Note : Voici le premier chapitre d'une petite histoire d'halloween, un manoir hanté, des âmes égarées, une ancienne légende, un bon repas d'Halloween… Le tout arrosé d'une belle romance !!! N'hésitez donc pas à me dire ce que vous en pensez.

Synopsis : la vie de Mlle Parker est sens dessus dessous depuis le terrible drame. Alors qu'elle pleure toujours l'absence de l'être cher, elle reçoit dans son courrier une invitation pour le moins étrange, l'incitant à visiter un manoir réputé hanté. De nature curieuse et guidée par son intuition, elle se rend sur les lieux. Là-bas, sur place, elle est témoin de phénomènes surnaturels. C'est à ce moment-là que Jarod, le jeune caméléon-humain choisit de refaire son apparition. La soirée peut donc commencer…

Chapitre 1 : À l'aube des souvenirs

Résumé : à la veille de la fête des morts, Mlle Parker décide de se rendre au cimetière de la ville. Là, sur la tombe du défunt, elle devient vite nostalgique, faisant un retour en arrière sur les événements qui ont marqué sa vie, sur ses sentiments et son avenir.

Cimetière de Blue Cove, Delaware

Ce matin-là, par une belle journée d'octobre, à la veille d'Halloween, elle avait décidé de se rendre au cimetière de Blue Cove. Vêtue d'un long manteau noir molletonné, la tête baissée, elle marchait avec lenteur à travers les allées du boulevard des allongés. Le dernier lieu de vie de ces êtres parti bien trop tôt. Les talons de ses bottes en cuir frappaient sur les chemins de gravier. Sa longue chevelure brune encadrait son visage pâle et mélancolique, tandis que le vent d'automne jouait avec quelqu'une de ses mèches rebelles. Ses yeux tristes et bouffis lui étaient douloureux causés par ses pleurs. Elle tenait encore serrée, contre sa poitrine, dans ses menues mains gantées une petite gerbe de belles fleurs blanches, selon elle, c'était des fleurs de circonstance ainsi que des feuilles d'arrière-saison aux couleurs chaudes et vives, tout comme lui, une offrande pour l'être cher qu'elle venait honorer depuis trois mois. Elle respira cette essence si fraîchement pure et qu'elle ne connaissait que trop bien. Le décor morose du cimetière se déployait devant elle dans toute sa splendeur. Ces arbres ancestraux et ombragés par ses teintes rouges, oranges, et même dorées formèrent une canopée, là, juste au-dessus des tombes. Les feuillages au sol craquaient sous ses pas, rappelant la fragilité de son cœur meurtri. Et au loin, on entendait les corbeaux noirs croasser dans les hautes branches, accentuant l'ambiance lugubre de cet endroit austère. Son regard était vide de sens, c'était insensé. Absolument insensé. Les sépultures, recouvertes d'une fine couche de mousse, témoignaient de l'histoire de la ville. Des statues angéliques et autres symboles se dressaient devant elle, certaines couvertes de toiles d'araignée et avec une légère touche de mystère, il aurait adoré. Et pour elle, cela ne faisait aucun doute. Elle s'arrêta juste devant sa pierre tombale, sobre et d'un marbre gris, ornée d'une croix en bronze. Et délicatement elle déposa en un geste les fleurs florissantes et les feuilles sur l'emplacement du défunt, et poussa un long soupir. Puis encore un. C'était un moment chargé d'émotion et d'intensité en cette veille de fête, où tous les êtres vivants se souvenaient de leurs proches disparus, enfants et parents, amis et amants. Mlle Parker restait là, agenouillée, perdue dans ses innombrables pensées, se remémorant toutes ces personnes qui avaient jadis croisé sa route, la traque de Jarod qui avait fini en tragédie, les secrets, les mensonges, le manque d'affection qui avaient fait d'elles une femme insensible, méprisable voire détestable. Une femme à qui on avait privé du droit au bonheur. Cependant, aujourd'hui, ce n'était pas le jeune Thomas Gates, charpentier et ancien fiancé à qui elle rendait hommage. Non, c'était un autre homme, c'était son secret qu'elle avait enfoui en elle depuis longtemps maintenant, quelqu'un à qui elle regrettait de n'avoir jamais osé dire la vérité. Des larmes jaillirent de ses yeux bleus, elle commença à prononcer à voix basse des mots qu'elle avait jusqu'ici peur de partager avec lui.

« Bonjour. Tu vois, je suis revenu comme je te l'avais promis et si je suis là, c'est parce que j'ai une bonne raison… Regarde, comme elles sont magnifiques toutes ces couleurs. Ça a du charme. C'est une belle journée qui s'annonce. Tu ne trouves pas ? Oui, toi qui adorais cette saison. Je n'ai jamais su exactement pourquoi tu l'appréciais autant. Est-ce à cause de ce que ça représente ? Peut-être ces friandises dont tout le monde raffole ? Ou ces déguisements si ridicules les uns que les autres ? Non, c'est quelque chose de plus symbolique… Cette nuit, j'ai fait un rêve merveilleux. Tu étais là, tout près de moi. Tu me regardais de la même manière que lors de notre première rencontre. Tu me souriais comme la dernière fois où j'ai vu ton visage. Je pouvais de nouveau respirer ton odeur, sentir la chaleur de la paume de ta main contre la mienne, te toucher et entendre le son de ta voix. Ton cœur battait aussi fort et aussi vite que le mien. Je sais ce que tu vas me dire. Que ce n'est qu'un rêve… Mais cette illusion était réelle. C'était réel. Tu étais réel ! Peut-être n'es-tu pas mort ? Au Centre, rien ne va. Et à vrai dire, ça m'est égal. Lyle et ce cher William Raines jouent toujours les apprentis sorciers comme tu peux t'en douter. Broots et Sydney, eux, se reprochent constamment ce qu'il t'est arrivé tout comme moi… Je passe alors de très longues heures à pleurer sur toi, me demandant ce que j'aurais pu où ce que j'aurais dû faire pour avoir enfin le courage… Comme toi, je voulais échapper à cette triste existence, celle que l'on nous a si injustement imposée depuis notre naissance. Et finalement je me suis perdue oubliant de ce fait qui j'étais vraiment alors que toi, tu as toujours su qui j'étais. Et aujourd'hui, il est trop tard pour revenir en arrière… Je voudrais t'entendre me dire que tu me pardonnes… Que rien ne change pour toi. En fin de compte, on est pareil toi et moi. On est les pièces d'un même puzzle, c'était ce que tu disais… La vie ne nous a pas épargnés. Elle nous a toujours traités avec cruauté, prenant un malin plaisir à nous voir souffrir, emportant avec elle tout sur son passage. Elle nous a tout pris... Elle m'a enlevé la seule chose qui comptait vraiment pour moi, toi. Quelle ironie du sort puisque tous deux nous avons fait le sacrifice de notre vie, tu as fait le sacrifice de la tienne, en vain. Je le regrette. Je le regrette sincèrement... On a passé tellement d'années à se chercher, à se courir après, à jouer, à se méfier l'un de l'autre, à s'apprivoiser que jusqu'ici, je n'avais jamais osé t'avouer à quel point tu me manquais. Tu étais le seul qui me comprenait, qui savait ce que je ressentais, ce que je pensais, où encore ce que je désirais et ce que moi, j'éprouve toujours pour toi, tu ne le sauras jamais et ça me fait souffrir. Je t'en veux de m'avoir quitté, de m'avoir abandonné... Je te jure que malgré tout, j'essaye d'avancer, sans toi, seulement, je n'y arrive pas parce que je porte encore en moi le poids de mes remords, mon cœur est si lourd de chagrin que si j'avais su que ce soir-là, se serait la dernière fois que je te voyais, je serai parti avec toi… »

Elle avait ses grands yeux fixés sur la plaque portant le nom de l'être disparu. En dépit de ses sentiments et sans le vouloir, elle revivait inlassablement ces instants de joie et de tristesse, les rires et les larmes, les trahisons et les regrets alors que les souvenirs refaisaient surface comme un film en accéléré, la jeune femme ne pût se retenir d'éclater en sanglots, se rappellant d'abord, son enfance et l'affection de ses parents ainsi que les sourires de sa mère. À l'adolescence, sa toute première rencontre avec Jarod, leur amitié grandissante, leur jeu et leurs sentiments respectifs. Enfin, à l'âge adulte, les nombreuses disputes avec son père et Lyle, le jumeau pathétique retrouvé. Puis ces dernières années, la recherche intensive consacrée uniquement à la capture du jeune caméléon. Les différents dossiers, des meurtres non résolus entre autres la mort de Thomas, celle de Catherine Parker. Sans oublier, les expériences, les enlèvements d'enfants et le conditionnement. Ses alliés comme ses ennemis. Mais surtout cette personne si spéciale, une figure centrale de son univers, celui-là aussi venait de disparaître. Les dures épreuves qu'elle avait endurées par le passé lui semblaient à la fois lointaines et pourtant proches. Les semaines s'écoulaient et elle se sentait toujours aussi coupable de sa mort. Ses pensées la ramenaient à ce moment très précis, à la douleur si profonde qui depuis le terrible malheur la rongeait de l'intérieur. Et jamais, elle n'aurait imaginé que cela finirait ainsi, que tout ce chemin la mènerait dans ce cimetière, devant lui. Toujours des questions sans réponses et un immense vide qu'elle ne pourrait plus jamais combler. Si seulement, ce jour-là, elle avait laissé parler son cœur, si elle l'avait accepté, pour une fois, sa main. Elle aurait fait, dit, donné n'importe quoi pour effacer le passé et avoir une petite chance de tout recommencer… Avec lui.

« À toi, qui as été arraché si violemment à ce monde. À toi, qui t'en es allé vers d'autres horizons. À la vie qui te tendait les bras. À ces cœurs à qui tu rendais leur sourire. À ces âmes perdues que tu as sauvées. Ne sais-tu pas comme tu me manques ? Chaque seconde de chaque minute, je ressens le vide laissé par ton absence. J'entends si souvent ta voix m'appeler au loin, l'éclat de ton rire. J'ai peur qu'au fil du temps la dernière image que j'ai de toi ne finisse par totalement disparaître. Et je m'accroche de toutes mes forces à ces merveilleux souvenirs pour ne pas sombrer. Et c'est difficile, parce que je sais qu'un jour, ils disparaîtront tout comme toi. Une chose que je n'oublierai jamais, c'est que cette nuit-là, c'est moi que tu as voulu sauver. Et jusqu'à ce que nos chemins se croisent à nouveau, je te fais la promesse de continuer à te pleurer, de revenir à chaque saison, chaque année qui passe afin de te garder auprès de moi. À très bientôt. »

Agenouillée juste en face de lui, Mlle Parker se redressa lentement, ses gestes étaient d'une grâce. La lumière douce des rayons du midi illuminait sa silhouette élégante tandis que la brise froide du vent venait fouetter son joli visage. Debout, elle décida de laisser derrière elle la tombe. Ses pas légers glissaient sur la terre sacrée de ce dernier lieu de repos s'éloignant peu à peu de lui. Le cimetière redevenait paisible, les ombres se refermaient doucement sur les secrets qu'il abritait. Mlle Parker, quant à elle, n'était devenue qu'un minuscule petit point dissimulée par le soleil portant avec elle la promesse de revenir un jour prochain.