sama, réveillez vous je vous en prie ! »

L'intéressée sentait qu'on lui tapotait la joue, lui arrachant un léger grognement. A qui diable pouvait appartenir cette voix haut perchée ?

« Kali-sama ! »

L'européenne parvint enfin, avec un effort qui lui parut surhumain, à ouvrir les yeux, papillonnant des cils sur ses prunelles félines, découvrant le visage d'un blondinet à seulement quelques centimètres du sien.

Hiroaki...

Petit à petit, les évènements récents lui revinrent en mémoire. La rencontre avec Maeda, l'attaque, le transfert raté, l'appel à l'aide au jeune homme...

Elle avait du perdre connaissance entre temps.

C'était plutôt ironique en réalité...

Alors qu'elle se trouvait là, à même le sol, sans défense, blessée et incapable d'user de ses pouvoirs, elle avait rêvée de la première fois où elle avait utilisé ses capacités occultes, peu de temps après son réveil. Cela avait été la première- et la seule et unique fois- où elle s'était laissée allée sans restriction, ne sachant pas encore à ce moment là que son pentacle ne lui permettait pas de telles folies.
Elle l'avait d'ailleurs payé cher, car elle avait continué à s'amuser quelques minutes avant de passer à deux doigts de mourir, son cercle d'encrage cédant presque... Sans l'intervention de Prasad, elle serait morte ce jour là...

Elle avait survécu, mais elle n'avait plus jamais ressentie cette euphorie, cette liberté qu'elle avait connue pendant ces quelques instants.

Elle donnerait beaucoup pour pouvoir y gouter à nouveau...

D'un coup, un profond soupire de soulagement extirpa Kali de ses pensées, la faisant se redresser un peu. Hiroaki la fixait avec intensité, posant ses mains sur ses épaules.

« Mon dieu, Kali-sama, vous m'avez fait une de ses frayeurs... Vous êtes dans un sale état, j'ai cru... J'ai cru que j'étais arrivé trop tard... »

La demoiselle dévisagea son interlocuteur, lisant au fond de ses yeux verts d'eau un trouble poignant, une vive et criante inquiétude, la faisant un peu culpabiliser. Il lui paraissait ne faire que ça, inquiéter les gens qui l'entouraient...

« T'as pas vu la tête de l'autre gars... » Ironisa-t-elle d'une voix érayée, tentant d'offrir un sourire à Hiroaki mais ne parvenant qu'à grimacer. « Enfin... pour tout avouer, il avait même plus de tête à la fin... »

« La vache... » Souffla le blond. « Faut pas vous cherchez, vous !»

Kali haussa légèrement les épaules, un rien désabusée. « Tu... Tu as réussi à contacter Maeda ? »

En entendant sa question, le garçon détourna la tête, fuyant son regard, intriguant un peu l'hybride

« Non... Je suis navrée, Kali-sama, j'ai essayé tout le long du chemin mais elle ne m'a pas répondu une seule fois... Je vous avoue que cela m'inquiète un peu. J'espère qui ne lui ait rien arrivé... »

« Oh. » Laissa tomber la jeune femme, se rendant compte avec un rien d'effroi qu'elle n'avait même pas envisagé cette possibilité. « Je l'espère également... »

« Mais elle est forte, je suis sure que ça ira ! » tenta Hiroaki, d'une voix qu'il voulait légère, cherchant visiblement à se convaincre lui-même. « Enfin... pour le moment, le plus important est de vous mettre à l'abri... Venez, je vais vous aider. »

Joignant l'acte à la parole, le garde du corps passa le bras valide de la jeune femme autour de ses épaules avant d'agripper sa taille. Kali n'eut pas le choix que se laisser aider, bien trop faible pour pouvoir se redresser toute seule. Elle qui aurait du être faite de flammes avait l'impression d'être en plomb...

Il leur fallut plusieurs tentatives avant de parvenir à se remettre debout tous les deux, arrachant un lourd grognement de douleur à l'hybride. Elle serra les dents et les poings, essayant de ne pas prêter attention à la multitude de points lumineux parasitant son champ de vision.

« Vous êtes glacée.» remarqua le jeune homme, resserrant sa prise sur le corps abimé de l'européenne, l'entrainant un peu après l'autre vers la sortie du cimetière. « Il faut qu'on trouve un moyen de vous soigner... »

« Me soigner... » Répéta la demi-démone, soudain très abattue « Sans sort d'inversion, je vais pas aller bien loin tu sais... Tu es certain que dans ton équipe, aucun ne le maitrise ?»

«Pas à ma connaissance... C'est plutôt rare les gens qui savent l'utiliser... »

« Je ne le sais que trop bien... » Soupira Kali. « Même Gojo ne sait pas s'en servir... »

« La tuile... » Commenta Hiroaki, s'arrêtant un instant pour permettre à son interlocutrice de reprendre son souffle, raffermissant en passant sa prise autour de sa taille.

« Comme tu le dis... » Soupira l'européenne en levant son regard bicolore vers le ciel, fixant cet azur immaculé lui rappelant un peu la couleur incroyable des iris du shaman. « En réalité... Je connais qu'un seul être sur terre qui soit capable de s'en servir, de ce foutu sort. »

En entendant cela, Hiroaki se tourna brusquement vers elle, une vive lueur d'optimisme traversant son regard.

« Sans déconner ? Pourquoi ne pas l'avoir dit plus tôt ? C'est parfait ! Où est-il ? On va aller le voir de ce pas et il va vous guérir ! »

*Si seulement c'était si simple...* pensa Kali en fermant les yeux, l'image du roi démoniaque jaillissant dans son esprit, lui et son maudit sourire moqueur lui plaisant pourtant tellement.

« Non... » Murmura-t-elle tout bas, toujours autant écartelée

« ... Non ? » S'étonna vivement le blond, le dévisageant sans comprendre. « Je pige pas... Mais pourquoi, Kali-sama ? »

« Parce que... »

L'aveu lui coutait, mais au fond ce garçon avait accouru à son secours sans hésiter et se retrouver maintenant à la porter à moitié, ne faisant pas une seconde attention à tout son sang qui était en train de tâcher sa tenue exubérante. Au fond d'elle-même elle avait envie de croire en lui... Elle avait besoin de pouvoir partager son fardeau et ses doutes avec quelqu'un.

« Parce que c'est Sukuna, Hiroaki... Celui qui pourrait me sauver, le seul en l'état actuel des choses... c'est le roi des fléaux en personne. Et personne d'autre.»

Le jeune homme la fixa une poignée de secondes sans rien dire, assimilant visiblement l'information et ses répercutions potentielles.

« ... Et il ferait ça... Par pure bonté d'âme, je suppose ?» tenta-t-il d'une voix où Kali pouvait percevoir l'ironie perler, lui arrachant un ricanement sans joie.

« ... Plutôt en échange...De mon âme...» finit-elle par corriger, glissant un regard désabusé à son interlocuteur qui osa imperceptiblement ses sourcils en entant ses mots.

« Ah. Genre... pacte inviolable, un truc du genre ? »

« Oué... Genre » confirma la demoiselle, repoussant un peu le blondinet pour se laisser alors contre un des piliers de pierre marquant l'entrée du cimetière désert, s'y appuyant lourdement, laissant choir son attention jusqu'à ses pieds. « On va dire que... ce qu'il veut... C'est qu'en échange de son énergie... je devienne sa... sa soumise... grosso modo »

Un silence stupéfait répondit à son aveu dans un premier temps, s'étirant désagréablement pendant plusieurs secondes.

« AH ! » fut la seule réponse que parvint à formuler le garçon aux yeux clairs, arrachant un faible sourire à l'européenne.

« Ah oué... Voilà... Tu comprends mieux pourquoi j'hésite du coup... »

« C'est une très grosse tuile... » Commenta le jeune homme qui alla s'adosser à son tour sur le pilier faisant face à celui de Kali, passant une main dans ses cheveux blonds méchés de fushia dans un geste de nervosité mal contenue, comme s'il venait de mieux saisir le côté sans solution de la situation actuelle.

« Comme tu dis. » soupira l'hybride, terriblement fatiguée, fermant un instant les yeux. Jamais elle n'avait autant eu l'impression d'être arrivée au bout du chemin...

« Après... » Finit par reprendre Hiroaki, pensif. « Si c'est la seule option... ça reste quand même mieux que la mort, vous ne pensez pas ?»

En entendant ses paroles, la demi démone releva la tête vers son vis-à-vis encrant l'or de ses yeux cernés dans les opales vives braquées sur elle avec sérieux.

Encore et toujours ce même dilemme...

« Mieux que la mort... » Répéta-t-elle, torturée. « Toi, Hiroaki... Tu vendrais ton âme contre ta survie ? Tu accepterais de te vendre pour vivre ? De donner ton corps, ton esprit, ta liberté et ton respect de toi-même à un être supérieur pour échapper à la mort ?»

Il la fixa une poignée de secondes, réfléchissant très sérieusement à sa question. Il finit par lui répondre, surprenant un peu Kali.

« N'est pas le principe de toutes les religions, en même temps ? S'abandonner à une puissance qui nous dépasse et suivre des règles qu'il nous impose, régissant tous les aspects de notre vie dans l'espoir de connaitre mieux dans l'après vie, et d'échapper ainsi à la mort... »

La rousse souffla un grand coup, les yeux légèrement écarquillés, étonnée de découvrir une telle profondeur de réflexion chez ce garçon qu'elle avait surement trop vite jugé.

« Je... n'avais jamais envisagé les choses sous cet angle, mec... » s'amusa faiblement l'européenne, l'ombre d'un sourire ornant ses lèvres. « Vu comme ça... Je me convertirai juste à une nouvelle religion, où Sukuna deviendrait mon dieu alors... Le côté esclave sexuel mis à part, ça pourrait presque paraitre acceptable, dis comme ça... »

« Oh, si c'est que ça qui vous dérange. » Laissa tomber l'homme de garde, faisant hausser les sourcils de l'hybride.

« Bah... oui, un peu... Quand même... Non ? »

Hiroaki haussa les épaules, repoussant ses doutes.

« Oh bah... Ça dépend en fait.»

« Ca dépend ? » répéta-t-elle, dubitative. « Ça dépend ? Mais de quoi ? » Questionna Kali, perplexe.

« Eh bien... De pleins de trucs... » Il se mit à se gratter sa joue imberbe, encrant son regard vers le ciel. « Par exemple... Est-ce qu'il est beau gosse ? Est-ce qu'il vous attire ? Est-ce que vous vous voyez passé beaucoup de votre temps avec lui ? Est-ce qu'il est doué pour le sexe et est ce que vous, vous aimez terriblement ça ?»

Au fil se ses questions, une légère rougeur naquit sur les joues blafardes de la fléau, la rendant incapable de répondre dans un premier temps. Jamais elle n'avait considéré la situation sous un angle si... pragmatique...

« Kali-sama ? » l'interpella, un peu inquiet, l'homme de main de Prasad. « J'ai encore été inconvenant, c'est ça ? »

Sukuna, Sukuna, tout en revenait toujours à lui.

L'hybride ricana doucement, se laissant glisser jusqu'au sol, passant sa main la plus valide striée de noir sur son visage épuisée.

Beau gosse ? Il l'était, indubitablement, et bien plus que ça.
Il avait un charisme à retourner le cerveau d'une statue, en plus d'avoir le corps magnifique de Yuji...
Attirant ? Elle était depuis le premier jour aimantée vers lui comme s'il était le centre de gravité de l'univers... Son coté égocentrique, sur de lui et joueur était aussi exaspérant qu'attirant. Il la fasciné plus que de raison...
Passer du temps avec lui ? C'était ce qu'elle faisait presque toutes les nuits, depuis son arrivée au sanctuaire. Et elle aimait terriblement ça, même s'il était un mufle par moment. Si elle était honnête avec elle-même, elle aurait même admis que la simple idée que le fléau ne vienne par la taquiner un soir l'aurait profondément peinée...
Doué pour le sexe ? Elle mettrait ses deux mains à couper que oui...
Et elle ? Aimait-elle cela ? Elle n'en savait rien, mais le seul souvenir des mains et des lèvres du démon sur son corps suffisait à lui donner la chair de poule.

« Non... » murmura l'intéressée, secouant doucement la tête. « Non, au contraire, tu me donnes matière à réflexion. Et pour être honnête... Pour la plus part des questions, je pourrais dire oui... Pour les dernières, je ne peux que supposer de son talent et de mon goût pour la chose... »

« OH ! » Le feu monta à son tour aux joues d'Hiroaki, le faisant un peu se dandiner d'un pied à l'autre, mal à l'aise. « Merde... C'est vrai que vous êtes super méga jeune en fait... On a tendance à l'oublier en vous voyant… »

Kali laissa échapper un rire sans joie. Si cela avait été le seul de ses soucis...

« ... ET... » reprit-il, une mimique aux lèvres, cherchant visiblement à détendre l'atmosphère. « Malgré tous vos 'oui', Il reste un démon de 1000 ans misogyne, lubrique et sanguinaire ? »

La réflexion arracha un nouveau rire à Kali, la faisant fixer son interlocuteur qui était venu s'accroupir face à elle, genoux à terre.

« Et, malgré tous mes 'oui'... » Répéta-t-elle doucement « Il reste un démon de 1000 ans misogyne, lubrique et sanguinaire... Egocentrique également, terriblement gamin et avec une tendance à vouloir transformer les gens en hachis à la moindre contrariété... J'ai pas forcément envie de finir en paillasson de hachis... »

« Hum... » Le blondinet s'assit à même le sol, recommençant à se tapoter la joue avec son index, les yeux fermés. « J'vois qu'une chose à faire alors, Kali-sama... »

« Oh ? » soupira la jeune femme, n'osant même plus trop y croire. « Je t'avoue que si tu as une idée brillante à me donner, quelle qu'elle soit, je prends... Et plutôt deux fois qu'une... »

« Eh bien c'est simple... » Il se rapprocha d'elle dans crissement de gravier, allant se saisir avec douceur de la main valide de la démone, sa chaleur se diffusant au travers de sa peau glacée par l'hypovolémie. « Va falloir que vous le fassiez tomber amoureux de vous, Kali-sama ! »

L'interpellée écarquilla ses yeux félins bicolores en entendant ces mots, les assimilant lentement avant d'éclater de rire. Elle s'arrêta cependant très vite à cause de la douleur lui vrillant les côtes, transformant son rire en une toux douloureuse qui se termina en grognements étouffés.

«Hiroaki, ne me fait pas rire, ça fait trop mal putain ... »

Mais ce dernier ne se laissa pas démonter, enchainant sans en démordre.

« Je suis sérieux, vous savez ! Même un lion peut être dompté... S'il tient à vous, il ne vous transformera pas en natto à la première occasion...»

La demoiselle secoua doucement la tête, désabusée. Il n'y aura pas de solution miracle issue de la cervelle hyperactive du blondinet. « Tu ne le connais pas... Moi non plus d'ailleurs, mais de ce qu'il laisse paraitre, il n'est pas du genre à s'amouracher de qui ou de quoi que se soit... »

« C'est peut-être un masque qu'il porte, pour se protéger ? » tenta Hiroaki, les yeux pleins d'espoir.

« Et même si c'était le cas, chou... Il est le roi des fléaux, la malédiction la plus puissante n'ayant jamais foulé ce monde. Il est né humain et a réussi à devenir de son vivant un démon pour devenir ce qu'il souhaitait être, plongeant le Japon dans un flot de sang et de feu. D'après les textes anciens et ce que lui-même m'a laissé entendre, la seule chose n'ayant jamais compté à ses quatre yeux était, est et demeurera toujours la satisfaction immédiate et absolue de ses moindres envies. Tu crois vraiment qu'un homme tel que lui pourrait s'amouracher d'une petite bestiole hybride inculte frôlant la mort à chaque fois qu'elle use des ses pouvoirs occultes ? Tu as trop regardé de dramas... »

« Mais il vous propose quand même un pacte... » murmura le jeune homme, ne voulant visiblement pas lâcher l'affaire.

En entendant cela, Kali laissa échapper un nouveau ricanement. Elle avait arrêté de se leurrer par rapport à la nature de l'intérêt que lui porter Sukuna depuis un moment déjà.

« Il s'ennuie, Hiroaki... Yuji le tient prisonnier, leur cohabitation est catastrophique et il est en manque de sexe. Le roi millénaire s'emmerde comme un rat mort et je suis là. Il n'y a pas de paillettes dans ses yeux, juste une faim sans fond d'un millier d'années... Ça va pas plus loin... »

« Moi j'suis convaincu que c'est déjà un début prometteur ! Y a des dramas qui commencent avec bien moins que ça, vous savez...»

Elle lui adressa un faible sourire, peu convaincue. C'était quand même rafraichissant, cet optimisme alors que tout semblait si noir... Doucement, avec une très grande gentillesse, le blond posa ses mains sur les épaules de la demi-démone, la couvrant d'un regard plein de sollicitude.

« Bon alors... C'est pas tout, mais on va pas rester à tailler le bout de gras le cul dans les cailloux alors que vous continuez joyeusement à vous vider de votre sang... où va-t-on, Kali sama ? »

Où aller... Bonne question... Le nombre de ses possibilités était à présent réduit au minimum. Il n'y avait plus qu'une seule chose à faire...

« Au refuge, Hiroaki. On retourne au refuge voir les deux hommes les plus égocentriques et puissants de ma connaissance. Si Sukuna-san a déjà abattu ses cartes... Gojo, s'il est encore là, aura peut être une idée à sortir de son chapeau lui aussi. »

Le garçon se pencha vers elle pour l'aider à se relever avant de se figer, encrant le vert pétillant de ses yeux dans l'or ternis par l'épuisement de siens.

« Attendez... Attendez, attendez ! Ca veut dire que... Je vais rencontrer Gojo Satoru ? Et... Y aura aussi le réceptacle de Sukuna ? La DINGUERIE ! »

La joie que cette simple idée faisait naitre en lui crépitait littéralement autour de lui, le rendant euphorique.

« Ravie de te faire ta journée... » s'amusa faiblement l'hybride, passant son bras autour des épaules du blond pour s'y accrocher comme une naufragée à sa planche.

« J'en reviens pas... » murmura-t-il alors qu'il les relevaient tous les deux, un sourire ébahie aux lèvres. « Carrément trop cool... Vous pensez que je pourrais prendre un selfie avec eux ? »

« Tu pourras toujours leur demander... Mais fait gaffe, Sukuna-san ne fait jamais rien gratuitement... »

Il la dévisagea une poignée de seconde, regardant son visage, son corps certes abimé mais résolument féminin, un sourire énigmatique aux lèvres. « Pas sur d'être à son gout, Kali-sama... »

« Oulà... Je mettrais pas ma main au feu à ce sujet là, Hiroaki... Tu peux récupérer mon téléphone dans mon sac ? J'espère qu'il lui reste encore un peu de batterie... »

Le garçon s'exécuta, farfouillant comme il le pouvait dans le sac en piteux état qu'il portait en bandoulière, parvenant à en extraire le mobile abimé.

« Le code c'est un Z... » murmura la demoiselle alors qu'ils avançaient tant bien que mal dans la ruelle heureusement déserte, prenant la direction du sanctuaire renfermant son dernier espoir.

« Pas très prudent quand même... » Ne put s'empêcher de commenter le garçon, un rien taquin. « Et votre pin, c'est 0000 ? »

« La ferme... » grommela Kali, prise sur le fait. « Téléphone à Gojo et met nous en haut parleur. Même s'il est déjà parti, je suis certaine qu'il pourra ramener ses fesses rapidement. »

« Je vois pas son nom... » commenta le blond en faisant défiler ses contacts, surpris d'en découvrir si peu. Il y en avait là une quinzaine à tout cassé...

« Ah... » Une très légère rougeur colora brièvement les joues blafardes de la jeune femme, lui faisant fuir le regard de son interlocuteur. « Il... Il est enregistré à 'l'exaspérant coton tige'... »

« AHAHAHAH » Un rire franc secoua le corps mince mais musclé du japonais, rejetant la tête en arrière. « Pas mal, pas mal ! Ça me rassure, moi vous m'avez juste mis mon nom... »

« Parce que j'ai pas eu le temps de le personnaliser vois-tu... » répliqua-t-elle au tac au tac, se souvenant qu'elle avait pensé à marquer 'le psychopathe décoloré' à la place du prénom du garçon, se remerciant intérieurement de ne pas l'avoir fait. « Si je survis, j'y réfléchirais... »

« Hiroaki le magnifique, ça me va pas mal je trouve, si vous cherchez une idée... »

Kali leva les yeux au ciel, n'en revenant pas. Il était déconcertant, ce mec... « Oh punaise, je rigolerais bien, mais ça risque de m'achever... Tu vas bien t'entendre avec les deux autres... Et s'il te plait, Hiroaki, téléphone à Gojo... »

« Oh, oui, oui, bien sur... » s'amusa-t-il, recommençant à taper sur l'écran du téléphone de l'hybride, trouvant rapidement le numéro recherché, allant plaquer le téléphone contre son oreille. « J'en reviens pas que je vais parler au porteur du 6ème œil ! Ça sonne, ça son... »

D'un coup une écrasante puissante occulte s'abattit sur les deux jeunes gens, coupant presque le souffle à Kali déjà au bout de ses forces, remettant immédiatement Hiroaki sur ses gardes, le faisant resserrer sa prise sur le corps de la jeune femme.

Ils fixèrent l'espace autour d'eux, la vive lumière de cette chaude journée d'été ayant laissé place à des murs intangibles d'un sombre violet mouvant, délimitant un espace restreint coupé du monde.

« Putain de merde... » souffla le blond, fixant le téléphone devenu brusquement inutile.

« Un rideau... » commenta, horrifiée, l'européenne blessée, sentant son sang se figer dans ses veines. « Ils m'ont retrouvé... Je suis restée trop longtemps sans scellées, j'suis trop conne... »

D'un coup elle attrapa le t-shirt du garçon de sa main la plus valide, une vive panique commençant à gronder en elle. Ses actes inconséquents l'avaient menée ici, elle risquait fortement de tomber entre les mains de ceux la traquant depuis son réveil... Mais elle refusait d'entrainer Hiroaki dans sa chute.

« Je suis désolée de t'avoir entrainé là dedans, Hiro... Court, casse-toi. Je vais me débrouiller. J'ai encore mon fli... »

« Non mais vous êtes barjot ? » Il ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase, soudain plus sérieux qu'il ne l'avait jamais été auparavant. « Vous me prenez pour qui ? Je suis là pour vous protéger, je vais certainement pas vous abandonner au moment où vous avez vraiment besoin de moi ! Prenez votre flingue pour vous défendre si jamais c'est nécessaire, mais je partirai pas sans vous, point final ! »

En disant cela, il plaqua Kali contre un mur pour qu'elle puisse tenir debout sans son aide, vidant sans ménagement le contenu de son sac au sol, repérant ainsi plus facilement le révolver argenté. Sans plus attendre, il s'en saisit avant de le fourrer dans la main de l'hybride, encrant ses yeux à la douce couleur d'opale dans les siens, solennel.

« Si jamais vous avez un angle. Tirez. Ne réfléchissez pas, on a pas assez d'atouts pour faire dans dentelle. »

L'européenne hocha faiblement la tête, retrouvant le pois de son arme au creux de sa paume. Naturellement, son doigt alla se placer au niveau de la détente, déjà prêt à s'abaisser en cas de besoin. Elle avait déjà tiré un coup dans la ruelle. A présent il restait plus que 5 balles, il ne faudrait pas qu'elle se rate. Entre temps, le japonais s'éloigna de quelques pas, passant son t-shirt par-dessus sa tête, se retrouvant torse nu face à elle, l'étonnant un rien.

Il avait une peau pâle, presque aussi laiteuse que la sienne, et son torse était bien plus étroit qu'elle ne l'aurait cru sous son large vêtement. Malgré le fait que la lumière se soit grandement tarit à cause du rideau, la jeune femme pouvait voir comme de légères marbrures nacrées parcourant son corps, l'intriguant un peu. Il portait surtout une sorte de harnais en cuir l'enserrant complètement, sur le quel était fixé deux larges gantelets au niveau de ses reins. Le garçon passa ses bras dans son dos pour les enfiler dans un geste visiblement habituel, tirant d'un coup sec sur les liens qui les maintenaient en place une fois ses mains correctement enfoncées. Immédiatement, une nouvelle vague d'énergie déferla sur l'hybride, faisant naitre une chair de poule sur ses bras.

Des sortes d'étincelles crépitaient tout autour du corps d'Hiraoki qui se retourna vers la femme qu'il avait pour mission de protéger, lui adressant un léger sourire.

« Dans ma famille, on dit que l'on descend du dieu ancestral de la foudre, Raiden... Ces gants nous permettent d'utiliser nos sorts sans trop en pâtir, parce que malgré tout ce qu'on dit, on reste juste des humains... Dans tous les cas, ma foudre est votre, Kali-sama. On va se sortir de ce traquenard, je vous en donne ma parole. »

En disant cela, il lui adressa un clin d'œil, levant un pouce crépitant d'électricité dans sa direction. Il était inconscient, ce garçon, vraiment...

« Hiroa... »

Brutalement, une chaine sombre vint s'enrouler autour du buste de Kali, lui coupant le souffle, la tirant violemment vers l'avant. Surprise et trop fatiguée pour avoir de bons réflexes, l'hybride tomba face contre terre, se faisant trainer sur plusieurs mètres par une force herculéenne, lui arrachant un cri de surprise.

« KALI-SAMA ! »

La voix du blondinet résonna non loin alors que la tête de l'intéressée lui donnait l'impression d'être sur le point d'exploser à cause du choc avec le bitume, le gout métallique du sang lui tapissant la bouche. Elle avait du se mordre la langue dans sa chute... Pitoyable.

Non loin d'eux un rire puissant retentit dans la ruelle occultement isolée, faisant relever la tête aux deux jeunes gens qui purent découvrir 3 silhouettes non loin sur le toit d'une des maisons, l'un d'eux ayant la fameuse chaine enroulée autour de son avant bras.

« J'la tiens les gars ! » hurla l'inconnu de haute et large stature, son corps entièrement couvert d'un uniforme sombre ayant des allures militaires. « Sans déconner... Tout ça pour ça ? Elle est déjà presque claquée, l'hybride ! »

« Justement... » Enchaina l'homme sur sa gauche, également vêtu de noir, les toisant avec dédain de son perchoir. « Il la veut vivante, alors tâche de ne pas l'achever. »

Le dernier tira sur une cigarette quelques secondes, sa fraise s'illuminant dans la demi-pénombre créée par le rideau, avant de parler à son tour d'une voix aux accents étrangers faisant tiquer la jeune femme prisonnière.

« Et la folle dingue, là, avec ses mèches roses ? Qu'est ce qu'on en fait ? »

L'agresseur de gauche scruta un instant la scène à ses pieds, chef visible de la petite équipe, avant de lâcher d'une voix coupante et sans appel. « Pas de témoin. On l'élimine. Il avait qu'à mieux choisir son camp. »

« Connard ! » S'écria l'intéressé, piqué au vif, bondissant au-dessus de Kali afin d'empêcher l'armoire à glace de l'attirer plus vers eux. « Tu crois que je vais vous laisser faire ? J'vais vous faire sortir les yeux du crâne en mode pop corn, pauvres tâches ! »

Comme pour illustrer ses propos, le blond vint se saisir de la chaine maintenant captive la demi démone impuissante de ses deux mains, libérant d'un coup son pouvoir familial qui se matérialisa en une sorte de serpent étincelant remontant à toute vitesse vers l'homme tenant les maillons entre ses doigts, le prenant par surprise.

Hélas, lui et ses comparses furent plus rapides. Le geôlier dématérialisa sa chaine avant que l'onde électrique reptilienne ne les atteigne, et tous les trois sautèrent hors de portée pour échapper à l'aveuglant choc électrique qui s'abattit sur le toit de la maison où ils s'étaient tenus quelques secondes auparavant.

« Enfoirés... » siffla Hiroaki, avant de s'agenouiller près de Kali, la relevant précipitamment en lui arrachant un grognement de douleur. « Faut qu'on bouge... Maintenant ! »

Cependant, il n'eut pas le temps d'esquisser le moindre pas qu'une nouvelle attaque leur tomba dessus, sous la forme d'une trombe d'eau s'abattant sur eux, comme sortie de nulle part, les clouant au sol. L'onde glacée coula sur leur corps avec violence sans discontinuité pendant d'interminables secondes, les empêchant de respirer, nourrissant en eux deux une panique grandissante face à leur infériorité dans ce combat. Quand enfin la chute d'eau stoppa, les laissant tous deux à bout de souffle et frigorifiés, les trois hommes ne se tenaient plus qu'à quelques mètres d'eux, sûrs de leur victoire.

« Allez, gamin... Lâche la donc. On veut bien être magnanime et te laisser déguerpir. Au fond, tu ne te rends pas compte que ce que l'on fait, c'est pour le bien commun. »

Hiroaki, qui s'était mis au dessus de l'hybride pour la protéger autant que possible de son corps, resserra encore sa prise sur elle, visiblement peu sensible à la proposition énoncée par le chef du trio, sa colère grandissante faisant littéralement crépiter l'air autour de lui.

« On va la récupérer, de toute façon, la bête de foire... Alors soit reconnaissant et sauve ta peau. »

A ces mots, Kali releva la tête, complètement sonnée, regardant les traits déformés par la haine du garçon qui tentait de toutes ses forces de la protéger. Ils n'avaient pas tords, les trois hommes... Sa vie valait-elle vraiment celle du jeune homme ? Elle était de toute façon condamnée à cause de son pentacle à deux doigts de céder. Alors, quoi que puissent être leurs plans la concernant, ils risquaient fort de ne rien obtenir d'elle de toute manière...

«Hi... Hiroaki... S'il te plait, écoute-les. » Lui murmura t'elle en passant une main dans son cou pour le ramener vers elle, tentant de le raisonner. « Je vais mourir, Hiroaki. Je ne sais pas qui ils sont, ou ce qu'ils veulent, mais je doute qu'ils aient un manipulateur du sort d'inversion sous la main, c'est bien trop rare... Et sans cela, je vais mourir, c'est une question d'heures, je le sais bien. Je le sens dans mes tripes. Alors s'il te plait, ne te sacrifie pas pour moi inutilement. Laisse les m'emmener, sauve ta vie. Ils n'obtiendront rien de moi de toute façon... »

« Vous... » commença le garçon, choqué, la dévisageant avec une frayeur galopante déformant ses traits. « Vous divaguez... C'est l'épuisement qui vous fait voir les choses comme ça. Sukuna pourrait... »

Elle posa sa main sur sa bouche, l'empêchant de continuer. L'hybride hocha négativement sa tête, un triste sourire aux lèvres.

« Non... C'est trop tard à présent... Laisse moi être celle qui protège les autres, une fois dans mon existence insensée... Eh, vous... »

Sa voix était faible et hésitante, malgré le fait qu'elle souhaitait se faire entendre, mais les trois autres hommes présents dans la ruelle l'entendirent tous, braquant leur attention sur le corps malmené étalé au sol de l'européenne. Usant de ses dernières forces, la jeune femme repoussa son chevalier servant de sa main valide, se hissant courageusement pour se retrouver à genoux, relevant la tête pour dévisager de ses yeux félins inhumains les trois silhouettes noires se tenant non loin d'eux.

« E... Épargnez-le... Je vous suivrais... » continua-t-elle, refusant qu'une autre vie que la sienne soit perdue aujourd'hui à cause de sa propre incapacité à se défendre. « Mais ne touchez pas à Hiroaki. »

« Ka...Kali-sama... » Le garçon la fixait, effaré. « Dîtes pas de conneries, je vous en conjure ! Vous pouvez pas les suivre, ces mecs... Dieu seul sait ce qu'ils vous veu... »

« Ça suffit, Hiroaki... ça suffit... Je suis fatiguée. Regarde-moi. »

Elle encra son regard dans le sien, plus sérieuse qu'elle ne l'avait jamais été dans sa courte existence, tentant de le protéger de son envie suicidaire de la protéger.

« Hiroaki. » Elle vint l'enlacer, lui parlant tout bas à l'oreille pour être sure que les autres ne puissent les entendre. De l'extérieur, cela pouvait paraitre pour un adieu déchirant là où il était en réalité question d'un plan kamikaze. « Hiroaki, écoute moi bien. Il me reste 5 coups à tirer dans mon arme. Je compte bien les utiliser. Mais je refuse que tu sois présent, ça ne va pas bien finir. Toi et moi le savons parfaitement. Alors tu vas bouger ton cul et te barrer d'ici. Dans l'état actuel des choses, tu vas mourir et je vais être capturée. Et mourir aussi, de toute façon. Alors pour l'amour du ciel... Casse toi, que ce fiasco ne nous coute pas la vie à tous les deux... »

Elle s'éloigna lentement de lui, le dévisageant avec intensité.

«C'est un ordre, bordel de merde. »

Il lui rendit son regard sans sourciller, respirant profondément, son aura électrique s'intensifiant au fil des secondes.

« Je le refuse, putain. De chaque cellule de mon corps, je vous dis merde, avec tout mon respect. Je ne tournerais pas le dos à l'ennemi, alors qu'une demoiselle, quelque puisse être sa nature, est en détresse. »

Sans plus lui laisser le temps de répliquer, il se releva, repoussant sa main avec un rien de mauvaise humeur, comme vexé dans sa fierté par sa proposition.

« On est pas dans un putain de Disney, Hiroaki ! » s'emporta-t-elle soudain, désespérée.

« J'emmerde les Disney. Je vaux bien mieux que tous ces princes débiles en plus... »

En disant cela il se tourna vers elle, adressant un clin d'œil complice à la demoiselle, dissimulant tant bien que mal le fait qu'il savait aussi bien qu'elle que la situation était catastrophique. Lui contrôlant l'électricité, quelque puisse être sa maitrise, le fait qu'il y ait un manipulateur de l'eau en face d'eux lui compliquait lourdement la tâche. En effet, à présent que lui et l'européenne étaient trempés et barbotés dans une flaque de plusieurs mètres d'envergure, toutes ses attaques risquaient de porter préjudice à l'intégrité du corps déjà moribond de l'hybride, le limitant terriblement dans son champ d'action. S'éloigner d'elle, c'était potentiellement la laisser à la portée de l'homme aux chaines, rester près d'elle, c'était s'empêcher de pouvoir se défendre réellement...

Dans les cas foutus d'avance... La meilleure défense était souvent l'attaque, on le lui avait toujours enseigné.

« Tenez bien votre arme, Kali... Et quand vous pourrez... même si je suis au milieu... Tirez. »

Sans plus attendre, le jeune homme s'élança vers leurs trois adversaires, brandissant ses gantelets crépitant dans l'air. Dès qu'il eut quitté la zone détrempée de la ruelle, il ouvrit les bras, invoquant une myriade de serpents incandescents qui fondirent dans toutes les directions, dont la sienne, faisant naitre de nouvelles zébrures nacrées sur sa peau pâle, lui arrachant une grimace de douleur.

Immédiatement, l'homme manipulant l'eau voulu faire tomber une nouvelle trombe d'eau sur lui, pour le court-circuiter. Cependant Kali, qui observait la scène avec effroi, voyant déjà un cercle d'incantation se matérialiser au dessus du blond, tendit son arme d'une main vers son invocateur encapuchonné, serrant les dents tout en visant d'un œil pour compenser le vertige qu'elle ressentait actuellement.

« Tirez ! » crut-elle entendre au creux de son oreille de la voix du jeune japonais, lui faisant presser la détente alors qu'il se trouvait à quelques mètres seulement de la trajectoire initiale de son tir.

Instantanément, la déflagration partit dans un éclair aveuglant de puissance, renversant une nouvelle fois le bras déjà malmené de l'hybride dans une position très peu naturelle, lui arrachant un cri de douleur résonnant au sein du rideau. Elle tomba lourdement en arrière sur le sol trempé, le souffle court, son être entier parcourut par une nouvelle douleur ne faisant que s'ajouter à toutes celles qu'elle ressentait déjà, lui donnant le tournis. Une nuée de lucioles dansaient au fond de ses prunelles d'or, alimentant la terrible nausée lui vrillant les tripes alors que ses oreilles bourdonnaient à leurs chants, la rendant momentanément sourde et aveugle aux évènements se tramant tout à coté d'elle.

L'avait-elle touché ? L'avait-elle tué ? Et Hiroaki ? Il lui restait encore 4 balles dans son chargeur mais après deux coups seulement son épaule paraissait définitivement déboitée. Comment pourrait-elle à présent seulement presser sur la détente ? Y parviendrait-elle de son autre main, qu'elle ne ressentait déjà plus que dans une brume de douleur vague et distante ?

Si le blondinet continuait à se battre, elle ne pouvait décemment pas demeurer passive et le laisser mener cet affrontement seul. Elle se devait de faire quelque chose... Mais quoi, dans une telle situation où tous les dés paraissaient pipés ?

Périlleusement, étouffant comme elle le pouvait un nouveau râle de souffrance en s'appuyant sur son bras gauche, à présent le moins blessé, ou tout du moins le plus fonctionnel des deux, la jeune fille se redressa un peu, balayant l'espace l'entourant de ses yeux félins, sa vue terriblement trouble à présent.

...

Elle cligna des yeux, incrédule, sentant de la glace saisir ses veines.

...

Avait-elle perdue conscience un moment ?

...

Cauchemardait-elle ?

...

Etait ce vraiment le corps du garçon n'ayant cherché qu'à la protéger qu'elle voyait à présent prisonnier d'une sphère d'eau, à quelques mètres du sol, se débattant vainement de ses dernières forces, ses étincelles électriques partant dans toutes les directions, le blessant plus lui-même qu'autre chose, saisit d'une une panique viscérale très compréhensible vue la situation.

Kali sentit la bile remonter dans sa gorge à cette vision, chose exacte qu'elle aurait voulu éviter.

« Non... » murmura-t-elle, sa voix étouffée par la peur et l'émotion, les larmes lui montant aux yeux. « Arrêtez... »

Elle voyait le blond gesticuler inutilement dans l'enveloppe d'eau l'emprisonnant, ses dernières bulles d'oxygène lui échappant malgré lui, ses gantelets battant vainement les courants occultes le maintenant prisonnier.

« Arrêtez... Je vous ai dit que je me rendais... ARRÊTEZ ! »

Elle voulu se relever pour courir au secours du japonais mais en fut incapable, parvenant seulement à se trainer sur un mètre tout au plus.

Elle retomba pitoyablement au sol, les larmes dévalant ses joues cireuses, ses jambes ne réussissant même plus à la porter. Malgré elle, un sanglot lui échappa, lui faisant baisser la tête, le désespoir et la colère l'enserrant conjointement.

La famille de Prasad avait elle vraiment passé tous ces siècles à attendre son réveil, à elle, impuissante et dépendante des autres à chaque instant ?

« Arrêtez... je me rends, putain... Laissez le juste partir... »

Un ricanement narquois retentit non loin, lui faisant serrer les mâchoires, lui poignardant le cœur et l'âme.

Voilà donc à quoi elle était réduite, aux portes de la mort ?

Elle était bien loin, la sensation de liberté, de puissance et de vie qu'elle avait ressentit, ce jour là, baignée de ses flammes occultes dont elle devait être la reine, à flotter au-dessus du monde...

« Eh bien... » Reprit une voix non loin, présomptueuse au possible. « Tu as entendu la créature... Laisse-le partir. »

« Ma foi... » Finit par dire l'homme manipulant la sphère aqueuse, tout aussi moqueur que son confrère. « Maintenant qu'elle veut bien être docile... »

D'un coup, le bourdonnement créé par le mouvement circulaire de l'eau s'arrêta, remplacé par une trombe s'abattant sur le sol tout près de Kali, la trempant un peu plus encore. Le corps inerte d'Hiroaki tomba lourdement sur le goudron, face contre terre, arrachant un nouveau sanglot à la demoiselle qui craignait déjà le pire.

« Eh... Eh... Hiroaki... Bouge, qu'est ce que tu me fais ? »

Lentement, elle se traina sur le sol détrempé jusqu'au garçon glacé et silencieux, agrippant sa ceinture pour le tirer vers elle de sa main blessée, parvenant difficilement à le faire basculer sur le côté. Il était plus pâle qu'un linge, plus froid que la mort et ne respirait visiblement plus, faisant rater un battement au coeur de la jeune hybride.

« Hiro...aki... ? S'il te plait... »

Elle renifla faiblement, passant sa main sur sa joue frigorifiée. Comment pouvait-il déjà être si froid ?

C'était à cause d'elle tout ça.

Elle...Elle... Encore et toujours elle et sa putain de nature soit disant rarissime mais surtout bancale...

La demoiselle se laissa aller contre le corps immobile du japonais, sanglotant doucement, sentant une vive colère naitre au creux de son ventre. Elle enfouit son visage dans son cou, maudissant sa propre existence, celui qui l'avait faite telle qu'elle était, celui qui la traquait et ces maudits hommes servant ses desseins...

« On l'a relâché, comme promis, ton blondinet... Allez, Yuki. Choppe-la avec tes chaines, qu'on en finisse. »

En finir...

Ces paroles firent étrangement écho dans l'esprit embrumé par le ressentiment et la douleur de l'hybride, lui faisant serrer les dents.

Oui...

Il fallait que tout ça finisse.

Lentement, l'européenne glissa ses lèvres contre la joue bleuie de son preux chevalier, y déposant un baiser avant de murmurer tout bas contre sa peau. « Pardonne-moi, Hiroaki... Je n'ai pas pu empêcher ce gâchis... Mais permet moi d'au moins te venger. »

Sans plus attendre, elle vint mordre son cou, pour aspirer son sang, s'alimentant de son énergie occulte vacillante pour offrir à son corps en sursit un nouveau souffle. Il ne durerait pas, elle le savait parfaitement, mais se n'était pas cela qui lui importait. Elle se devait de faire la peau à ces trois bâtards avant de partir, quoi qu'il puisse lui en couter.

« Mais qu'est ce qu'elle fout, cette tarée ? Il est sur, le boss, de vouloir récupérer cette chose ? »

Elle voulait les tuer.
Elle voulait les faire souffrir.
Elle voulait les faire payer.

Il n y avait plus que cela qui occupait son esprit, éclipsant la douleur qui grondait en elle comme une tempête.

Il n y avait plus de chrono à respecter, son temps était de toute manière compté.

Alors au diable la raison, seule la vengeance avait valeur à ses yeux.

Kali pouvait sentir l'énergie occulte d'Hiroaki courir dans ses veines, alimentant un peu son pentacle assoiffé. C était insuffisant, mais elle s'en contenterait pour le moment.

Sans plus réfléchir, l hybride appela ses flammes, les relâchant tout autour de son corps blessé. Elles s'élevèrent tout autour d'elle, consumant les restes de ses vêtements alors qu'elles l'habillaient d'une matière mouvante et vivante, faite de flammèches allant du noir au violet courant a même sa peau striée de noir. Son feu parcourait ses veines, son sang, sa chair, brûlant et chaotique, grondant à ses oreilles comme une bête sauvage, animé par l'énergie du désespoir. Alors qu'elle se relevait dans un embrasement occulte à la chaleur délirante, elle ne se rendit même pas compte que ses flammes s'affairaient au niveau de ses innombrables blessures afin, si se n'était de les guérir, de les diminuer un minimum.

Sans y prêter attention ni perdre une seconde de plus, elle se transféra vers l'homme le plus proche d'elle, celui qui manipulait les chaînes, lui tombant dessus avant qu'il n'ait pu faire un geste. Elle se coula contre son corps, féline et prédatrice, tirant sur la capuche sombre dissimulant jusqu'alors son visage à sa vue, libérant ainsi l'accès à sa gorge.

« Qu'est ce que... »

Elle ne lui laissa pas le temps de terminer sa phrase, plantant ses crocs dans sa peau, au niveau de la jugulaire, s'abreuvant a grandes gorgées de son sang tiède chargé d'énergie occulte.

Infecte.

Après avoir goûté au pouvoir de Sukuna, si unique et puissant, comment aurait elle put en réalité se contenter de celles de quiconque d autres ? Ça avait le goût que la terre sur sa langue, que du verre pilé dans ses veines.
Mais au moins, cela avait l avantage de lui offrir la possibilité d'user de ses pouvoirs encore un peu.
C était certes comme essayer d'écoper un navire qui prenait l eau a l aide d'une cuillère à soupe, mais au point où elle en était...

En même temps qu'elle s abreuvait avec voracité, les yeux fermés, broyant la gorge de l'homme sous ses doigts sans même s'en rendre compte, ses flammes prenaient de l'ampleur autour d'elle, brûlant par la même occasion le corps de son prisonnier, lui arrachant des râles de douleur sonnant doux à ses oreilles.

Bientôt il n y aurait plus rien à tirer de lui...

« Yuki, putain ! »

La voix de l'homme manipulant l'eau résonna non loin et Kali sentit dans l'air des mouvements occultes qui devaient certainement annoncé l'utilisation de son sort, la mettant instantanément sur ses gardes.

Sans plus attendre, la demi démone relâcha sa prise sur sa première proie, non sans s'assurer d'arracher suffisamment de chair à sa gorge pour offrir à l'homme déjà lourdement brulé et exsangue une lente agonie dans le peu de sang qui lui restait.

Usant de l'énergie qu'elle venait tout juste de boire, elle se transféra à nouveau dans un jaillissement de flammes sombres, se désintéressant complètement du corps moribond du dénommé Yuki qui s'effondra mollement sur le sol, plaquant vainement ses mains sur son cou éventré à la recherche d'un air qui ne parviendrait jamais jusqu'à ses poumons.

Et de un.

Encore deux à faire périr…

Kali se rematérialisa à quelques mètres des hommes encapuchonnés restant, les scrutant de ses yeux inhumains, commençant à faire les cent pas, prédatrice. Elle pouvait sentir en elle toute la colère, la frustration et la souffrance qu'elle avait ressenties ces dernières semaines se mêler et gronder telle une bête enragée et affamée, exigeant vengeance.

« Tu ne paies rien pour attendre ! Sale… Monstre ! »

L'encapuchonné manipulant l'eau tendit alors le bras vers elle, sans doute pour la capturer dans une nouvelle prison occulte comme il l'avait fait avec Hiroaki. Mais l'hybride n'avait aucunement l'intention de se laisser faire. En ce jour qui sonnait son glas, elle ne s'interdisant plus de limite à l'utilisation de ses pouvoirs : elle pouvait à nouveau percevoir les choses avec cette dimension ajoutée qui lui était propre : celle des ombres.

Elle sentait chacune d'entre elles, comme un relief à part entière, un point d'encrage endormi n'attendant que son ordre pour s'éveiller. Et celle se trouvant aux pieds de cet individu ne faisait pas exception…

Jamais elle n'avait fait cela auparavant. Mais au fond, qu'avait-elle à perdre ?

A son tour, elle tendit le bras vers son adversaire, le toisant avec une férocité qu'elle ne se connaissait pas. A ces yeux inhumains aveuglés par la peine et la colère, ces inconnus n'étaient que des tas de viandes, juste bons à lui servir de défouloir. Ils ne méritaient pas l'air qu'ils respiraient, ils ne valaient même pas leur ombre assoupie à leurs pieds. Et cela tombait bien, car c'était d'elles dont elle allait se servir.

La jeune femme se focalisa complètement sur l'ombre de l'homme lui faisant face, sans se soucier de l'onde qui commençait à tournoyer autour d'elle, ni de la coulée de sang qui s'échappait de son nez ou de la sensation déchirante que créait son pentacle dans sa chair. Au bout qu'un instant, elle sentit comme un lien se tendre entre elle et la forme sombre et assoupie, lui indiquant qu'elle était parvenue à faire ce qu'elle souhaitait.

Elle n'avait besoin que d'un ordre en plus…

« Consume… » énonça-t-elle d'une voix d'outre tombe dénuée d'émotion, ses pupilles félines s'étrécissant sous la concentration que lui demandait ce nouvel exercice.

A peine eut-elle prononcé cette simple parole que l'ombre du manipulateur d'eau s'embrasa littéralement, de hautes flammes noires et violettes s'élevant à plusieurs mètres du sol, arrachant de terribles hurlements à la victime qui se trouvait en son épicentre. L'agresseur se débattit quelques secondes, essayant de s'enfuir en courant mais ne parvint qu'à faire une poignée de pas trainant avant de s'effondrer, face contre terre, le feu surnaturel continuant de le calciner sans relâche.

Il s'arrêta cependant aussi vite qu'il n'avait pris, les flammes s'évaporant dans l'air alourdit par les relents de chair calcinées, et le lien avec Kali s'évapora par la même occasion à l'instant même où l'homme cessa de se débattre, visiblement terrassé. La mort de du propriétaire faisait visiblement disparaitre son ombre…

Quel dommage… Son supplice avait été si court…

L'européenne regarda avec dédain la forme noircie étalée sur le sol, ne trouvant pas dans ce cadavre hélas un quelconque réconfort.

Peut être une fois le dernier tué…

Elle chercha alors celui-ci du regard, mais une vive douleur lui transperça le cœur, lui coupant le souffre et la faisant tomber à genoux. Les flammes l'entourant diminuèrent terriblement, se réduisant bientôt à des flammèches parcourant sa peau à chaque instant plus striée par les traits de son pentacle. Une violente toux la secoua d'un coup, lui arrachant les poumons, lui faisant fermer les yeux un instant. Quand elle parvint enfin à reprendre son souffle, elle rouvrit les paupières et découvrit sans grande surprise une flaque de sang devant elle.

Son cercle d'encrage cherchait à puiser ses dernières forces avant de lâcher.

Et c'était imminent…

« Pu… Putain de merde… Je vais te crever! »

Lentement, un rien désabusée, Kali releva la tête pour fixer le dernier survivant du trio qui se tenait à présent face à elle, l'arme que lui avait offert Prasad pour qu'elle puisse se protéger à la main, la pointant, le doigt sur la gâchette.

L'ironie de la situation arracha un sourire un peu triste à la demoiselle qui réfléchissait cependant à un moyen de retourner la situation. Elle voulait bien mourir, mais pas avant d'avoir ôté la vie à ce mec ayant participé à l'assassinat d'Hiroaki.

« Eh bien eh bien… » Susurra doucement Kali en tentant de donner le change, bien que chaque mouvement lui coutait à présent un effort titanesque et la faisait souffrir le martyre. « Et ta mission, alors ? Tu devais me ramener chez je sais pas qui ? Qui c'est, d'abord, ce mec ? Qu'est ce qu… »

« TA GUEULE ! » éructa le sbire, secouant frénétiquement le révolver vers elle. « Ferme ta putain de gueule ! »

L'hybride l'observa un bref moment, voyant que ses mots avaient quand même eu un impact sur sa détermination. Visiblement l'objectif de la mission, à savoir la ramener à son patron, semblait peser aussi lourd que son envie de la tuer dans son esprit. Brave petit toutou.

Kali se releva péniblement et fit un pas en avant, faisant reculer d'autant son vis-à-vis, son doigt toujours crispé autour de la détente. S'il tirait à cette distance, elle mourrait à coup sur, il n'y avait pas à en douter.

« Approche pas, putain ! »

« Si tu veux me capturer, mon grand… » répliqua Kali qui fixait le canon pointer vers son cœur, réfléchissant à toute vitesse. Si seulement il lui restait assez d'énergie pour à nouveau en appeler à l'ombre assoupie aux pieds de son adversaire… Mais, hélas, elle était bien trop épuisée et le lien qu'elle parvenait à percevoir entre elles était bien trop mince pour qu'elle puisse l'embraser. « Va falloir que tu viennes plus près… »

« Me prend pas pour un con… » cracha l'homme, bien conscient de l'état dans lequel elle se trouvait. Tous deux savaient que tant qu'il restait ainsi à distance, il ne craignait pour ainsi dire rien… « Mets-toi à genoux et passe ces scellés, sale garce ! »

Cette simple phrase raviva la rage dans le cœur de la demi-démone. Elle avait passé sa courte existence à se cacher et à s'étouffer sous des scellés pour se dissimuler aux yeux de cet homme pour qui l'autre bossait. Elle refusait de mourir de la sorte. Il fallait qu'elle trouve une solution pour l'atteindre…

Les deux êtres encore debout au sein du rideau se fixèrent pendant de lourdes secondes, la tension entre eux allant crescendo, rendant l'air comme électrique. Kali serra les poings, s'enfonçant les ongles dans les paumes, cherchant à appeler tout ce qui pouvait restait de force en elle pour une dernière attaque suicide.

Elle. Ne. Mourrait. Pas. A. Genoux.

Alors qu'elle s'apprêtait à convoquer une dernière fois ses flammes pour fondre sur son adversaire, une vive lumière s'abattit brutalement sur eux, leur faisant cligner des yeux de stupeur. Ils levèrent tous les deux la tête, découvrant le vrai ciel au dessus d'eux, preuve que le rideau les maintenant séparé du reste du monde venait de tomber.

« Qu'est ce que… » Commença l'homme encagoulé, regardant dans toutes les directions, habité par une vive inquiétude grandissante, toujours l'arme en main.

C'était sa chance !

Sans réfléchir au pourquoi du comment, s'en foutant même complètement, Kali profita de cette seconde d'inattention de son adversaire pour lui bondir dessus, allant se plaquer contre lui avec violence. Elle fit hurler tout ce qui lui rester de feu autour de son bras droit avant de le planter dans le torse de l'homme, allant ainsi se saisir de son cœur palpitant, le regard fou et triomphant. Elle souriait d'une grimace mauvaise, ne prêtant pas attention au sang qui coulait de sa propre bouche et de son nez, de la douleur qui hurlait dans chacune de ses cellules, se contentant d'encrer ses yeux félins étrécis dans ceux, paniqués, de cet homme dont elle tenait la vie entre les doigts.

« Pour Hiroaki, bâtard… » murmura-t-elle tout bas, alors de resserrer brutalement sa prise sur son muscle cardiaque battant frénétiquement sous ses doigts, l'écrasant et le consumant d'un même geste.

Le sbire, les yeux exorbités, cracha une gerbe de sang chaud sur son corps strié avant de s'effondrer sur le sol comme une poupée de chiffon à ses pieds, lâchant le revolver étincelant qui tomba au sol dans un bruit métallique.

Kali demeura immobile quelques secondes, regard avec dégout le cadavre au torse éventré à ses pieds, incapable de ressentir quoi que se fut.

Elle les avait tué. Tous les trois.
Pourtant…
Elle n'en tirait aucun réconfort…
Hiroaki n'en demeurait pas moins mort…
Tout ça… N'avait été qu'un immense gâchis…

« Kali… »

Lentement, l'intéressée se tourna pour découvrir une haute silhouette sombre à quelques mètres d'elle, lui arrachant un faible sourire. Il avait toujours su travailler ses entrées, celui là…

« Salut… Satoru. » Souffla la jeune femme.

L'intéressé ne put retenir une vive grimace alors qu'il découvrait la terrible scène de son regard azur dissimulé derrière son bandeau noir, de l'eau glacé coulant le long de sa colonne vertébrale. Il voyait là, en plus de l'hybride aux portes de la mort dont le corps était couvert de sang, quatre corps, dont trois étaient assurément morts vu leur état.

« Putain, Kali… » Murmura l'exorciste aux cheveux de neige avec gravité, enjambant l'agresseur décédé pour venir se planter devant elle, n'osant pas la toucher de peur qu'elle ne s'effondre à ce simple contact. «Je… J'étais déjà parti… C'est… C'est Sukuna qui a repéré ton énergie et la levée du rideau. Yuji a fini par sortir du sanctuaire pour aller voir et il m'a de suite téléphoné. J'ai fait aussi vite que… »

« Tu n'as pas à te justifier. Je me doute bien que tu étais pas en train de faire un scrabble… » Le coupa la demoiselle, le souffle court, sa vue devenant de plus en plus trouble.

Sukuna… Décidément… Le fait que se soit lui qui ait détecté le danger qu'elle encourait lui arracha un sourire sans joie.

Gojo déboutonna le haut de son uniforme noir, le retirant d'un mouvement souple pour venir le poser sur les épaules de la jeune hybride, navré.

Il savait.

Il n'avait eu qu'à poser les yeux sur elle, sur son corps entier défiguré de noir, sur sa respiration périlleuse et sifflante, sur le sang injectant ses yeux, celui séché à sa bouche, celui coulant en continue de son nez… Il avait une nouvelle fois raté le coche, et la petite allait le payer de sa vie.

« Me regarde pas comme ça… On se doutait un peu de l'issu final, pas vrai ?» tenta sans grande conviction l'européenne, sentant son corps devenir glacé à présent que l'adrénaline retombait et que ses dernières forces se consumaient petit à petit, la faisant frissonner.

D'un coup, ses jambes se défaussèrent sous son poids, forçant Gojo à parcourir la distance les séparant encore pour l'empêcher de tomber au sol, la plaquant contre son torse. Kali ferma les yeux, serrant les dents pour encaisser une vague de douleur plus violente encore que les précédentes, lui coupant le souffle, lui broyant le cœur. L'exorciste les fit précautionneusement s'assoir à même le sol, enserrant de ses bras le fragile corps de Kali qui commençait à présent à être secoué de légers spasmes, lui serrant la gorge. Les traits de son pentacle continuaient quant à eux à s'étendre, réseau macabre et sanguinolent recouvrant à présent toute sa peau de nacre.

L'européenne, sentant son énergie lui échapper comme du sable entre ses doigts, plaqua sa joue contre les pectoraux de Gojo, savourant contre sa peau glacée la chaleur qu'elle pouvait percevoir à travers son t-shirt ainsi que le battement puissant et régulier de son muscle cardiaque, en complète opposition avec le sien qui pompait son sang de manière de plus en plus chaotique…

C'était peut être idiot… Mais elle était contente de ne pas partir seule, au milieu de cette ruelle anonyme théâtre d'un nouveau de ses échecs…

Hiroaki… Elle aurait tellement aimé qu'il ne trouve pas la mort à cause d'elle…

A cette pensée, une larme roula sur la joue de la demoiselle, lui arrachant un faible sanglot.

Il y avait bien des choses qu'elle regrettait, alors qu'elle sentait son corps céder petit à petit face à la faim sans fond de son pentacle, qui semblait planter à présent littéralement ses pointes jusqu'à dans son âme, lui rendant difficile le fait de réfléchir.

Elle regrettait la perte du jeune japonais, elle regrettait la peine qu'elle allait provoquer chez Prasad, Yuji et même Gojo…

Elle regrettait de n'avoir jamais pu savoir qui elle était réellement, ni ce dont elle aurait été capable si elle avait pu user de ses pouvoirs…

Elle regrettait de n'avoir pas pu botter le cul de celui qui la traquait…

Elle regrettait aussi le fait de ne plus jamais voir le sourire narquois de Sukuna, ni d'entendre sa voix caressante et horripilante…

Jamais elle ne saurait qui il était vraiment, lui non plus…

Elle aurait aimé vivre plus longtemps… Finalement…

Satoru fut incapable de prononcer un mot, la gorge nouée par l'émotion, alors qu'il pouvait sentir entre ses bras l'énergie occulte de la jeune femme doucement s'éteindre, comme une braise qui se consume. Il ne pouvait hélas rien faire, son pentacle était en train de céder et il n'avait pas les capacités nécessaires pour l'alimenter, à son plus grand désespoir…

Rarement dans son existence il s'était senti aussi impuissant, lui donnant envie de hurler.

« Je suis tellement désolé… Kali… »

Il vint poser un baiser au sommet de son crâne, au milieu de ses cheveux d'automne qui sentait le feu et le sang, ne percevant presque plus son souffle contre son torse. Tout cela n'était qu'un immense gâchis…

« SEMPAI ! »

D'un coup la voix de Yuji résonna dans la ruelle, faisant se redresser le porteur du sixième œil. Il découvrit, non sans grande surprise, son élève qui courait vers eux à toute vitesse, le souffle court, les cheveux en bataille, une peur viscérale émanant de son corps puissant.

Quand Itadori l'avait contacté, en panique, pour le prévenir de la présence du rideau et du danger encourut par l'européenne, Gojo avait du prendre une décision. Il devait aller porter secours à l'hybride, bien entendu. Mais il devait, avait toute chose, protéger Yuji de son côté chevaleresque qui risquait de le mettre en péril, lui et tout ce qu'il représentait pour l'avenir. Il avait donc, à son arrivée, pris le temps de faire perdre connaissance à l'adolescent grâce à ses capacités occultes et le ligoter, en sécurité, au sanctuaire.

Il n'allait pas mentir, il se doutait bien que Yuji, avec l'intervention d'un Sukuna qui portait beaucoup d'intérêt à la demoiselle (assez, d'ailleurs, pour alerter son réceptacle alors qu'elle courait un danger), allait finir par se libérer et rappliquer. Mais il avait secrètement espéré qu'il arriverait après la mort de l'hybride… Quand il n'y aurait eu plus aucune chance pour l'autre de la 'sauver'…

« Kali-sempai… » Le jeune Itadori s'arrêta à quelques pas de son professeur qui enlaçait toujours l'européenne immobile, ne prêtant même pas attention au chaos les entourant. Il se laissa tomber à genoux dans l'eau et le sang, les poings serrés à s'en faire blanchir les phalanges, des larmes emplissant ses yeux noisette bouleversés. « Non… Non, c'est pas possible… Gojo-sensei… Faites quelque chose… Vous pouvez pas la laisser mourir…»

L'intéressé serra les dents en resserrant sa prise sur le corps inanimé de la demi démone, incapable de prononcer un mot. Avouer au garçon auquel il tenait tant qu'il était impuissant dans cette situation qu'il avait tant redouté lui coutait bien plus qu'il n' l'aurait jamais cru…

« Il peut rien faire, gamin, c'est pas dans ses cordes de sauver la crevette… »

Gojo releva la tête, tombant nez à nez avec la matérialisation contre nature d'un œil couleur rubis le poignardant avec dédain et d'une bouche moqueuse affichant un sourire victorieux sur la joue de son protégé. Le voilà… Le roi des fléaux laissa choir son attention vers le petit être aux portes de la mort que tenait l'exorciste, son sourire s'effaçant un rien face à l'état catastrophique dans lequel elle se trouvait. C'était plus une mission sauvetage à présent, mais presque une mission impossible, même pour lui… Les minutes étaient incontestablement comptées.

« Laisse-moi la place, gamin. Moi seul peux la sauver dans son état. »

Yuji ne dit rien dans un premier temps, complètement écartelé. Il fixait alternativement l'européenne, méconnaissable tant sa peau était couverte de traits noirs sanguinolents, visiblement déjà en passe d'être emportée par la faucheuse, et son professeur pour qui il avait une admiration presque sans borne mais qui, en cet instant précis, le regardait d'un air profondément navré face à sa propre incapacité à agir. Le garçon déglutit, ne sachant que faire…

« Magne-toi, gamin ! » le pressa le démon en son sein, criant à même son crâne. « Tu vois bien qu'elle est déjà presque morte ! Bientôt, même moi je ne pourrais plus rien pour elle… Tu veux qu'elle crève ? »

« Bien sur que non ! » Se défendit Itadori en tapant le sol d'un poing rageur, se mettant à vif les phalanges. Mais la douleur lui faisait presque du bien, par rapport au dilemme auquel il était soumis. Laisser Kali mourir ou laisser Sukuna la sauver en échange d'un pacte inviolable qui la ferait sienne ? Et s'il la traitait tellement mal que la mort lui paraissait plus douce à coté ?

« Tu préfères la voir morte qu'à moi, gamin ? » lui susurra le démon à l'oreille, suivant le fil de ses pensées. « Je ne t'aurais pas cru comme ça, toi qui te vante sans cesse d'être prêt à te sacrifier pour tout le monde… »

« Je… Je veux qu'elle vive… » concéda Yuji, les larmes lui emplissant les yeux, troublant sa vue. Il repensait aux sourires de la toute jeune hybride, à ses rires, à vivacité d'esprit et son espièglerie… Il ne voulait pas que tout cela disparaisse… Mais les conserverait-elle si elle devenait le jouet de Sukuna ? « Je veux qu'elle vive… Pas qu'elle soit malheureuse… »

La remarque fit tiquer le roi des fléaux, lui faisant hausser un sourcil du haut de son trône macabre. Quel rapport l'un pouvait-il bien avoir avec l'autre ? Et quelle importance, de toute façon, cela pouvait-il bien avoir ? Il soupira, levant les yeux au ciel de son domaine. Les gens d'aujourd'hui et leurs délires psycho-patho-chouinant, franchement…

« Qui te dit qu'elle sera malheureuse ? Elle sera vivante… N'est ce déjà pas beaucoup mieux que de moisir dans de la terre humide, rongée par des vers ? Toi qui voit, mais le temps presse, gamin… »

Le porteur du fléau déglutit difficilement, fixant douloureusement le visage meurtri de sa colocataire moribonde.

La laisser à Sukuna… Ou la laisser mourir ?

Il respirait profondément, les sourcils froncés, complètement perdu. Jamais il n'avait eu à faire un choix aussi cornélien dans sa vie… Gojo, quant à lui, ne pouvait que le fixer, serrant Kali contre lui, sentant sa vie qui s'éteignait de plus entre plus entre ses bras. Si seulement il pouvait lui être d'une quelconque aide en cet instant… Mais il ne pouvait rien faire. Il comprenait son dilemme…

« Yuji… Peut-être devrait-on simplement la laisser partir… »

Ce dernier secoua vigoureusement la tête, agrippant ses cheveux de ses poings serrés, ne sachant que faire. Chaque seconde qu'il passait à hésiter, c'était une chance de survie qu'il volait à l'européenne, il le savait.

« Putain… » finit-il par murmurer, baissant la tête, comme vaincu… « Putain, putain, putain ! »

Il ne pouvait pas la laisser disparaitre… Pas comme ça…

Il ne le voulait pas.

Il se redressa un peu, regardant une dernière fois le corps presque sans vie de la demoiselle, comme pour chasser ses derniers doutes.

Et puis merde…

Il n'y avait qu'une seule chose à faire, vu que lui ne pouvait rien pour elle à présent…

« Tu as gagné, Sukuna… Vas-y, sauve-la ! »

A peine eut-il dit cela qu'il effaça son contrôle sur son corps, laissant la place au démon millénaire qui s'en saisit immédiatement, ses sombres tatouages apparaissant sur le visage de l'adolescent sous le regard désabusé de Satoru. Inconsciemment, ce dernier resserra sa prise sur l'européenne inconsciente, alors que son regard d'azur rencontrait celui, double et sanglant, du fléau le plus puissant n'ayant jamais foulé cette terre.

« Il est vraiment long à la détente, le gamin… » s'amusa-t-il avec un sourire en coin, piquant au vif les nerf de son protecteur. « Allez, exorciste, donne moi la crevette. Elle est à moi à présent. »

Gojo ne bougea pas dans un premier temps, incapable d'accepter ce qui était pourtant à présent l'inévitable pour sauver la jeune femme. Yuji avait fait son choix, il le savait. Il devrait le respecter… Cependant il ne parvenait pas à faire taire la petite voix dans son esprit qui lui murmurait que la mort serait peut être plus libératrice que l'hybride qu'une vie de soumission à cet être.

De son coté, Sukuna s'impatientait déjà, bien plus conscient de la précarité de la situation que le porteur du sixième œil lui-même. « Si tu veux que je te l'arrache de force, tes bras avec, c'est aussi possible tu sais… Je serai ravi de te détruire un autre jour, exorciste. Mais pour l'heure, je dois m'occuper de la crevette. »

Jamais le démon millénaire ne lui aurait avoué que Yuji, bien trop bouleversé par la situation, ne lui avait laissé qu'une emprise partielle sur leur corps, près à bondir dessus si jamais il s'avisait de faire autre chose que ce pourquoi il lui avait laissé la main.

Au prix d'un immense effort, presque douloureux physiquement, Gojo desserra un peu son étreinte autour de Kali, laissant Ryomen la lui arracher avec possessivité, la plaquant contre son torse comme une poupée désarticulée. Il jeta un regard victorieux au sorcier impuissant, savourant sa défaite, avant de reporter son attention sur le petit être entre ses bras, son sourire se ternissant un peu.

Vraiment, il ne fallait pas la laisser sans surveillance plus de cinq minutes, la crevette…

Comment diable avait-elle pu se mettre dans un tel état ? Son pentacle s'était étendu sur ton son corps, noircissant presque complètement sa peau de nacre. Et si l'extérieur était impressionnant, le fléau millénaire se doutait qu'il devait en être de même pour l'intérieur, que se fut de son être ou de son âme à proprement parler.

S'il n'agissait pas immédiatement, elle serait définitivement perdue, c'était indéniable.

Doucement, Sukuna la cala contre lui, dégageant son visage de ses cheveux emmêlés, scrutant les faibles sursauts de son âme s'éteignant.

Hélas, vu qu'elle errait déjà dans les limbes de la mort, elle ne pouvait pas accepter le pacte dans cette réalité ci. Et, vu son état, il n'était même pas certain de pouvoir amener son esprit dans son domaine. Il allait devoir se rendre, lui, dans le sien…

La chose en elle-même n'était pas compliquée, vu sa puissance et sa dextérité occulte. Tout le problème résidait dans la faiblesse incommensurable de la demoiselle. La présence d'une aura aussi puissante que la sienne dans son domaine intérieur, qui devait sans nul doute possible être à l'image de son corps, risquait de suffire à le faire s'effondrer complètement… Il allait devoir être rapide s'il voulait qu'elle survive…

S'il n'était pas déjà trop tard.

« Ah, crevette… » Il se pencha vers elle, caressant ses lèvres ourlées de sang, la détaillant du regard. « Tu ne veux vraiment pas me faciliter les choses, hein ? Soit… Je rajoute ça à la liste de toutes les choses que tu dois te faire pardonner… Tu n'as pas intérêt à mourir, je te le garantis. »

Il parcourut alors les quelques centimètres les séparant encore, plaquant ses lèvres contre les siennes, glacées, profitant de ce contact superflu mais agréable pour se glisser à l'intérieur de son domaine intérieur.

Comme prévu, y accéder fut d'une grande facilité, vu que l'européenne ne protégeait absolument pas son esprit. Cependant, quand le fléau millénaire rouvrit les yeux, il découvrit sans grande surprise un espace presque complètement plongé dans les ténèbres, preuve supplémentaire de la mort imminente de la propriétaire des lieux.

« Crevette ! »

Sa voix se répercuta en écho autour de lui, mais personne ne lui répondit, alors qu'il balayait l'espace silencieux de son double regard. Il n'y avait là aucune trace de l'étrangère, lui faisant un peu froncer les sourcils. Arrivait-il déjà trop tard ?

Non… Si le lieu tenait encore un peu debout, c'était que l'esprit de l'hybride devait être encore présent, quelque part. Le tout était à présent de trouver où…

Sans plus attendre, bien conscient que le temps était comptait et que sa présence terriblement puissante en ces lieux n'allait rien arranger, il commença à s'avancer, suivant la terriblement faible palpitation de ce qui devait être l'épicentre du domaine, et où il espérait en trouvait la propriétaire…

Tout était presque plongé dans l'obscurité la plus totale, lui rendant même à lui impossible l'observation des lieux. Se n'était pas une noirceur standard, mais celle de la mort qui régnait ici…

Il pouvait cependant, alors qu'il progressait le plus vite possible au milieu des décombres, sentir l'humidité de la verdure qui l'entourait, et entendre de l'eau coulait non loin. A quoi donc pouvait bien ressembler le domaine de la crevette ? Cependant, il y avait autrement plus urgent pour l'heure, car tout était en train de s'effondrer. Des pieux sombres et gigantesques traversaient l'espace depuis le ciel pour venir s'enfoncer partout, détruisant tout sur leur passage.

Le pentacle de l'hybride cherchait à puiser de l'énergie directement dans son âme ... Et quand il aurait extrait d'elle sa dernière once d'énergie, se serait la mort…

"Crevette !"

Pas de réponse, une nouvelle fois...

Mais, après quelques secondes, il parut à Sukuna ressentir comme une légère vibration dans l'air, un battement non loin, faible, mais présent. Il prit alors cette direction, évitant les masses obscures qui s'écroulaient tout autour de lui, le faisant un peu maugréer. Vraiment, elle ne lui aura pas rendu la tâche facile, la petite !

D'un coup, il se figea quand il aperçut non loin un espace à peine plus éclairé au centre du quel se trouvait un corps inerte allongé, lui indiquant qu'il touchait au but. Il était bien là, finalement !

Il marcha jusqu'à elle, ses sandales quittant le sol accidenté pour rencontrer enfin une surface plane faite d'une roche nacrée dessinant une rosace complexe autour de la propriétaire inconsciente des lieux. Ici, le corps de l'européenne était légèrement différent, moins défiguré par les traits sombres de son pentacle. Ses cheveux d'automne étaient plus longs encore que dans le monde réel, cascadant autour d'elle jusqu'au creux de ses genoux. Elle portait une robe fine et vaporeuse, se coulant le long de ses courbes en de multiples pans dissimulant et dévoilant tour à tour son corps félin, lui faisant un peu penser à une prêtresse d'un pays lointain. Quelle étrange petite bête elle était, vraiment…

Si du sang ne coulait pas des tracés macabres de son cercle d'encrage, et si son domaine ne continuait pas à se désagréger toujours plus près d'eux, Sukuna aurait pu passer un peu plus de temps à l'observer.

Cependant, un lourd bloc de pierre s'abattit non loin d'eux, ramenant le démon à l'urgence immédiate de la situation. Le domaine de l'européenne cédait, il fallait faire vite.

Sans plus attendre, Sukuna parcourut les quelques mètres le séparant de Kali, s'ageunouillant preès d'elle pour la prendre dans ses bras. Elle était froide comme du marbre, et son énergie occulte vacillait telle une flamme dans la tempête. Il attrapa son menton d'une main, autoritaire. Il fallait faire vite. Très vite.

« Eh, crevette, répond moi. On a plus beaucoup de temps... Je sais que tu m'entends. Tu es vraiment en train de mourir, et si tu n'acceptes pas le pacte tu mourras. Alors accepte. Dis que tu acceptes le pacte, que tu te donnes à moi... »

Sa respiration était sifflante, périlleuse. Au bout de quelques secondes, elle commença cependant à papillonner des cils, parvenant, avec un effort qui paraissait titanesque, à les ouvrir un peu, le regarda les yeux mi-clos, luttant de toutes ses dernières forces pour comprendre ce qui était en train de se passer.

« Su... Kuna... san... » murmura-t-elle tout bas, faisant resserrer la prise de l'intéressé sur son corps épuisé.

« Oui, crevette. » répondit-il, un de ses sempiternels sourires aux lèvres. « C'est moi... Allez, tu m'as pas fait faire tout ce foin pour claquer dans mes bras… Accepte le pacte, crevette. Tu as bien résisté, mais là on a plus le temps de jouer au chat et à la souris... Dis que tu acceptes."

Elle le fixa, perplexe, comme si elle ne comprenait pas bien de quoi il en retournait, perdue. D'un coup une violente toux la secoua douloureusement et elle se mit à cracher du sang sur le kimono immaculé du démon, une pierre tombant alors non loin d'eux à cause d'une nouvelle lance noire qui s'abattit depuis le plafond.

Il attrape alors ses cheveux d'une main, approchant son visage tout proche du sien, terriblement conscient de l'urgence de la situation.

« Crevette ! Ne veux-tu pas vivre ? Tu veux vraiment mourir comme ça ? Sans n'avoir rien vécu ? »

Elle secoua doucement la tête, une larme glissant le long de sa joue.

« Je … » souffla-t-elle difficilement, chaque mot lui coutant visiblement un terrible effort. « Je ne veux … plus… être… prisonnière… »

Elle le fixa de ses yeux bicolores rendus incandescents par les larmes, le plongeant dans une perplexité absolue. Prisonnière ? De lui ? Certes le pacte qu'il lui proposait supposait qu'elle serait à lui, mais il le lui avait déjà répété, et ce plusieurs fois même, qu'il n'avait qu'une intention de la garder à ses côtes continuellement. Alors que diable pouvait-elle vouloir d'autre ?

Il réfléchissait à toute vitesse alors qu'un nouveau pieu sombre s'abattait plus près encore d'eux, faisant frémir de douleur la petite inconsciente contre son torse. Mais qu'est ce qu'elle pouvait bien vouloir de plus ? Avaient-ils seulement déjà parlé de tout cel…

D'un coup Sukuna se figea, se remémorant la conversation qu'ils avaient eu ensemble une nuit, alors qu'ils prenaient un bain ensemble… Il lui semblait se souvenir que la petite ingénue lui avait parlé d'une condition potentielle à leur pacte… Une possibilité de… Pause…

Improbable.

Le démon dévisagea l'hybride moribonde qui s'était entre temps laissée aller contre lui, se roulant un peu sur elle-même alors que son corps épuisé commençait à être secoué de spasmes inquiétants et d'une toux sanglante rendant difficile sa respiration, incrédule.

C'était à cause de sa maudite condition qu'elle résistait encore ? Mais qu'est ce qu'elle était, cette petite chose improbable ?

Il la fixa, balayant de son deuxième regard l'espace de plus en plus dévasté les entourant, avant de lever ses quatre yeux au ciel en soupirant lourdement.

« Comment peux-tu être aussi têtue aux portes de la mort, crevette ? Je n'ai jamais rencontré une créature aussi butée que toi ! Je te les accorde, tes stupides pauses ! Alors accepte le pacte, avant qu'il ne soit trop tard ! »

L'intéressée releva faiblement la tête vers, le regardant comme si elle ne comprenait pas vraiment de quoi il était question, clignant faiblement des yeux. Ce dernier, craignant vraiment qu'elle ne finisse par lui mourir dans les bras, vint lui prendre le visage en coupe, bien décidé à obtenir ce pourquoi il avait fait tous ces efforts.

« Kali. » commença-t-il, terriblement sérieux, encrant le brasier de ses yeux dans l'or ternis de celui de sa vis-à-vis à bout de force. « Si tu ne veux pas mourir, répète après moi. Accepte le pacte. Donne-toi à moi. Maintenant. »

Elle le regarda une poignée de secondes, silencieuse, faisant craindre le pire au démon millénaire.

Puis, au bout d'un moment qui lui parut interminable, puisant dans ce qui devait être son dernier souffle, la demoiselle articula courageusement une phrase, si faiblement cependant qu'elle semblait n'être un secret entre le roi millénaire et elle.

« Je... J'accepte... le pacte... Je... Je me... donne... à vous... Suku...na... san... »

Un sourire terrible s'étira instantanément sur les lèvres de Ryomen alors qu'il recevait ses paroles, un incendie enflammant le sang de son double regard et des ses veines.

Enfin... C'était fait...

Il lui fallait encore parvenir à extirper cette petite inconsciente des bras glacés de la mort, mais à présent... Le pacte était scellé.

Déjà il pouvait sentir les liens occultes se tisser entre leurs deux âmes, le ravissant au plus haut point.

Elle était à lui, à lui seul. Et cette idée le grisait complètement.

Sans plus attendre, il plaqua ses lèvres contre les siennes, possessif, goutant le sang au parfum si unique qui les ornait.

« Bien, crevette... très bien... Tu en auras mis du temps… »

Il la regarda, voulant savourer sa victoire mais la découvrit presque inconsciente tant les divers chocs qu'elle avait subit ces dernières heures l'avaient laissé sans force. Entre le combat qu'elle avait du avoir pour retirer ses scellés, celui qu'elle avait eu dans le rideau qui avait terminé de l'amener aux frontières du décès et le pacte qu'ils venaient de passer, faisant se déverser en elle un flot terrible d'énergie occulte, il aurait été miraculeux qu'elle parvienne à rester éveillée. Elle risquait d'avoir besoin de quelques jours pour se remettre de tout cela, mais cela n'avait à présent plus d'importance…

Toujours aussi souriant, Sukuna vint planter un dernier baiser sur les lèvres de son hybride avant de quitter son domaine si fragilisé, fier comme un paon de sa victoire.

« Laisse-moi juste le temps de repousser la mort que tu as tant et tant aguiché ces dernières semaines, crevette… Je n'aime pas son odeur sur ta peau. Et… Après ça… A ton réveil… Tu seras vraiment toute à moi… »

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Mot de l'auteur :

M : OMG ! OMGOMGOMGOMGOMG !
C'est la fin de l'arc 2 messieurs dameeeeeeeeeeees ! On l'a faiiiiiiiiit !

Kali, couverte de pansements dans son coin : oui bah tu m'excuseras de pas sauter de joie hein…

Yuji, désespéré d'avoir du laissé la place à Sukuna : youpi…

Gojo, blasé de s'être senti impuissant : où sont les cordes ?

Sukuna, qui pète la forme et à sortie boule à facettes, sono et cotillons depuis le haut de son trones de crânes : MAIS OUUUUUUUUUUUUUUUUUUUE ! C EST QUI LE PATRON ? C EST QUI ? C EST BIBIIIIIIIII !

Gojo, encore plus blasé : oh putain je vais le tuer…

Sukuna, moqueur au possible : bah alors, le coton tige ? on est pas utile ? on sert à rien ? C est qui qui gère la fougère ? Cest mwaaaaaaa !

Yuji, haussant un sourcil : il est bourré ?

M : même pas…

Sukuna : La crevette, elle est touuuuuuuuute à moi, bande de moules ! Mwa qui l'est sauvé d'abord !

Yuji et Gojo, boudeurs : …

Sukuna : CHE !

Kali, qui ajuste ses pansements : au fait… C'était cette histoire de condition ?

Sukuna, se figeant sur place : pardon ?

Kali : la condition dont vous parliez. Avant… Vous savez… qu'on passe le pacte.

Sukuna, qui descend de son trône pour aller se planter devant sa nouvelle acquisition : TA condition crevette… Pour ça que tu voulais pas passer le pacte… n est ce pas ?

Kali, le regardant visiblement sans comprendre : … ?

Sukuna, sentant venir le fait qu'il avait fait les questions et les réponses tout seul dans sa tête en fait : fait un effort… pas prisonnière ect ect …

Kali, toujours perplexe : nan vraiment…

Sukuna, s'attrapant l'arrête du nez : PUTAIN ! Je t ai laissé une option dans le pacte alors que tu savais même plus de quoi on parlait ?

Yuji et Gojo, moqueurs : OUH le nul ! Il s'auto-berne tout seul le mec !

Sukuna, un peu vexé : LA FERME ! ça empêche pas que la crevette, elle soit toujours à moi !

Hiroaki : et moi ? On en parle de moi ?

Kali, se jetant au cou d'Hiroaki : Hiroooooo, j'suis désolée de t'avoir mal jugé, t'es trop cool même si t'es un peu fou, meuuuuuuurs paaaaaaas T_T

Hiroaki, enlaçant Kali : Kali-chwaaaaaan T_T

Sukuna, jaloux : Pas touche à la crevette, le macchabé, elle est à moi ! J'ai bossé dur pour ça !

Hiroaki et Kali : maaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaieuh T_T

M : Ahah l'angoisse …
Bon en tout cas, un arc se ferme, celui 'du chat et de la souris' ! On va pouvoir passer à l'arc 3, 'à nos corps et âmes éperdus' qui va être celui avec du… hum… Du…

Sukuna : DU CITRON +_+

M, soupirant : oui, c'est ça… Y en a un qui attend ça depuis le chapitre de la rencontre …
Dans tous les cas, un grand merci à vous toutes et tous qui nous suivez ! J'espère que ce nouveau chapitre vous aura plu ! Un immense merci pour celles et ceux qui prennent le temps de laisser un vote et/ou un ou des commentaires ! ça nous touche énormément et on essaie tous d'y répondre !
Le premier chapitre de l'arc 3 est déjà biiiiiiiiiiiiiiiiiiien avancé et devrait ne pas tarder, accrochez vos slips, Sukuna est chaud bouillant !

Love à vous toutes et tous ! Et à très vite !