Un œil brillant parfaitement rond le fixe. Noir. Perdu dans une masse de plumes. Noires. L'œil cligne. Un croassement résonne, se répète. La corneille sautille dans le néant, s'envole. Dans un tonnerre de bruissement de plumes noires des centaines d'oiseaux la suivent, les cris lui vrillent les tympans, lui écrasent la poitrine, l'oppressent de toute part. Le noir est partout.

Dean se réveille en sursaut, le cœur complètement emballé dans sa poitrine, il l'entend même cogner contre sa cage thoracique, c'est presque comme s'il avait l'un des piafs de son rêve qui essayait d'en briser les barreaux et d'en sortir. Ses neurones essaient de reprendre le contrôle, de comprendre ce qui se passe et quand les connexions arrivent enfin à le faire revenir dans le monde réel, il comprend qu'il a été réveillé par le son du vibreur de son téléphone qui lui indique joyeusement un message non lu.

Putain de merde.

Il se redresse vaguement, tend la main, l'attrape et lit le message de Sammy.

Je rentre pour dîner, à ce soir. Amuse-toi bien ;)

.

Mais quel connard ! Il regarde l'heure, il est presque dix heures du matin. J'vais te tuer Sammy, lentement. Il balance ton téléphone sur la table de nuit et se laisse retomber contre son oreiller humain qui n'a pas bronché. Dean soupire et essaye de se laisser glisser à nouveau dans la torpeur, mais c'est mal barré. Le stress a du mal à redescendre malgré la présence de Cas' à ses côtés.

Cas'...

Il est magnifique, allongé sur le ventre, la tête tournée vers lui, les cheveux en pétard comme jamais, un début de barbe sombre se devine sur sa mâchoire. La couette est un peu repoussée sur le bas de son corps, laissant deviner à travers le t-shirt un dos large et fort.

Dean se presse davantage contre lui, l'entoure d'un bras et serre, serre. Il a le visage à cinq centimètres du sien, il sent la chaleur de sa respiration, de sa peau. Ma petite bouillotte personnelle.

- 'Ean ?

Cas' et sa tête dans le cul matinale qui mange des consonnes.

- C'est rien, dors.

- S'kya ?

Oula, quelques voyelles avec aussi.

- Juste mon frère qui me prévient qu'il ne rentre pas avant ce soir.

- Mh.

Ça doit vouloir dire d'accord. Castiel se tourne difficilement sur le côté et entreprend de se servir de Dean comme d'un doudou. Pas de problème mon pote, fais comme chez toi. Le brun laisse échapper un soupir à fendre l'âme, mais sa prise est étonnamment sûre autour de son corps.

Dean savoure, s'en fout s'il ne dort plus parce que là, il peut consciemment profiter du fait qu'il partage son lit avec Cas' sans crainte d'être dérangé, sans peur d'être surpris, sans voler ce moment, et avec son consentement. Les doigts du brun se promènent lentement sur son corps, son dos, remontent jusqu'à sa nuque et terminent contre son cou, pressent doucement contre sa carotide.

- Ton pouls est rapide, qu'est ce qui ne va pas ?

Ah, la voix est embrumée et rauque, mais il est bien réveillé, assez pour remarquer le trouble de Dean.

- Rien, j'ai juste été réveillé en sursaut par le message.

Castiel grogne vaguement. Ils restent allongés l'un contre l'autre un moment, avant que le psy finisse par ouvrir les yeux et s'étirer. Ne te le lève pas, si tu le fais, tu vas bientôt partir. Il le prendrait probablement mal si Dean l'attachait au lit, non ? Humpf.

- Quelle heure est-il ?

- Pas loin de dix heures.

Reste, reste, pitié reste.

Mais c'est trop demandé.

Ils se lèvent, l'appel de la nature a de toute façon raison d'eux. Dean laisse la première place aux toilettes à Castiel, et le rejoint ensuite dans la cuisine, où le brun est debout devant la cafetière à attendre qu'elle ait fini de crachoter l'arabica. Dean se sent pathétique, mais il ne peut pas s'en empêcher. Il le rejoint, se presse contre son dos et entoure sa taille de ses bras, avant de poser le menton sur son épaule. C'est désespéré, il le sait. Il pue la détresse et la peur, mais il est incappable de rester loin de Cas'.

- Tu as bien dormi ?

- Je dors mieux quand tu es là.

Argh, c'est définitivement beaucoup trop guimauve pour lui. Mais c'est la vérité, alors, pourquoi ne pas l'avouer ? Dans son cerveau ça sonne moins cucul la praline, mais quand les mots sortent de sa bouche, il les regrette aussitôt. Castiel hoche simplement la tête en silence. Dean finit par le lâcher et aller au frigo sortir de quoi leur faire un petit déjeuner correct.

- Et toi ?

- Très bien, c'est calme chez toi.

- Oh, ton quartier est bruyant ?

Dean allume une plaque et pose une poêle dessus avant de préparer la pâte à pancake.

- J'habite au-dessus de mon cabinet, la rue est très passante, même la nuit.

- Eh bien, si tu veux une nuit tranquille, tu sais où aller.

Il sent ses joues s'enflammer quand Cas' croise son regard. Ils cuisinent en silence, s'installent et commencent à manger avec la télé que Dean a allumée en fond sonore. Ils passent l'Etrange Noël de Monsieur Jack, il connaît les chansons par cœur.

- Puis-je te poser une question, hum, personnelle ?

Dean hoche la tête, la bouche pleine de pancake beurre de cacahuète - gelée de cerise.

- J'avais cru comprendre que tu es un homme à femmes. Me suis-je trompé ?

Dean s'étrangle à moitié et fait passer le tout avec une gorgée de café. Aïe, comment faire passer ça pour autre chose que de la curiosité sans déballer quelque chose qui le ferait peut être tout autant fuir ?

- Je le croyais aussi, mais… Depuis Sioux Falls, j'ai remis ça en question. C'est pas - Je recherche pas juste un peu d'exotisme si ça peut te rassurer.

Castiel fronce les sourcils, décontenancé.

- C'est Charlie qui utilise ce terme. Elle tombe parfois sur des hétéro qui veulent tester les filles, et elle - elle n'aime pas ça. Pas quand c'est pas sérieux en tout cas.

- Oh, je vois.

Ils se fixent dans les yeux de longues secondes.

- Je suis donc bien ton premier.

Dean pique un fard et détourne le regard.

- Oui. Euh je - C'était quand même bien ? Non ?

Castiel sourit et le coin de ses yeux se plisse adorablement.

- Je n'ai aucune critique à formuler.

Dean rit, un peu pour cacher sa gêne, aussi parce qu'autant de formalisme quand ils parlent de s'envoyer en l'air est tellement décalé que c'en devient comique. Il se racle la gorge avant de reprendre plus sérieusement.

- Moi aussi j'ai une question.

- Je t'écoute.

- Qu'est ce qui t'a fait changer d'avis sur nous ?

Castiel prend quelques secondes de réflexion avant de répondre.

- Hier soir tu étais, eh bien, différent en quelque sorte. J'ai eu la sensation d'avoir le vrai Dean sous les yeux, et j'ai aimé ce que j'ai vu. Tu étais détendu, heureux de partager tes anecdotes, tu riais et…

Castiel rougit un peu, et c'est magnifique.

- Et t'as pas pu résister à mon charme naturel.

Dean lui fait un clin d'œil. Cas' hoche la tête, mais son visage est empreint d'une certaine gravité.

- Je vais probablement le regretter demain matin à notre rendez-vous, quand nous serons seuls dans mon cabinet et que je vais devoir rester professionnel, mais comme je te l'ai dit à Sioux Falls, il est hors de question pour moi de mettre en péril ta thérapie. Tu dois me dire si cette situation te gêne ou t'empêche d'être correctement suivi.

Dean se mordille les lèvres.

- Je veux que tu restes mon psy. J'ai confiance en toi et tu as un effet bénéfique sur moi. Je veux dire, tu m'apaises. Ta voix… Elle est magique.

Il baisse la tête sur son bol de café.

- Je ne me suis même pas excusé quand je t'ai menacé de t'en coller une.

Sa voix est basse, à peine un murmure, un peu trop aiguë.

- Est-ce que tu l'aurais fait ?

Il secoue la tête.

- Non, je voulais juste… Je sais pas. La pression est montée d'un coup et je crois que je cherchais une excuse pour partir. Je suis désolé Cas'.

- Je ne t'en veux pas. Tu n'es pas le premier à être dépassé par tes émotions, et certainement pas le dernier.

Ils terminent de manger et regardent la fin du Burton assis sur le canapé, café à la main. La famille Adams est diffusé juste après, et ils somnolent vaguement dans les bras l'un de l'autre en écoutant plus qu'en visionnant le film.

Quand vient l'heure pour Castiel de rentrer chez lui, Dean sent la panique s'installer bien tranquillement dans son cerveau et prendre toute la place. Il reste planté dans le salon à regarder l'autre ramasser ses affaires après s'être rhabillé. Il y a un moment de flottement quand il le raccompagne à la porte, mais Dean se décide et l'embrasse doucement, essaye de ne pas laisser paraître son désespoir. Un baiser, deux, trois. Cas' finit par reculer le visage et pose le front contre le sien, laisse échapper un soupir.

- A demain Dean.

- A demain.

Il est seul. La maison est affreusement vide et silencieuse malgré la télé.

La bile lui remonte dans la gorge, il est à deux doigts d'aller se faire vomir pour faire passer cette foutue boule d'angoisse qui s'est nichée dans son œsophage.

Il s'occupe les mains en rangeant le salon et la cuisine, vérifie qu'il ne reste aucune trace de leurs ébats - Sam est beaucoup trop prude, vraiment, où est le mal de tomber sur un préservatif usagé oublié sur le tapis ? Oh c'est juste arrivé une fois, peut-être deux. Bref.

Il ramasse le plaid roulé en boule sur le canapé, et d'un coup c'est comme si Castiel était de nouveau là. Il le presse contre son visage, inspire à plein poumon l'odeur épicée, masculine, et le vague relent de sexe de la veille. Il monte les marches, le tissu toujours collé à son nez, hésite devant la salle de bain. Machine à laver ? Non. Il fait demi-tour vers sa chambre et lance le plaid qui atterrit sur son lit.

La salle d'attente est toujours la même. Vert canard, tableaux moches à la couleur un peu passée, l'odeur d'humidité. Mais là tout de suite, Dean s'en fout. Il est complètement sur les nerfs, l'anticipation le ronge. Il a à peine dormi cette nuit, roulé en boule dans son lit, la couette serrée contre lui, le nez dans l'oreiller que Cas' a utilisé la veille, le plaid dans ses bras. Pathétique. Il n'a rien foutu ce matin, le regard perdu devant les données inscrites sur son écran, la tête complètement ailleurs. Même pas 24h sans Castiel, et il est réduit à moins que rien, une larve inutile.

Cas', Cas', CAS' !

Le clic de la porte le sort de son apitoiement, et pour la première fois depuis le début de ses rendez-vous avec le Docteur Novak, il croise enfin le regard de ce qui doit être le patient précédent. Pas aimable, le regard. Il est transpercé par deux yeux bleus, bien plus clairs que ceux de Cas', mais les mêmes paupières légèrement tombantes. Le type le détaille de haut en bas, de bas en haut, et s'éloigne rapidement après un signe de tête sec, sans un mot. Qu'est ce que ? Peut-être pas un patient, finalement. L'impression d'avoir été mis à nu et jugé ne colle pas. Est-ce que ce serait Michael, le fameux ex infidèle ? Une nouvelle angoisse vient s'ajouter à la pile "à traiter d'urgence" dans son cerveau. Et si Cas' se rendait compte que le bordel dans la tête de Dean était trop, beaucoup trop ? Et s'il décidait de le quitter ? De retourner auprès de l'autre connard et son crâne bien rangé ? Et si…

- Dean ?

Castiel fronce un peu les sourcils en regardant Dean entrer dans le cabinet.

- Balthazard vous a dit quelque chose de déplacé ?

Oh putain, le frangin. Ça fait sens. Le regard est bien plus froid, mais oui, maintenant que son cerveau daigne connecter quelques neurones, il se rend compte que l'air de famille est bien là. Et Dean n'ose imaginer la tête d'enterrement qu'il doit avoir pour que Castiel s'inquiète aussi vite.

- Non, non. Je ne m'attendais pas à voir quelqu'un sortir d'ici, je n'ai jamais croisé t-vos patients.

Castiel l'observe quelques secondes avant de finalement hocher la tête quand Dean tente un sourire rassurant. Peut-être pas dupe, mais il laisse couler. Dean se réfugie sur le divan et sert deux mugs de chaï pour faire comme si tout était normal.

- J'ai peu de patients, surtout en présentiel.

Castiel s'assoit en face de lui et accepte la tasse que Dean lui tend.

- Pourquoi est-ce que vous consultez autant à distance ?

Le psy prend une gorgée et se racle la gorge avant de répondre.

- Certains de mes patients sont sur le terrain, et ne peuvent rompre une couverture, par exemple. D'autres sont à l'autre bout du monde, ou incarcérés.

- Oh. Et ça fonctionne aussi bien que face à face ?

Castiel l'observe quelques secondes en silence, avant de répondre.

- Tout dépend du but recherché, mais généralement oui.

Dean le voit du coin de l'œil prendre sa position "thérapeute" sur son fauteuil, bloc et stylo à la main. Il aimerait bien savoir ce que Cas' écrit sur lui. Hm, non, mauvaise idée. Tout ce qu'il imagine, ce sont des lignes et des lignes de "instable", "insécurité", "infantile", "incapable"... Il secoue la tête pour s'éclaircir les idées et prend une gorgée de liquide épicé.

- Je crois que Sammy a enfin trouvé celle qu'il lui faut. Je l'ai rarement vu aussi heureux qu'hier soir.

Sammy et ses airs de grand chiot, des étoiles plein les yeux, qui lui a raconté comme Eileen est merveilleuse, drôle, intelligente, et oh Dean, les murs de son salon sont recouverts de livres. Il a enfin trouvé une fille, une vraie, aussi nerd que lui.

- C'est à moi qu'il montrait ses bulletins de notes vous savez. Moi qui recevait ses colliers de macaronis ou ses mugs en terre cuite pour la fête des pères. John n'a jamais eu le moindre dessin de sa part.

Dean baisse les yeux sur sa tasse, soupire doucement.

- Quand j'avais 18 ans, je suis même allé à une réunion de parents d'élèves. Je me souviens des regards des autres parents, des profs. Ils ne comprenaient pas ce que je foutais là alors que dans le dossier de Sammy, John était bien inscrit comme représentant légal. Je m'en fichais, on ne restait de toute façon jamais longtemps dans une ville, alors l'avis de ces gens que je ne reverrais jamais… Bref. Mais cette prof d'Anglais m'a parlé de lui pendant ¾ d'heures, que des compliments et éloges, m'a conseillée sur les options à prendre au lycée, toutes ces choses. J'étais tellement fier de lui, et pour fêter ça je l'ai emmené au drive-in voir un film et manger un burger. John était furax quand on est rentrés, mais j'en avais rien à faire.

Castiel hoche la tête en silence. Dean se lèche les lèvres avant de poursuivre.

- C'est ce soir-là que Sam s'est mis en colère contre lui. Il lui a balancé qu'il n'était pas son père, que je l'étais bien plus que lui. Après ça, ils ne se sont plus adressé la parole. Trois ans plus tard, John mourrait, et… Et Sammy a juste été heureux, parce que ça voulait dire qu'il resterait avec moi, dans la même ville, dans la même école, et qu'on arrêterait de déménager tous les six mois.

Sa voix craque un peu à la fin de son histoire.

- Alors maintenant qu'il a peut être trouvé la bonne, je me sens tellement fier de ce qu'il est devenu. Il a un job où il excelle, des amis, une copine avec qui il a peut être fonder une famille. Une vraie, stable. Pas ce que j'ai essayé d'imiter pendant toute sa vie.

- Et votre vie à vous ?

Dean grimace. Que dire ?

- Je sais pas. Je ne me vois pas avoir des gamins. J'ai la trentaine, et j'ai l'impression d'être déjà passé par là, même si ce n'est pas vraiment le cas.

- Vous avez élevé votre frère alors que vous n'aviez que quelques années de plus que lui. Vous avez eu une énorme responsabilité bien trop tôt.

Dean se mordille la lèvre. Oui, y'a de ça. Mais aussi, qui voudrait d'un père à peine capable de manger seul ou de réussir à dormir trois heures ?

- Je me vois plus en oncle cool. Celui avec qui faire tous les trucs que les parents refusent. Celui qui achète les jouets les plus bruyants, vous voyez.

Castiel sourit légèrement.

- Vous inquiétez-vous du départ de votre frère du domicile que vous partagez ?

Dean avale sa salive. On y revient.

- Un peu. Mais je dois le laisser partir, c'est sa vie qui compte.

Le psy se retourne vers lui, lentement.

- Votre vie ne compte pas à vos yeux ?

Aïe. Le ton est toujours aussi neutre que d'habitude, mais c'est trop neutre justement. Surveille ta bouche mieux que ça Dean, bordel.

- Si, bien sûr, mais ce sera toujours lui qui passera en premier.

Castiel hoche la tête, pose son carnet sur la table basse et se redresse dans son fauteuil, les doigts croisés. Il semble chercher ses mots quelques secondes avant de commencer à parler.

- J'aimerais que vous compreniez que la vie de votre frère lui appartient, Dean. Cela n'altère en rien l'importance de votre relation, entendez bien, mais vous n'êtes plus seul responsable de sa vie et de sa direction. Je comprends votre désir de faire passer votre frère avant tout lorsqu'il était à votre charge, mais ce n'est plus le cas. Vous devez vous réapproprier votre vie, lui redonner de l'importance à vos yeux.

Dean baisse le regard sur la moquette et soupire.

- Vous avez tendance à vouloir porter tout le poids du monde sur vos épaules et à faire passer les autres avant vous. Ce qui est noble, j'en conviens, mais à long terme ignorer vos propres besoins risque de vous bloquer dans cette spirale d'autodestruction. Je ne vous demande pas d'ignorer les autres, Dean, loin de là, mais juste de penser à vous, et de commencer à vivre pour vous.

Une grimace de douleur déforme le visage de Dean l'espace d'une seconde. Il inspire laborieusement et souffle un peu fort pour évacuer les larmes qui tentent de se frayer un chemin vers ses yeux. Comment réussir à vivre pour lui-même quand juste une nuit sans Castiel lui paraît une éternité de solitude glacée ?

Il est dans une merde noire. Il finit par hocher la tête en silence, trop incertain de sa voix pour murmurer son accord.

Une fois la séance terminée, il reste quelques instants sur le trottoir à reprendre une respiration posée. L'air glacé et humide lui fournit la claque nécessaire, et il finit par se mettre en route vers sa voiture garée à deux rues de là. Jusqu'à ce qu'il se fasse attraper par la manche de sa veste et se fasse plaquer contre le mur d'une ruelle qui pue la poubelle malgré le froid. La rapidité de l'action lui coupe le souffle et il s'apprête à répliquer lorsqu'une voix ferme et deux yeux bleu glacier le clouent au sol.

- Un mot, Winchester, vous permettez ?

Dean pose la main sur celle qui agrippe fermement son bras pour tenter de lui faire lâcher sa prise d'acier. Putain il n'est même plus foutu de se défendre tout seul.

- Balthazar, je présume ?

Sa voix est un peu étranglée, mais l'autre finit par le lâcher et recule d'un pas. Balthazar se contente de hocher la tête sèchement. Toujours ce regard inquisiteur, les Novak doivent être le fruit de l'union d'un scanner et d'un quelconque bigot.

- Qu'est ce que vous voulez de mon frère ?

Euh. Sa queue ? Non Dean, sûrement pas une bonne réponse.

- C'est mon psy.

Voilà, reste neutre, c'est bien le neutre, c'est ce que Castiel ferait. Balthazar lève les yeux au ciel.

- Ne me prenez pas pour un con, Agent spécial.

S'il avait pu vomir le titre, il l'aurait sûrement fait. Charmant.

- Alors dites moi ce que vous voulez entendre.

Novak serre les dents, furieux.

- Mon frère compte énormément pour moi, je souhaite que cela soit bien clair pour vous.

Dean avale sa salive. Oh, le mode "grand frère", il connaît.

- Et je vous assure que je n'ai aucune envie de le voir souffrir.

- Pourquoi est-ce que vous croyez que je veux le faire souffrir ?

Balthazar laisse échapper un rire sans joie.

- Je vous connais, Winchester, de réputation en tout cas. Nous avons quelques connaissances en commun. Et vous voir tourner autour de Castiel…

Il grogne, un rictus mauvais aux lèvres.

- Cassie a assez souffert avec cet enfant de catin de Michael, et je ne laisserais pas un merdeux dans votre genre profiter de lui.

Dean laisse échapper un vague rire désabusé.

- Je ne profite pas de lui. Ecoutez, je comprends totalement le délire "touche à mon frère et t'es mort", j'en ferais autant pour le mien, mais vraiment c'est pas nécéssaire et je -

- C'est totalement nécessaire.

Dean se mord les lèvres.

- D'accord. J'ai aucune intention de lui faire du mal ou quoi que ce soit. Je… Je suis vraiment bien avec lui, ok ?

Balthazar le détaille encore une fois de la tête aux pieds.

- Vous avez peur que je le trompe comme Michael, c'est ça ?

L'autre plisse les yeux.

- Quelque chose dans ce goût là oui.

Dean secoue la tête.

- Pas mon style, désolé. Les histoires d'une nuit c'est une chose, mais les autres se sont terminées d'un commun accord.

L'aîné des Novak semble se détendre quelque peu.

- Castiel a été dévasté quand il a appris que Michael l'avait trompé. Je ne veux pas que ça recommence.

- Et croyez moi, je ne comprends pas comment ce mec a pu lui faire ça. Cas' est un ange tombé du ciel.

Balthazar sourit brièvement.

- Nous sommes donc d'accord.

Dean hoche la tête.

Sans un mot de plus, il est laissé seul dans la ruelle puante.

Bon, c'était intéressant. Dean a rarement eu l'occasion de rencontrer ses belles-familles dans sa vie. Soit ses relations étaient trop courtes, soit cachées, ou il n'avait de toute façon pas exactement le profil "genre idéal". Pour une première, on peut parler de réussite, non ?

Grumpf.