Neige écarlate

Harry Potter, seize ans, se serait bien passé de retourner chez ses « tuteurs » pour les fêtes de fin d'années. Malheureusement, Albus Dumbledore, le directeur de Poudlard, avait voulu lui faire payer le fait de ne pas avoir accompagné ses « amis » au ministère en juin dernier pour révéler « par inadvertance » le retour de Voldemort. Il avait donc fermé l'école pour les vacances et interdit les Weasley de l'accueillir. Sans surprise, cela n'avait pas été apprécié par les Dursley mais ne les avait pas empêchés de reprendre les « bonnes » habitudes avec lui. Depuis la descente du train donc, il n'avait droit qu'à un seul repas frugal par jour, des corvées à ne plus en finir et avait vu ses affaires enfermées dans le placard sous l'escalier.

Harry observa la neige qui tombait doucement. Contrairement à ce qu'on aurait pu croire, sa situation actuelle n'était pas dû à Pétunia et Vernon Dursley, du moins, pas directement. Malgré leurs personnalités déplorables, personne, et le brun le premier, ne pouvait nier que le couple était intelligent ou plutôt, particulièrement retors. En conjuguant leur haine de l'enfant, de la magie et de toute ce qui n'était pas normal, ils avaient fini par adopter un comportement qui couvraient toutes leurs frasques depuis qu'ils l'avaient recueilli : seul leur fils frappait ouvertement Harry.

Frappait, frappait … disons que Dudley se défoulait allègrement sur son cousin, ayant le blanc-seing de ses parents. C'était pour cette raison qu'il était en sang sur le pas de la porte de derrière le soir du réveillon de Noël. Quand le brun était arrivé à Privet Drive, il avait appris que son cher cousin était de retour depuis plus d'un mois car le conseil de discipline de son école l'avait renvoyé après qu'il ait été pris en flagrant délit d'agression sur plusieurs élèves. Sa bande de brutes en primaire s'était éloignée de lui depuis qu'il était en école privée et sans son influence néfaste, ils privilégiaient leur avenir professionnel et avaient de moins en moins envie de tabasser les plus jeunes pour le plaisir. L'ennui étant l'un des pires fléaux de son cousin, il n'avait rien trouvé de mieux que de travailler ses poings sur son punching-ball préféré, Harry. Au plus grand « déplaisir » de ce dernier, l'autre adolescent avait trouvé des utilisations inventives d'un couteau et les avait toutes testées sur le brun. Pour allier l'utile à l'agréable, Pétunia et Vernon n'avaient pas voulu qu'il salisse l'intérieur de la maison et l'en avait chassé sans lui permettre de prendre des vêtements chauds malgré les températures glaciales.

Sans surprise, à cause du froid, les membres de l'Ordre du Phénix n'avaient pas hésité à déserter les lieux pour rester au chaud chez eux, ce qui voulait dire qu'il n'y avait personne pour lui porter secours. On lui avait également interdit tout artefact magique et les potions de premiers secours – même sa baguette magique était restée à Poudlard, sur ordre d'Albus Dumbledore, qui avait également décidé que sa chouette serait sous la garde de Rubeus Hagrid pendant les vacances – ce qui voulait dire qu'il ne pouvait pas se soigner. Il pouvait mourir là, personne ne le saurait avant au moins le retour à Poudlard.

Submergé par tout ce qui lui arrivait depuis qu'il avait été confié aux Dursley, Harry décida de lâcher prise, de ne plus se battre pour sa vie. Il était incohérent qu'il doive tous les sauver alors qu'il n'était même pas entraîné ou renvoyé dans le monde moldu sans contact avec la magie. Tant qu'il était là pour se prendre la réprobation de la population et de ses proches parce qu'il ne réagissait pas et n'agissait pas comme ils le voulaient, ils ne se préoccupaient pas de ce que lui ressentait. Tant pis pour ses amis ou le monde sorcier, qu'ils se débrouillent seuls contre Voldemort. Il avait assez donné sans rien recevoir en retour.

Harry se laissa tomber dans un coin du jardin et observa le ciel étoilé, la neige lui tombant tranquillement dessus et se teintant d'écarlate sous lui.

Belle nuit pour mourir …