carineka, Meranath, Lusyne, EnigmaM et Guest : MERCI MERCI MERCI pour vos reviews ! J'étais aussi surprise que touchée de découvrir vos pensées et encouragements. Du coup je me suis enthousiasmée et je suis en train d'écrire un épilogue en bonus... Merci encore, vous me transportez :)
Place à la huitième fois, beaucoup plus longue.
La huitième fois que Drago Malfoy croisa Hermione Granger, il n'avait laissé passé que deux semaines sans la voir. Il avait longuement bataillé avec lui-même, tentant de se raisonner. Après tout, il était sans doute mieux pour lui de ne pas chercher sa compagnie, il était loin d'être qualifié dans ce rôle-là. Et puis, juste parce que Granger avait volontairement accepté sa présence le temps d'une soirée ne signifiait pas qu'elle aurait envie de recommencer. Il avait sûrement offert une pause intéressante parce qu'elle se lassait des gens qui lui léchaient les bottes. Il n'imaginait pas une seule seconde qu'elle ait pu accorder de l'importance à cette soirée du nouvel an... N'est-ce pas ?
La question l'avait tant et si bien torturé, qu'il avait fini par en parler à Blaise Zabini au détour d'un café. Son nouvel ami et ancien camarade de classe l'avait jaugé un instant et Drago avait supposé que le portrait en résultant était sans doute peu flatteur : Il avait peu ou pas dormi les jours suivant le nouvel an, et il ne doutait pas une seule seconde que les signes de fatigue étaient visibles sur son visage pale.
-Hey Drago, dis-moi, tu serais pas idiot au point d'en pincer pour la golden girl des Gryffondors?
Drago avait recraché son café sans cérémonie. Les insomnies s'étaient intensifiées.
Après quelques jours de plus de torture, Drago décida qu'il en avait assez de se poser trop de questions. Il avait besoin de voir Granger ou il allait devenir fou. Alors il avait assisté à toutes les soirées mondaines possibles dans l'espoir de la croiser. Elle n'y avait malheureusement fait aucune apparition. Il tenta alors le ministère, mais à part se faire insulter, il revint là encore bredouille. Il n'avait aucune idée du quartier où elle habitait et il refusait de manifester son intérêt pour la jeune sorcière auprès des gens qui auraient pu l'assister.
Il décida qu'en désespoir de cause, il allait devoir essayer la librairie où il l'avait croisée la deuxième fois. La trouver là était improbable, mais il n'était pas encore prêt à ce que le monde sache que Drago Malfoy cherchait activement la compagnie d'Hermione Granger. Il avait travaillé dur pour que ce monde l'oublie un minimum, il avait aussi beaucoup sacrifié en terme d'orgueil pour faire amende de son passé, mais il avait encore cette limite-là. Avouer à voix haute qu'il cherchait Granger– il préférait ne même pas y réfléchir.
Il poussa donc la porte de la librairie un après-midi ensoleillé de janvier, et après quatre ans à pester contre cette force incompréhensible qui plaçait Granger régulièrement sur sa route, il se promit de ne plus y voir que de la chance.
Car elle était là.
Cheveux en pagaille au milieu des piles de livres. Vue familière. Souvenir d'enfance... Et plus belle qu'il ne l'avait espérée.
Il resta un moment à l'entrée du magasin, le regard vissé sur la jeune sorcière qui ne l'avait pas encore remarqué. Elle semblait concentrée, naviguant d''un livre à un autre tout en prenant des notes. Drago ne put s'empêcher de sourire ; il se reprit avant d'avoir l'air un peu idiot et se râcla la gorge pour se donner contenance... ou était-ce confiance ? Granger ne leva la tête que lorsqu'il se planta face à elle, de l'autre côté de la table.
Elle sembla plus que surprise lorsqu'elle le vit, et il ne put s'empêcher de scruter son visage. Il cherchait désespérement un signe que la surprise était mauvaise – il n'en trouva aucun.
-Malfoy ? S'étonna-t-elle à voix haute.
-Granger, répondit-il en offrant un sourire un peu tendu.
-... Tu es à court de livres ? S'enquit-elle.
Il fit signe que non et elle lui sourit, apparemment amusée par sa réponse non-verbale.
-Tu n'es pas à court de livres, donc tu es entré chez le libraire ?
Son ton était légèrement moqueur et si Drago n'avait pas eu des années de pratique en noblesse Malfoy, il aurait sans doute un peu rougi.
-Tu cherches des recommandations ? Continua-t-elle en se levant, désormais curieuse.
-Je suis venu te voir.
Il avait lâché l'information sans le vouloir, ni réfléchir. Il se sentit immensément stupide en voyant le choc provoqué s'inscrire sur le visage de la jeune femme.
-Je veux dire... Je passais pas là, je t'ai vue à travers la vitrine, rectifia-t-il en ayant conscience du manque de crédibilité de son mensonge.
-Oh.
Elle lui offrit un air innocent, mais il y lut un peu d'humour. Rien de malveillant cependant, il y avait bien des années que toute hostilité entre eux avait pris fin. Il le savait désormais. Il baissa les yeux vers la table envahie de livres et parvint à reprendre la parole en pointant un livre du doigt :
-Je te déconseille la lecture du Registre des Sang-Pur, Cantankerus Nott était un parfait idiot et il a fini aussi taré que seul.
Hermione parut surprise par le changement de sujet mais se reprit vite :
-C'est pour ça qu'il est dans la pile à jeter, s'amusa-t-elle.
-Tu jettes les livres de la librairie ? S'étonna-t-il.
-Le patron est un ami, il n'a pas le temps ni la patience de passer en revue tous les livres de la remise alors je l'aide quand j'ai un peu de temps.
Drago acquiesça, soudain à court d'idées. Il évita son regard curieux un moment puis ne put s'empêcher de chercher à nouveau les yeux noisettes de Granger. Il sentit son cœur louper un battement et se maudit intérieurement. Elle semblait songeuse, et il se raccrocha à l'idée qu'il n'était pas le seul à cogiter. Il espérait juste que les pensées de Granger soient un minimum neutres à son égard, à défaut d'être positives –il n'osait espérer plus.
-Tu as un peu de temps devant toi ? S'enquit-elle finalement en attrapant une pile de livres.
Drago la regarda faire le tour de la table pour s'approcher de lui. Il faillit oublier de répondre ; il préféra acquiescer à mi-voix. Le sourire d'Hermione s'aggrandit et elle lui déposa la pile de livres dans les mains. Il accueillit le poids des livres avec surprise.
-Super, aide-moi à classer tout ça, dit-elle avant de retourner à sa place sans vérifier s'il acceptait.
Drago la regarda un moment, estomaqué, puis, voyant qu'elle ne lui prêtait plus attention, déjà le nez dans les livres, il posa la pile de livres devant lui et se mit au travail.
Il manqua le sourire de Granger lorsqu'elle le vit s'installer avec tout le sérieux du monde.
…
Plusieurs heures s'écoulèrent dans la librairie alors que Drago Malfoy et Hermione Granger triaient des montagnes de bouquins. Ils parlaient beaucoup : des livres à classer, des livres lus, des livres encore à lire, des gens qui entraient dans le magasin, des gens qui ressortaient, parfois même des gens derrière la vitrine... Et plus ils parlaient, plus Drago réalisait qu'il avait eu raison de la chercher. Hermione Granger avait un effet étonnament positif sur sa vie et il avait décidé d'arrêter de lutter.
Aussi lorsqu'elle proposa de conclure une heure après la fermeture, Drago sentit la déception et la mélancolie le gagner. Il n'avait aucune envie de rentrer, encore moins de lui dire au revoir. Mais il n'osa rien dire alors il enfila son manteau lentement. Granger l'attendit près de la porte tandis qu'il trainait un peu des pieds, faisant mine de vérifier qu'il n'avait rien oublié. Elle souriait lorsqu'ils quittèrent la librairie ; il ne parvint pas à l'imiter.
-J'ai un peu faim, annonça finalement la jeune sorcière.
Le visage de Malfoy s'illumina brièvement, le temps de se rappeler qu'il n'y avait rien de noble à paraître trop enthousiaste.
-Je t'ai fait travailler cet après-midi, reprit-elle. Que dirais-tu d'un resto pour te remercier ?
-Je doute que nos goûts culinaires soient les mêmes, rétorqua-t-il immédiatement.
Il s'en voulut un peu, après tout il aurait sûrement dit oui à n'importe quoi pour rester en sa compagnie... La réponse avait été aussi arrogante qu'automatique. Elle sourit un peu plus pour toute réponse, et il ne put s'empêcher de l'admirer un instant. Elle semblait désormais plus détendue en sa présence, plus douce aussi, et elle lui rendait la tâche infiniment plus difficile. Comment était-il sensé ne pas dépendre de leurs rencontres quand elle semblait les apprécier un minimum elle aussi ? Le jeu devenait dangeureux, il en avait conscience. Mais il était trop tard pour arrêter.
Alors il s'entendit dire que n'importe quel restaurant ferait l'affaire, et il la suivit lorsqu'elle suggéra le plus proche.
Ils mangèrent en discutant de tout et de rien. Drago apprit qu'elle travaillait dans les bureaux du département de la justice magique depuis peu. Avant cela, elle était retournée à Poudlard pour finir sa septième année d'études, puis elle avait travaillé au département de contrôle et de régulation des créatures magiques. Il la trouva brillante, mais ne l'avoua pas, il préféra user de sarcasme pour se moquer de son mouvement de libération des elfes de maison. Elle lui tira la langue pour toute réponse et Drago sourit. Il souriait beaucoup lorsqu'elle était là.
Le repas se termina. Encore une fois, Drago remit son manteau avec toute la lenteur dont il était capable et Granger rit.
-Tu ne crois quand même pas que je vais te laisser t'échapper sans m'avoir offert un verre, Mafoy ? Lança-t-elle après avoir réglé la note.
-Dis-le tout de suite si tu ne peux plus te passer de moi, Granger, railla-t-il en cachant très mal un sourire enchanté.
Elle ne répondit pas mais elle souriait encore lorsqu'ils quittèrent le restaurant.
-Où va-t-on ? S'enquit-il.
-Tu me fais confiance ? Demanda-t-elle soudain, le regard presque sérieux.
-Oui.
Il avait répondu vite. Il en était le premier surpris.
Granger était une constante surprenante dans sa vie depuis désormais plus de quatre ans. Envers et contre tout, elle l'avait sortie de l'ombre. Il aurait sauté les yeux fermés si elle l'avait demandé.
Cette pensée l'effraya un peu, mais il était trop tard. Granger lui tendait la main.
Ils échangèrent un long regard silencieux, puis, doucement, presque timidement, il glissa sa main dans la sienne. Ils transplanèrent sans se quitter des yeux et atterrirent dans une petite allée de Londres. Hermione l'entraîna à sa suite vers un pub moldu, sans lâcher sa main, et il se sentit tellement plus léger.
...
Drago avait décidé que finir son chemin vers la rédemption par l'expérience d'un pub moldu avec Hermione Granger était la meilleure issue possible. Elle lui avait fait essayer différents breuvages tous plus surprenant les uns que les autres, il avait aussi vu des tableaux étranges tous montrer la même image : des athlètes courir avec un ballon ovale à la main pendant que les gens du bar les encourageaient. Hermione lui avait aussi appris à jouer à un jeu nommé « fléchettes ». Il avait eu une chance épouvantable et le mur autour de la cible avait recueilli beaucoup desdites fléchettes, mais Hermione avait beaucoup ri, et il avait décrété que ça en valait la peine.
Aux alentours de minuit, il commanda un verre d'eau, et elle le dévisagea sans comprendre en le voyant revenir. Il se laissa retomber à côté d'elle sur la banquette et but une longue gorgée avant de répondre à sa question muette :
-Il est hors de question qu'un trop plein d'alcool me fasse oublier cette soirée.
Il réalisa en se tournant vers elle qu'elle était beaucoup plus proche que prévu, et cette fois-ci, il eut du mal à ignorer le tiraillement sur son cœur heurté. Il plongea dans ses yeux noisettes, elle semblait songeuse ; il s'émerveilla du fait qu'elle ne s'était pas encore écartée de lui.
De tous les livres qu'il avait pu lire en quatre ans, le genre qu'il avait aimé le moins était sans doute les romances. Mais à cet instant, alors que son visage était à quelques centimètres de celui d'Hermione Granger, il se surprit à penser qu'il aurait dû lire plus attentivement. Il ne put s'empêcher de laisser son regard se balader sur les traits devenus familiers, les joues rouges de la jeune sorcière créèrent une distraction fugitive, mais malgré lui – malgré elle – c'était vers ses lèvres qu'il se destinait. Il avait furieusement envie de l'embrasser, et il était étonnament encore conscient des chances de finir giflé, dans le meilleur des cas. Il n'avait plus aucun souvenir de pourquoi l'idée lui avait paru un jour repoussante. Il revint brièvement à ses yeux, sans parvenir à la lire, puis, lentement, il se rapprocha un peu plus, jusqu'à ce que leurs nez se frôlent et leurs respirations se mêlent... Puis le bar éclata d'un cri de joie commun, faisant sursauter Hermione hors d'atteinte, et le moment s'évapora.
Drago ferma les yeux. Incapable de penser, encore moins de comprendre. Lorsqu'il reprit le dessus, Hermione évita son regard et marmonna qu'elle allait aux toilettes. Il s'attendait presque à ne pas la revoir, et il se maudit.
Mais elle revint. Elle s'assit à côté de lui et lui prit son verre d'eau pour boire.
-Moi non plus, je ne veux pas oublier, dit-elle finalement.
Son cœur bondit dans sa cage thoracique, comme s'il tentait de lui échapper pour aller la rejoindre. Il lui offrit un sourire un peu embarrassé et laissa le silence s'installer alors qu'ils observaient tous deux leur entourage. Ils finirent doucement par retrouver des sujets de conversation. La gêne passa.
Le pub se vida progressivement jusqu'à ce que le patron leur demande gentiment de rentrer chez eux car il devait fermer. Lorsqu'ils quittèrent le pub, il faisait nuit noire et très froid, et Drago n'avait pas du tout envie de dire au revoir. Hermione dut le sentir car elle posa une main douce sur son avant-bras et lui offrit un sourire navré.
-Je suis contente que tu sois entré dans cette librairie, dit-elle finalement. Merci pour tout...
Elle hésita un instant puis termina dans un souffle qu'il pensa avoir imaginé :
-... Drago.
Si on lui avait dit qu'un jour, ce moment existerait, il ne lui aurait sans doute jamais lancé la première pierre alors qu'ils étaient enfants. Il se sentait léger, et en même temps l'idée qu'elle allait partir lui pesait beaucoup. Il aurait aimé trouver mille excuses, prolonger la nuit et la transformer en jours, en semaines... Il reprit le dessus sur son avalanche d'émotions :
-Prends soin de toi, s'entendit-il prononcer.
Elle acquiesça et relâcha son avant-bras. Il eut l'impression que le froid s'intensifiait. Elle lui sourit une dernière fois, puis tourna le dos pour s'éloigner. Il ne put s'empêcher de la retenir une dernière fois avant qu'elle ne soit hors de portée de voix :
-Hermione !
Elle ne se retourna pas mais il comprit qu'elle écoutait.
-Est-ce que...
Est-ce que tu veux sortir avec moi ? Est-ce qu'on peut avoir un vrai rendez-vous ? Est-ce que j'ai une place dans ta vie ? Est-ce que tu acceptes d'en avoir une dans la mienne ? En ai-je seulement le droit ? – Tout était flou.
-... Est-ce que je pourrais te revoir ?
Elle revint sur ses pas et lui offrit un nouveau sourire, moins railleur, plus doux. Il se figea lorsqu'elle se mit sur la pointe des pieds pour effleurer sa joue d'un baiser.
Lorsqu'il rouvrit les yeux, Hermione avait transplané. Il pesta seul dans la rue, à la fois grisé par sa journée puis nuit et frustré que tout soit fini. Puis, en ajoutant les pièces du puzzle qu'était la soirée dans sa tête, il réalisa qu'au détour d'un verre, d'une anecdote, ou peut-être d'un sourire, elle avait cessé d'être Granger. Il avait pris la main tendue et passé des heures avec Hermione. Et il pouvait assurer avec certitude qu'il en était éperdument amoureux.
Il était foutu.
