Quand Eddie arriva devant la chambre de Buck, il hésita.

Il ne savait pas s'il était vraiment prêt à le revoir dans cet état. C'était tellement douloureux de le voir lutter pour vivre. Il frappa un coup à la porte et l'ouvrit. Il n'y avait personne dans la pièce.

Il entra et referma la porte.

Il s'avança dans la pièce. Ses yeux ne pouvaient pas quitter son visage blafard. Ses magnifiques yeux étaient fermés et cerclés de noir et ses lèvres fines étaient refermées sur le tube du respirateur.

– Buck, souffla-t-il en pleurant. Je suis si désolé.

Il s'installa sur la chaise libre et prit sa main dans la sienne. Sa peau était froide et si pâle. Eddie embrassa ses doigts, en les serrant entres ses deux mains.

– Tu dois te battre Buck, murmura-t-il. Ne lâche pas prise, j'ai besoin de toi, Christopher à besoin de toi. Je ne m'en sortirai pas sans toi. Et tu n'as pas fini, on doit encore faire tomber Simmons tous les deux. Je n'y arriverai pas tout seul. Je suis sûr que c'est pour ça que tu es coincé dans cet état, tu as encore quelque chose à accomplir et je vais t'aider.

Eddie sortit les dossiers qu'il avait subtilisé dans le bureau du capitaine et il les posa sur le lit.

– C'est évident que Simmons a menti dans ses rapports pour se couvrir. J'ai besoin de toi pour combler les trous.

– Pourquoi ? s'enquit-il soudain et Eddie sursauta. Pourquoi tu veux m'aider ? Tu voulais que je parte hier et maintenant...

Buck était assis sur une chaise de l'autre côté du lit dans lequel son corps était allongé. Il ne le regardait pas, portant toute son attention sur lui-même.

– J'avais besoin de temps... pour traiter, affirma-t-il. Pour essayer de comprendre et je n'ai pas toutes les réponses mais je refuse de te laisser partir sans me battre.

– Je suis fatigué, Eddie. Plus je reste là, plus les gens que j'aime souffrent.

– Tu ne peux pas partir.

– J'ai résolu le problème. Tu prendras soin de Christopher.

– Ton père s'en occupera bien mieux que moi. Je ne bouleverserai pas tout son monde. C'est de toi dont cet enfant à besoin. Et tu le sais. Christopher n'est pas la raison de ton blocage. Tu dois résoudre le vrai problème. Tu dois venger Ravi Panikkar. C'est ta mission inachevée.

– T'as vu trop de film, Eddie, sourit-il compatissant.

– Et alors ? Au pire, on mettra un enfoiré hors d'état de nuire. Rien que pour ça, ça vaut le coup.

– Tu ne pourras pas me retenir éternellement, Eddie.

– Je prendrai tout ce que je pourrai obtenir.

Buck secoua la tête.

– Je suis désolé Buck, tellement désolé d'avoir tout gâché, de ne pas avoir compris avant mais je t'aime tellement. Je n'ai jamais aimé comme je t'aime.

– Tu avais raison, admit Buck. J'ai été égoïste. Je n'aurais jamais dû entrer dans ta vie.

– J'avais tort, sur toute la ligne, le contredit-il. J'ai besoin de toi pour mettre Simmons hors d'état de nuire et ensuite tu devras te battre pour revenir.

– Même si c'était possible, qui te dit que je me souviendrai de toi.

– Ce n'est pas important.

– Et si je rencontrais quelqu'un d'autre... ?

– Tu ne le feras pas, affirma Eddie. Toi et moi, on est lié Buck, de vraies âme-sœurs. On se retrouvera toujours.

Buck avait les yeux humides et Eddie ferait n'importe quoi pour le serrer dans ses bras mais il refusait de lâcher la main du vrai Buck.

– Dis-moi plutôt comment je peux aider à faire enfermer cet enfoiré !

– Ce que tu m'as raconté, tous tes bleus... Hen m'a dit que la seule fois où tu as été dans cette équipe c'est ce soir-là.

– Ouais, mais j'ai enquêté avant ça et j'ai découvert ce qui était arrivé à Ravi, pourquoi il était mort dans cet incendie.

– Hen a dit qu'il n'était physiquement pas en état de faire son travail.

– Des côtes fêlées et une commotion cérébrale, dû à une intervention précédente.

Eddie ouvrit les dossiers de Simmons à la recherche de cette intervention mais il n'était même pas sûr d'avoir pris les bons dossiers. Puis, une intervention retint soudain son attention.

– Putain de merde, l'enfoiré, lâcha-t-il en comprenant soudain. C'est Ravi qui a chuté d'une dizaine de mètres, pas toi.

– Je savais que tu finirais par faire le lien, lui sourit-il.

– Tous les incidents que tu as mentionnés ? C'était Ravi aussi ?

– Tout ce que j'ai pu découvrir dans les dossiers ou en parlant avec les témoins.

Eddie reporta son attention sur le rapport.

– Simmons ne mentionne pas de problème de treuil dans son rapport, ni la pluie. Il ne mentionne même pas l'incident.

– Pourtant il a eu lieu. Il y a eu des témoins.

– Tu as leurs noms ?

– Ils auront trop peur pour témoigner, Eddie.

– Et toi ? Ton accident ? Tu seras un témoin crédible.

– Pas dans mon état.

– Raconte-moi !

Buck soupira et se leva pour aller regarder par la fenêtre. Eddie serra sa main. Il refusait toujours de la lâcher.

– Il pleuvait, commença Buck. Et l'orage grondait. Quand on est arrivé, l'incendie avait déjà ravagé tout le rez-de-chaussée. Simmons a demandé à déployer l'échelle et je lui ai fait remarquer que ce n'était pas prudent. J'ai essayé de le convaincre de me laisser entrer dans le bâtiment par le bas pour rejoindre les étages. Il n'a rien voulu entendre et il m'a gentiment rappelé que c'était lui le capitaine. Ensuite il a ordonné à Gutierrez de monter.

– Attends, quoi ? sursauta Eddie. Tu n'étais pas censé être là-haut ?

– Il ne m'aurait pas envoyé sciemment là-haut. Je suis le genre de type qu'il recherche dans son équipe et surtout je suis le fils d'un capitaine. Il n'aurait pas pris le risque.

– Comment tu t'es retrouvé là-haut ? demanda Eddie incrédule.

– J'ai pris sa place.

– Buck...

– Je sais mais je ne le regrette pas. Je n'aurais pas pu me regarder en face si un autre pompier avait été tué par sa faute.

– Gutierrez devrait pouvoir témoigner, se reprit Eddie.

– Il est terrorisé par Simmons. Il a démissionné, il me semble...

– Simmons ne peut donc plus rien contre lui, on devrait pouvoir le convaincre de témoigner.

– Qu'est-ce que tu fous ici ? cracha la voix de Bobby dans son dos.

Eddie se redressa d'un bloc et lui fit face, gardant toujours la main de Buck dans la sienne. Bobby semblait en colère et Eddie ne doutait pas que l'avocat de son père ait déjà commencer les démarches.

– Ecarte-toi immédiatement de mon fils !

– Je sais que tu es en colère mais je vais...

– Ecarte-toi de lui tout de suite !

– Non, et tu vas m'écouter...

– Cet homme est dangereux, s'exclama Bobby en laissant entrer des agents de police. J'ai toutes les raisons de penser qu'il va essayer de tuer mon fils.

– Non, tu ne comprends pas...

– Monsieur, l'interpella l'un des policiers. Veuillez sortir de la chambre.

– C'est hors de question, gronda-t-il.

– Eddie, s'il te plait, le supplia Buck.

– Je reste avec toi. Je ne t'abandonne pas.

– Tu as tout en main pour faire tomber Simmons, tu n'as plus besoin de moi. Tu dois me laisser partir.

– Je t'interdis d'abandonner, grogna-t-il en se tournant vers son corps inerte. Tu m'entends Buck ? Tu n'as pas le droit de lâcher prise. Je ne plaisante pas, je ferai ce qu'il faut pour te rejoindre quoi qu'il m'en coute alors tiens le coup.

Eddie sentit qu'on l'empoignait pour le faire sortir. Il se cramponna à la main de son amant mais on lui fit lâcher prise et il hurla.

– Je t'aime Buck, je t'aime alors bats-toi ! Bats-toi !